Chapitre 4

Loukina se levait plusieurs fois par nuit pour aller boire de l'eau et à chaque fois ça me réveillait aussi. J'ouvris les yeux dans le noir et attendis de l'entendre retourner dans sa chambre avant de les refermer et d'attendre que le sommeil revienne. Quand le matin arriva et que nous étions complètement réveillées, Loukina entra dans ma chambre et s'assit sur le bord de mon lit pour me raconter son rêve. Quant à moi, je la fixais en silence, curieuse de savoir ce qu'elle allait me dire. « J'ai fait plusieurs rêves courts cette fois et la plupart d'entre eux sont très vagues. Je me souviens que tu y étais. -Moi ? demandai-je avec un petit sourire fier. » Loukina sourit. « Oui toi. C'est le même rêve qui est déjà revenu plusieurs fois. Tu étais avec la même personne. Je ne pouvais pas voir son visage. C'était juste une masse énorme, sombre et impressionnante. Mais je sens que c'était cette personne. » J'ai hoché la tête. « Sûrement un démon. Vous m'avez vu le tuer ? Elle secoua la tête. « Pas du tout. Vous étiez juste en train de vous regarder. » Je soufflais. « Vous ne me voyez jamais le tuer. Je ne comprends pas. Pourtant, mon travail consiste à protéger la Terre des démons en les tuant. Pourquoi laisserais-je celui-ci en vie ? Il a l'air assez terrifiant. » Loukina haussa les épaules. « Je ne sais pas. C'est peut-être un démon très puissant ou gentil. » J'ai ri. « Aucun démon n'est gentil, Loukina. » Mon ami sourit gentiment. « Nous avons tous des côtés sombres, Olympe. Certains plus que d'autres. Mais sans lumière il n'y a pas d'ombre non plus. - Oui. Jusqu'à présent, je n'ai rencontré aucun démon gentil. -Et les vendeurs du magasin ? Vous ne les avez jamais tués et ils vous aident avec votre maladie. » Je haussais les épaules. « Ils sont différents. Ils sont utiles à la société. De tels démons sont à part. -Alors il y a effectivement de gentils démons. - J'ai dit utile pas sympa. Fais attention. Je sais que vous seriez capable de vous lier d'amitié avec un démon. Vous ne devriez pas leur faire confiance. -Je sais, ne t'inquiète pas pour moi. C'est de toi que je m'inquiète le plus. » Je souris amusée. « Moi ? Tu me connais, tu n'as pas besoin de t'inquiéter pour moi. -Je sais que tu sais très bien te battre et tout mais tu restes humain et ce sont des démons. Prends soin de toi. » Je pris sa main dans la mienne. « Je ferai attention ne t'inquiète pas. -Je ne parle pas seulement des démons. Qu'est-ce qui se passe avec ta famille ? » Je me suis figée. « Pas de nouvelles. -Vraiment ? Mais c'est bientôt Noël. » Je haussais les épaules. « Je ne suis généralement pas le bienvenu. Ils ne vont pas faire d'exception pour les vacances. » Loukina se força à sourire. « C'est encore mieux. Comme ça tu pourras venir fêter Noël avec ma famille. Ils t'aiment tu le sais. Tu ne vas pas déranger nous serons tous très heureux de te voir. » J'ai souri vraiment touché. « En es-tu sûre ? -Oui ! -Merci. Tu es vraiment un ange. » Elle se figea. « En parlant d'ange. J'en ai vu un dans mon rêve. - Aurais-tu rêvé de toi-même ? » Elle roula des yeux avec un grand sourire. « J'ai vu des ailes d'ange blanches, j'en suis sûre, mais c'est étrange, je ne me souviens pas avoir vu un corps. » J'ai froncé les sourcils. « En général, ils viennent par paires. -Oui je sais. -Un ange... » Loukina avait souvent des rêves prémonitoires, donc cet ange pouvait être un indice pour l'avenir ainsi qu'une simple manifestation de son imagination. « Nous verrons, je suppose. »

