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A Walk on the White Side
A Walk on the White Side
Auteur: Julia Weber

L’AUTEURE + PROLOGUE 13 MAI 2019

Julia Weber est née en 1987 dans le sud de la France.

Travaillant dans le paramédical depuis dix ans, l’écriture est d’abord pour Julia un exutoire avant de devenir sa passion. Elle essaie dorénavant de partager le plaisir qu’elle a si souvent ressenti dans ses lectures en relatant des histoires de gens ordinaires ou extraordinaires, où s’entremêlent gaieté et tristesse.

Julia espère faire passer sa joie de vivre et ses rires au travers de ses écrits.

A Walk on the White Side est son premier roman édité.

À Brice,

À Morgan et Rachel,

Solveig

Nous sommes plantés devant le St Patrick, à faire les cent pas sur un trottoir, face au pub dans lequel nous crevions de chaud il y a encore quelques minutes. Je vais partir, je vais le chercher, je viens d’annoncer ma décision.

La nuit est déjà bien entamée, nous avons fait la fermeture. Pas que nous ayons eu tant à nous dire, mais plutôt qu’aucun de nous ne parvenait à mettre des mots sur ce qu’il avait sur le cœur. L’ambiance pesante des non-dits n’a rien d’agréable et pourtant aucun de nous n’arrivait à se résoudre à y mettre fin.

Les voitures roulent à vive allure sur l’avenue, leurs phares font échos aux lumières qui nous ont éblouis toute la soirée.

Simon semble sonné. Être ailleurs. Si tant est qu’il puisse l’être plus qu’à son habitude. Il est le premier à me saluer avant de partir, Elise sur ses talons. Mon amie est fermée comme une huître. Elle a été exécrable comme elle sait l’être par moments.

Camille les observe s’éloigner sans un mot. Je la questionne :

— Tu es sûre que tout va bien ?

— Oui, oui. Mon taxi va bientôt arriver, je suis juste un peu fatiguée.

— J’attends avec toi.

— Ne t’embête pas.

— Je ne m’embête pas.

Elle se contente d’un léger sourire en guise de réponse.

Je ne sais pas pourquoi, j’ai le ventre qui se noue, la gorge qui se serre. Je suis au bord de l’explosion. On pourrait croire que c’est le fait de mon départ imminent, seulement je n’en suis pas convaincue.

Une Peugeot 508 noire, lustrée avec soins, se gare devant nous. Elle est conduite par un type qui pianote sur deux téléphones en même temps. Je me demande si ce n’est pas dangereux de la laisser embarquer, d’autant qu’il a des lunettes de soleil vissées sur les yeux en pleine nuit. J’embrasse mon amie sur la joue avant de la voir s’installer sur la banquette arrière.

L’air frais me fait tressaillir – ou la trouille. Je me mets à fumer comme si ma vie en dépendait, comme si la nicotine avait le pouvoir de m’apaiser, tout en marchant pour rejoindre mon lit.

Tant pis si, pour cela, il me faut traverser le centre-ville et si je bataille ensuite à trouver la serrure qui se défile quand je souhaite y insérer sa clé, comme à chaque fois que je rentre de soirée.

Depuis que j’ai trempé les lèvres pour la première fois dans un verre d’alcool – au cours d’une fête sauvage au collège – je ne sais pas faire dans la demi-mesure. C’est soit rien soit tout. C’est valable pour la totalité de ce que j’entreprends. On aurait pu me croire prudente sur le sujet, vu mes antécédents familiaux, pourtant non.

Ce soir ne fait pas exception, même si je n’en suis pas non plus à marcher de travers. Mais c’est à quelque pas de chez moi que je réalise que j’ai peut-être quand même dépassé la dose prescrite.

Une brume épaisse a envahi la rue. Il y en a marre de cette fichue purée de pois, j’ai l’impression que 2019 est l’année officielle du brouillard. Je trébuche sur quelque chose et manque de tomber. Je ne vois même pas mes pieds. Cela devait être une bordure. Mon cœur est sur le point de transpercer ma poitrine. J’ai bien cru que la prochaine fois que l’on entendrait parler de moi serait pour lire un truc dans ce goût-là : « Solveig Morel, à peine vingt-sept ans, retrouvée gisant sur un trottoir, son alcoolémie tutoyant les étoiles. La jeune aide-soignante anonyme cachait en réalité bien son jeu et n’était autre que L ».

— Solveig !

— Qui est là ?

Au fond de moi je sais à qui appartient cette voix, je dois être sacrément à l’ouest, car il lui est impossible d’être là.

On me touche l’épaule, je hurle à m’en faire péter les tympans et à m’en décoller les cordes vocales. Je tourne sur moi-même, les bras en avant et ne parviens pas à toucher quoi que ce soit.

— Cette blague est vraiment nulle... Qui est là ?

Ma question se perd dans la rue et personne ne me répond.

Peu à peu, le brouillard se dissipe et mes mains réapparaissent. Je cours les derniers mètres qu’il me reste jusqu’à chez moi et m’enferme à double tour. Essoufflée, je m’écroule à genoux. Deux fois dans la même journée... Quand cette histoire sera finie, que je serai sûre qu’il est en sécurité, je prendrai rendez-vous chez un psy.

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