Quatre mois plus tardLucas tomba lourdement sur le sol de l’Organisation. Son premier réflexe fut de vérifier que sa coéquipière était encore en un seul morceau, puis, quand il se révéla que c’était effectivement le cas, il se concentra sur la douleur vive qui irradiait de son genou droit.—Je crois que je suis de nouveau bon pour me traîner cette fichue attelle durant plusieurs jours, grimaça-t-il en se relevant péniblement.—Je savais que tu n’aurais pas dû arrêter la kiné aussi tôt, mais tu ne m’écoutes jamais!—Je t’écoute, mais tes propos sont loin d’être tous aussi raisonnables que tu sembles le penser.—Allons voir le Doc dans ce cas, je suis certaine qu’il se fera une joie de prendre mon parti, comme toujours.—Je crois ne pas me tromper si j’affirme haut et fort que le Doc est loin d’être partial me concernant.—Bien évidemment, si tu n’avais pas tenté par trois fois de détruire
Elyna E.C. est née à Paris en 1991. Les Arcanes d’Hemera est son premier roman, elle a consacré plus de quatre ans à son écriture. Pour mon loup, Hugo, le seul à savoir m’apaiser lorsque je vire en mode « Ouragan Harper », et pour ma kkouette, mon Axel, Kévin. J’essaie de ne pas laisser mon imagination divaguer face à l’inconnu, convaincue que les hypothétiques poissons carnivores seront le cadet de mes soucis si je n’arrive pas à reprendre mon souffle rapidement. Je sens ma volonté diminuer à mesure que l’oxygène me manque, si bien que je remarque à peine la vague plus violente que les autres, suivie d’une for
—Bon ça suffit, dis-moi ce qui te perturbe.Ne m’attendant pas à me faire attaquer de front à une heure aussi matinale, je délaisse mon chocolat chaud et ma tartine beurrée pour plonger mon regard fatigué dans celui de ma meilleure amie attitrée.—Je vais bien, affirmé-je avec une telle conviction que je m’en serais persuadée moi-même si l’image révoltante de Lucius et la rouquine torturant une pauvre âme perdue ne revenait pas sans cesse me hanter depuis mon réveil.—À d’autres, répond Alice qui balaye sa crinière blonde en arrière pour éviter qu’elle ne tombe dans son Moka. Tu sais que je parviens toujours à mes fins, alors évitons la partie du « je vais bien / tu es sûre? / oui / je n’y crois pas un instant / bon d’accord / alors raconte! » et passons direct au plus intéressant: Hugo va bientôt arriver et je ne veux pas qu’il interrompe notre session commérage.—Il n’y a pas de session commérage qui tienne.
Lorsque Lucas s’avachit sur la chaise vide en face de la mienne ce matin-là, il le fait avec si peu de délicatesse que j’en manque de renverser mon petit déjeuner sur mon plateau-repas.—Toi, on peut dire que tu as le chic pour choisir tes âmes perdues, lance-t-il en guise de préambule.Bien le bonjour à toi aussi.—Je présume que tu as fait connaissance avec Marion.—Cette femme est horrible.—Ravie que pour une fois on soit capable de s’entendre sur un point.Lucas fronce les sourcils et m’examine longuement avant de continuer:—Bref, j’ai tout autant envie de reprendre la lecture que de me couper une main, mais de toute manière ce n’est pas important pour le moment, car je pense avoir trouvé un souvenir intéressant.—Vraiment? Déjà?—Je lis vite, assure-t-il.Harper penche la tête sur le côté, sûrement dans l’espoir de déchiffrer mon expression blasée. Dé
Je lâche la main d’Harper dès notre arrivée. À notre grand soulagement, nous sommes cette fois-ci parvenus à bon port, ou du moins dans la Sphère. Je ne cherche pas à vérifier si mon équipier affiche son petit air supérieur face à cette constatation et lui emboîte le pas. S’il y a bien une chose que je dois admettre, c’est que c’est un soulagement de voir Lucas reprendre les rênes. Toute cette tension commençait à avoir raison de moi et le « cas Marion » n’est définitivement pas idéal pour débuter en tant que guide.La Sphère se trouve aujourd’hui dans la cour intérieure d’un énorme jardin décoré de buissons en forme de cygnes, de fontaines resplendissantes de propreté et de colonnes blanches entretenues avec soin, formant un péristyle autour d’une baie vitrée encadrée de rideaux pourpres. J’en serais restée bouche bée d’admiration si un détail particulièrement dérangeant n’avait pas attiré mon attention.—Sont-ils vivants? chuchoté-je en me penchant vers Luca
—Comment ça tu n’en gardes aucun souvenir? s’étonne Alice.—Je ne suis pas amnésique, la corrigé-je face au buffet à desserts, hésitant entre une mousse au chocolat faite maison et une tarte sablée framboise pistache. Je dis seulement que les images de cette mission sont encore trop chaotiques pour que je puisse en faire un résumé précis.—Mais tu n’as même pas été droguée! D’ailleurs Lucas ne s’est pas gêné pour me le faire savoir. Quel pauvre type.—Je te rejoins sur ce dernier point, approuvé-je dans un sourire. Mais je ne saurais t’éclairer davantage sur le sujet. J’étais tellement… inutile. Une vraie demoiselle en détresse avec tout le stéréotype du boulet. Je crois que même lors de ma première mission, je n’ai pas été aussi inefficace.—Curieux…Nous prenons tout le temps qu’il nous faut devant les plateaux de fruits, car nous savons très bien que notre petit tête-à-tête prendra fin lorsqu’il nous faudra
Je me réveille ce matin avec une atroce boule au ventre qui ne me quitte pas du saut du lit jusqu’à la fin du petit déjeuner. Plusieurs éléments peuvent être en cause: je ne parviens pas à déterminer ce qui me ronge à ce point les nerfs. Serait-ce l’apparition prévisible de l’Ange Noir au crâne rasé dans un de mes ravissants cauchemars? Une mauvaise digestion suite au gratin extrêmement calorique d’hier soir, ou encore savoir que Lucas et moi nous apprêtons à entamer notre quatrième aventure dans le monde merveilleux des souvenirs de Marion?Ma main tremblote au-dessus de mon bol. Je suis obligée de poser ma cuillère sur mon plateau de peur d’en renverser à côté. Ce malaise persistant me paraît de très mauvais augure et pourtant j’essaie par-dessus tout de sourire bêtement lorsque Guillaume et Juliette me rejoignent à table, vêtus tout comme moi de leur combinaison de Singulier.—C’est reparti pour un tour? lance-t-il allègrement.De t
J’émerge à une heure tardive. Ayant dans un premier temps envie de satisfaire mon estomac affamé, j’enfile les premiers vêtements qui me tombent sous la main à la suite d’une douche express, puis enchaîne directement avec la cafétéria. L’heure avancée de la matinée me permet de manger dans le calme. Mieux encore, l’absence de mes compagnons est un avantage, car je suis plus que disposée à compléter mon petit bout de papier concernant les souvenirs de Marion.« Quatrième souvenir: chalets de Noël / dédale infernal. Choisi par Harper. Moi: »Je mordille mon stylo avant d’ajouter quoi que ce soit. Je ne sais pas quoi penser de cette dernière mission. C’était angoissant, effectivement, mais d’une manière bien plus complexe que les fois précédentes. Quant à cet épisode avec le double de Lucas… Non mais, même dans mes cauchemars les plus tordus je n’ai jamais songé à un truc pareil.« Moi: trompée par sa duplicité? »Après tout, le jumeau d