MasukLe vent soufflait sur les ruines comme une plainte ancestrale. Lina leva les yeux vers le ciel, d’un gris cendré, et sentit sur sa peau la morsure des premières gouttes de pluie. Ce n’était pas une pluie ordinaire — elle tombait avec une lenteur sacrée, comme si chaque goutte portait la mémoire du monde. Tout autour d’elle, les survivants restaient immobiles, les visages levés, écoutant le murmure des éléments, ce langage oublié que la terre avait enfin retrouvé. Depuis la chute du bastion de Ferros, trois jours s’étaient écoulés. Trois jours à marcher, à enterrer les morts, à panser les plaies, à tenter de reconstruire des gestes simples — manger, respirer, croire. Ethan avançait à ses côtés, le regard perdu quelque part entre la douleur et la foi. Ses mains, encore couvertes de traces de suie, tremblaient parfois sans qu’il s’en aperçoive. Ils avaient survécu. Mais à quel prix ? Lina s’arrêta sur une hauteur d’où l’on voyait la vallée entière : un champ de ruines et de cendres. L
Le vent s’était levé avant même que le soleil n’apparaisse. Pas un vent de tempête, ni de colère, mais un souffle ancien, chargé de voix lointaines. Il traversait le camp, faisait danser les tissus, renversait les cendres et caressait les visages endormis. Ce matin-là, le monde semblait respirer à nouveau. Lina sortit de sa tente, drapée dans un manteau de toile claire. La flamme bleue, au centre du camp, brûlait encore, paisible. Autour, les survivants s’éveillaient lentement. Certains murmuraient des prières, d’autres chantaient. Ce n’était plus le camp des errants, ni celui des fuyards. C’était le commencement d’un peuple. Malik la rejoignit, les yeux plissés vers l’horizon. — Le vent change, dit-il. Il ne vient plus du Sud. — Non, répondit Lina. Il vient d’ailleurs. De là où tout recommence. Il hocha la tête, sans comprendre vraiment, mais sans contester. Il avait appris que certaines phrases de Lina ne demandaient pas de réponse. Kael arriva à son tour, tenant une plume bl
L’aube se leva sur un horizon brûlant. Le ciel, d’un rouge presque liquide, semblait se dissoudre dans la terre. Le vent charriait des étincelles de poussière qui brillaient un instant avant de disparaître, comme des fragments de souvenirs. Lina ouvrit les yeux sur ce monde en mutation et sentit que quelque chose avait changé — pas seulement dehors, mais en elle.Le fragment noir qu’elle tenait depuis la veille palpitait doucement dans sa main. Il émettait une chaleur stable, comme un cœur minéral battant au rythme du sien. Elle ne savait pas encore ce qu’était vraiment cette pierre, mais elle sentait son influence : chaque pas qu’elle faisait semblait plus ancré, chaque respiration plus consciente.Les survivants se préparaient en silence. Malik donnait les ordres avec la précision d’un homme qui n’avait plus le luxe de douter. Kael ajustait les sangles de son sac, et Meryn dessinait des symboles sur le sol — des cercles, des lignes, des runes que personne ne comprenait, mais que tou
Le matin s’étira lentement sur les visages marqués de fatigue. Les flammes du camp s’étaient éteintes, ne laissant que des braises rougeoyantes qui palpitaient dans l’air calme. Autour de ces cendres, les survivants se taisaient, chacun absorbé dans ses pensées. Le vent, lui, ne soufflait plus. C’était un silence neuf, presque sacré, comme si la terre retenait son souffle. Lina se leva la première. Ses pas craquaient dans la poussière, et son regard balayait la plaine, désormais couverte de traces humaines : des tentes improvisées, des étendards faits de tissus déchirés, des feux allumés dans la nuit par des mains tremblantes mais vivantes. Ce n’était pas encore une armée — juste des âmes qui avaient décidé de ne plus fuir. — On a fait un miracle, souffla Malik derrière elle. — Pas encore, répondit-elle. Ce qu’on a maintenant, c’est un commencement. Le jeune homme hocha la tête, mais son regard restait inquiet. Il observait les silhouettes des Veilleurs — ces hommes venus du dé
Le jour se levait lentement sur la plaine encore fumante. Une brume dense s’élevait du sol, teintée de lumière dorée, comme si le monde hésitait entre le souvenir du feu et la promesse de l’aube. Lina restait à genoux près du corps de Malik, les mains tremblantes, le souffle court. Ses doigts effleuraient le front du jeune homme, brûlant de fièvre. Chaque respiration qu’il prenait semblait arracher un fragment de douleur à l’air lui-même. — Tiens bon, murmura-t-elle. Tu ne partiras pas encore. Pas cette fois. Autour d’eux, Kael et Meryn se relevaient lentement. Le vent s’était enfin apaisé, mais la terre portait encore les stigmates du combat : des sillons creusés par la force invisible, des pierres éclatées, des traces de cendres dessinant des spirales étranges. Kael s’approcha, son manteau couvert de poussière. — Qu’était-ce que cette chose ? Lina secoua la tête. — Pas une chose. Une mémoire. Quelque chose que Malik a réveillé. Meryn, encore pâle, ajouta : — Il a murmuré un n
Le vent soufflait sur Lumaé avec une force nouvelle, comme s’il voulait éprouver la solidité de cette cité renaissante. Les étendards dressés sur les tours vibraient dans l’air, portant haut le symbole qu’ils avaient choisi : une flamme enfermée dans un cercle ouvert, image de la lumière apprivoisée sans jamais être domptée. Lina observait le spectacle depuis le balcon du Conseil, ses cheveux battus par la brise. En bas, la vie reprenait lentement : les artisans martelaient le métal, les enfants couraient, les voix se mêlaient au rythme des marteaux et des rires. Pourtant, derrière cette façade d’espoir, une inquiétude sourde s’installait dans son cœur. Depuis plusieurs nuits, le vent portait des sons étranges, des échos de voix lointaines, comme des chuchotements à peine audibles. Certains habitants parlaient de présages, d’autres de fantômes. Lina, elle, restait prudente. Elle savait trop bien que la paix n’était jamais qu’un répit. Ethan la rejoignit sur le balcon. — Tu sens ?







