Je ne sais pas quoi faire. J’ai l’air complètement ridicule à attendre ainsi, devant sa porte. Cela doit bien faire cinq minutes que je me dandine sur place. Après cette dure journée d’entraînement à la Colombe, je n’avais qu’une envie, prendre une douche et partir me coucher. Mais lorsque je me suis glissée sous les draps, les vibrations sont apparues. Cette connexion étrange et désormais familière a décidé de pointer le bout de son nez au moment même où je pensais n’avoir plus qu’à fermer les yeux pour profiter d’un repos bien mérité.Je tire sur mon tee-shirt trop long. J’ignore pourquoi je me sens si nerveuse. Je toque deux petits coups et la porte s’entrouvre légèrement. Elle était probablement mal fermée. Le Leader est assis sur le bord de son lit, dos à moi, suffisamment accaparé par quelque chose pour ne pas avoir senti ma présence. Étrangement, il est torse nu. Je ne l’ai jamais vu sans l’un de ses éternels tee-shirts noirs. Je peux donc apercevoir très clairement ses t
—Je peux au moins savoir pourquoi tu m’as soudainement laissé en plan?—Je ne t’ai pas laissé en plan, je suis juste… partie.Angie lève un sourcil moqueur.—À tes yeux, ce sont deux choses différentes?—Exactement.Je repositionne correctement le matelas de mon lit puis laisse échapper un soupir lorsque je me rends compte du ridicule de notre dialogue. Encore une fois, Eléana m’a prise au dépourvu. En revanche, elle ne m’a pas menacé, ce qui est contraire à ses habitudes. Et j’ai respecté ce qu’elle m’a demandé. Le journal est en sécurité.—À moins que tu ne ressentes un besoin soudain et irrépressible de mettre le journal d’Eléana sous ton matelas, ce dont je doute fort, je pense que j’ai de bonnes raisons de croire que tu me caches quelque chose, insiste-t-il.Je me mords la lèvre inférieure. Comment me sortir de cette situation… Je ne peux pas lui avouer que je ne suis pas toute seule dans ma
Je donne un grand coup de poing dans le punching-ball. Expire. Inspire. Et j’enchaîne de nouveau. C’est libérateur. Qui aurait cru que me défouler ainsi me ferait autant de bien? D’habitude, je pleure pour évacuer mes problèmes. Mais aujourd’hui, je n’en ai pas envie. Je veux juste laisser sortir cette rage qui me ronge de l’intérieur. J’assène un ultime coup et le punching-ball valse à travers la salle, s’écrasant violemment contre le mur.—Ev’, tu ne dois pas t’en vouloir… Ce n’est pas de ta faute.Je tourne la tête vers Sean qui est adossé contre l’un des espaces vides du mur d’armes, les bras croisés, le regard inquiet.—Tu m’as suivi? le questionné-je sèchement.—C’est si mal que ça?—Je n’ai pas besoin d’avoir constamment quelqu’un sur le dos.—Je ne voulais pas que tu culpabilises dans ton coin alors que tu n’y es pour rien.—Sean, elle s’est effondrée sous mes yeux! Je n
—C’est une brillante idée!—C’est une très mauvaise idée!Sean et Angie se sont exprimés exactement en même temps. Je me doutais bien que cette idée ne plairait pas beaucoup au Leader. Prendre la Démone de court est peut-être dangereux, mais c’est justement notre meilleur plan aujourd’hui. Bien évidemment, il est inutile de les informer que cette idée ne vient pas de moi. Je doute qu’ils acceptent quoi que ce soit de la part de la toute première Démone, autant garder cette information pour moi. Encore une fois. J’ignore à partir de quel moment je me suis mise à leur mentir aussi facilement. Angie voulait qu’on se voie en privé, mais j’ai préféré réunir tout le monde à la Galerie pour leur faire part du plan. Je devine parfaitement de quoi il voulait parler, seulement notre discussion sur sa condition de métamorphe devra attendre.—Tu t’es trompé d’adjectif, Angie!—Ne commence pas à faire le clown avec moi, Sean. Je
