Chapitre 5

********** Quelques mois plutard **********

Après une dure journée de travail, Ahmadou alla à la buvette habituelle qu’il avait l’habitude de fréquenter, ainsi que ses connaissances Benskineur dont Batcho, celui duquel il était le plus proche. Ils commandèrent à boire et se mirent à causer comme à l’accoutumée…

-mais je dis hein Ahmadou… comment va ta femme ?

La question attira l’attention de tous ceux qui étaient présents…

-que Ahmadou est déjà marié ? demanda l’un d’eux.

-ékié vous jouez ? le gars vit même avec elle… elle est d’abord brune ! répondit Bacho, mort de rire.

-petit frère, tu es allé ramasser une fille brune où ? noir et sale que tu es ?

Ils intriguèrent Ahmadou durant de longues minutes à propos de sa nouvelle situation, avant de les laisser tous les deux lorsque leurs bouteilles à eux furent vides.

-tu vas me présenter ta femme quand alors ? il faut quand même qu’elle voit ton dur combi… questionna Bacho.

-ah, on va voir ça… pour le moment on a nos problèmes à gérer…

-gars je demande hein… tu dis qu’elle veut aller à l’école et que tu es prêt à payer pour ça ?

-oui non ?! pourquoi pas ? moi je veux qu’elle soit bien…

-et tu as pensé aux retombées ? demanda-t-il encore entre deux gorgées de bière.

-quelles retombées comme ça ?

-gars si j’étais toi hein ?! je lui donnais plutôt le capital, même 50 mill comme ça, elle fait le commerce, je l’inscris dans une réunion où elle peut côtiser… c’est moins cher et moins risqué…

-donc c’est risqué de l’envoyer à l’école ?

-franchement mon frère ! tu connais même les femmes ??? si tu l’envoies à l’école et qu’elle tente de percer, gars tu es mort ! tu ne connais même pas les femmes !

-non gars, la petite fille là n’est pas comme ça !

-hahahahaha !!! tu sais ça comment ? c’est écrit sur son front ? tu vas même wanda qu’elle va te ndem (laisser) quand elle sera bien. Ou alors si elle reste avec toi, elle va te mâter !

-gars arrête de raconter les faux trucs ! je te dis que je la connais, elle n’est pas comme ça ! moi je veux même qu’elle perce, comme ça elle va nous élever !

-héééhaaaaa !!! je n’ai jamais vu un gars naïf comme ça ! ngueuh élever ! moi j’ai mon oncle hein, il est policier. Sa femme est commissaire alors que lui il est encore inspecteur.

-ah bon ?

-ouuuiiiii !!! ils se sont connus en formation, mais quand ils ont commencé à travailler, elle a fait le concours interne des commissaires, elle a eu… gars je te dis que nous les membres de sa famille on ne part plus là bas ! le gars n’a plus son mot à dire… elle est plus côtée et plus puissante que lui ! il va dire quoi ?

-gars moi je fais confiance à ma go ! je sais qu’elle n’est pas comme ça, elle a un bon cœur !

-ahhh… okay, moi quoi ? on fait encore une tournée ?

-non gars il faut que je rentre ! j’ai déjà bu deux, c’est suffisant.

-hummmm le gars marié ? tu dis que tu fais comment pour la côtisation qu’on va lancer là ?

-c’est encore combien là le mois ? demanda-t-il

-50 mill…

-hummm… okay, en tout cas je vais voir !

-demain à 17h on se réunit chez moi pour le tirage au sort. Donc si tu es partant, sois là !

-okay frère ! bonne nuit !

Ahmadou rentra rapidement retrouver celle qui était désormais sa petite amie. Il se gara devant la chambre et entra. L’ampoule était éteinte et elle était couchée…

-Boni c’est comment ?

-…

-c’est quoi ? tu dors ?

Lorsqu’il alluma l’ampoule, il se rendit compte qu’elle était entrain de pleurer silencieusement. Il s’assit à côté d’elle et se mit à écraser ses larmes avec ses doigts.

-bébé pourquoi tu pleures ? dis moi…

-je n’ai pas eu mon concours !

