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Chapitre 7

Mais les meilleures choses ont une fin – à mon grand regret. Alors que les frissons s’estompent et que ma conscience se réveille, je retrouve tout ce que j’avais banni pendant ces quelques instants.

Ethan, toujours à genoux devant moi, m’embrasse les hanches et le ventre. Une partie de moi voudrait rester ici, dans ce moment. Le laisser me caresser tout son content. Ou tout le mien.

Mais il faudrait plus que quelques baisers et un orgasme mémorable pour me faire oublier la noirceur que je porte en moi. J’ai pu l’enfouir tout à l’heure, la faire taire, mais à présent – alors que je reprends contact avec le monde – elle est là, attendant de m’avaler tout entière.

Je suis trop à vif, trop écorchée. Mes défenses ont volé en éclats sous la violence du plaisir qu’Ethan m’a donné – et sous la tendresse dont il me couvre à présent. Je sens les larmes monter, et je ferme les yeux pour qu’il ne les voie pas. C’est curieux qu’un homme me rhabille. Surtout celui-là. C’est un acte si doux, si attentionné, si plein de sollicitude... et je n’attendais pas ça de lui.

Pourtant, je ne sais pas pourquoi ça me surprend. Lors de cet entretien, rien ne se passe comme je l’avais prévu, de toute façon. J’ai la gorge serrée, mais je ne veux pas pleurer.

Pas ici, pas maintenant. Et certainement pas devant Ethan.

Mais il devine. Il remonte une main vers le creux de mon dos, et me caresse dans un geste apaisant.

— Tout va bien ? demande-t-il d’une voix douce, le visage tout contre le mien.

Je sens mon odeur sur ses lèvres, et pendant un instant, j’ai envie de me pencher pour l’embrasser.

Découvrir non pas mon goût, mais le nôtre, celui de notre union. Mais cette idée est si bizarre, si horrible et gênante, que je recule d’un pas.

Ses yeux bleus s’assombrissent, et je devine qu’il n’est pas content. Il n’aime pas la distance que je viens d’instaurer entre nous. Mais comment pourrais-je rester près de lui, alors que le château de cartes que j’ai mis cinq ans à bâtir menace de s’écrouler d’une seconde à l’autre ?

— C’était..., dis-je.

Je cherche le bon adjectif. Hallucinant ? Époustouflant ? Extraordinaire ?

— ... agréable.

À peine ai-je prononcé ce mot que je le regrette. Agréable... On peut dire ça d’un bain chaud. D’un

cookie au chocolat encore tiède. D’une pédicure. Ce qui vient de se passer entre nous peut être qualifié de multiples façons, mais ça n’était certainement pas « agréable ».

Ethan se raidit, et je crains de l’avoir offensé. Je ne peux pas le lui reprocher : il vient de me donner un orgasme étourdissant, et je lui sors que c’était agréable ! Mais il semble plus amusé que vexé.

— Agréable ? répète-t-il en haussant son fameux sourcil.

Ça me bouleverse, me fait frissonner de désir à nouveau. Ce qui – si j’en crois la lueur de ses yeux – est exactement ce qu’il voulait.

— Tu sais très bien ce que je veux dire...

Je me penche pour prendre ma sacoche sur le canapé. Mais je ne le quitte pas des yeux. En cet instant, il a des airs de prédateur qu’il vaut mieux surveiller.

— Oui, je sais, répond-il en levant la main pour sentir mon odeur sur ses doigts.

En le voyant inspirer ma fragrance, j’ai les jambes qui flageolent. Je dois faire un effort pour ne pas tomber.

— Merci de m’avoir laissé te caresser, souffle-t-il d’une voix rauque de désir.

— Je crois que c’est plutôt à moi de te remercier. Après tout, c’est moi qui...

Je laisse la phrase en suspens. C’est une chose de penser ce mot, autre chose de le dire, même devant

l’homme par qui c’est arrivé.

