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La magie de l’inattendu

LA MAGIE DE L'INATTENDU

Djifa, debout à la portière, ouverte, enlève ses vêtements qu'elle dépose sur le siège duquel elle venait de se lever. Elle ramasse ses chaussures enlevées par terre et les met aussi dans la voiture sur le tapis. Elle n'est maintenant que dans son soutien-gorge, et un tanga.

Agbé de l'autre côté de la voiture se déshabille autant. Il se débarrasse de son tee-shirt qu'il laisse contrairement à Djifa, sur le capot. Il tire aussi son Jean pantalon qu'il laisse sur le tricot.

-Voilà, Princesse ! dit-il.

Il passe par devant la voiture et vient à Djifa qui offre à sa contemplation, un magnifique corps. Il ne peut s’empêcher de s’en exclamer :

-Waouh ! Que la nature a fait des merveilles !

Il admire la sublime créature en face de lui et l'harmonie de son corps de rêve qu'elle offre à sa vue. Elle est simplement splendide...

-Allons-y maintenant ! L'eau fraîche nous attend pour notre plus grande relaxation, Divine Princesse, lui dit-il finalement en lui tendant la main.

Djifa est aussi émerveillée par le buste d'Agbé. Il a un beau corps d'athlète pour faire craquer toute femme qui adore la forme divinement taillée de l'homme. Elle fait un petit sourire de rien et lui tend la main à son tour :

-Comme le veut mon bon et beau compagnon de nulle part dont je suis sous son autorité absolue, ce soir, sans pouvoir me faire raison.

Agbé sourit encore à ces mots. Il lui prend la main qu'elle lui tend et ils se dirigent vers l'eau. Sur le bord, il la relâche. Elle y reste. Il descend les pas dans la piscine et l'y invite. Elle le suit sans se faire prier malgré sa timidité encore. Elle descend les pas, puis, se jette dans l'eau à sa poursuite pour lui en avoir envoyé au visage et prendre la fuite à la nage.

Toujours assis dans son salon tel un endeuillé, Dodo laisse libre cours à ses réflexions.

« Où pourrait-elle être sans faire signe de vie et à être injoignable ? Elle ne me pardonnera jamais. Je l'ai poignardée au point de non-retour, bien conscient de sa sensibilité. Au moins, qu'elle fasse signe de vie pour rassurer que rien de fâcheux ne lui est arrivé ; telle est la seule chose qui m'importe. Sinon, comment m'y prendrais-je si un mal lui arrivait ? Ce vieux m'enverrait croupir en taule, en me tenant responsable pour avoir ouvert mon clapet et lancer dans le vide à sa sœur au téléphone que je suis impardonnable. Impardonnable de quoi ? Je m'expliquerais. Même si raison suffisante n'y est pas pour m'écrouer, cet homme me le ferait payer d'une manière ou d'une autre. À moins que je fuie ce pays. »

Son portable se met à sonner. Il saute dessus :

-Allô !

Abla depuis leur salon avec son père.

-Oui, Allô ! Tu as eu écho de ma sœur ?

-Dis-moi, tu en as eu, s'il te plaît, Abla ? Rien de mon côté...

-Écoute-moi bien, je ne sais pas ce que tu as fait à ma sœur pour qu'elle se résigne à rester dehors. Mais si quelque chose lui arrive, crois-moi, je te le ferai payer amèrement.

-S'il te plaît, Abla, je te comprends ! Mais ce n'est pas l'heure des menaces pour que tu m'en produises aussi à la chinoise comme papa. Dis-moi si vous avez de ses échos, je t'en conjure ! La pression, j'en ai de trop dans ma petite tête déjà.

-Elle venait d'envoyer un SMS et est redevenue du coup injoignable. À cause de je ne sais quoi tu as fait à ma sœur, elle passe sa nuit dehors pour la première fois, sans même dire où elle est et ce qu'elle a. Croise les doigts qu'elle aille bien. Sinon, tu ne me croiras pas capable.

Elle raccroche. Dodo est quant à lui soulagé, qu'ils ont de ses nouvelles maintenant, et qu'aucune persécution ne lui pèsera plus dessus. En tout cas, pas pour le moment.

-Ouf ! soupire-t-il, ils ont de ses nouvelles. Si une fille grande comme elle décide de passer la nuit dehors parce qu'elle a pour raison avoir vu son partenaire dans le lit avec une autre femme, c'est son choix. Elle se porte bien pour faire signe de vie aux siens, Dieu merci alors ! Elle n'a alors aucun mal pour me faire endosser la responsabilité. Ce vent passera et la vie ne va quand même pas s'arrêter. Elle va continuer son courant normal. Après tout, je suis un homme non ? Je m'inquiétais même pourquoi ? Maintenant, que les menaces pleuvent et aillent se loger où elles veulent...