—Alors?—Alors quoi?—Tu vas te décider à m’adresser la parole ou tu préfères rester à bouder dans ton coin?—Je ne boude pas, soupire Angie.—Dans ce cas, tu utiliserais quel mot pour décrire ton entêtement à garder le silence?—N’inverse pas les rôles, Miss.—Tu insinues que je boude?Je croise les bras sur ma poitrine, mais lorsque le draf vire soudainement à droite, je me cramponne maladroitement à la taille du Leader. Il tourne la tête et je peux discerner un petit sourire satisfait éclairer son visage.—Pas à cet instant, non. Mais l’art de bouder quand quelque chose te déplaît, c’est une de tes spécialités, et non l’une des miennes.—Ah oui, et quelle est ta spécialité alors?—Tu ne le sais pas?—Fuir les conversations en te terrant dans ton trou? Oh, bien sûr que si! J’attendais simpl
—Tu ne pourras pas les retenir éternellement…—Tais-toi.—Tu es plus faible que d’ordinaire.—J’ai dit, tais-toi, Isaac! hurle-t-elle, les yeux luisant d’une couleur carmin.Après avoir passé plusieurs semaines en sa compagnie, ses coups de sang ne me font plus le même effet. Je m’y suis habitué. Les choses ne se passent pas exactement comme elle l’avait prévue. Elle n’est pas tranquille et ne parvient pas à le cacher. Ses talons hauts claquent sur le sol de la pièce. Celui-ci est souillé des nombreux litres de sang qui se sont écoulés durant des siècles. Mes yeux se promènent sur les cordes, les lames, les objets bizarres et les torches prêtes à meurtrir n’importe quel morceau de chair sur la peau d’un malheureux. Un râle de douleur résonne dans la pièce.—Toi, la ferme!Mélodie resserre les chaînes du prisonnier et lui lance un regard meurtrier. Je n’éprouve d’ordinaire pas de grande empathie pour les
—Je… je ne comprends pas, murmuré-je contre son cou.Raphaël. Les questions se bousculent par dizaines dans ma tête, mais aucune d’entre elles ne parvient à sortir. Je me délecte de ce moment, celui de l’avoir dans mes bras, sain et sauf. Celui de l’avoir retrouvé.—Il va falloir qu’on se décolle l’un de l’autre, Ev’, articule-t-il d’une voix amusée.—Ce serait préférable, en effet. Ce n’est pas le moment pour ce genre de chose, on a plus important qui nous attend! raille le Leader.Je soupire, mais Angie n’a pas tort. Raphaël me lâche doucement et prend mes mains dans les siennes.—La bague, murmure-t-il.—Je ne la porte plus depuis le jour où… où Mélodie… enfin, où j’ai découvert tout ça. Toute cette folie. J’avais tellement envie de revenir sur Terre, et ton cadeau me faisait trop mal. Alors je l’ai retirée.D’un geste assuré, Raphaël me saisit le menton, forçant mes yeux à plonger dans les siens.
—Evalina… Evalina! Tu m’entends? Evalina! S’il te plaît, dis quelque chose!Mes paupières sont closes. Je me sens lourde. Affreusement lourde. Je parviens finalement à bouger les mains.—Evalina, parle-moi! Fais-moi un signe, n’importe quoi signifiant que tu vas bien!Angie. Sa voix regorge d’inquiétude. Ses mains pressent les miennes en attente d’un signe, mais je n’y arrive pas. L’image d’Apolline et de Lucie hante mon esprit. C’est comme si je les entendais hurler leur souffrance. Tout est ma faute. Je n’aurais pas dû les envoyer aider les métamorphes. Qu’est-ce qui m’a pris de donner des directives? Je suis tétanisée. Mes convictions n’étaient pas assez puissantes. J’ai lamentablement échoué. Et je dois maintenant vivre avec la mort de deux nouvelles Surnaturelles sur la conscience.—Ouvre les yeux, me supplie Angie. Je sais que tu es éveillée. Et je sais que tu dois sûrement t’en vouloir, mais