Solveig—Solveig, tu as un mail! me crie Erick, du salon.Je finis de ranger quelques affaires à l’étage et descends l’escalier pour me rendre devant mon ordinateur.De: EliseObjet: The White SideSalut Solveig,J’espère qu’Erick et toi allez bien. C’est le cas pour Martin et moi. Nous sommes à Sidney et je voulais te dire, car je pense que tu voudrais savoir… ça y est, nous l’avons retrouvé, il est dans notre sac. Nous nous étions rapprochés d’un laboratoire en Nouvelle-Zélande qui pratique des examens sur les objets anciens, les parchemins exposés dans les musées, ce genre de choses. Moyennant finance, nous nous sommes mis d’accord pour qu’ils l’étudient. Nous rentrons donc dès demain pour leur confier.Je crois que nous avons réussi à le mettre hors d’état de nuire. Autre chose, j’ai lu ton
Julia Weber est née en 1987 dans le sud de la France. Travaillant dans le paramédical depuis dix ans, l’écriture est d’abord pour Julia un exutoire avant de devenir sa passion. Elle essaie dorénavant de partager le plaisir qu’elle a si souvent ressenti dans ses lectures en relatant des histoires de gens ordinaires ou extraordinaires, où s’entremêlent gaieté et tristesse. Julia espère faire passer sa joie de vivre et ses rires au travers de ses écrits. A Walk on the White Side est son premier roman édité. À Brice, À Morgan et Rachel, Solveig Nous sommes plantés devant le St Patrick, à faire les cent pas sur un trottoir, face au pub dans lequel nous crevions de chaud il y a encore quelques minutes. Je v
SimonQuand j’ai eu quinze ans, mon amour modéré pour l’école a sauté aux yeux du monde. Cela faisait déjà quelques années qu’il avait sauté aux miens, mais ma mère espérait toujours un miracle. Je passais mon temps à traîner ailleurs qu’en cours, à fumer des cigarettes aux abords du collège. Je m’étais créé un petit paradis où emmener mes nombreuses petites amies. Le coin était plutôt cosy, il bénéficiait d’un banc – presque pas tagué –, d’un bout de gazon d’un mètre sur un où poussaient quelques pissenlits voire quelques pâquerettes, et il n’y avait que peu de vis à vis. Il me plaisait, ce refuge. J’éprouve même une certaine tendresse à me le remémorer.Ce jour-là, je séchais pour la énième fois le cours d’arts plastiques de Monsieur Ferry. J’étais concentré, la langue sortie, et roulait ma cigarette. Agacé, il a débarqué le front plissé – plus que par ses rides –, les poings sur les hanches, les joues rougies de colère, et m’a interrompu:—Dupuis&nbs
SolveigC’est quand j’ai créé un personnage pour écrire – me planquer derrière – que ma vie s’est à nouveau mise à déraper. Un choix qui peut paraître anodin, une goutte d’eau qui déséquilibre tout un système.J’ai fait entrer L dans la partie, un personnage pas si éloigné de moi, qui tire ses traits de mes failles, de mes travers, de mes peurs. Cet alias n’est pas mon opposé, juste un avatar qui me permet de me lâcher sans conséquence. Si je me suis cachée, c’est à cause du contenu de mon livre. Je voulais écrire un truc trash. Un de ces livres qu’on ouvre et qui ne laissent pas indifférent. Et c’est devenu un best-seller. La vie est étonnante. Cette histoire m’a surtout servi d’exutoire.À vingt-sept ans, seuls deux hommes, deux amours ont vraiment compté. Jérémy, Jérémy Varens, celui qui a inspiré mon roman et Erwann, l’homme qui m’a ramassé à la petite cuillère et offert l’idée d’un avenir doux auprès de lui.Ce qui était au départ un passe-temps est dev
SolveigMon portable vibre. Il résonne sur ma table de nuit en pin, et moi je suis incapable d’esquisser le moindre mouvement. Mon corps entier est en grève. Les quelques verres d’hier soir n’ont pas eu l’effet escompté sur l’instant. Ce matin, cela n’est pas la même affaire. Mes cheveux poussent à l’envers. J’essaye de me masser les tempes, mais il va me falloir quelque chose de plus radical.Au deuxième coup de téléphone, je me décide à attraper cet instrument de torture.—Elise, que me vaut cet appel matinal?—Alors ma chérie, tu vas bien?Je jette un œil à la place désormais vide à côté de moi, puis me lève en quête d’antalgique.—Et toi?—Tu es partie super tôt! tente mon amie.—Pas tant que ça.—Tu crois que je ne te connais pas? J’ai bien vu que tu étais à côté de tes pompes.Je trouve dommage qu’elle ne profite pas de ma moue et mes yeux au cie
SolveigLes mains sur les hanches, détaillant chaque recoin de la pièce principale de mon nouveau chez-moi, un sentiment de sérénité fugace me fait miroiter la paix que je cherche tant.Erwann n’a pas mis longtemps à récupérer ses effets et je ne vais pas m’en plaindre, cela m’ôte un poids des épaules. Nous nous sommes à peine croisés lui et moi, juste assez pour me rassurer sur mon choix. Évidemment, il m’a évitée tant qu’il a pu. Après tout, je suis responsable de notre séparation. Cela n’empêche que j’ai eu plaisir à le revoir. Je sais qu’on ne peut pas être amis, cela semble bien trop difficile pour lui, pourtant nous avons partagé toutes ces années et j’en garde un bon souvenir. C’est quelqu’un de bien, de droit, d’honnête, il mérite d’être heureux et je sais qu’il comblera une femme. Je ne suis pas cette femme.Un jeune couple a repris notre ancien chez nous et j’ai emménagé, non sans l’aide de mes amis, hier. Mes affaires sont toutes là, éparpillées devant m
SolveigBaptiste m’attend dans la voiture le temps que j’aille voir si l’objet de ma convoitise est à la hauteur. Il a accepté de venir m’aider.Je connais Baptiste depuis six ou sept ans, mais nous sommes devenus aussi soudés à partir du moment où Elise et lui se sont séparés. Il n’allait pas bien, c’était évident, mais il ne parlait pas. Il sortait de moins en moins, et quand il le faisait, quelque chose dans son regard que je n’avais jamais vu, apparaissait. La malice avait disparu pour laisser place au vide. Il dépérissait sous nos yeux, il s’éteignait et personne ne réagissait. Aucun de nous.Je pensais jusqu’alors que je ne côtoyais Baptiste que parce qu’Elise était avec lui. C’est à cette période-là que j’ai réalisé que je n’étais pas aussi insensible et froide que je l’imaginais, et qu’il avait de l’importance, que j’éprouvais de l’amitié à son égard.Un soir j’ai débarqué chez lui. J’ai cogné à sa porte, j’ai tambouriné pendant plus de trois quarts
SolveigVoilà de nombreuses minutes que j’observe un simple numéro de téléphone enregistré dans mon répertoire. Nom de contact: Erwann. Contact qui ne me répondra plus. Je fixe son nom sur l’écran. Je devrais l’effacer, à quoi bon garder ce numéro.Je ne peux pas.Mes mains tremblent, je pose mon portable sur la table à côté de moi. Une tasse fume, j’ai machinalement fait couler un café, mais je crois que je ne vais pas pouvoir le boire.Debout.Clope.Appel à ma cheffe: «Je ne peux pas venir travailler. »Assise.Clope.Ce n’est pas la réalité. Pas encore, ça ne peut pas recommencer. Je ne vais pas y arriver. Pourquoi?Ma tête tourne, je m’allonge les yeux fermés.Son image.Non, trop dur.Debout.Clope.