— Tu n’as pas besoin de me remercier pour le plaisir que je t’ai donné, Chloe. Jamais, insiste-t-il avec un sourire.

Il semble décidé à ce que ça se produise à nouveau. Ce qui est impossible. Quel qu’en soit mon

désir...

— Il faut que j’y aille.

— Pourquoi ? demande-t-il en se rapprochant, si près que j’en ai le souffle coupé. Laisse-moi t’inviter à dîner.

— Je ne peux pas. J’ai déjà quelque chose de prévu.

— Annule, dit-il.

Pour la première fois, il semble vraiment contrarié. Mais je déteste qu’on me donne des ordres.

— Non.

— Tu as vraiment l’intention de sortir avec un autre homme ? Après ce que nous venons de faire ?

— Une expérience, dis-je pour ne pas utiliser le mot

« orgasme », ne te donne pas de droits sur moi. Et réciproquement.

— Et si j’en veux, des droits ? reprend-il d’une voix douce et menaçante à la fois, comme pour me mettre en garde.

La peur éclate dans mon ventre, et je transpire. Je tremble. Je serre les poings, refusant de lui donner la satisfaction de savoir combien il lui est facile de m’intimider.

— Dans ce cas, bonne chance. L’homme qui aura le droit de me dire ce que je dois faire n’est pas encore né.

— Tu le penses vraiment ?

— J’en suis certaine. Jamais je ne donnerai à un homme un tel pouvoir sur moi.

Jamais plus.

— Et celui avec qui tu sors ce soir ? Il ne prétend à aucun droit sur toi ?

Pendant quelques secondes, j’envisage de le laisser croire que j’ai rendez-vous avec un mec. Et que je compte maintenir ce rendez-vous, même après ce que nous venons de faire. Ou plutôt, ce qu’il vient de me faire. S’il croit que je suis le genre de femme capable de sortir avec un garçon et s’envoyer en l’air avec un autre, il devrait se désintéresser de moi. De toute évidence, Ethan est du genre possessif, et il ne s’accommoderait pas d’une telle situation. C’est exactement ce que je veux : qu’il se désintéresse de moi. Pas seulement parce que c’est mon patron, mais aussi parce que je ne supporterai pas une telle intimité. Je me sens déjà cassée, fêlée. La douleur que je maintiens si difficilement à distance est en train de remonter à la surface.

Pourtant, je ne peux ignorer la façon dont il me regarde. Il me tient sous son emprise par la seule force de ses yeux.

— C’est ma coloc, dis-je avant même d’avoir décidé de le faire. On se fait une soirée entre filles. On dîne et on regarde des comédies romantiques. Tous les mardis soir.

La tension retombe aussi vite qu’elle était montée, et ça me soulage. Mais aussitôt après, je suis à nouveau en colère – plus envers moi qu’envers lui. Oui, Ethan a tendance à insister, mais il ne serait pas dans sa situation s’il agissait autrement. Il dirige l’une des entreprises biomédicales les plus lucratives du pays, à la pointe de la recherche pour sauver des soldats sur les champs de bataille. Self-made-man et presque milliardaire, il n’a pu compter que sur son intelligence et son sens des affaires pour passer du statut d’orphelin de guerre à celui de P.-D.G. à la réputation mondiale.

Non, ce n’est pas son insistance qui me met en colère. C’est le fait que je lui cède chaque fois. Que je

me plie à ses désirs même quand je n’en ai pas l’intention. Cela fait des années que je ne me comporte plus comme ça, et je ne veux plus jamais le faire. Voir Ethan me soumettre aussi facilement à sa volonté est déconcertant. Inquiétant, même...

— Laisse-moi te raccompagner à ta voiture, alors.

Il m’enlève ma sacoche des mains, passe la sangle sur son épaule, et attrape la sienne. Puis il me prend par le coude, fermement mais pas trop, et m’entraîne à travers les deux réceptions successives, jusqu’aux ascenseurs.

