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6.

ELIZABETH WILSON

La soirée se déroula trop vite à mon goût. Voir arriver Ethan ce soir Chez Lola m'avait littéralement déstabilisée, mais au fond, j'étais vraiment heureuse de le voir. Après m'avoir attiré avec lui et m'avoir demandé ce qu'il n'allait pas, j'ai préféré mentir et lui dire que tout roulait. Dans son regard, j'avais eu l'impression d'y déceler de la peur, du désespoir et c'était à cause de moi. Alors, j'avais préféré lui dire que tout allait bien. Ethan m'avait toujours fait tourner la tête, mais ce soir, il s'était clairement passé quelque chose entre nous. On finit par quitter Chez Lola assez tard, Kara et Shawn me saluèrent et Ethan insista pour me raccompagner à ma voiture.

Lorsque l'on y arrivait et que je me retournais, il se trouvait si près de moi que je reculais au point de me retrouver contre la carrosserie de ma caisse. Il avait ses yeux verts posés sur moi et il n'y avait que lorsqu'il me regardait que j'avais l'impression de ressembler à quelque chose, d'être désirée. C'était lui qui me faisait ça. Je m'empourprais.

- Merci, bonne soirée. Bafouillais-je avant de vouloir me retourner.

Il attrapait ma main, mon cœur eut un raté et je sursautais. Et encore une fois, c'est lui qui me faisait cet effet. Je regardais nos deux mains jointes un instant, avant de relever la tête vers lui. A une époque, Ethan était mon meilleur ami et cela ne me surprenait pas qu'il me prenne la main comme il le faisait encore aujourd'hui. Ce contact me faisait du bien. Il avait un sourire en coin et mon cœur fondit d'amour. J'écarquillais les yeux.

- Tu viens toujours demain hein ?

Je n'avais jamais précisé si je viendrais le lendemain ou le jour d'après, mais je me contentais de hocher la tête. Il me coupait le souffle, je savais que si j'ouvrais la bouche, j'allais me mettre à bégayer comme une adolescente en rut. Il ne fallait pas que ça arrive, surtout pas.

- James sera content de te voir. Me dit-il en me fixant intensément. Et...  Moi aussi. Ajouta-t-il.

Je ne pus contrôler le sourire qui s'étira sur mes lèvres. Un sourire timide. Je finis par me retourner et par monter dans ma voiture. Ethan me regardait toujours. Je démarrais. Il était là. Je fis ma manœuvre afin de sortir du parking. Il était toujours là. J'enclenchais la première vitesse et appuyais sur l'accélérateur et lorsque je jetais un coup d'œil à mon rétroviseur. Il était encore là, les mains dans les poches, regardant ma voiture se perdre dans les rues noires de Sherwood.

*

Le lendemain, comme d'habitude, je me relevais en sursaut, les larmes aux yeux. J'étais prise de tremblement et j'avais froid. Je plaquais ma main contre ma bouche au moment ou je sentis un sanglot arriver. Je fondis en larmes, n'arrivant pas le moins du monde à les contrôler. Les genoux relevés contre ma poitrine, j'y déposais ma tête, n'arrivant pas à m'arrêter de pleurer. Cela faisait un peu plus d'une semaine que je gardais tout ce que j'avais sur le cœur. Je pensais être plus forte que ça, mais à l'évidence, ce n'était pas le cas. Peut-être que Kara avait raison. Peut-être qu'il fallait vraiment que j'en parle ? 

Je me roulais en boule sur mon lit, les larmes continuant tristement de couler et pour la première fois en quelques jours, les tremblements s'arrêtèrent seuls, le poids du sommeil s'abattant sur moi et je me rendormis épuisée par le lourd poids des secrets.

Je sentis quelque chose affaisser mon matelas et j'ouvris directement les yeux. Kara se tenait juste à côté de moi, me fixant, le regard triste. Mais qu'est-ce qu'elle foutait là ?  Je fronçais les sourcils et tournais la tête vers ma table de nuit pour attraper mon téléphone. Il était déjà dix heures. Je soupirais, me laissant retomber sur mon oreiller.