À la piscine, Agbé et Djifa sont tous heureux. Ils se plaisent agréablement bien. Comme des amoureux. Et des vrais. Des habitués qui s'adonnaient depuis à de telle sortie de romantisme dans une ambiance aussi sensuelle.

Nageurs nocturnes, l'eau est bien fraîche, bien douce, sous ce ciel, radieusement étoilé, pour les accueillir. De délectable moment, ils se pourvoient. Djifa se détend complètement : elle en avait vraisemblablement besoin. Et pareille à une fatidique coïncidence, Agbé qui traverse aussi le même abîme qu'elle, s'est retrouvé sur son chemin pour mieux la comprendre et l'emmener à cette merveilleuse et rédemptrice partie inopinée.

Il se plaît aussi profondément, Agbé, avec une certaine béatitude. Djifa lui est une félicité au plus merveilleux des cieux qui a croisé son chemin. Il est bienheureux.

Alors que Djifa se réjouit, elle, profitant de ce délicieux moment d'être tombée sur quelqu'un de bon, telle une providence sur son chemin cependant que le ciel s'écroulait sur son monde, pour égailler un temps peu son malheur et lui faire oublier son fiel, elle ne peut tout simplement pas imaginer un seul instant, ce qu'elle apporte à ce bienfaiteur, son ami, à être en sa compagnie.

Pour Agbé même, il reçoit de Djifa, tellement de choses incroyables plus qu'il ne lui en donne. Il ne s'attendait pas à une telle délectation, à un tel laisser-aller dans la nébulosité de son monde. Cette jeune femme guérit tellement ses blessures profondes : cet état d'âme pénible, qu'il cache à sa famille, pour le traîner, comme un lourd fardeau fatal duquel il ne pourra point se débarrasser, en tenant bon la rampe, solitairement...

Pour lui, que dame Nature peut avoir pitié de lui pour être si juste et si merveilleuse, lui envoyant, providentiellement sur son chemin, une fée pour éteindre en un temps record les bûchers de son tréfonds ! Elle le sort de sous les débris de son univers affaissé. Elle le comble de bonheur. Elle lui apporte à profusion, un confort qu'il n'a jamais ressenti auparavant !

Il ne s'était pas autant senti heureux et comblé, même le jour de son mariage, ni à sa nuit de noces. Rien de spécial, cette jeune femme qu'il venait de rencontrer, et de la pire manière, lui fait certes, pour lui procurer de tels sentiments inouïs. Mais, juste la toucher, être à ses côtés, conférer avec elle, rire aux éclats ensemble, entendre sa voix, sentir sa peau raffinée glisser contre la sienne qui fourmille aux contacts comme ne voulant plus s'en débarrasser, le dotent d'une sensation indescriptible. Une tranquillité absolue d'esprit. Un épanouissement sublimé de l'âme. L'émotion est grande, l'évasion est subtile. Djifa, est un salut.

En tout cas, chacun est le salut de l'autre. Frénétiquement, ils poursuivent leurs amusements dans la douceur de l'eau.

Agbé prend Djifa au dos et nage avec elle.

Djifa se détache de lui et lui envoie de l'eau au visage.

Agbé répond à sa provocation. Il lui en envoie aussi à son tour.

Ils se font face tous les deux, et s'envoient l'eau au visage, se bidonnant de leurs taquineries à oublier le reste du monde et à se concentrer sur l'instant salvateur. Ils en profitent au maximum.

Les jets d'eau d'Agbé deviennent de plus en plus forcenés. Ils font reculer Djifa qui se débat aussi de toutes ses forces, toujours en se poilant tous les deux.

Agbé la domine toujours, il la poursuit, de plus belle. Entre la force physique de l'homme et celle d’une femme, il y a bien un grand fossé.

Djifa continue de reculer encombrée avec ses esclaffements joviaux à se plaire dans l'eau avec son compagnon, et se voit stopper à la paroi de la piscine juste près des pas.

Agbé vient se coller à elle.

Ils arrêtent leur jeu d'un coup. Qu'est-ce qui leur arrive là ? Ils se regardent dans les yeux, attirés tous les deux subitement par quelque chose de sensationnel qui leur est très unique. Réciproque.

Leurs lèvres se rapprochent en frissonnement. Leur cœur chantant l'ineffable instant. Les poils de leur corps se hissent comme s'ils s'appelaient à se joindre les uns aux autres, captivés par le même sentiment et leurs corps se magnétisent encore plus. Les haleines s'accélèrent pendant que les lèvres vont lestement plutôt les unes aux autres, les yeux fermés.

Elles se rapprochent. Elles se rapprochent. La volupté bat son tambour..., et elles se rapprochent. Leurs lèvres. Elles se touchent. Elles commencent à se déguster, posément, délicatement, les yeux toujours fermés, dans un rythme harmonieux. La magie de l'inattendu.