Il comprit automatiquement pourquoi elle pleurait… elle avait posé tous ses espoirs sur ce concours, mais malheureusement il lui était passé entre les doigts.

-c’est pas la fin du monde ! ne pleure plus ! tu es encore jeune, tu pourras le faire l’année prochaine !

Bonita ne répondait pas, elle se contentait juste de pleurer à chaudes larmes. Elle était de ceux là qui n’étaient pas habitués à l’échec… elle avait horreur de l’échec…

-l’échec c’est important dans la vie hein… mais c’est pas parce que tu as échoué que tu vas baisser les bras ! je suis sûr que Dieu te réserve autre chose…

-…

-tu as même mangé ? questionna-t-il.

-non, j’ai pas faim !

-hummm… là on ne va pas s’entendre ! moi je veux que tu manges… stp ! tu peux faire ça pour moi ?

-je vais essayer… répondit-elle à peine.

-okay, je pars me laver après on part chercher ce qu’on va manger !

Ahmadou se changea et alla se laver… à son retour de la douche, Bonita était déjà assise sur le lit. Ils se rendirent tous les deux sans un cafétéria où ils passèrent la commande de ce qu’ils allaient manger.

-quand j’aurais l’argent, je vais bien me saper et je vais t’amener dans un restaurant… il faut qu’on sorte plus souvent !

-okay !

Les réponses de Bonita étaient sèches, mais il comprit qu’elle n’était pas dans son assiette.

-en attendant peut-être l’année prochaine pour refaire le concours, tu peux aller à l’université ? demanda-t-il.

-ah, c’est la seule possibilité maintenant…

-okay ! je vais payer ça dans quelques jours…

-okay… j’irai donc à Ngoa demain pour me renseigner, pour savoir comme se passe l’inscription.

-voilà ! ne te laisse pas abattre… okay ?

-okay !

Une fois que leur commande leur fut remise, ils rebroussèrent chemin…

Le lendemain, Ahmadou sortit pour travailler, laissant à Bonita l’argent de transport pour sa rendre à l’université.

Elle était mal à cause de l’examen qu’elle n’avait pas eu, mais elle était contente de l’ange que Dieu avait mis sur son chemin. Après avoir fait les travaux, elle courut à l’université et après avoir pris les renseignements, elle tomba sur une de ses camarades de la classe de terminale qui passait par là. Elles avaient fait la classe de terminale sur le même banc…

-Bonita !! c’est comment ? ça fait un bail hein… cria-t-elle.

-oui ça va !! tu fais quoi ici ?

-je suis venue voir ma mère… je suis entrain de rentrer ! quand les résultats sont sortis, je t’ai même cherché chez toi, ta tante m’a dit que tu as voyagé ! tu es revenue quand ?

-ah je suis là depuis quelques mois… répondit Bonita, embarrassée.

-accompagne moi alors au glacier…

Elles se rendirent tous les deux à un glacier qui était à proximité et elles commandèrent des glaces…

-sinon, comment se passe ton après bac ? demanda-t-elle à Bonita.

-ah… j’ai fait le concours de l’ENS mais je n’ai pas eu… donc du coup je suis obligée de me préinscrire à Ngoa en attendant l’année prochaine pour retenter.

-wouèèè… assia pour ton concours !

-merci Olive ! et toi, ça se passe comment ?

-je n’ai pas fait de concours… on m’a inscrit à l’école ci… répondit-elle en lui tendant la brochure d’une école privée de formation professionnelle.

Elle parcouru les pages… les formations étaient intéressantes, mais le coût était élevé. Elle rêva même durant quelques minutes et revint très vite en elle.

-c’est une bonne école ! ils ont de bonnes formations !dit-elle en lui rendant la brochure.

-non tu peux la garder… mais tu peux pas demander à ta tante de t’y inscrire ? comme ça on sera deux, c’est plus motivant !

-hummm… je ne pense pas qu’elle aura les moyens ! en tout cas, je vais quand même lui demander !

-fais donc ça !

Elles restèrent à causer durant environ 1h jusqu’à ce que Bonita rentre finalement. Elle trouva Ahmadou qui était couché…

-ah tu es déjà là ? questionna-t-elle.

