Lamia gémit. Des rigoles humectaient les bords crénelés et plissés de ses lèvres extérieures qui s’ouvraient sous les mouvements de ses doigts enfiévrés. Des larmes salées coulaient sur le mont de vénus, s’infiltraient dans les sous-bois ombragés de son pubis. Ses doigts errèrent entre les poils, stimulèrent le clitoris puis se glissèrent dans sa cavité humide.
Ses hanches se soulevèrent pour augmenter la pénétration agile et affolante. Elle caressait en même temps son ventre, gourmandait ses seins de caresses, titillait ses mamelons qui devenaient le sommet volcanique d’une activité jouissive.
La veille, Lamia avait perdu sa virginité avec Paul. Elle se remémorait ce moment exceptionnel et s’octroyait un plaisir solitaire dans son lit de jeune fille.
« Lamia ! »
En criant son nom, Paul s’était enfoncé dans son sexe virginal, et cette première intrusion avait provoqué un sursaut de douleur. Il l’avait pénétrée d’un coup, après qu’elle se fut enflammée sous les caresses et lui eut hurlé son envie de lui : « Viens ». Sursaut de douleur suivi d’un plaisir nouveau.
Lamia activait ses mains de plus en plus rapidement, la jouissance venait. Son corps enivré de plaisir s’arquait. Elle étouffa un cri dans l’oreiller à la toile rêche. Sous la grosse couverture en peau de loup, son corps cessa de s’agiter, elle savoura la sensation de béatitude.
Pourtant Paul n’était pas le garçon à qui, selon la tradition, elle avait promis d’offrir sa virginité. Elle avait embrassé et mordu son amoureux, son Valérian, dans le cou jusqu’au sang et avait marqué au charbon noir sa joue gauche d’un « LA » qui voulait dire Lamia. Toujours selon la tradition, le garçon devait rester un jour avec cette marque pour que tout son entourage sache qu’il avait été choisi par une jeune femme pour la dépuceler.
Oui, mais Lamia était comme une braise qui s’enflamme au vent. Nombreux étaient les garçons émus par les charmes pulpeux de cette belle brune à la voix douce et légèrement grave, au regard intense et sauvage. Une constellation de grains de beauté dans la vallée de ses seins achevait de lui donner un charme redoutable. Depuis un moment, Paul lui tournait autour et Lamia était sensible à la chaleur de son désir, d’autant plus que physiquement il l’attirait beaucoup. Elle n’était pas amoureuse de lui à la différence de ce qu’elle ressentait pour Valérian. Pourtant Paul dégageait quelque chose d’extrêmement érotique dans ses regards, ses attitudes. Pour une jeune fille en fleur comme elle, c’était délicieusement troublant et tentant.
À peine sa vie de jeune femme commencée, Lamia avait donc trompé et n’éprouvait guère de remords. Elle avait été remarquablement baisée par un jeune homme expérimenté, elle avait joui comme une folle, elle n’avait pas de regrets d’autant que Paul lui avait promis le secret.
À l’extérieur du lit, il faisait froid. Depuis l’escalier au bois vermoulu, les fumets de la cuisine de sa grand-mère montaient vers sa chambre. D’après les Grands Anciens, à l’époque de l’industrialisation, les gens pouvaient se chauffer à l’électricité, ou au gaz, au fuel… « L’électricité », quel mot magique.
Nicolas la regardait de ses grands yeux verts ou jaunes suivant la lumière du jour et semblait partager ses pensées. Elle avait appelé ainsi son chat car elle habitait rue Nicolas Flamel dans l’ancien domicile de l’alchimiste1 qui appartenait à une époque depuis longtemps ignorée, même des anciens.
« Lamia, descends, on va manger ! »
Lamia s’habilla rapidement d’un pantalon en lin et d’un gros pull qui irritait ses seins et se revêtit de sa doudoune en peau de mouton.
« J’arrive ! »
La jeune fille dégringola de l’escalier et se précipita vers la table. L’âtre tout près la réchauffait, c’était un vrai bonheur.
Sa grand-mère préparait un ragoût de mouton. C’était un plat qu’anciennement on aurait dit arabe mais, bien sûr maintenant que n’existaient plus les divisions, ce mot était censé ne plus avoir grand sens. N’existaient plus aucune nation, clan, ethnie, pays. Depuis la « Guerre Ultime », c’était formellement interdit.
