CHAPITRE .02

     Alyssa

Je rêve ? Je divague ? Non, impossible. Je viens à l'instant de me pincer les joues comme une idiote et cette scène est bien réelle. Les deux inconnus de la bibliothèque sont dans mon salon à discuter à mon propos visiblement. Depuis quand on se connaît ? Enfin, non je veux plutôt dire, depuis quand ils me connaissent ?! En plus de ça, ils semblent connaître ma mère vu qu'ils l'appellent par son prénom.

Remise du choc de me voir débarquer sans prévenir, ma mère s'approchait alors de moi en tapotant doucement l'hématome que j'avais à la mâchoire. Je ne manquais pas de grimacer légèrement face à la douleur.

«Ma puce, il faut mettre un peu de glace dessus... Tu vas mieux dis-moi?»

«Oui ça va un peu mieux. Maman, j'aimerais que tu me répondes plutôt que de faire comme si de rien n'était. Tu peux m'expliquer pourquoi ces deux inconnus sont chez nous et pourquoi vous étiez entrain de parler sur moi et de tout un tas de trucs dingues ?» Je la fixais sérieusement, m'attendant à ce qu'elle me donne ce que je voulais entendre.

«Alyssa... Ma chérie, je... C'est compliqué. Et je ne pense pas que tu supporterais d'apprendre la vérité maintenant. On ne pourrait pas en parler une autre fois ?... Crois-moi, ça vaudrait mieux que tu fasses comme si tu n'avais rien entendu.» Murmurait-elle en prenant mes mains, les serrant légèrement.

«Je crois que le peu que j'ai entendu m'a déjà montré un petit aperçu. C'est quoi ces histoires d'Académie, de grâce perdue ou je ne sais quoi d'autre ? Vous travaillez sur le scénario d'un nouveau film ou ?»

Ma mère relâchait un petit soupire tandis qu'elle me faisait signe de m'asseoir sur le canapé. J'étais vraiment décidée à savoir de quoi elle parlait. Les deux autres convives prenaient place sur les deux fauteuils face à nous. Très clairement, je n'arrivais pas à comprendre pourquoi ils étaient ici et pourquoi ils semblaient en avoir après moi. Dans tout les cas, ils restaient muets comme des carpes pour le moment. Tant mieux. Si je devais découvrir quelque chose, je préférais que ce soir ma mère qui me l'annonce plutôt qu'eux. Bien que j'étais très loin de me douter de l'ampleur des choses...

«Tu risques sûrement de me prendre pour une folle mais je te demande de m'écouter. Ce que tu vas entendre va te paraître irréaliste mais c'est vrai. Tout est vrai. Je ne te mens pas bien que je sais que tu aimerais que ce soit le cas. Crois-moi, je suis désolée. J'aurais préféré te garder loin de tout ça pour toujours mais mon passé me rattrape plus vite que prévu. Il faut croire que le moment est venu. Promets moi que tu m'écouteras jusqu'au bout.»

«D'accord. C'est promis maman.»

J'avais répondu avec un léger froncement de sourcils. Bizarrement, j'avais peur. Peur de quoi ? Je ne sais pas. Les paroles de ma mère ne m'avaient pas vraiment inspiré confiance. A l'entendre, le sujet semblait très grave et d'une importance capitale. A vrai dire, je m'attendais à tout niveau révélation. Et pas forcément à des trucs tout roses voyez-vous. Ma mère inspirait alors profondément avant de commencer son récit.

«Je suis en réalité un ange descendu sur Terre. Oui, ça existe ma chérie. Les anges sont bel et bien réels. Je suis arrivée ici il y a environ vingt ans maintenant. J'étais jeune, dynamique, obéissante et en quête d'aventure à l'époque. Le soldat parfait pour le Paradis comme on dit. Alors on m'a envoyé ici pour trouver quelque chose durant l'une de mes missions. Quelque chose qui saurait nous débarrasser d'eux. De ces démons qui tentaient d'assiéger notre royaume. C'était une mission très importante et on comptait beaucoup sur moi pour la réussir. Mais malheureusement, j'ai échoué. Je suis tombée amoureuse de ton père. Je l'aimais et j'étais prête à tout pour lui. J'ai tout abandonné pour rester avec lui et les forces Supérieures n'ont pas apprécié mon geste. Les Anges n'ont pas le droit de tomber amoureux d'humains. C'est strictement interdit car c'est bien trop dangereux. J'ai été punie pour cette sorte de trahison et je me suis cachée pour pouvoir vivre en paix avec vous tous et fonder ma propre famille. Malheureusement, aujourd'hui, il semblerait que ce calme ne soit plus aussi serein qu'il l'était auparavant. Voilà, c'est la vérité Alyssa...»

