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LES LARMES D'UNE ÉPOUSE
LES LARMES D'UNE ÉPOUSE
Auteur: Koumondji

Mésentente

Elle se lève et va chagrinée, les bras croisés sur son buste à la fenêtre. Elle monte le store pour jeter du regard dehors, guettant le retour de son mari. Ainsi la énième fois elle mène la même intrigue anxieusement. Elle se retourne pour jeter du regard à l'horloge murale. Les aiguilles lui indiquent une heure à laquelle elle ne croit pas, qu'elle se soit avancée autant encore déjà. Elle va vérifier sur son Smartphone, la pendule est très bien à l'heure. Donc, c'est elle qui n'a pas perçu filer le temps dans son attente désespérée.

Sur la table à manger, le dîner est, et a bien refroidi. C'en est devenu un devoir pénible pour elle depuis un certain temps sous ce toit : rester angoissée dans la nuit, guetter sans cesse le retour de son mari ; un homme qui trouve plaisir à rester dehors les soirs pour ne rentrer que tard la nuit. Voire le lendemain.

Une larme lui perchant sur une joue, elle l’écrase du dos de la main, pousse un soupir le cœur serré et va tristement dans la chambre retrouver sa fille de cinq ans environ dormant paisiblement. Elle lui pose ses lèvres molles sur le front pour l’embrasser puis réajuste sur elle sa couverture avant de se mettre à ses côtés en se fourrant dans la sienne jusqu’au buste. Elle fixe le plafond et pleure en silence son désarroi. Le rituel. Des jours, des semaines, des mois déjà que ça perdure. Et ce soir, une fois de plus, Akpénè se couche le ventre creux.

Ils sont sur le deuxième round de cette nuit. La dame, elle crie, elle gémit. Elle tire le drap et ses dix doigts semblent pénétrer le matelas pendant que l’homme est aussi fougueux comme un cheval compétitif au trot. Tous ses nerfs sont dessinés sur ses cuisses et ses bras raides. Il y va avec tant d’ardeur. La chaleur est intense. C’est torride. Jouissance indescriptible. Le rythme devenant plus rapide, plus vigoureux, signale que l’instant solennel est tout près tout comme il est fatal. Il émet de cris de jouissance à son tour et laisse couler la semence pour devenir flasque aussitôt et se jeter sur le dos.

-J’ai adoré. Tu es encore bien en forme ce soir, l’apprécie-t-elle, la tête sur sa poitrine, et lui, lui caressant le dos de sa main gauche.

-Tu trouves ?

-C’était plutôt magique. Tu m’as mis le feu et bien fluidifié mon sang.

-Ah merci ! Tu n’étais pas du reste non plus. Tu es encore époustouflante ce soir. Regarde, tu es comme ça !

Elle tourne ses yeux, toute flattée et souriante, lui donne une bise avant de continuer :

-Merci, mon chéri ! On a magistralement assumé tous les deux pour mieux jouir alors.

-Et le prochain coup, celui de l’aube, saura être de taille aussi pour électrifier la journée.

-Je ne doute pas de toi. C’est quand même monsieur AHADE non !

-J’adore ta fureur !

-Toi aussi, mon chéri. Mais dis-moi, et ce dont je t’ai parlé ? Tu m’as promis mais tu ne dis plus rien.

-Tu parles comme si j’ai déjà refusé de te satisfaire un besoin alors que tu m’en as fait part avant-hier seulement.

-J’espère ne t’avoir pas exaspéré hein, mon doudou !

-Tu es ma sucette adorée. Rappelle-moi de combien tu as besoin.

Elle sourit, l’embrasse et lui fait le détail de ses besoins :

-La caution pour le déménagement : trois cents mille francs. Je veux changer aussi la table télé et le salon. Et il me faut au moins cinq cent cinquante mille francs, mon doudou.

-Nous parlons de huit cent cinquante mille alors ?

-Bien évidemment, mon chéri !

-Tu as ton cheque sans faute au lever du jour.

Toute heureuse, elle se saisie de ses lèvres, l’embrasse avec passion et lui susurre toute sorte de mots doux à l’oreille ; ce qui lui donne aussi un air fier.  Et ils décuplent leur érotisme dans le lit.

Le sommeil, étant aussi fort que le dernier sort du pèlerinage terrestre, il finit par emporter au fond de la nuit, Akpénè malgré sa détresse, d’autant qu’elle avait connu une journée aussi éreintante la veille. Elle se réveille. Le jour est déjà en avance sur elle. Elle saute vite du lit, y laissant sa fille. Elle sort au salon, il n’y a aucune ambigüité : son mari n’est pas rentré de la nuit. Pour ne plus perdre du temps, elle retourne à l’intérieur et file dans les toilettes.

Le petit déjeuné est prêt. Son enfant déjà lavée et apprêtée pour l’école, elles passent à table. Mais devant son plat, Akpénè reste veule et ne consomme pas. Elle semble oublier même que le temps est contre elle depuis. Or, plusieurs fois déjà, elle a eu des avertissements verbaux au travail pour des retards exagérés. « Tu ne bois pas ton thé et tu ne manges pas ton pain, maman ? », lui demande sa fille qui ne cesse de la fixer. « Le thé se refroidit », lui fait-elle observer.

Elle sursaute :

-Ah, mon bébé, excuse-moi ! Tu as fini ?

Elle passe sa main gauche sur sa joue pour essuyer une larme qui s’y glisse.

-Tu pleures encore ! Parce que papa n’est pas rentré hier aussi non ?

