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Chapitre 1

~𝒞𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇𝑒 𝟣~

Point de vue de Chad

J'enfile mes godasses noires, ainsi que ma veste en cuir. Je passe devant le miroir pour voir l'état de mes cheveux mais la réalité me claque soudain en pleine gueule. Je suis fatigué, épuisé de tout ça. Mes cernes deviennent peu à peu vraiment imposantes et mes yeux sont rouges. Les nuits sont courtes et agitées. Le sommeil, pour moi, est devenu un vrai défi. Je ne passe pas une nuit sans faire de cauchemars, ils sont sans cesse en train de tourner dans ma tête, comme un film. Je me recoiffe vite fait en passant une main dans mes cheveux bruns. Soudain mon téléphone se met à sonner, je lâche un grognement et commence à le chercher au milieu du bordel de cette maison. Au bout de trois sonneries, je finis par le trouver dans un coin de mon lit. La photo de mon père ainsi que son nom est affiché sur l'écran. J'ignore l'appel en voyant l'heure qu'il est.

Arrivé devant l'église, je m'assois sur ma moto et sors une cigarette de mon paquet. Je laisse glisser la cigarette entre mes lèvres et rapproche la flamme sortant du briquet pour l'allumer. Mon regard divague de personnes en personnes. Des personnes s'enlacent pour se consoler, d'autres restes neutres et attendent le début de la cérémonie. Tout le monde est là, même nos anciens amis du lycée. Ils sont tous là pour lui rendre hommage, même des personnes qu'il ne connaissait pas. Tout le monde l'aimait, c'était le genre de mec qui rendait votre vie meilleure. Il était là pour faire le clown, ce n'était pas le genre de gars à chercher les ennuis. Oh non, il redoutait ça. Il voyait le meilleur en nous, et nous encourager pour tout. Jamais il n'a montré une once de chagrin. Il cachait bien trop ses émotions. Pour lui, c'était inutile de se lamenter sur son sort, la vie était trop courte ça. Il a raison, je le sais pertinemment. Mais ça, ce n'est pas ancré dans mon cerveau. Je n'arrive pas à être comme lui. Je l'admire pour son courage, pour ce qu'il était et cela me fait terriblement mal au cœur de voir qu'il nous a quitté.

Voyant que le monde commence à se précipiter vers l'entrée, je décide d'y aller moi aussi. Lorsque je tourne ma tête pour jeter ma cigarette au sol, mon regard se braque sur une jeune femme blonde. Celle-ci sort du côté passager et salue la personne dans la voiture. Mon regard reste fixe, je n'arrive pas à me détacher d'elle et je ne comprends pas. La blonde est vêtue dune longue robe noire, qui ne laisse apparaitre aucun centimètre de sa peau. Soudain, la caisse redémarre et finit par s'en aller. La femme, elle, continue son chemin vers l'église. Elle finit par tourner sa tête vers moi, sentant sûrement mon regard insistant. Mais soudain je percute, je comprends pourquoi j'étais attiré par cette femme. Je la reconnais, son regard ne détrompe personne. Je le sais, c'est elle. Mon dieu, elle est de retour. Alexis est de retour à Chicago. La blonde ne s'arrête pas, au contraire elle continue son chemin et finit par entrer dans l'église.

Toujours figé par son retour, je n'ai pas bougé d'un seul pouce. Mon corps est comme tétanisé, et effrayé. Je n'arrive pas à réaliser que la fille que je cherchais depuis des années se retrouve enfin devant moi, là aujourd'hui. Je croyais même qu'elle était morte et me voilà face à elle. Je regarde l'heure et comprends que l'enterrement va bientôt commencer. Je prends mon courage à deux mains, descends de ma moto et décide d'entrer dans ce lieu catholique. Je me trouve enfin une place, tout près de la grand-mère à mon meilleur ami. Près de l'autel, se trouve un cadre avec une photo d'Andrew d'il y a quelques années, accompagné d'un énorme sourire. A cet instant précis, je comprends. C'est aujourd'hui que je vais lui faire mes adieux. Mon coeur se serre et les larmes menacent d'arriver. Je les ravale aussitôt et essaye de me concentrer. Je n'arrive pas à croire, que c'est terminé, que lui aussi est parti. Je ne peux pas y croire. J'ai passé toute mon enfance et adolescence avec ce clown et dire qu'aujourd'hui on ne se verra plus jamais grandir. Non, il ne me restera que des souvenirs. C'était tout pour moi, il ne me restait plus que lui. Désormais je suis seul. Il ma soutenu après la mort de Kelly et Stella. Il s'est donné corps et âmes pour me remonter à la surface malgré son état. Malheureusement, la Mort est venu le chercher. Un cancer du poumon s'est infiltré dans son corps, et il était trop tard pour le guérir. Il a finit par décéder quelques mois après le diagnostic. Comment je pourrais vivre après tout ça, cela sera quoi mon but ? J'ai tout perdu et je ne mérite pas de continuer ma petite vie. Je ne mérite absolument pas d'être encore sur cette terre, j'aurais dû mourir, moi, à leur place. Eux, ne méritait pas tout ça, non absolument pas. Moi, j'ai fais un tas de choses qui mériterait d'être puni, mais non je suis toujours là et cela me tue. La vie m'a tout enlevé. J'ai perdu les personnes qui m'étais de plus chère et je ne vais pas tenir encore longtemps. Plus les jours passent, plus je ressens ce vide qui me consume. Ce vide, cette tristesse, cette haine, me broient de l'intérieur. Toutes ces émotions me font mal et me détruisent. Elles vont me tuer. Mon heure approche et j'ai bien l'intention de m'en rapprocher bien plus tôt que prévu. Je veux les rejoindre, j'en ai besoin.