Silence. Une nouvelle bombe venait d'exploser. On n'entendit plus aucun bruit pendant au moins cinq bonnes minutes. J'essayais d'analyser le maximum d'informations. Bien trop à mon goût. Je ne comprenais rien. J'avais tout écouté sans jamais l'interrompre comme elle me l'avait demandé mais dans ma tête des milliers de questions apparaissaient et étaient prêtes à être expulsées d'une minute à l'autre. Je me levais alors brusquement en prenant un air sévère. Mince. Mauvaise idée. Mes tournis reprenaient rapidement le dessus sur moi. Je me rasseyais rapidement en tentant de discerner le vrai du faux dans toute cette mascarade. Ma mère était-elle droguée ou faisait-elle partie d'une secte ? Je n'y comprenais strictement rien et ça m'inquiétait assez.

«Allons maman c'est une caméra cachée c'est ça ? Vous me faites une blague en faite ! Ah ah c'est très drôle je suis morte de rire ! ... Maintenant j'aimerais bien savoir la vérité. C'est à Vanessa qu'il faut faire ce genre de blague, pas moi. Je suis quand même assez sensée pour savoir que toutes ces choses n'existent pas.» Je lançais un petit rire nerveux, regardant autour de moi à la recherche d'une quelconque caméra.

«Ce n'est pas une blague Alyssa. Ta mère t'a dit la vérité. Nous sommes venus ici te chercher. Nous avons besoin de toi. Tu es un ange jeune et c'est parfait pour que nous puissions t'entraîner et ainsi combattre les forces du Mal. Nous avons besoin que tu rejoignes nos rangs.»

Mes yeux venaient de se déporter sur la fille. Elle venait de parler pour la première fois depuis que j'étais là. Sa voix était douce comme le bruit de l'eau coulant d'une source. Était-elle un ange elle aussi ? Elle en avait l'apparence dans tout les cas avec son aura à moitié angélique. Bon sang, j'avais l'impression d'être devant une sainte tant elle me paraissait innocente. Je la regardais alors fixement, fronçant légèrement mes sourcils, une fois de plus.

«Je crois que vous faites erreur. Je ne suis pas un ange ou quoi que ce soit. D'ailleurs ça n'existe pas. Je suis tout à fait banale. Tout comme vous tous ici.»

«Tu ne sembles pas comprendre ce que nous essayons de te dire. Notre Père a fini par pardonner ta mère malgré ses fautes mais il reste ce qu'il en est. Elle nous a trahi une fois. Et maintenant, tu te dois de venir avec nous pour devenir l'un de nos soldats. C'est une manière de racheter les fautes d'Émilie. C'est assez injuste nous le savons mais nous avons besoin de toi dans nos rangs. Et puis, si ta mère n'était pas un ange comment est-ce que tu pourrais expliquer plusieurs choses à son sujet ?»

Cette voix, je la connaissais. J'avais totalement oublié ce détail pendant quelques minutes. Le regard fixé sur l'homme, je le détaillais longuement. Il avait beau être charmant à tomber, je n'avais pas vraiment aimé sa façon de me parler. Mais malgré tout, je me radoucissais immédiatement. C'était lui. Sa voix, son odeur qui me parvenait jusque là. L'homme qui m'avait sauvé la veille de mon agresseur. Et bien que j'essayais, je ne pouvais pas lui en vouloir. Du moins, pas complètement. Je prenais néanmoins un air faussement dur pour ne pas craquer.

«Désolée mais je ne vous crois pas. A mes yeux, vous semblez juste être deux fous sortis d'un asile ou envoyés par une secte pour me recueillir parmi vous. Je ne veux pas rejoindre votre académie ou quoi que ce soit. Et ce, même si vous m'avez sauvé hier. Maintenant, maman j'aimerais que tu les fasses sortir de chez nous j'aimerais me reposer après ma dure soirée d'hier. Au revoir.»

Un silence pesa dans le salon pendant quelques minutes. Visiblement, mes propos n'avaient pas forcément plu aux deux inconnus. Tout particulièrement au garçon qui avait froncé ses sourcils d'un air dur. Toutefois, la fille avec lui l'apaisa immédiatement en posant sa main sur la sienne. L'effet fut immédiat. N'en disant rien, je lançais un regard à ma mère. Comprenant que je ne voulais pas attendre d'avantage, elle soupira et se releva afin d'accompagner les deux dehors. Ceci fait, elle venait me retrouver dans le salon.

«Ma chérie je...» Commençait-elle d'une petite voix avant que je ne l'interrompe soudainement.

«Maman, je ne sais pas du tout si ce que tu m'as dit est vrai ou non. Très honnêtement, j'aimerais que tu me racontes des bêtises mais je sais que quand tu prends ce genre d'expression c'est que tu es sérieuse... Mais avoues que cette histoire est complètement folle !» Lançais-je finalement en baissant un peu mon visage.

