Il est parti en trombe, ne laissant que le sillon de son parfum dans l’entrée. Alors que la voiture s’éloigne, et que son ombre disparaît totalement par-delà les grilles, une solitude sans nom me mine immédiatement.
Délaissée par cet homme, je ressens un grand vide en examinant l’immense maison. Sa présence m’importune, en même temps, je perçois un fil invisible se tisser dès qu’il me touche. Et je ne parle pas de sa bouche impétueuse qui s’est posée sur mes lèvres, du plaisir qui s’est logé dans mon ventre à son contact. Son charme, indéniable, lui vaut probablement les attentions des filles du coin. Un beau brun ténébreux comme ça, avec en prime des yeux gris-bleu à tomber, une carrure carrée et un accent ravissant… pour une Française, les femmes de Beaumont lui courent après, évidemment ! Notre mariage, c’est du bidon, un contrat avec le diable prénommé François. Je suppose que Scott tient autant ou même plus à ses biens que moi au million d’euros et à la maison.
Dans la maison vide, les craquements des portes m’effraient. Hier, la peur est passée au second plan, la présence de Scott m’a rassurée malgré son comportement d’australopithèque. Dans le même élan, je repense à Gégé. Je ne l’aime pas, et j’en ai la trouille, mais cette bête va mourir de faim si elle est encore ici. Que mangent les lézards ? Un tour sur le net, j’apprends qu’ils se nourrissent d’insectes. Beurk ! Tout, mais pas ça ! Mon étude du saurien se poursuit en même temps que je rejette les appels de mon interlocuteur anonyme. Ma concentration revient sur l’alimentation des lézards. Si certains gobent des insectes, d’autres apprécient les fruits, pourvu que ce soit le cas, sinon, tant pis, il crèvera le ventre vide. Je refuse d’aller à la chasse à la mouche. D’ailleurs où Scott l’a-t-il enfermé ? Comme mon futur époux a dormi sur les lieux, il a donc occupé une chambre. L’étage se découpe en deux parties, un long couloir à droite possède quatre portes, et à gauche, ma
Bon sang ! Cette fille me tourne la tête. Je suis rentré il y a une demi-heure environ, et l’ai vue nager d’en haut dans la piscine. Une vraie sirène. Ses formes me font bander, déjà à son arrivée sa silhouette me tentait, mais là, en maillot, elle défie le peu de ressources que j’ai quand je la vois. Et dire qu’il va falloir habiter sous le même toit qu’elle une année. Comment faire taire l’envie qui se loge au bas de mon ventre ? Ses lèvres sont d’une douceur… et j’ai senti que je ne lui suis pas indifférent quand j’ai pris sa bouche. Je patiente gentiment le temps qu’elle finisse son sport en me délectant du spectacle du haut de la fenêtre du corridor.— Mon Gégé. Elle est belle, n’est-ce pas, ma future femme ?Mon reptile me répond en clignant des yeux, ou c’est ce que je veux croire. Pendant ce temps, Anaëlle se sèche sur le bord du bassin. J’envie la serviette dans laquelle elle se blottit. Sur le coup, je me persuade qu’elle m’a entendu rentrer et qu’elle va m’appeler,
D’une oreille attentive, j’écoute la conversation téléphonique. Mon vocabulaire très pauvre ne me permet pas de comprendre tous les mots, mais j’en saisis le sens général. Scott parle de cheval, puis il dit « I arrive immediately ». Je suppose, « J’arrive immédiatement ». Voilà qu’il va s’en aller encore. Pas question qu’il déserte une fois de plus. Nous devons planifier le mariage avec cette amie Amber, dès cet après-midi, alors il ne filera pas je ne sais où.Avant qu’il remonte, je me cache derrière une porte en épiant mon beau Texan. On n’a pas idée d’être aussi sexy au saut du lit. Les cheveux ébouriffés, les yeux moitié fermés, il est craquant. Je mâte son postérieur rond, musclé. La faute aux hormones de la trentaine. Aux hormones ou au décalage horaire. Sinon je ne fantasmerais pas sur un homme que je connais à peine. Je me ressaisis en analysant les solutions pour le suivre. Il revient très vite habillé, puis décroche la clé suspendue au porte-clés de l’entrée. C