Je me tournais vers l'heure. « Bon, je dois y aller. » Je me suis levée et j'ai commencé à me changer. « Tu vas à la banque ? -Ouais. Et puis j'irai faire quelques courses. As-tu besoin de quelque chose en particulier ? -Hum non je ne pense pas, merci quand même. -Et qu'est-ce que tu vas faire aujourd’hui ? -Je vais rester à la maison et traîner je pense. Il y a une nouvelle saison de La casa de papel qui vient de sortir. -Ne me spoil pas. -Je verrai. » Je suis donc allée à la banque déposer le chèque que j'avais reçu pour mon dernier emploi. J'étais toujours payée la moitié du montant par chèque avant de faire le travail et l'autre moitié était immédiatement transféré sur mon compte à la seconde où je libérais la Terre du démon cible. Je ne pouvais pas poser trop de questions et ça me convenait. J'avais été repérée précisément parce que j'avais commencé à tenir tête aux démons et que j'avais commencé à protéger les humains. Ils étaient si faciles à reconnaître. Il y avait quelque chose de différent autour d'eux. Comme une aura noire et froide. L'organisation pour laquelle je travaillais m'a envoyé une photo du démon à éliminer et j'étais heureux de le faire. Ils étaient tous dangereux et devaient être punis. Je ne vais pas mentir, j'ai eu du mal au début. Je n'étais pas une humaine comme les autres. Je pouvais reconnaître les démons et j'ai dû apprendre à me défendre très jeune pour me protéger de ce monde mais je n'ai pas eu le courage de les tuer au début. Je ne faisais que les combattre et les laisser dans le pétrin, leur promettant que je reviendrais s'ils ne partaient pas. Parfois, ils étaient revenus pour se venger mais j'avais toujours été prêt. L'organisation m'a donc contacté, un émetteur m'a fait des propositions et j'ai accepté. Ils m'ont expliquée que les démons ne meurent pas vraiment quand on les tue. Leurs âmes disparaîtraient simplement de ce monde et ils finiraient là où ils pourraient être capturés et jugés. Tout ce que j'avais à faire était de les envoyer là-bas et pour cela on m'a donné des informations, des armes et bien sûr des récompenses. J'y pensais depuis longtemps. Après tout, je devais être sûr que l'organisation ne me mentait pas et même s'ils ne mouraient pas vraiment dans ma tête, c'était comme ça. Je ne voulais pas me vanter mais je travaillais pour les anges d'une manière ou d'une autre. Il y avait pas mal d'humains qui connaissaient les démons et certains d'entre eux les ont combattus comme moi et les ont tués. Mais très peu pouvaient dire qu'ils étaient payés par les anges eux-mêmes. Je n'avais pas réalisé à quel point le monde sorcier était vaste jusqu'à ce que je sois contactée par l'organisation. Des anges et des démons se trouvaient à chaque coin de rue et mon banquier lui-même venait du monde des anges. Il était très gai et chaleureux, mais n'était pas très bavard sur des sujets autres que l'argent. Par conséquent, je n'en ai jamais su plus sur les anges de lui.

Il connaissait mon travail, alors il ne m'a pas demandé d'où venait tout cet argent et il a juste pris les chèques et les a rangés avec un sourire. En quelques minutes, c'était fini et j'étais en route pour le magasin. Avec la liste de courses en main, j'ai soudain eu envie d'un milk-shake au chocolat. J'ai hésité. J'avais acheté beaucoup de milkshakes dernièrement et c'était assez cher. Même si j'étais bien payé, j'avais l'intention de surveiller mes dépenses. Cependant, je me suis finalement laissé tenter en me disant que ce serait la dernière fois du mois. Je me suis donc dirigée vers le stand de milk-shake où ils commençaient à bien me connaître quand sur mon chemin j'ai vu ma prochaine cible. J'ai sorti la photo de ma poche pour m'assurer de ne pas me tromper de personne. Non, c'était vraiment lui. Il marchait les mains dans les poches et la tête haute, ne sentant pas sa fin approcher. Je me mis à rire. Quelles étaient les chances que je le croise ? Je me dépêchais de rattraper le démon qui était un étage en dessous de moi. En m'approchant de lui, j'entendis mon téléphone vibrer. Alors je l'ai sorti de ma poche surprise. D'habitude, je le laissais toujours en mode silencieux. C'était un message de Loukina. Loulou : J'ai entendu un nom dans mon rêve. Kérian l'éclipseur de Lune. Ou Soleil. Ou quelque chose comme ça. Souviens toi. J'ai noté le prénom quelque part dans mon esprit avant de ranger mon téléphone. En continuant d'approcher le démon j'ai décidé de gagner du temps et de m'attacher les cheveux tout de suite. Le démon que je suivais sentit enfin ma présence. J'aurais pu cacher mon envoi ou être plus discret mais je devais aller faire les courses donc j'ai préféré en finir au plus vite. Il m'a repérée bien vite et sans prévenir a commencé à courir à toute vitesse. J'ai laissé entendre une insulte avant de me lancer à sa poursuite. Je n'aimais pas courir. Pourquoi ne pouvait-il pas simplement s'arrêter et venir me voir ? Très vite nous avons quitté le centre commercial et à mon grand malheur le démon a continué à courir dans les ruelles et sur les toits. Quant à moi, je le suivais avec irritation. La poursuite a finalement pris fin lorsque le démon a sauté d'un toit et, après un roulement, s'est rendu compte qu'il était dans une impasse. Il n'a pas eu le temps de fuir dans l'autre sens car j'avais déjà sauté du toit à mon tour et après un tonneau j'étais entre lui et sa sortie. Je triais mes cheveux du mieux que je pouvais.