«Alyssa... Je sais que c'est encore dur pour toi à croire. Je n'ai jamais voulu t'en parler car je savais qu'un jour ou l'autre on irait me retrouver. Je ne te force à rien parce que je sais absolument que tout cela te paraît irréaliste ces histoires d'ange et de démons. Mais crois-moi, je suis tout à fait sérieuse. Tu es ma fille et par conséquent tu as hérité de mon sang.»

Mes yeux se relevèrent vers elle. J'avais beau essayer de me convaincre que tout cela était faux, je ne pouvais pas. Les yeux de ma mère me faisait clairement comprendre que tout était vrai. Vous imaginez vous apprendre que le monde n'est pas seulement composé d'être purement humains ? Les anges n'étaient que des histoires pour moi. Et toute ma réalité venait à l'instant de s'écrouler devant moi.

«Mais alors ça veut dire que... Steve en est un aussi ? Ils ne sont pas venus pour lui j'espère ? Enfin, si toute cette histoire est vrai bien sûr...»

«Non, ils n'ont rien contre lui. Ils ne veulent que toi comme tu es l'aînée de la famille. Et ils m'ont dit qu'il avait un potentiel moins grand que le tient. Mais je pense que si tu ne les rejoins pas ils demanderont à ce que ce soit ton frère qui les rejoigne. Histoire de te forcer à venir avec eux. Bien évidement, ils ne lui feront rien si je m'y oppose fermement.»

«Maman je ne comprend rien. Pourquoi est-ce qu'ils sont venus pour moi ? Ils ne pouvaient pas nous laisser en dehors de tout ça ? Nous laisser vivre dans toute cette ignorance ?» Je soupirais longuement, enfouissant mon visage dans mes mains.

«Je suis désolée ma puce c'est de ma faute. Je suis tellement désolée... Mes origines vous font de la peine et vous causent du tort...» Elle soupirait faiblement, serrant les points.

Je repensais alors soudainement aux paroles de l'homme de tout à l'heure. Il avait évoqué des choses à propos de ma mère. Des choses que l'on ne pouvait pas expliquer. Je la regardais alors, prenant ses mains.

«Maman,je veux que tu m'expliques quelque chose qu'a dit le garçon tout à l'heure. Quelles sont ces choses que l'ont ne peut pas expliquer à ton sujet ?»

Ma mère relevait son visage vers moi. Ses yeux se faisaient légèrement humide. Oh non... Elle n'allait quand même pas pleurer ? Je détestais la voir comme ça. Je serrais alors légèrement ses mains comme pour la rassurer. Moi-même j'avais besoin de me rassurer alors ça présence me suffisait. Elle inspirait un grand coup avant de finalement me répondre :

«Comme tu as pu l'entendre, j'ai à moitié perdu ma grâce. Je ne l'ai pas perdu entièrement. Enfin disons que mes ailes m'ont été arraché mais j'ai pu conserver une certaine partie de mes pouvoirs. Je pense que quand il a dit cela il a évoqué le fait que ma vieillesse soit ralentie ou encore quelques autres particularités.»

Je l'écoutais attentivement et avec silence. A vrai dire, lui couper la parole me semblait complètement idiot. Je voulais des explications et ma mère était parfaitement disposée à me donner des réponses. Autant en profiter ! Mes sourcils se haussèrent légèrement lorsque je vis ma mère porter l'une de ses mains à ma mâchoire, juste au dessus de ma blessure. Je la regardais alors attentivement avant qu'une douce et agréable sensation de chaleur traverse ma peau. La douleur de la veille n'était plus là et par la même occasion, mon mal de crâne avait complètement disparu !

«Comme celle-ci par exemple.» Fit-elle en retirant délicatement sa main avant de me tendre un miroir. Je le prenais alors pour regarder ma blessure.

«Qu'est-ce que ?!» Lançais-je, surprise de voir que je n'avais plus rien.

«Ça s'appelle de l'altruisme. Les anges peuvent soigner des blessures en utilisant leur propre énergie vitale.» Elle m'adressait un léger sourire.

Malgré son sourire, je sentais très bien qu'elle avait peur de ma réaction. Elle avait peur. Oui. Comme je l'avais rarement vu. Peut-être pensait-elle qu'après cela je la considérerais comme un monstre ? Bien que cette découverte me faisait atrocement peur et me fascinait à la fois, je ne pouvais m'empêcher de l'aimer. C'était ma mère après tout. J'étais son sang. Et cette partie d'elle faisait également partie de moi. Je la prenais alors dans mes bras.