- Tu as pleuré ? Me demanda-t-elle d'une voix si douce, qui fit remonter les larmes à mes yeux. Oh non Lily, s'il te plaît. Non...

Elle me prit dans ses bras et je m'accrochais désespérément à elle, me laissant aller une nouvelle fois. Kara était sans conteste, la meilleure amie que quiconque pouvait avoir. Elle était et avait toujours été là pour moi, depuis si longtemps. Elle ne me tournait jamais le dos et ne l'avait jamais fait.

- Chérie, ça va aller... Ça ira mieux tu verras... Murmura-t-elle à mon oreille tout en me caressant le dos.

Une heure après, j'étais dans la salle de bain, attenante à ma chambre. Je m'étais passé de l'eau sur le visage, avais pris une douche, m'étais brossé les dents, avais enfilé un legging et revenais auprès de Kara. Elle écarquilla les yeux et c'est de la terreur que j'y lu lorsqu'elle les déposa sur mes bras. Je fronçais les sourcils avant de baisser les yeux et de comprendre ce qu'elle regardait. Je me sentis nue d'un coup et courus récupérer un tee-shirt manche longue que je mis avant de me retourner vers elle. Ses yeux s'étaient remplis de larmes. 

Et bien... ce matin, ce n'était vraiment pas la joie.

- C'est... C'est lui qui t'a fait tout ça Lily ? Chuchota-t-elle la voix tremblante.

- Ça va aller Kara. Dis-je nerveusement en tirant sur mes manches.

- C'est lui ? C'est lui qui a fait ces marques sur ton corps ? C'est pour ça que tu n'arrêtes pas de mettre des tee-shirt manches longues, des cols roulés et j'en passe. C'est ce malade qui t'a fait ça ?

Plus elle parlait et plus elle avait l'air de s'énerver. Son beau teint bronzé virait au pivoine et elle faisait de grands gestes. Je tournais la tête vers la porte, les épaules voûtées. Et si mes parents l'entendaient ? Les murs de ma chambre étaient assez épais, mais on ne savait jamais...

- S'il te plaît, arrêtes de crier, Kara... Cette situation est difficile pour moi. Je n'ai pas besoin que tu m'enfonces encore plus.

- Je ne t'enfonce pas, Elizabeth. Loin de là. Je veux tout ce qu'il y a de bon pour toi. Je veux que tu sois heureuse. Et tant que cette affaire ne sera pas réglée, tu ne le seras pas. Ce mec t'as brisée et je le comprend. Mais... Il faut que tu en parles Lily. Il faut que tu l'extériorises, tu ne peux pas le garder que pour toi. Tu ne t'en sortiras pas sinon.

Je savais qu'elle avait raison, je n'étais pas idiote, mais je croisais les bras sur ma poitrine.

- Je vais gérer Kara, je te le promet.

- Qu'est-ce que tu me promets au juste ?

Elle aussi elle avait croisé ses bras contre sa poitrine et me regardait d'un air de défi. Je détestais plus que tout lorsqu'elle faisait ça.

- Je vais en parler Kara, je te le jure. Laisses-moi juste du temps, s'il te plaît. C'était déjà assez dur de t'en parler à toi. Alors s'il te plaît...

Ma voix s'éteint en un simple murmure et ses épaules se détendirent. Elle se relâcha finalement et se leva pour venir me prendre dans ses bras.

- Merci d'être mon amie, lui dis-je.

- Je t'aime Lily.

- Je t'aime aussi.

Le reste de la matinée passa rapidement. Kara s'en alla après avoir déjeuner avec mes parents et moi. Ces derniers me demandèrent au moins dix fois si j'allais bien. J'avais une tête d'enterrement. Mais je soutenais que ça allait et je continuerais de le faire. Je ne voulais surtout pas les inquiéter. Brandon était loin derrière moi aujourd'hui. Il ne me retrouverait pas et je pourrais enfin avancer. Enfin c'est ce dont je tentais de me persuader.