« À quoi cette course vous a-t-elle conduit ? Vous pourriez aussi bien vous rendre dès le début. Ce n'était même pas amusant. » Le démon a paniqué un instant lorsqu'il a vu un poignard dans ma main mais s'est un peu détendu lorsqu'il a réalisé que j'étais humaine. Il a retrouvé sa détermination et son courage et a même souri. Je devais admettre que j'aimais cette réaction. C'était mieux que s'il m'avait suppliée. Il aurait eu l'air pathétique. La seconde de panique passée le démon s'est jeté contre le mur sur lequel il a marché comme s'il avait oublié la gravité et a réussi à se placer derrière moi. Il est tombé au sol et m'a lancée un regard de défi avant de s'enfuir. J'étais à bout de souffle. « Sérieusement ? Toujours pas fini ? » J'ai roulé des yeux et j'ai continué à courir après lui. J'aurais dû lui lancer le poignard tout de suite. Dans les films, les gentils s'enfuient toujours quand les méchants parlent trop. Mais il était le méchant. Les ruelles devenaient plus étroites et plus sombres pour une raison quelconque. Quelques démons nous ont regardés passer avec curiosité mais n'ont rien fait pour aider les leurs. Je ne voyais plus les humains. Nous avons dû nous enfoncer dans l'un des célèbres monuments démoniaques. Il y en avait quelques-uns en ville. Bars, restaurants, boîtes de nuit etc où seuls les démons allaient ou très peu d'humains.

J'avais raison. Le démon s'était précipité dans ce qui semblait être une boîte de nuit et je l'ai suivi. Les videurs n'avaient pas eu le temps de se rendre compte que j'étais humain et quand ils ont commencé à m'appeler pour arrêter il était déjà trop tard j'étais divisé dans la foule. Tout comme le démon que je cherchais. J'ai arrêté de courir maintenant très énervé. J'ai toujours tué les démons aussi rapidement et sans douleur que possible même s'ils méritaient souvent de souffrir. Mais cette fois, je m'attendais à être encore plus rapide. J'avais autre chose à faire, je n'allais pas passer la soirée à lui courir après. J'imaginais toutes les manières dont j'allais le torturer même si au fond je savais que je n'allais pas le faire alors que je cherchais autour de lui. La musique était beaucoup trop forte et rythmée à mon goût comme si je devais boire plusieurs bouteilles avant de pouvoir l'apprécier. En plus, il y avait beaucoup trop de monde et surtout de démons. Loukina allait me tuer quand elle allait savoir que j'étais entré dans un endroit démoniaque. J'avais déjà vu quelques personnes se retourner à mon passage alors j'ai continué à avancer. J'ai finalement repéré le fugitif et en me voyant il s'est détourné en s'enfonçant plus profondément dans la foule. J'ai commencé dans sa direction en avançant aussi vite que possible à travers la foule. Je poussais plus d'une personne et je me faisais remarquer, mais je m'en fichais. Tout ce qui comptait, c'était la mission. Le mot a circulé qu'un humain est entré dans la boîte de nuit et que la musique s'est même éteinte, mais j'ai continué à marcher. La foule m'a laissée passer par surprise ne s'attendant pas à voir un humain à cet endroit mais très vite ils ont finalement récupéré et ont décidé de me barrer la route. Une main se referma sur mon bras et je vis rouge. Une seconde plus tard, le démon était au sol inconscient, ce qui a poussé les autres à se jeter sur moi. J'ai réussi à en éliminer beaucoup mais naturellement j'ai fini par être maîtrisé. Après tout, je n'aurais peut-être pas dû entrer.