«C'est incroyable maman. Maintenant que j'y pense, je me souviens que petite, tu nous soignais en un rien de temps Steve et moi quand on se faisait de petites égratignures. Au début que c'était comme pour tout les enfants des bisous magiques mais... Je comprends mieux pourquoi maintenant !» Je souris, la serrant contre moi pour la rassurer que je l'aimais encore malgré tout.

     Émilie

Je n'avais jamais eu réellement l'occasion de voir à quel point ma fille avait grandi et mûri à ce point... Je venais tout juste de lui balancer la vérité sur mes origines et mon histoire en pleine figure et la voilà qui était entrain de me serrer dans ses bras pour me rassurer. En ce moment-même, on se demandait réellement qui était l'enfant et l'adulte. Rassurée de par sa réaction, mon visage s'enfouit rapidement dans son cou alors que je la serrais fortement contre moi. Cette petite ne méritait pas de vivre ce qui allait lui arriver à l'avenir... Je me sentais tellement coupable de lui imposer tant de souffrance.

«Je suppose que tu dois me croire maintenant ma puce...»

Ma voix se faisait faible. J'étais persuadée qu'elle me croyait maintenant et que forcément ce serait dur pour elle de vivre ensachant ce secret désormais. J'avais peur pour ma fille. Sincèrement.

     Alyssa

En toute honnêteté, mon cerveau essayait encore de chercher de quelconques explications plausibles et correctes à tout cela mais ça ne servait à rien. Je venais d'avoir une preuve même de ses propos. D'autant plus qu'à bien y réfléchir, le vieillissement de ma mère était assez ralentit. Elle paraissait avoir dix ans de moins qu'elle n'en avait ! La plupart des gens qui connaissaient ma mère ne cessaient de lui dire. Je venais de me prendre l'une des plus grosses claques de ma vie en ce lendemain de soirée. Peut-être n'était-ce qu'un rêve au final ? Toutefois, j'essayais de voir les choses au mieux. Il faut positiver dans la vie comme on dit. Quelle phrase idiote parfois.

«Disons que je n'ai plus vraiment le choix alors je vais essayer de me faire à cette idée folle. Dis-moi maman, tu peux me préparer un bon chocolat chaud ? J'ai envie de me reposer un peu devant un bon film.»

Un sourire naquit sur les lèvres de ma mère lorsqu'elle m'entendit. J'avais beau avoir découvert cette vérité, je voulais essayer de paraître encore normale. Et surtout que cela ne change rien à notre quotidien. Après tout, mon frère n'était au courant de rien à propos de toute cette histoire. S'il restait bien quelqu'un que je voulais préserver de tout cela c'était lui. Je me devais de faire en sorte qu'il ne sache rien. Et j'étais persuadée que ce vœux était partagé avec ma mère. Steve avait déjà bien trop souffert de la perte de notre père pour apprendre en plus de ça que nous n'étions pas des humains normaux. Quoi qu'avec ses jeux, je suis sûre qu'il le prendrait relativement bien et chercherait à tout prix à devenir un super héro comme dans les bandes dessinées... Je n'en parlerais à personne. C'était un secret entre elle et moi pour le moment. Je passais finalement l'après midi dans mon canapé avec un bon chocolat chaud devant un film. J'avais besoin de me poser un peu. Ma mère n'était pas bien loin bien qu'elle s'était absentée une heure pour chercher mon frère chez son ami. Encore une chance qu'il n'était pas là aujourd'hui.

Au final, le reste de la journée s'était passé relativement bien. Je n'avais pas voulu aborder l'événement qui venait de se passer à nouveau. Tout simplement parce qu'il me fallait encore un peu de temps pour pouvoir digérer tout. J'avais beau avoir été compréhensive à l'égard de ma mère, je ne pouvais m'empêcher de ressentir quelques difficultés à me rentrer tout cela en tête. C'était normal après tout. J'avais toujours été une humaine aux yeux de tous et de ma propre personne et voilà que je venais d'apprendre que du sang d'ange coulait dans mes veines.

Étant donné que les cours allaient reprendre demain, je me décidais à aller me coucher directement après avoir fini de manger. Le sommeil fut assez difficile à trouver. J'étais perturbée. Ma tête pensait à mille et une choses à la fois. Je me demandais réellement ce qui allait m'attendre par la suite...

     Alyssa

J'étais prête depuis environ dix bonnes minutes. Ce matin-là, je m'étais réveillée quelques minutes avant mon réveil. Et comme je n'avais pas réussi à retrouver le sommeil, j'avais décidé de me préparer plutôt que de ne rien faire. Oui, la fille qui adorait glander dans son lit venait de se lever vingt bonnes minutes à l'avance pour pouvoir aller à l'école. Exceptionnel, non ? D'ailleurs, ce détail n'avait pas manqué de surprendre ma famille qui avait fait des yeux de merlans fris en me voyant à table avant eux alors qu'habituellement c'était plutôt l'inverse. Steve semblait en pleine forme aujourd'hui, faisant des blagues à tout va. Apparemment, maman ne l'avait pas mit au courant pour les incidents de samedi et dimanche. Tant mieux. Je préférais que les choses restent ainsi.

