Tous les chapitres de : Chapitre 41 - Chapitre 50
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CHAPITRE 40
BesançonBoris Karpof avait appelé son ex-ami d’enfance. La loi du silence devait être brisée, les faits étaient trop graves. Le vieil animal politique n’était pas facile à dompter. La joute avait commencé.– N’oublie pas Boris, si je plonge, tu plonges avec moi !– Ne me prends pas pour un idiot Georges. On est dans la même galère. Ton méchant toutou a merdé grave. On ne peut pas dire que ce crétin de Jarier va beaucoup me manquer, mais qu’est-ce qui t’a pris d’envoyer Jörg ? Tu sais aussi bien que moi que c’est un cinglé ingérable. Et pourquoi Jarier ?– Il a pris une initiative regrettable. Mais à chaque chose malheur est bon, on va être débarrassé de toute la bande d’un coup.– Il n’y a que Biakry qui soit hors circuit, les autres sont encore là.– Ne t’inquiète pas. Dès cet après-midi, j’appelle la préfète de Haute-Garonne. On va gérer ça entre homologues, les ordres vont redescendre en cascade et demain, ils ne se
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CHAPITRE 41
Moscou été 1957On l’appelait « le boucher », un homme massif au visage inexpressif. Un taiseux. Il était déjà taciturne avant de quitter sa mère patrie, la Russie. Son déracinement, depuis son arrivée en France, avait renforcé son caractère renfermé. À Moscou, il était quelqu’un. Un homme respecté, craint. Ici, il n’était rien qu’un étranger regardé par les « frantsuzskiy » avec dédain, voire suspicion. Ici, il était devenu le ruskof, l’immigré.En situation d’urgence absolue, il avait dû fuir avec sa famille, au début de novembre 1956, grâce à un réseau de camarades : des frères d’armes. L’hiver s’annonçait rude, les premiers froids étaient arrivés en avance d’un bon mois. Mais la météo ne changerait rien, ils ne pourraient pas retarder leur départ pour cause de mauvais temps. Le boucher était sur les listes, et sa famille aussi. Rester au pays signifiait : arrestation, procès, déportation dans un camp du goulag ou pire, exécution ! Pour certains, la dépo
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CHAPITRE 42
Besançon 2018Yannis souriait encore de la réflexion de Sandrine. Il tourna son PC portable vers ses collègues. De portable, il n’avait que le nom : il faisait le poids d’une armoire normande. Un HP série pro boosté au maximum des possibilités actuelles, qui pouvait supporter n’importe quel jeu de l’année. Une bête de puissance que son maître aimait malmener, à pousser dans ses retranchements et, comme tous les flics informaticiens, dans les méandres du NET : aussi bien le « clean » que le « dark ».En plein écran, était affichée une photo anthropométrique d’un type qui toisait un mètre 97. En incrustation, le même homme apparemment dans un environnement qu’ils connaissaient tous : le café à l’ancienne dans lequel Frédo avait serré Jarier.– Je vous présente Jörg Jurgensen, citoyen allemand résidant à Besançon depuis dix ans. Adepte de salles de sport et de gonflette. Il matche aussi dans plein d’articles sur le kickboxing. Il écluse l
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CHAPITRE 43
Besançon 1957La première chose qu’Anatoli aima en France fut le pain. Jusqu’à ses 17 ans, chez lui en Russie, il faisait partie du peuple des sans grades, bien que vivant dans une famille relativement privilégiée. Son père était chef de culture dans une ferme collective, un kolkhoze du sud de Moscou. Le pain manquait souvent, mais au moins mangeait-il presque tous les jours, et plutôt pas mal, enfin, selon le critère russe de l’époque. Au grand dam de son père, Anatoli n’avait pas une âme de paysan. Il vouait une passion dévorante à l’uniforme. Un matin, alors qu’il portait des denrées au marché, il passa devant un stand tenu par des militaires, il mentit sur son âge et intégra l’armée rouge comme ça ; quasiment par hasard.L’ordinaire des soldats était plutôt maigre, fait de pain noir amer et gluant, accompagné de harengs ou de viande séchée. Ce pain de seigle, enfin normalement ce devait être du seigle, était en fait composé de toutes les céréales qui pouvaie
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CHAPITRE 44
Besançon 2018Yannis et sa collègue roulaient en silence, peu enclins à la conversation. Les deux premiers lieux visités n’avaient rien donné. La première coordonnée GPS les avait emmenés devant une salle de sport où personne ne connaissait Jules Dejean. Le responsable leur avait expliqué que le turn-over était important. Si quelqu’un ne venait pas pendant 2 ans, il ne connaissait plus personne. Ils essayèrent quand même.Comme prévu, le jeune Dejean était inconnu. Le propriétaire aussi avait changé, il n’avait même pas gardé le fichier client de son prédécesseur... Son souhait en rachetant le lieu était de hausser le niveau de la clientèle. Ils ne pouvaient même pas savoir si Jules avait été adhérent. Yannis soupira, il lui faudrait éplucher les comptes de « musclor » pour le vérifier.En y réfléchissant, l’option qu’il fut un client régulier était peu probable. À moins d’avoir le sens d’orientation d’un poisson rouge dans un bocal, il n’aurait pas eu be