— Bonne nuit, Dot, lance-t-il au dragon fidèle au poste.

Sauf que lorsqu’elle le regarde, elle ressemble plus à une maman attendrie qu’à un dragon gardant l’entrée d’une caverne.

— Bonne nuit, Ethan. À demain matin.

L’ascenseur arrive avant qu’il ait eu le temps de répondre. Il se contente d’un sourire et d’un geste de la main. Nous entrons, à peine quelques secondes après qu’il l’a appelé, et je ne peux m’empêcher d’être agacée. J’ai l’impression d’avoir passé la journée à attendre des ascenseurs, mais dès qu’Ethan appuie sur le bouton, il y en a un qui arrive comme par magie. Comme s’ils savaient que c’est le P.-D.G. qui les appelle, et qu’ils n’osaient le faire attendre.

Alors qu’il me raccompagne, Ethan me demande si je passe un bon été. Quels étaient mes cours préférés au dernier semestre. Si nous avons aimé, ma colocataire et moi, les fraises qu’il m’a envoyées. Cette dernière question me déstabilise. Parler de la pluie et du beau temps ne me dérange pas – j’aime le caractère prévisible de ces conversations –, mais discuter de son cadeau, c’est autre chose. Surtout quand on sait tout ce qui s’est passé aujourd’hui à cause de ce fichu colis.

Je décide de lui expliquer ce que j’en pense, que je n’ai pas davantage apprécié les fraises que le blender à 400 dollars. Mais encore une fois, comme s’il avait le pouvoir magique de me forcer à dire la vérité, je m’entends prononcer tout autre chose que ce que j’avais prévu.

— Je te les aurais renvoyées aussi, mais ma coloc en avait déjà avalé la moitié. Ça ne semblait pas très classe de n’en réexpédier qu’une partie. Un peu « Je vous les renvoie, mais seulement après en avoir profité ». Vraiment pas terrible.

À ma grande surprise, Ethan éclate de rire.

— Ça ne me dérange pas que tu me rendes les fraises. Surtout si ça me donne l’occasion de me faire incendier encore une fois.

— Tu aimes ça, qu’on te crie dessus ?

— Non. Je déteste carrément. Sauf quand c’est toi.

Je ne sais pas trop quoi en penser – ni comment répondre. Par chance, je n’en ai pas besoin : nous sommes arrivés devant ma voiture, une Mini Cooper achetée d’occasion lors de mon entrée en fac, il y a trois ans. Je l’appelle Phoebe, comme dans Friends, parce qu’elle est drôle, mignonne, et excentrique. Contrairement au personnage, cependant, il arrive que ses excentricités ne soient pas sympathiques. Comme lorsqu’elle me lâche au pire moment. Ou quand la clim décide de ne fonctionner que l’hiver. Je m’y connais pas mal en mécanique, et j’ai réussi à régler un certain nombre de problèmes moi-même, mais d’autres résistent toujours. Elle est têtue...

Tori me harcèle pour que j’en change, mais j’aime trop Phoebe. C’est la première possession que j’ai eue, vraiment à moi. Je l’ai achetée avec mon argent, et elle est à mon nom. C’était un grand pas pour moi, qui m’a aidée à prendre vis-à-vis de mes parents la distance dont j’avais désespérément besoin à dix-huit ans. Et le fait que mon père ne puisse me la reprendre – parce qu’il a besoin d’argent, qu’il est de mauvais poil ou qu’il veut me punir pour une offense réelle ou imaginaire – signifie encore plus pour moi. En outre, j’ai fini de rembourser l’emprunt, ce qui n’est pas rien. Avec les frais de scolarité exorbitants de la fac et les dépenses courantes, joindre les deux bouts est un vrai défi. Pendant l’été, alors que je suis en stage non rémunéré, c’est encore pire. Seule l’absence de loyer et de traites pour la voiture m’a permis d’accepter le job de mes rêves.