Le prêtre arrive et en voyant ça, Nathalia, la grand-mère d'Andrew, me prends la main et me la serre pour ensuite me faire un sourire.

Après que le prêtre ait parlé, les discours commençâmes. Les parents, trop émus par sa disparition, ont décidé de rester assis et de ne pas s'exprimer. Mais maintenant, c'est le tour d'Alexis. Celle-ci se lève du banc, accompagné d'une petite feuille dans sa main. Sa chevelure blonde, est relevé en un chignon bien tiré laissant apparaitre les boucles d'oreilles qu'elle avait autrefois. Andrew lui avait offert pour son anniversaire. Elle s'avance et se met derrière le pupitre en posant la feuille. La blonde s'éclaircit la gorge et observe la photo. Tout en observant Andrew photographié, elle commence son discours accompagné d'une voix tremblante.

"Me voilà à nouveau dans cette ville pour revivre un cauchemar. Mon Dieu, cette ville je la détesterais jusqu'à la fin de ma vie.

Andrew, je tenais à m'excuser pour mon départ, pour l'inquiétude que tu t'ais faite. Ce n'était pas voulu, au contraire. Je suis terriblement désolé de ne pas avoir réussi à revenir te voir, à revenir dans cette maudite ville. Je peux te jurer que j'ai essayé de nombreuses fois mais ça n'a jamais marché. Je m'en veux terriblement si tu savais. Je ne voulais pas te blesser et te décevoir. Mon seul souhait aujourd'hui, serait de te retrouver et de te serrer dans mes bras. Malheureusement rien ne te fera revenir. Rien, nous sommes condamnés à vivre sans toi.

Alexis marque une pause et essuie ses larmes qui perlent le long de ses joues. Elle tourne sa tĂŞte vers nous, toujours en pleure avant de lancer.

Tu devrais voir le nombre de personnes qui sont ici, pour honorer ta mémoire. Tu étais un mec adorable, je n'ai jamais rencontré un homme comme toi. Merci pour tous ses fous rires au lycée, merci pour cette joie que tu m'as transmise, merci pour tout Andrew. Tu as été mon meilleur ami, et jamais je ne t'oublierai. Jamais. Je t'aime."

En entendant sa voix, je me souviens soudain de son léger accent québécois. Durant ces années d'absence, je l'avais complètement oublié mais en l'entendant aujourd'hui cela me réchauffe en quelque sorte le cœur. Je n'en connais pas la raison, mais c'est sûrement grâce aux souvenirs qui me reviennent. Alexis finit par craquer en prononçant ces derniers mots et court vers l'extérieur.

En entendant un énième discours, je décide de m'en aller. Je ne peux plus supporter tout ça, je vais craquer. Mes larmes montent de plus en plus, et je veux rester fort face à lui. Les parents me regardent et me font un hochement de tête. Leurs visages sont couverts de larmes et leurs cernes sont imposantes, ils sont si épuisés. Je reconnais cette douleur, la douleur de perdre son enfant. En pensant à ma Stella, un haut le coeur remonte, je sens ma poitrine se comprimer et une larme couler le long de ma joue. Jai craqué alors que je ne voulais pas. Ce foutu manque me tue, il me consume jour après jour et je suis si épuisé et en colère. Comment un enfant peut-il partir avant ses parents ? C'est inimaginable et totalement illogique. Je veux retrouver ma fille, je veux retrouver mon petit bout de bonheur. Je ferais n'importe quoi pour l'avoir encore une fois auprès de moi, mais ça, c'est impossible. J'aimerai tellement pouvoir la serrer contre moi, sentir son odeur de vanille, entendre son rire. Je veux juste la revoir, la revoir revivre et grandir. Ses petites mains me manquent, son petit corps me manque, ses crises me manques, ses bisous me manquent. Tout ce qui faisait Stella me manque. C'est un vide qui ne pourra jamais être comblé. J'ai perdu ma fille, et j'en souffrirai jusqu'à la fin de ma vie. J'ai envie de vomir. En repensant à tout ça, tous les souvenirs qui remontent, mon ventre se tord.

En arrivant à l'extérieur, je découvre un ciel sombre. Le temps est orageux, des gouttes semblent même tomber. Je descends les escaliers et vois Alexis monter dans la même voiture blanche que tout à l'heure. Ses joues sont recouvertes de larmes et de mascara. Son regard terne finit par recroiser le mien. Elle ne sourit pas, et ne réagit pas en me voyant. Elle ne fait pas attention à moi. Je ne sais même pas si elle m'a reconnu. Il faut dire que depuis le lycée, depuis son départ tout à changer. Je suis comme métamorphosé. Le sport a changé tout mon corps, un piercing s'est rajouté à mon nez, et de nombreux tatouages sont étalés sur mon corps aujourd'hui. En l'observant de loin, lorsqu'elle a prononcé son discours, j'ai pu remarquer quelques changements. Son style vestimentaire à totalement changé. Avant, Alexis n'aurait jamais porté ceci. Alexis aimait les vêtements originaux (beaucoup trop originaux parfois). Elle adorait faire nimporte quoi avec ses tenues, elle trouvait ça marrant. Mais bon, qu'on se le dise très franchement, c'était très moche. D'ailleurs notre style à nous trois, Andrew, Alexis et moi étaient bien ignoble. Oui, vraiment c'est le mot. Nous ne faisions pas trop attention à ce que l'on portait. J'ignore la raison, mais on était comme ça, sans prise de tête. C'est ce qui nous définissait.

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