-N’y prête pas attention, mon ange. Finis vite ton repas et allons ! Tu vas être en retard pour l’école.

Akpénè parvient à calmer son enfant pour éviter d’éventuelle question d’elle. La fillette est bien consciente de tout à son âge ; pour être toujours témoin de ses pleurs. Elle a su la calmer. Toutefois, ce n’est pas pour autant elle l’a convaincue qu’elle allait bien. Elle-même s’efforce pour avaler un peu du menu.

Il sonne 7 : 30 presque. Akpénè arrive au travail après le dépôt de sa fille à l’école. Un retard d’une trentaine de minutes, elle accuse. Le bureau en haut, elle monte. Dans les escaliers, elle croise le DG. Et ce matin où son humeur, une fois de plus, est plus basse, elle a encore la malchance d’être devancée par ce dernier qui vient fréquemment au boulot désormais avant son heure : les 8.

Elle salue. Pas de réponse qu’elle reçoit. Elle reçoit plutôt, d’une humeur noire, visage renfrogné, une invitation au bureau dans les minutes. Elle encaisse l’ordre intimé du chef de la tête en « oui ! » avec veulerie. Le chef la dépassant, elle hésite avant de prendre le prochain palier, écrasant une larme.

Et ce matin-là, Akpénè reçoit une bonne douche à sa présentation au bureau de monsieur le directeur général, et un avertissement sévère de répondre pour une prochaine fois devant le conseil d’administration. Au pire des cas, décrocher son licenciement. Non seulement ses retards lui deviennent une tradition, son travail est de jour en jour désolant, et il y va du service de la structure.

Elle sort du bureau, va au sien sous le regard sensible de sa compagne de bureau qui lui prête quelques mots d’encouragement. Leur directeur, un homme doux et gentil mais qui ne badine pas avec le travail. Pour ça, tous en savent quelque chose déjà dans cette maison.

Aux sorties à midi, Akpénè est approchée par sa collègue qui veut bien savoir ce qui se passe réellement avec elle, car ses pertes de pédale en sont de trop. Mais, elle lui fait juste une caricature de la réalité. La collègue, bien consciente que ce qu’elle lui raconte n’est pas vérité, se contente de la laisser et ne pas l’exaspérer.

Le dîner, se déroule dans une ambiance apathique. Ou, plutôt pour Akpénè que sa fille, sur laquelle elle déteint cette humeur, ne cesse de dévisager sans qu’elle ne s’en rende compte. Son mari, monsieur AHADE Amézado, n’a que quant à lui, à satisfaire son estomac. Il semble ne pas remarquer sa femme en face de lui de l’autre côté de la table, ou l’ambiance autour de la table tout simplement. Toute son attention est axée sur son plat. La petite en dévisageant sa maman, lui jette aussi de regards discrets de son visage lugubre. 

« Papa, pourquoi tu fais pleurer maman tout le temps, tout le temps ? » laisse entendre soudain de sa voix d’enfant fine et teintée de chagrin, la petite pour les brusquer. La cuillère avec la nourriture qu’Amézado envoyait à la bouche déjà mi- pleine tombe de sa main. Ses yeux s’écarquillent. Akpénè semble revenir à la table dans un soubresaut. C’est la consternation. Les yeux d’Amézado ont l’air de cracher de flammes sur sa femme que sur la petite innocente.

« Sitsopé, je ne t’ai pas interdit le parler pendant les repas ? » finit par sortir Akpénè à l’enfant en la grondant.

La petite baisse les yeux. Mais, il découle clairement qu’elle ne manifeste aucun remord d’avoir enfreint à une règle stricte et risquer de se faire réprimander. Akpénè retourne son regard sur leur père aux nerfs refusant de se détendre pour lui porter des excuses :

-Ne t’énerve pas, excuse-la et calme-toi, je t’en prie ! Je suis sincèrement désolée et te demande pardon à sa place.

-Comment oses-tu ? Comment oses-tu, Akpénè ? Raconter de telles balivernes à l’enfant sur moi ! Pour quel motif ? Que veux-tu me faire croire ? grommèle finalement Amézado sur sa conjointe.

Akpénè s’en ébaubit, elle reste le cul troué un instant à le fixer. Et lorsqu’elle retrouve un peu de ses sens, elle se lève sans mot et quitte la table en prenant la main de l’enfant et elles vont dans la chambre de la petite.

« Akpénè ! » entend-elle le mari l’appeler énergiquement. Elle s’arrête pour se retourner, restant toutefois sur place.

-Je te parle, tu me ridiculises pour t’en aller et me laisser à table avec des assiettes ? Reviens ici ! lui ordonne-t-il.

-Je suis désolée, je vais dans la chambre !

Amézado se sent contrarié par sa femme dans son refus de revenir sur ses pas sur ses ordres. D’un bon de bile, il quitte son siège pour se jeter sur elle, la prenant par un bras : « Tu me défis ? » gronde-t-il.

Akpénè sent sa serre sur son poignet.

-Tu me fais mal ! lui fait-elle observer.

-Tu retournes à cette table tout de suite !

-Quoi ! Tu veux me frapper ? Tu vois, je n’ai nullement besoin de dire je ne sais quoi à ton enfant. Elle n’est plus un bébé. Elle a maintenant les yeux ouverts et voit tout comme elle te voit actuellement. Et de ce fait, remarque tout. Maintenant desserre mon poignet, tu me fais trop mal, s’il te plait !

Commentaires (2)
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Stéphanie Buche
très bien.
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Hellen white Sanit-vil
c'est une histoire de famille très intéressante
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