-oui je viens d’arriver ! je me repose unpeu parce que je vais travailler dans la nuit !

-aannnhhh okay… mais ton travail de la nuit là moi je n’aime pas trop ça… c’est dangereux !

-ah même en journée il y a le danger ! on sort seulement et on demande à Dieu de veiller sur nous !

-vraiment !

-c’est quoi que tu as en main là ? demanda-t-il en pointant la brochure du doigt.

-ah c’est le prospectus d’une école là que mon amie m’a donné.

Elle lui donna le prospectus et il se mit à lire…

-mince c’est cher hein… première année 550 mille ? on apprend seulement à voyager la nuit là bas ?

-hahahahaha !!! ne me fais pas rire Ahmadou… ça ce n’est même pas cher. On était venu nous donner les fiches d’un école là… la plus petite pension c’était 2 millions…

-yeuuuye !!! que c’est quoi ? pardon…

Il lui remit le papier et se coucha. Bonita se changea et se coucha auprès de lui… environ trente minutes après, il l’interpella encore…

-je dis hein Bonita…

-oui chérie…

-ça te plairait d’aller dans l’école là ?

-laquelle ? Ngoa ? est ce que j’ai le choix ?

-non pas ça… l’autre ci…

-hummm… je pense que ça plairait à tout le monde… c’est une bonne école, ils offrent de bonnes formations… seulement que c’est cher !

Il resta encore pensif et très silencieux… puis il se leva et s’habilla…

-pourquoi tu pars tôt comme ça aujourd’hui ? demanda sa copine.

-je vais d’abord arriver chez quelqu’un pour faire un truc.

-okay bébé sois prudent hein…

-oui chérie t’inquiète !

Il sortit après lui avoir remis 500 frs pour manger. Il n’y avait ni téléviseur, ni radio, ni téléphone pour aider Bonita à ne pas s’ennuyer. Les nuits où Ahmadou travaillait, elle avait l’impression qu’elles étaient plus longues que la normale, donc pour passer le temps, elle chantait les louanges à Dieu. C’était une manière pour elle de le remercier car malgré tout, les choses allaient dans sa vie mieux qu’elle-même ne l’espérait. Elle chanta jusqu’à ce qu’elle s’endorme finalement.

Elle fut réveillée le lendemain par Ahmadou qui était rentré, tout souriant…

-chérie c’est comment ? tu as bien dormi ? demanda-t-il

-oui oui…

Il était même rentré avec une bouteille de jus pour elle… il la lui tendit…

-prends, je t’ai gardé !

-merci bébé !

-j’ai une bonne nouvelle pour toi…

-laquelle ? dit-elle, très curieuse.

-tu pourras aller à l’école là… je vais payer !

Son cœur s’arrêta de battre quelques secondes… elle ne s’y attendait pas ! elle était à la fois heureuse et curieuse de savoir où il allait ramasser cette somme là…

-tu vas payer ça comment ? explique moi !

-en fait j’ai intégré un cotisation là… je bouffe le premier, donc chaque année je pourrais avoir ta pension complète !

Elle était vraiment heureuse… mais elle se sentait gênée…

-non, je ne veux pas que tu fasses ça ! c’est trop ! je vais aller à Ngoa comme prévu et je vais refaire les concours l’année prochaine !

-non écoute… moi je veux que tu ailles là bas ! tu sors, tu trouves le travail et tu nous sors de la galère ! accepte stp !

-non, je ne peux pas… sérieux ! c’est trop !

-je te promets que ça ne me dérange même pas ! c’est juste pour trois ans… on serra la ceinture et on voit ce que ça donne ! je sais que tu as envie d’y aller, pourquoi tu veux refuser ?

Bonita éclata en sanglots et tomba dans les bras d’Ahmadou… elle était vraiment bénie… Dieu était avec elle…

-Ahmadou je ne sais même pas comment je vais pouvoir te remercier un jour ! je t’aime très fort !

-pour me remercier, ne me déçois pas ! sois la meilleure là bas !

Elle se leva et alla fermer la porte à clés… ensuite elle se jeta sur lui et ce fut le début d’une longue partie de jambes à l’air.