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CHAPITRE 45
Besançon– Allo, capitaine Sergent ?– Oui…– Karpof. Commissaire Boris Karpof.Damien était sur la défensive, il venait d’apprendre la découverte du corps, il devait les y rejoindre.– Vous m’appelez pour me dire que Frédéric Biakry est libre ?– Euh non, pas tout à fait.– Alors merci commissaire, il me semble que nous n’ayons plus rien à nous dire.– Arrêtez de déconner Sergent, et écoutez-moi au lieu de me faire votre numéro à 2 balles !– Bien, dites-moi, mais dépêchez-vous, il faut que j’appelle un ado de 15 ans dont vous avez enfermé le père. Le fils d’un flic irréprochable…– Mais bon sang, écoutez-moi espèce de merdeux ! Je veux autant que vous que Biakry sorte, je sais qu’il n’y est pour rien…Damien attendit un délai raisonnable. Le ton paternaliste du commissaire ne lui faisait ni chaud ni froid, mais comme le fond du discours changeait, il éta
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CHAPITRE 46
Besançon, hôtel du groupeToc toc…– Qui est là ?Un chuchotement lui répondit.– Moi. – Qui moi ?– Ouvre bordel, t’en connais beaucoup des nanas à Besançon qui viennent gratter à ta porte à une heure du mat ?Les huisseries étaient si fines que la conversation aurait pu se prolonger ainsi toute la nuit. Ça n’aurait pas gêné Yannis, tant il trouvait la situation cocasse. Après réflexion, il la fit entrer. S’il pouvait l’entendre, il se dit que les autres le pouvaient aussi, et il avait des scrupules à risquer réveiller tous ces braves travailleurs en semaine... Elle se tenait sur le palier avec deux canettes à la main.– J’ai besoin d’un témoin ou pas ?Elle le regarda, interloquée.– Je demande ça, au cas où tu espères abuser de moi.– Couillon va, je pourrais être ta grande sœur ! Je fumais une clope : insomnie. J’ai vu de la lumière, et me voilà. Tu veux u
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CHAPITRE 47
BesançonDamien était de sale humeur. Mauvaise nuit, très mauvaise nuit. La veille, pendant le dîner, il leur avait dit qu’il voulait partir tôt, avant les embouteillages. Ils avaient besoin de décompresser et avaient décidé qu’ils feraient un point au petit-déjeuner et, bon sang, ils n’étaient pas levés. Yannis, encore, il comprenait, il avait la trace de l’oreiller jusqu’à 9 h tous les matins, mais Sandrine, jamais elle n’était en retard. Il alla toquer à la porte du jeune. Il lui fallut insister longuement ! Quand elle ouvrit enfin, le geek avait vraiment la tête à l’envers. – Yannis, qu’est-ce que tu fous. Magne, je t’attends au p’tit dej. – Oh bordel, chef, tu es con ! Tu veux réveiller tout l’hôtel ou quoi ?Le capitaine lui mit sa montre sous le nez.– Je ne risque pas de déranger grand monde. Il est sept heures, ils sont déjà tous partis !La mauvaise foi était évidente, il était six heures quarante. Le j
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CHAPITRE 48
BesançonLe bâtiment était d’apparence très moderne, un peu clinquant. Une jolie façade sur un vieil immeuble. Damien avait recherché des renseignements sur la toile pour se guider dans le CHRU. Comme souvent, leur site était superbe. Ils avaient dû dépenser une petite fortune pour faire un site internet : élégant, agréable, informatif et... inutile. La seule chose dont il avait besoin était de savoir où se situait le bâtiment bleu. D’après les informations décrites, il y avait deux sites, mais quid de Minjoz ou Saint-Jacques ? Impossible de trouver le renseignement, ou alors, l’indication était tellement bien cachée qu’il avait jeté l’éponge. Il avait donc appelé.Le bâtiment bleu était le service Oncologie. Étrange ! Le nom marqué sur le chambranle de la porte ne lui dit rien du tout : Roger Mongin. Une chambre à un seul malade. Un type grand, d’une maigreur extrême. Son teint crayeux et sa peau translucide évoquaient une visite imminente de la Camarde.
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CHAPITRE 49
Bois de Pugey 2011Séverine terminait d’enfiler ses chaussures de running, trop contente de son cadeau. Son Frédo ne s’était pas moqué d’elle, sa réaction en disait long sur le plaisir qu’il lui avait procuré :– Wow je vais voler avec ces pompes ; elle les avait fait tourner en l’air ! Regarde comme elles sont légères... Et ces semelles, le top de l’amorti.– Va les essayer. Nous, on va faire un tennis avec Matthieu, sauf si tu veux jouer avec nous. On peut faire un tournoi, c’est Nathan qui arbitre.Penser à leur petit bout de huit ans en juge de chaise la fit sourire.– Ah ah ! Vous voir courir désespérément après cette balle trop rapide pour vous : l’idée est alléchante, mais non merci. Je vais faire un tour en forêt pour roder mon cadeau, n’oublie pas que j’ai un trail dans un mois près d’Anduze.Frédo la regarda partir à petites foulées. Elle lui jeta un baiser porté par le vent, assorti de son incroyable sou
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