« Dis, grand-mère, c’est vrai qu’avant il existait des machines lourdes en métal qui pouvaient avancer toutes seules sans ânes, ni chevaux, ni bœufs ? Des “voitures” ? »
Sa grand-mère était la récipiendaire d’une longue lignée, les Keshiv, qui avait pour tâche de transmettre la mémoire et diriger la communauté. Malheureusement elle n’avait eu que des fils. Aussi, quand elle avait découvert un matin d’été, Lamia, bébé abandonné et vagissant, sur le pas de la porte, elle s’était dit que la Grande Mère Universelle avait bien fait les choses une fois de plus.
Beaucoup lui prêtaient un talent de prescience et de sagesse peu commune, ce qui imposait un respect et une autorité naturelle. Elle regarda sa petite fille et dit :
« Non, elles n’avançaient pas toutes seules ma chérie… Énergie, tout est énergie… Elles avançaient grâce à une ressource qui n’existe plus : le pétrole et plus tard grâce à l’électricité fournie par des centrales qui elles-mêmes fonctionnaient avec un minerai qui n’existe plus : l’uranium… oui qui n’existe plus… C’est mieux ainsi. »
Lamia l’écoutait, admirative : sa grand-mère était un puits de savoir et d’histoires incroyables.
Sakhia, sa grand-mère, reprit :
« D’après la doctrine des Anciens, sur laquelle est fondé tout notre mode de vie, cette époque était littéralement dominée par le diable2, qui s’y entend en divisions et en petites coupures. Or c’est bien, par exemple, la division poussée du travail qui conduisit l’homme à épuiser les ressources naturelles et qui finit par engendrer une guerre pour la conquête des dernières ressources. C’est pourquoi la division du travail et le progrès technique dans notre société sont interdits. C’est aussi pour cela que nous avons confié le pouvoir politique aux femmes car nous sommes plus près de la nature et de l’Harmonie universelle. »
Comme à son habitude, tout en parlant, sa grand-mère manipulait ses cartes de tarot. Elle en sortit une puis regarda fixement sa petite fille… « Mais même notre société a besoin d’évoluer. »
Lamia regarda la carte qu’avait tirée sa grand-mère : c’était la mort, la lame XIII du tarot de Marseille.
Après avoir mangé le délicieux tajine de mouton, Lamia sortit et se dirigea vers la pointe de l’île de la cité où Valérian devait la rejoindre.
1Nicolas Flamel est un alchimiste de la fin du XIVe siècle.
2Étymologiquement, diable vient du grec « diabolos » qui veut dire division.
Lamia traversait les paysages en ruines de Paris. Tout d’abord la tour St Jacques qui éventrait le ciel bleu telle une lame de poignard à demi-ébréchée quand tant d’autres monuments parisiens avaient connu la ruine. Cet édifice de calcaire blanc était la survivance triomphante d’un passé depuis longtemps révolu qui voyait les différents savoirs théologiques, philosophiques et scientifiques unis. Un passé à l’expressivité fabuleuse qui intriguait par ses figures grimaçantes– les gargouilles, ses symboles mystérieux, ses messages claironnants mais incompréhensibles. Des messages figés dans la pierre dont la patine donnait un charme indéfinissable. Les rosiers avaient envahi le square en contrebas de la tour. Un panneau depuis longtemps dévoré par la rouille affichait encore p&e
Après avoir vu Valérian, Lamia alla examiner le petit moulin à eau qu’elle avait conçu dans un endroit difficile d’accès sur l’Île de la Cité. Un jour, en furetant dans les archives rongées par le temps de la bibliothèque de Polytechnique, elle était tombée sur le schéma d’une bobine électrique. Lamia s’était penchée sur le problème et avait eu l’idée de ce moulin pour recharger des batteries qui allumeraient une lampe. La jeune femme sortit de sa poche une ampoule trouvée dans une réserve d’un magasin puis prit la batterie et la connecta avec des fils en cuivre. Un court instant, dans le soleil couchant, une lumière brilla qui n’était pas celle d’une bougie ni celle de l’astre solaire; puis un grésillement se fit entendre et l’&eacut
