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La maison du Haut

Penulis: Seth
last update Terakhir Diperbarui: 2025-04-26 21:04:32

À l’autre bout de la ville, bien loin du cliquetis des casseroles de Rose, des rues cabossées de Yassa et des rendez-vous louches dans des dépôts abandonnés, s’élevait La Maison du Haut.

Une villa majestueuse, perchée sur une colline résidentielle, entourée d’un mur en pierres blanches et d’une grille automatisée qui coulissait sans bruit. Devant la grille, deux vigiles en uniforme bleu nuit surveillaient les allées et venues, oreillette vissée à l’oreille, main toujours proche de la hanche.

Le jardin, lui, ressemblait à une brochure de paysagisme : haies parfaitement taillées, allées en marbre rose, et une fontaine centrale en forme de fleur de lys. Le genre d’endroit où même le vent semblait discipliné.

À l’intérieur, la salle à manger baignait dans une lumière naturelle filtrée par des rideaux crème. Sur une longue table en acajou, le petit-déjeuner resplendissait : jus de grenade fraîchement pressé, salades de fruits tropicaux, viennoiseries dorées à point, charcuterie fine, fromages importés.

C’était 7h. Toute la famille Mbala était là.

— Papa, tu n’as pas oublié mon défilé vendredi, hein ? lança Nina, 22 ans, les cheveux tirés en un chignon élégant, tout en tranchant sa mangue comme une pro.

Nathan leva les yeux de son café.

— J’ai dit que je viendrai, princesse. Et j’y serai. Premier rang, caméra en main, comme tous les papas modernes.

Emilia, la cadette, 18 ans, affalée dans sa chaise, grogna :

— Elle, elle a toujours droit à des promesses VIP. Moi, je mentionne juste mon audition de chant, et c’est déjà “réunion au Parlement, ma chérie…” C’est pas juste.

Nathan éclata de rire.

— Ta sœur prépare un projet solide, voilà tout. Elle veut lancer sa marque. Toi, tu veux devenir Beyoncé d’Afrique centrale avec une guitare que tu touches trois fois par semaine…

— Et alors ? Même Beyoncé a commencé quelque part, non ? marmonna Emilia, croissant à la main.

— Je suis sûr qu’elle avait un planning, elle.

— Tsss… vieux jaloux.

Pendant qu’ils s’échangeaient des piques, Samuel, 11 ans, la mine concentrée sur son bol de céréales au chocolat, leva la tête.

— Moi, j’veux juste que papa m’achète la PlayBox. La vraie. Pas les contrefaçons de la boutique à côté du collège.

Nathan, amusé, lui ébouriffa les cheveux.

— On dit s’il te plaît, mon fils. Et seulement si tu m’apportes un 20 en maths ce trimestre.

— Haan ! C’est injuste ! Toi-même, t’as jamais eu 20 en maths !

— Mais j’avais du charisme, rétorqua Nathan en souriant.

— Moi aussi j’ai du charisme ! protesta Samuel.

— Les filles ont jamais eu besoin de notes pour avoir leurs cadeaux, ajouta-t-il, boudeur.

— Parce que nous, on est déjà des cadeaux, lança Nina, espiègle.

Un éclat de rires résonna dans la pièce. Même leur mère, Clarisse, assise au bout de la table avec son café, laissa échapper un petit sourire derrière sa tasse.

Nathan regarda la scène avec une fierté discrète. Il était ce qu’on appelait dans les médias un homme d’État intègre, un patron respecté dans les affaires, redouté dans les négociations. Mais à cette table, il n’était rien d’autre que papa.

Son regard se posa un instant sur Nina. Sa fierté. Sa princesse. Elle avait hérité de sa droiture, de son ambition, mais aussi de cette étincelle qu’il redoutait. Une étincelle qui attire la lumière… et parfois, le feu.

Son téléphone vibra. Il y jeta un œil.

Chauffeur : Le véhicule est prêt. Départ possible dans 5 minutes.

Nathan soupira légèrement et se leva, époussetant son veston noir.

— Bon, mes trésors… le pays m’attend.

Il fit le tour de la table, embrassa sa femme sur le front, donna un clin d’œil à Emilia, tapota la tête de Samuel, et s’arrêta près de Nina.

— Vendredi. Je n’oublie pas. Tu es mon étoile.

Elle détourna les yeux, un peu gênée.

— Papa… arrête avec tes phrases de film, là.

— Un film de ta vie, alors.

Il se dirigea vers la porte d’entrée. Le marbre blanc de l’allée scintillait sous le soleil. Les vigiles se redressèrent à son passage. Il entra dans sa voiture comme un roi dans son carrosse, et referma la portière.

Le convoi s’éloigna doucement, les pneus glissant sans un bruit sur le bitume chaud.

Dans l’arrière-cour de la ville, des destins moins dorés prenaient forme. Dans des ruelles oubliées, des mains échangeaient des colis, des visages se masquaient de sourires factices, et l’argent circulait en silence.

Nathan ne le savait pas encore, mais le monde parfait qu’il avait bâti allait bientôt croiser celui de Fabrice, celui des illusions, des risques, et des vérités qu’on préfère ignorer.

Et parfois, ce sont les routes les plus éloignées qui finissent par se percuter avec le plus de bruit.

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