— Salut, dis-je en ouvrant le coffre pour y déposer ma sacoche.

Ethan ne semble pas franchement émerveillé par mon véhicule. Il s’abstient cependant de tout commentaire, et c’est tout ce qui compte. Après la journée que j’ai passée, je ne suis pas d’humeur à supporter une nouvelle dispute. Et je suis sûre que ça pourrait arriver, car je défends toujours Phoebe bec et ongles contre ses détracteurs.

— Sors avec moi, demain, m’enjoint-il alors que je me dirige vers ma portière.

Merde. Pourquoi ai-je cru qu’il n’insisterait pas ? Le fait qu’il ait pris du bon côté mes plans pour ce soir – une fois qu’il a compris que je traînais avec Tori – ne signifie pas qu’il va laisser tomber. Pourtant, c’est ce dont j’ai besoin. Ce que je veux. J’en ai l’estomac noué, et je ne sais pas si c’est parce que je voudrais qu’il accepte mon refus... ou le contraire. Dans un cas comme dans l’autre, je ne sortirai pas avec lui.

— Je ne peux pas, dis-je après un long silence tendu.

Tendu de mon côté, en tout cas. J’évite désespérément de le regarder dans les yeux, craignant qu’il me fasse encore une fois son truc de Jedi et que je me retrouve à accepter sa proposition contre mon gré.

J’ouvre la portière et tente d’entrer. Mais Ethan ne va pas me laisser m’en sortir aussi facilement. Il me prend la main, referme la porte avec sa hanche – il est bien trop grand pour le faire avec l’épaule. Avec son mètre quatre-vingt-quinze, il a l’air d’un géant à côté de ma Mini, et je mentirais si je prétendais que je ne trouve pas sa taille intimidante. Jusqu’à ce que je me souvienne comme il tenait parfaitement entre mes jambes un peu plus tôt. Il fait chaud, tout d’un coup...

— Tu as d’autres projets avec ta coloc ?

— Non.

Pourquoi suis-je incapable de mentir à cet homme ? J’ai pourtant menti sur à peu près tout ce qui m’importait depuis cinq ans, afin de me protéger, mais à présent, alors que j’en ai le plus besoin, ce talent m’a totalement désertée.

— Avec quelqu’un d’autre, alors ?

— Non.

Je sens son regard sur moi, et je sais qu’il voudrait que je lève les yeux. Mais cette fois, je ne cède pas. Je ne peux pas. Sinon, je serai incapable de garder ma distance, ma santé mentale, et ma faculté de dire non.

Je suis têtue. J’ai suffisamment de volonté pour décourager les plus acharnés – c’est comme ça que j’ai réussi à traverser mes années de lycée sans devenir folle –, mais Ethan est encore plus obstiné que moi. Alors que je me débats à la recherche d’une idée pour meubler le silence, sans pour autant le regarder, il se contente de s’appuyer contre ma voiture.

Et d’attendre.

Longtemps.

Très longtemps.

Le silence s’étire, tendu comme une corde de violon. Je décide de ne pas desserrer les dents, de ne rien laisser échapper, mais c’est plus difficile à chaque seconde qui passe.

Les mots se bousculent sur mes lèvres. J’ai beau avoir décidé de ne pas me justifier, je m’y sens tout

de même contrainte. Je me mords la joue pour résister, si fort que je sens le goût métallique du sang dans ma bouche.

Et aussitôt, tout s’arrête. Comme hier, quand mon estomac s’est mis à gronder. Dès qu’Ethan prend conscience de ma souffrance, il y met un terme. Il me pose doucement la main sur la joue et tente du bout du pouce de me desserrer les mâchoires.

— Ne fais pas ça..., souffle-t-il.

— Je ne peux pas coucher avec toi, Ethan.

— Il ne s’agit pas d’une coucherie, Chloe. Ce n’est pas ce que je te propose.