Tranquillement assise sur le banc de mon arrêt de bus, je patientais en gardant ma musique dans les oreilles. Il n'y avait pas grand chose à faire après tout. C'est alors que je me remémorais une fois de plus les événements de la veille. Sérieusement, toute cette histoire m'avait tourmenté dans mon sommeil. J'avais fait des rêves complètement loufoques à ce sujet.

Soupirant légèrement, je relevais les yeux du sol en entendant le bruit d'un moteur devant moi. Il y avait une sublime voiture noire avec des vitres teintées. Résultat, je ne pouvais pas voir qui conduisait le véhicule. Curieuse et surtout intriguée, je retirais ma musique. La vitre s'abaissait alors lentement avant que je ne découvre le visage des deux zozos d'hier. Bon sang, ils comptaient encore me suivre pendant longtemps ces deux toutous ?!

«Qu'est-ce que vous me voulez ?» Lançais-je sur un ton un peu agressif. Je ne leur faisais pas vraiment confiance. Voir pas du tout en faite.

«Rassures-toi Alyssa, on ne te veut aucun mal. On comptait plutôt t'accompagner à ton lycée. Viens, montes. C'est ta mère qui nous l'a demandé pour que l'on puisse te protéger au cas où.» Me lançait doucement la fille aux yeux argents.

«Me protéger de quoi ? Je ne vois pas pourquoi ma mère irait vous demandez de me protéger alors qu'hier elle se méfiait de vous. Je ne suis pas niaise.»

«Maintenant que nous sommes venus te chercher, nos ennemis doivent sûrement être au courant. Ils vont en avoir après toi et rester avec nous est la meilleure solution que tu ais.» Répondit calmement le garçon à la crinière châtains clairs aux mèches dorées.

Je posais mes yeux sur lui tandis qu'il tenait son volant comme s'il était prêt à ce que je monte pour partir. Néanmoins, il pouvait rêver. Ils avaient beau avoir presque un pouvoir hypnotisant sur moi, je ne me laisserais pas faire. C'est alors que mon téléphone se mettait à vibrer dans ma poche. Je le sortais et aperçu un message de ma mère. Quand on parle du loup tiens.

  Maman, à l'instant : Ma chérie, j'ai oublié de te prévenir. J'ai demandé aux deux personnes d'hier de t'amener au lycée. Vas avec eux. Je sais que tu ne leur fais pas trop confiance tout comme moi mais ils sauront te protéger en cas de soucis... Crois-moi sur ce point là. Bisous, à ce soir. Je t'aime.

Un petit grognement s'échappait de mes lèvres. Ils avaient raison. C'était bel et bien ma mère qui les envoyait. Je ne comprenais pas vraiment le fait qu'elle puisse me laisser avec eux alors qu'elle ne leur faisait pas totalement confiance. Je levais rapidement les yeux au ciel avant de me diriger vers la porte arrière de la voiture,vaincue. Je montais dans le véhicule et fit preuve de silence en regardant simplement le paysage enneigé.

«Allons bon, tu t'avoues vite vaincue.» Fit l'homme en reprenant tranquillement sa route en direction de mon lycée.

«Laisses-la un peu tranquille. Elle ne nous aime pas trop alors c'est normal qu'elle ne veuille pas nous suivre aveuglément.»

Pour une fois, je commençais à apprécier cette fille. Elle avait beau me paraître assez louche, j'aimais cette façon qu'elle avait de directement prendre le dessus sur son ami avec un geste ou encore quelques paroles. Ça ne voulait pas dire non plus que je l'appréciais entièrement. Il me faudrait bien plus pour leur accorder ma confiance.

Quelques minutes plus tard, le véhicule s'arrêtait enfin. Je remarquais alors que nous étions devant mon lycée. Je me décidais à sortir du véhicule seule. Sauf que visiblement, mes deux chauffeurs ne semblaient pas d'accord avec cela. En effet, les voilà qui venaient de descendre de la voiture pour me retenir. Super, voilà que tout le monde se mettait à nous regarder. Il faut dire que deux canons comme eux ça ne passe pas inaperçus.

«Qu'est-ce que vous me voulez encore ?» Lançais-je en les fixant, un peu embarrassée d'être au milieu de l'attention.

«Tu finis à quelle heure ? Nous avons à parler tout les trois ce soir.» Me répondit le garçon en tenant calmement ma main.