La lune voilée par les nuages éclairait son chemin d’une lumière pâle et habillait les recoins sombres de nuances fantastiques. À la faveur de la nuit la raison semble s’effacer au profit d’une émotion venue du fond des âges, et sous la lune tous les décors prennent une autre dimension.Les sphinx du Châtelet dormaient tandis que les gargouilles de la tour St Jacques semblaient prêtes à attaquer la moindre menace sur Paris de leur bouche hurlante.Arrivée chez elle, Lamia trouva son chat en train de miauler.«Qu’est-ce qui se passe Nicolas?»Nicolas courut vers la porte qui menait à la grande cave. Une porte en bois sur laquelle étaient gravés des symboles ét
Assis en tailleur, faisant face à la fenêtre qui donne sur l’orient, Valérian méditait en attendant l’aube nouvelle. Il avait passé une nuit agitée à penser à la trahison de Lamia. Il n’avait pu s’empêcher de l’imaginer en train de baiser avec Paul alors que lui mettait tant d’application à respecter les traditions. En même temps, c’était bien dans le caractère de Lamia de transgresser les règles. Il ne pouvait prétendre l’aimer et à la fois ignorer cet aspect de sa personnalité. Il distingua deux pensées en lui, l’une de basse énergie, qui l’entraînait dans les tourments de l’ego, et l’autre plus élevée qui l’emmenait vers plus de compréhension, d’acceptation.Finalement, il avait do
Le paysage de la cave disparut. Nicolas la tenait par la main, une main chaude et protectrice. Dans ce maelström, elle devait absolument lui accorder toute sa confiance, sous peine de perdre l’intégrité de son corps. Enfin, sa perception retrouva toute sa cohérence.Ils se tenaient en haut d’une colline verdoyante où soufflait un vent doux. Sous son pied, elle sentit un caillou qui la rassura sur la réalité de ce qu’elle vivait. Pour couronner le tout, elle alla vomir dans un buisson tout proche.«C’est normal, ton esprit et ton corps ne sont pas encore habitués, d’autant que là, ce n’était pas toi qui dirigeais la manœuvre.»Tremblante, Lamia jeta un regard dégoûté vers Nicolas Flamel.
Lamia percevait la lumière du jour à travers ses paupières closes et profitait dans sa semi-torpeur de la chaleur des deux corps qui la pressaient. Fameux moments qu’elle avait connus, Lamia n’avait pas envie de rompre tout de suite cet engourdissement bienfaisant.Contre ses fesses, elle sentait le sexe de Stéphane qui durcissait sans vergogne.Les trois jeunes gens s’agitèrent enfin et décidèrent de se lever.«Rhubarbe au petit-déjeuner?», lança Cynthia. Éclats de rire des trois compères.Ils allèrent se baigner dans un étang non loin qui était alimenté par une cascade. Lamia observa avec étonnement une licorne tandis que les jeunes gens autour d’elle n
Lamia écoutait le doux chant de la pluie sur les feuilles. Allongée sur l’herbe, ce matin, elle s’imprégnait de l’odeur de l’humus. Des rigoles d’eau tiède imprégnaient ses vêtements et sa peau.La voix d’Aphrodite lui parvenait lointaine, à travers un brouillard bien réel:«La séduction, ce n’est pas ce que vous croyez jeunes femmes, ce n’est pas arborer des tenues qui laissent entrevoir vos charmes, ce n’est pas vous maquiller de façon à vous faire ressembler à des déesses… La séduction en fait mes chéries passe par la présence à l’instant, par le jeu, par l’attention accordée à chacun des gestes, à l’interaction avec votre partenaire; alors l&rsq
La brume matinale déposait sa froide rosée sur les corps endormis, enroulés dans leurs couvertures. Nexa, Markus, et Valérian s’étaient collés les uns contre les autres pour se tenir chaud. Ils n’avaient pas fait de feu pendant la nuit, pour ne pas être repérés par les reptiliens. Ils approchaient de la zone dangereuse, et la longue expérience des éclaireurs montrait que les extraterrestres étaient très sensibles à la chaleur et pouvaient la détecter sur une longue distance. Ils n’avaient pas réellement dormi pendant que tour à tour l’un d’entre eux prenait son tour de garde. Ils s’étaient relayés ainsi toute la nuit. Dans le ciel obscur, le guetteur pouvait observer les traces lumineuses des vaisseaux reptiliens tandis que les sifflements suraigus venaient briser le murmure de la forê