Non, c’est vrai, mais mon refus va plus loin. Ce n’est pas juste parce que je ne veux pas coucher avec le patron. C’est bien plus profond, mais je ne sais pas comment le lui expliquer. Sans lui révéler tous mes secrets... et mes blessures.

— Il faut que j’y aille.

Je me tourne vers la voiture et tente d’ouvrir la portière. Je sais que je n’ai aucune chance d’y parvenir si Ethan ne bouge pas, mais j’espère qu’il ne va pas insister. Pas maintenant, alors que la faille que je sens en moi s’élargit de seconde en seconde.

Pendant un long moment, il semble ne pas vouloir bouger. Il continue à me caresser la joue, puis le menton. Il lève mon visage vers lui pour me forcer à le regarder. Je m’attends à lire de la colère ou du dégoût dans ses yeux. Au minimum, de l’agacement. Mais je découvre une émotion si inattendue et imméritée que j’ai du mal à l’accepter. Mêlée au désir que j’éprouve également, se lit une douceur, une tendresse qu’il ne tente pas de cacher. Jamais encore on ne m’avait contemplée comme ça. C’est la première fois qu’un homme scrute au fond de moi, par-delà la surface. Qu’un homme me voit comme je suis.

Ma résistance faiblit aussitôt, et je me demande pourquoi je suis convaincue que sortir avec Ethan serait une mauvaise idée. Ce qui montre bien à quel point il me met la tête à l’envers. Je sens la panique monter, m’envahir, et pendant une minute je suis comme un loup pris au piège, prête à me ronger la jambe pour me dégager.

Mais alors que je suis sur le point de craquer complètement, Ethan s’écarte et m’ouvre la portière. Je me précipite à l’intérieur avant qu’il ait pu changer d’avis. Ensuite, je ne peux m’empêcher de me tourner vers lui, en me demandant pourquoi il m’a rendu ma liberté. J’étais sur le point de céder, de lui donner tout ce qu’il voulait si ça pouvait me permettre d’échapper au chaos qui faisait rage autour de moi. Autour de nous.

Avec ce geste simple, il m’a empêchée de m’effondrer, m’a rendu la force que j’avais perdue au cours de cette bataille de volonté. Je ne comprends pas. Pourquoi un homme qui aime tellement gagner recule-t- il alors que la victoire s’offre à lui ? Mais je suis reconnaissante. Et perplexe. Reconnaissante plus que perplexe.

— Sois prudente sur la route, conseille-t-il d’une voix bourrue.

— Ethan...

— Ce n’est pas grave. Je peux attendre.

— Attendre quoi ?

— T’attendre, toi, Chloe, sourit-il. Sauf si tu restes là à me regarder avec cet air adorablement égaré, conclut-il avec une grimace.

Je demeure parfaitement immobile, sans détourner les yeux ni même ciller. Je suis perdue, vulnérable, et terrifiée à l’idée que ça se voie. Il semblerait qu’avec Ethan, j’ai également perdu la faculté de cacher mes émotions, et je ne sais pas comment résoudre ce problème.

— Allez, file, m’ordonne-t-il soudain avant de claquer la portière d’un geste ferme.

Je mets la clé sur le contact et commence à baisser la vitre, mais il secoue la tête et s’éloigne de quelques pas. Puis il m’indique la sortie d’un geste de la main.

Je n’ai pas d’autre choix que de suivre ses instructions. Je passe une vitesse et me dirige vers la sortie

du parking. Mais j’ai bien du mal à ne pas me retourner pour le regarder. Et à ne pas faire demi-tour.

Et la partie de moi qui a été blessée autrefois, qui a été déchirée et recollée comme les morceaux mal

assortis de différents puzzles, ne peut s’empêcher de se demander ce qu’Ethan voulait.

Commentaires (4)
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S Djou
96 cest trop chère
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Vinciane Vinckboom
I am living this...
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Khadija Kaloun
...........................
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