«Hum...Quinze heures. Me parler de quoi hein ?» Je haussais un sourcil.

Ils ne prirent même pas la peine de me répondre que les deux jeunes remontèrent immédiatement dans le véhicule en me laissant planter là comme une idiote. Je fronçais les sourcils. Décidément, ces deux là avaient un sérieux problème. Légèrement agacée, je me dirigeais vers l'enceinte du lycée en tentant de faire abstraction des discussions à mon sujet.

«ALYSSA !»

Je me retournais et aperçu Vanessa courir vers moi comme une déjantée. Est-ce que je devais essayer de l'éviter ? Trop tard. Elle me sautait au cou en me faisant un câlin digne des vieux films d'amour où les deux amoureux se retrouvent après une grande séparation. Surprise, je passais simplement mes bras dans son dos tout en haussant un sourcil.

«Euh ? Ça va bien Vanessa ce matin ?» Demandais-je en me demandant bien ce qu'elle avait.

«Bon sang t'es en vie ! J'ai eu la peur de ma vie ce weekend ! J'ai appris pour samedi soir et je t'ai envoyé des tas de messages mais tu ne répondais pas alors j'ai vraiment cru que quelque chose de grave t'étais arrivée ! Je suis tellement désolée de t'avoir laisser toute seule !» Criait-elle en me serrant fortement contre elle.

«Hum excuses-moi pour hier. J'avais bien reçu tes messages mais je n'avais pas trop la tête à tout t'expliquer. Je n'étais pas bien, excuses-moi. Je vais mieux maintenant allez rassures-toi. Regardes, je n'ai aucune égratignure.» Lui assurais-je en me reculant un peu d'elle pour qu'elle puisse observer mon état.

Chose qu'elle s'empressa de faire puisque mon visage fut rapidement coincé entre ses mains. Elle m'inspectait sous tout les angles possibles à la recherche d'une quelconque blessure. Heureusement, grâce à ma mère, je n'avais plus rien. Je pouvais dire merci à ses pouvoirs étranges pour le coup. Rassurée, Vanes' décidait de se rendre rapidement en cours avec moi tout en me bombardant de questions sur le chemin.

La matinée se passait relativement bien. Comme toujours, j'essayais de faire de mon mieux pour apporter de bonnes appréciations à mon bulletin. Je tenais vraiment à faire mon entrée dans cette école bien qu'aucune réponse n'était encore parvenue. Tiens, j'avais presque oublié ce détail qui, pourtant, me rongeait les os. L'heure du midi finalement venue, Vanessa et moi décidions de nous rendre au self. On s'installait à table une fois servies.

«Tu comptes me donner des explications ou pas ?»

«Huh? De quoi tu parles Vanes' ? Je t'ai déjà tout expliqué.» Lui répondis-je en haussant un sourcil, prête à manger le contenu sur ma fourchette.

«Tout le monde ne parle que de ça depuis ce matin. De toi et des deux canons de la bibliothèque. Je n'ai pas voulu en parler tout à l'heure parce que je me faisais du soucis mais ça m'a surprise de te voir descendre de leur voiture tu sais. Je ne savais pas que tu les connaissais.» Elle me regarda d'un air insistant.

«Je ne les connais pas. La preuve, je ne sais même pas leurs prénoms. Disons juste que ce sont eux qui m'ont tiré d'affaire samedi soir. Et comme ma mère était inquiète à mon sujet , elle leur a demandé de m'amener. Je sais, elle en demande beaucoup mais tu la connais.» Répondis-je simplement. C'était la vérité après tout.

«Oh je vois. Ça veut dire que ta mère les connaît alors ?»

Quelle insistance. Je ne voulais pas aller trop loin dans les détails. Je m'étais promis de ne mettre personne au courant de mon nouveau secret. Pas même ma meilleure amie. Je savais bien qu'elle aurait certainement sauté de joie en entendant la nouvelle mais je ne me sentais pas d'attaque à lui dire. Elle n'était qu'une simple humaine rêveuse et je tenais à ce qu'elle le reste.

«Ce sont eux qui m'ont ramené chez moi alors forcément ma mère les a rencontré. Le feeling est très bien passé. Et vu qu'elle leur est redevable, elle leur a demandé ce petit service.»

«Hum je vois ils sont sympas dis donc. Dans tout les cas, tu es bien tombée niveau super héros toi ! J'aurais tellement voulu être à ta place ! Tu vas nous faire rencontrer hein ? Allez tu peux faire ça pour moi quand même !» Dit-elle en prenant un petit air implorant.

«Tu sais, je n'ai pas vraiment pour intention de les revoir. J'les sens pas eux deux alors moins je les vois mieux je me porte...»