- Tu t'en vas chez Ethan et Jamie à quelle heure ? Me demanda ma mère.

Ma mère était tellement belle, une beauté apaisante. Une beauté d'une douceur inégalable. Elle avait les cheveux afro, coiffés à la perfection en un chignon. De mon visage, je tenais pratiquement tout d'elle. J'avais les mêmes yeux en amande, les mêmes pommettes relevées ainsi que la même bouche pulpeuse. J'étais sa jumelle et j'étais heureuse de l'être. Ma mère était ravissante.

- Je ne vais pas tarder. Je vais aller acheter quelques trucs à grignoter avant.

- Jamie va être content. Il adore ça les films.

- C'est vrai ? C'est quoi son type de films préféré ?

- Il est fan de... Tu sais, le super-héros, celui qui ressemble à une souris. Dit-elle en cherchant son nom, les yeux plissés.

- A une souris ? Répétais-je en fronçant des sourcils. Une chauve-souris plutôt, non ? Batman ?

- Ah oui ! Celui-là !

Je la regardais avant de me mettre à rire. Je finis par sortir de la maison et par grimper dans ma voiture. Je me rendis au supermarché le plus proche et l'unique qu'il y avait à Sherwood et achetais du pop-corn au caramel, des chips, quelques sachets de bonbons et des boissons. Ma mère m'ayant donné l'adresse de chez les Green, j'y allais dans la foulée. 

Ethan habitait une petite maison dans le bourg de Sherwood. Je me garais devant, juste en face de sa voiture, avant de récupérer les provisions et de marcher jusqu'au portillon. L'extérieur était bien entretenu, je remarquais un parterre de fleurs et mon cœur se serra. C'était le père d'Ethan qui entretenait ce jardin, j'en étais persuadée. Déjà : de un, Ethan n'aimait pas le jardinage, ensuite, son père avait fait la même chose chez lui, en souvenir de sa défunte femme. C'était des roses rouges, ses fleurs préférées. Ethan me l'avait raconté une fois. Il avait perdu sa mère presque au même âge qu'avait actuellement son fils. Il avait six ans et même si il ne se souvenait pas très bien d'elle, il se rappelait à quel point elle l'aimait. C'était le principal pour lui.

Je me demandais alors ce qui était arrivé à la mère de Jamie, où est-ce qu'elle était passée ? Si il ne souffrait pas de son absence... 

Arrivée devant la porte d'entrée je frappais trois coups ferme. Je levais les yeux au ciel. Il faisait incroyablement beau et les températures étaient élevées. On sentait que l'été arrivait à grand pas. J'entendis des pas derrière la porte approcher et une boule se forma dans mon estomac. C'était Jamie qui ouvrit la porte, un énorme sourire aux lèvres et sa fossette creusée sur sa joue droite. Il était à croquer. Il entoura ses bras autour de ma taille.

- Ellie ! Tu es venue !

- Bah oui mon grand, je t'avais dis que je viendrais.

Je me mis à sa hauteur et lui ébouriffais les cheveux. Au même moment, la porte s'ouvrit un peu plus en grand et je relevais les yeux pour croiser les yeux vert d'Ethan. Il était pieds nus et ne portait uniquement qu'un jean. Son torse était découvert, ses pectoraux étaient gonflés et ses abdominaux, tracés. Je me retrouvais face à la bosse qui formait son entrejambe, son jean était déboutonné et je devins sûrement rouge comme une tomate. Je me relevais, manquant de trébucher et il m'aida, me soutenant fermement par le bras. La boule dans mon ventre se liquéfia en une douce chaleur qui descendit jusqu'à mon entrejambe, à moi.

- Merci... Je... Salut Ethan. Bafouillais-je.

Jamie attrapa ma main et m'entraîna vers l'intérieur de chez eux, super content de me voir. L'après-midi promettait déjà.

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