Subitement réveillé par un souffle sur mon cou, j’ouvre les yeux sur ma belle blonde. Elle m’a fait peur hier. Par chance, le médecin m’a assuré que son état de santé ne requiert pas l’hospitalisation. Moi qui ai promis à François de veiller sur elle hier quand j’ai refleuri sa tombe, il se retournerait dans son cercueil s’il me voyait malmener sa nièce. Mon excuse bidon de mâle blessé dans l’âme me paraît soudain absurde. Elle n’a pas su me dire non sur le coup emportée par son allant. J’ai omis tous les paramètres qui nous ont conduits à nous comporter comme des animaux en rut. Ma soudaine attirance pour Anaëlle a balayé mes bonnes manières, mon corps a parlé pour moi, et je n’ai pas su le faire taire. Le retour à la réalité a été plutôt rude lorsqu’elle s’est enfuie. Au lieu de m’interroger sur son revirement, comme un idiot, j’ai cru bêtement que mon ceinturon et mon chapeau la repoussent ou que mon apparence la révulse. Ce matin, je ne sais plus que penser. Du jour au l
La maison de Scott s’apparente à un petit chalet, tout en bois, où l’on s’immerge dans un monde de douceur. Les poutres amènent ce côté cosy d’un foyer accueillant. Une grande cheminée supporte une tablette, posés dessus, des cadres-photos représentent d’anciens clichés. À la tenue vestimentaire, on les daterait des années ‘80, et d’autres un peu plus vieux. Une femme tenant un bébé sourit tandis qu’elle pose un regard rempli de tendresse sur la petite fille assise sur ses genoux. Cet environnement me plaît, bien plus que la grande demeure de François. Les gadgets m’ont conquise, mais il manque le bien-être d’une vraie maison, les odeurs, les petites choses qui traînent et qui prouvent que le terrain est habité. Scott a laissé un magazine sur la table basse, et dans la cuisine, une tasse attend sous le percolateur. Il n’y a pas de doute sur son lieu de résidence. En faisant le tour, je pousse un cri de surprise en rencontrant un pan de mur vitré.— Anaëlle !Scott arri
Ce merveilleux baiser sous l’arbre du bonheur me transit de bonheur. Anaëlle embrasse comme une déesse, ses lèvres ressemblent à du velours, et sa peau à du satin grège. Elle a apprécié notre tête-à-tête, ce qui n’exclut pas le fait qu’elle joue la comédie. Car elle perdra tout si le mariage tombe à l’eau. Pour l’instant, pas question de broyer du noir, même si la disparition de ma jument me secoue. Le shérif Runway vient en début d’après-midi, une autre affaire l’occupe. Il a promis de se rendre sur les lieux le plus tôt possible. C’est un homme de confiance, sérieux et tout ce qu’il y a d’intègre. Avec lui, les coupables de ces ravages paieront. En attendant, notre balade romantique se poursuit comme je l’ai prévu. J’essaie comme je peux de faire abstraction de mes inquiétudes en me focalisant sur ma future épouse. Gégé s’en est bien tiré, il a su amadouer notre invitée. Quelquefois, sa langue fourchue n’hésite pas à piquer les intrus. Afin de créer une ambiance ap
Scott m’intime de rentrer chez lui sous prétexte de garder Gégé. Franchement ! J’ai l’air d’une nounou pour serpent à quatre pattes ? Malgré mes protestations, il affirme que ma présence ici est indispensable. Pourquoi ne me ramène-t-il pas chez François ? Après réflexion, je me tais et obéis. Scott semble serein... en apparence.Contrainte et forcée, je sors de la voiture en rechignant. Ben oui, les Françaises, ça grogne ! À l’intérieur, tout paraît fade, d’une tristesse sans nom. Il manque l’âme du maître de maison, son odeur, ses muscles en action, sa capacité à me donner l’impression que nous sommes ensemble depuis des lustres. Statufiée sur le seuil, mon regard arpente le grand séjour en observant le vivarium. Gégé a les pattes de devant sur la vitre. Il me supplie de le réconforter comme s’il pressentait la gravité de cette journée. Dire qu’il y a quelques jours, il m’a terrorisée ! Enfin, ma peur n’a pas totalement disparu. Nous avons copiné en partageant n
La tempête a causé pas mal de dégâts, depuis, l’équipe du ranch s’attelle à remettre en place les clôtures, réparer les toits envolés. Frank ainsi que les autres m’ont ordonné d’organiser le mariage sans me soucier de l’intendance. Néanmoins, la mort de Feu Follet me déprime, outrepassant même ma joie de m’unir à ma petite Française. Le shérif Runway piste les responsables. Mais ses soupçons se portent sur mon voisin, Caldum. Or cet ours mal léché peut s’avérer sanguin, mais pas aussi pointilleux que ceux qui ont mis au point l’empoisonnement de ma jument. Le docteur Gary, après les tests, a décrété qu’elle a été empoisonnée (cela on le sait), mais une fois enlevée, elle a été de nouveau intoxiquée, puis relâchée dans la nature. Je préfère ne pas savoir comment elle a agonisé, et Gary a choisi de me laisser dans l’ignorance. Pour l’heure, je suis assis sur un banc, dans le fond de la grande propriété de François, sous le séquoia. Le temps, redevenu sec, présage un épisode de