Sans m'en rendre compte, je me mettais à froncer les sourcils. Vanessa ne se privait pas pour me mettre une petite pichenette sur le front pour que je cesse immédiatement. Elle s'empressait ensuite de me corriger en me disant qu'au contraire je devais m'estimer heureuse. J'en connais une qui ne s'était toujours pas remise de leurs charmes dévastateurs.

La journée continuait ainsi jusqu'à ce que ce soit la fin des cours pour moi. J'avais plutôt de la chance de finir à quinze heures le lundi. Ça permettait de se remettre en douceur dans le bain des cours. Je me dirigeais en compagnie de mon éternelle amie vers la sortie. C'est alors que je les aperçue. Ils étaient là, adossés contre le véhicule à m'attendre. Mince, j'avais complètement oublié. Mon visage se tournait alors sur Vanessa qui semblait surprise de leur présence.

«Hum désolée Vanessa j'avais complètement oublier de te le dire ce midi. Je rentre aussi avec eux ce soir... Tu comprends, hum c'est ma mère quoi...» Fis-je un peu embarrassée de devoir la laisser seule.

«Oh ne t'en fait pas pour ça ! J'ai pris ma voiture aujourd'hui de toute façon je trouve ça plus simple. Profites bien de ton rencart avec eux deux ah ah. Petite polygame va !» Elle me donnait un petit coup de coude avant de me tirer la langue.

Elle avait beau afficher un large sourire je me sentais un peu gênée de devoir la laisser pour partir avec eux. Surtout que je savais constamment qu'elle les admirait. Je lui aurais bien proposer de nous accompagner mais il valait mieux éviter. Je sentais d'avance que l'on risquait d'aborder tout un tas de sujet mystique. Ma blonde me faisait donc un signe de la main pour se rendre ensuite vers le parking. Pour ma part, mes pas me menèrent jusque devant la voiture noire.

«Tu n'as pas cherché à nous fuir à ce que je vois. C'est une bonne chose. Viens montes !» Déclarait la jeune inconnue en m'accordant un sourire.

Je ne me fis pas prier et montais dans le véhicule. Sans trop savoir comment, on se retrouvait quelques minutes plus tard en plein dans une forêt. Est-ce qu'ils allaient me kidnapper ou quoi que ce soit d'autre ? Je n'étais pas vraiment rassurée et cela se voyait à mon visage. En même temps, qui irait emmener une fille dans une forêt pour discuter ? Je croisais alors mes bras sous ma poitrine en les regardant attentivement.

«Bon alors, de quoi voulez-vous me parler ?» J'étais directe, voulant entrer directement dans le vif du sujet.

«Tu es directe à ce que je vois. Bien ça nous évitera les conversations inutiles. Nous voulons aborder le sujet d'hier vu que nous n'avons pas pu finir avant que tu nous mettes à la porte.»Répondit l'homme.

«C'était un comportement tout à fait normal pour quelqu'un qui se croyait humain jusque là.» Fis-je sérieusement, lui tenant tête.

«Je dois comprendre que tu as finis par croire à toute cette histoire.Tant mieux. On va pouvoir aborder le fait que tu te dois de nous rejoindre dans ce cas.»

Un nouveau silence se fit sentir. C'était fréquent ces derniers temps. L'ambiance était encore plus glaciale que le temps dehors. J'en étais sûre. Ils voulaient vraiment me recruter dans leurs rangs. Et bien que cela venait d'ordre du Paradis, je ne pouvais m'empêcher d'être agacée. C'est alors que j'aperçus la fille aux yeux d'argents venir vers moi. Elle semblait avoir vu ma colère et s'était donc empressée de prendre mes mains dans les siennes. Comme pour m'apaiser. Et bizarrement, cela fonctionna. Mon corps se détendit immédiatement.

«Je pense que nous devrions d'abord penser à nous présenter. Il est vrai que pour le moment, tu nous as fais confiance aveuglément en venant avec nous sans nous connaître alors je pense que la moindre des choses serait de se présenter. Je m'appelle Lindsay. Je suis une Nymphe ou plus précisément une Naïade. C'est une créature qui est généralement associée aux rivières ou aux lacs.» Me répondit-elle tout simplement avant de lancer un regard à son camarade. Comme si elle voulait qu'il se présente à son tour. Je le voyais alors avancer vers nous d'un air sage.

«Je m'appelle Keith. Je suis un Sylphe. Au cas où tu ne saurais pas ce que c'est, c'est un esprit élémentaire de l'air. On peut dire que je me situe à mi-chemin entre les anges et les elfes.» Ajoutait-il en croisant ses bras contre son torse musclé.