Djifa, à peine quelques coups de lèvres tendres avec cet inconnu ami de ce soir, et lui vient en boucle à l'esprit, la scène de l'après-midi : son fiancé au lit avec une autre femme.

Elle se détache soudain d'Agbé, avec ce choc encore revenu et sort précipitamment de la piscine. Elle va ramasser ses effets dans la voiture, et se précipite hors du parc en larmes. Aussi, avec de la culpabilité en elle d'avoir cédé aussi facilement face à un inconnu sous un coup de tête comme une fille frivole ; chose qui n'est pas de sa nature et qu'elle n'a jamais faite auparavant. Quand le désarroi pousse à l'extrême ! Ne dit-on pas que, celui qui se noie s'accroche désespérément à tout ce qui se retrouve à l'atteinte de ses mains sans s'en rendre compte ? Et les mœurs même font fi de leurs prix pour se parer des instants en face !

Agbé reste interloqué par le geste brusque de Djifa. Il ne revient en lui que quelques secondes plus tard pour sortir de l'eau à sa poursuite. Hélas, Djifa a disparu dans la nuit sans qu'il ne la sente nulle part. Juste quelques secondes de stupeur et il n'a pas su la rattraper. Il devient très furieux, il s'en veut. Passant les mains au visage, il se dit :

-Je ne l'aurais pas dû..., merde ! Elle me prendrait pour un profiteur. Et c'est un tel personnage, vil, je suis, en l'embrassant pour la pousser dans le vide encore cette nuit, alors qu'elle avait juste besoin d'attentions et d'affections pour sortir de ce gouffre abyssal. Oh, non ! Comment n'ai-je pas pu me contrôler face à une désespérée ?

Il reste devant le parc à s'accuser à tort et à raison, anxieux, nerveux, comme pour voir sortir d'un coin, la Djifa.

La nuit a bien avancé déjà et tout est calme, signalant que les âmes ont quitté les corps pour ne laisser que des dépouilles. Elles sont allées à l'évasion, reviendront les pénétrer à l'orée du jour.

Abla sort de sa chambre, en robe de nuit. Elle perçoit étonnée sous les lumières faibles, leur père toujours dans le salon.

-Papaaaa ! Tu es toujours ici ? l'approche-t-elle pâlement. Va te coucher, s'il te plaît ! Tu t'es privé de nourriture et tu te prives du repos aussi ?

-Comment veux-tu que j'aille au lit et être tranquille, ma fille ? Ma fille est au dehors, je ne sais pour quel motif, je ne sais dans quelle condition et où. Comment pourrais-je dormir, dis-moi ?

-Je sais, mais il faut se tranquilliser, papa ! Rester ici et te punir ne va pas changer les choses ou la faire rentrer cette nuit. Au moins, elle a fait signe de vie. Et on sait que rien de mal ne lui est arrivé. Alors, lève-toi et va te coucher pour moi, mon papounet !

-Tu ne comprends pas, Abla. Tu ne comprends pas, ma fille ! Vous êtes tout ce que j'ai de plus précieux et c'est une partie de moi perdue quelque part dans la nature cette nuit comme ça sans que je n'aie la force de la retrouver pour me compléter.

-Bien sûr que je comprends. Comment ne le pourrais-je pas ? Tu es notre seule maman depuis toutes ces années et nous, tes épouses. Alors, comment ne pas comprendre ? Je comprends, mon papa. C'est pourquoi je te prie d'aller te coucher pour moi. Dagan va rentrer saine et sauve demain et on saura ce qu'il y a.

Son papa abasourdi dans le divan, elle lui prend un bras et l'amène à se lever en le consolant.

Le père se lève timidement, la fille le conduit à sa porte avant de le laisser. Elle va chercher à la cuisine, un verre d'eau pour lequel elle est sortie. Puis, de retourner dans sa chambre.

Monsieur AFATODJI Nubukpo (papa Djifa), cinquante-quatre ans, entrepreneur bâtiment, technicien plombier de formation universitaire : forage, fosse septique, etc., et topographe, a élevé seul, ses filles Abla et sa grande sœur Djifa depuis que Abla avait huit ans et Djifa treize, à la mort de leur maman. Aujourd’hui, elles ont vingt et vingt-cinq ans.

Depuis la mort de sa femme, Nubukpo n'a plus cherché à refaire sa vie et à s'engager avec une autre femme, de peur qu'elle ne vienne maltraiter ses enfants si précieuses pour lui, que sa femme bien aimée a laissées derrière elle, à sa charge. Alors, il s'est consacré uniquement à les élever seul. Elles sont sa seule joie, et ses amies avec lesquelles il passe plus de temps ensemble. Et aujourd'hui, il a deux grandes filles ; deux femmes déjà et qui font sa fierté...

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