Enfin ! Enfin, je connaissais leur prénom. Lindsay et Keith ? C'était des prénoms plutôt charmants qui convenaient parfaitement à leur image. Je prenais néanmoins quelques minutes avant de comprendre plus en détail leur parole. Mes yeux s'agrandirent légèrement tandis que je les regardais d'un air surprit.

«Vous n'êtes pas des anges ? Ça veut dire alors qu'il y a d'autres créatures qui existent en plus ?»

«Oui, il en existe beaucoup. De différentes religions ou encore mythologies. Tu auras l'occasion d'en voir si tu rejoins l'Académie.Il n'y a pas que des anges là-bas. Il y a vraiment de tout. Et pas que des créatures gentilles malheureusement.» Déclarait Lindsay en gardant mes mains.

Je fronçais un peu les sourcils en l'entendant dire. J'allais vraiment finir par avoir la ride du lion à force de faire ça. Mes yeux se déportaient ensuite sur Keith qui restait tout à fait silencieux pour le moment. Je le voyais finalement approcher de moi et déposer une main sur mon épaule. J'en fus assez surprise, lui qui s'était plutôt froid jusqu'à maintenant. Ce contact direct me déstabilisa un peu.

«Nous avons vraiment besoin de toi Alyssa. Tu nous seras d'une grande aide pour protéger tout le monde.»

«Je ne comprend pas, pourquoi moi ? Je ne sais même pas me battre ou quoi que ce soit. Je vous serais inutile.» Soufflais-je en le regardant dans les yeux.

«Comment te dire... Ces dernières années, les forces du mal ont accumulé beaucoup de troupes. Nous sommes constamment en guerre bien qu'en ce moment ce soit plus comme une guerre calme. On ne s'attaque pas mais on sait très bien que nos ennemis attendent de voir une faille pour s'en prendre à nous. Nous manquons de troupe et pour cela, nous partons aux quatre coins du monde à la recherche de nouvelles recrues. Bien évidement, nos ennemis en font de même. L'académie dont nous t'avons parlé regroupent des créatures de tout horizon. Il y a aussi bien des démons que des anges ou tout un tas d'autres sortes.» Disait Keith en me regardant d'un air plus que sérieux sans pour autant paraître agressif.

«Comment ça de toute sorte ? Si vous êtes en guerre alors pourquoi vous rassemblez dans un même endroit ? Je ne comprends pas c'est complètement idiot.»

«Je sais, ça peut paraître surprenant mais nos deux camps ont conclu un accord. Leurs futurs soldats, nous, sont tous rassemblés dans une seule et même académie. On s'entraîne ainsi les uns contre les autres afin de pouvoir étudier au mieux nos ennemis. C'est un entraînement à double tranchant mais ça nous permet d'évaluer les faiblesses et autres du camp adverse. Et puis, ils veulent dès le début nous imposer cet esprit de combat entre eux et nous.»

Pour cette fois, j'écoutais attentivement chacune des paroles de Keith. Après tout, je risquais ou non de faire une visite dans cet endroit. Il semblait être quelqu'un de très spirituel et intelligent rien que de par sa façon de s'exprimer. Tout les Sylphes sont comme ça ? Je laissais alors mes yeux se plonger sur sa personne pendant de longues minutes. Peut-être un peu trop même. J'étais presque hypnotisée par la beauté de cet être surnaturel. Toutefois, je fus interrompue soudainement en sentant les mains de Lindsay se resserrer sur les miennes. Elle semblait avoir perdue son calme légendaire.

«Qu'est-ce qui se passe Lindsay ?» Lança Keith d'un œil interrogateur.

«Il y en a un... Je le sens.. Keith il va sûrement s'en prendre à Steve et Émilie !» Déclarait-elle en prenant un air paniqué.

«Quoi ?! Qui ça eux ?!» Criais-je en la fixant apeurée.

«Mince je n'avais pas pensé à ça ! Lindsay tu conduis Alyssa là-bas. Je vais y aller en vol ce sera bien plus rapide. Faites attention toutes les deux. Dès que vous serez arrivées, allez mettre Steve et Émilie à l'abri. Je me chargerais de lui à moi seul.»

Une fois de plus, personne ne me répondait. Je sentais simplement Lindsay me tirer avec insistance à l'intérieur du véhicule. Keith, quant à lui, resta dehors. J'étais morte d'inquiétude. Qui pouvait donc essayer de s'en prendre à ma famille ? Un démon ? Je sentais mon cœur battre fortement contre ma poitrine alors que le moteur démarrait déjà. Mes yeux se portèrent rapidement sur le jeune homme qui me fixait à travers les vitres teintées. La seule chose que je pus voir avant de partir vivement fut Keith dévoilant une paire d'ailes splendides et puissantes qui le hissèrent dans les airs à une puissance folle...