Une tape sur l’épaule la fit sursauter. Son regard se tourna automatiquement vers sa mère qui l’observait, un sourire malicieux aux lèvres. Il était temps pour le traditionnel lancer du bouquet.
« Ah non, maman ! Je t’ai déjà dit que je ne suis pas intéressée par tout ça », répliqua Samira en haussant les sourcils, ses yeux presque fuyants.
Sa mère la fixa d’un regard insistant, une moue déterminée sur le visage. La leçon de cette journée, c’était qu’il n’était pas question de refuser. Pas ici, pas maintenant.
Sans autre choix, Samira se leva et se dirigea vers la piste de danse, rejoindre les autres demoiselles d’honneur. Elle se moquait des coutumes, des attentes. Mais ce jour-là, elle n’avait pas l’intention de faire de vagues.
Le bouquet vola, et comme prévu, une des filles se jeta sur le petit bouquet de fleurs avec une telle force qu’elle tomba presque. Samira, avec un léger sourire, profita de l’effervescence pour se glisser en retrait et regagner son siège. Mais dans sa hâte, elle heurta quelqu’un
« Excusez-moi, madame », s’excusa une voix grave, assurée.
Samira releva la tête, reconnaissant la silhouette familière. « Ce n’est rien, Malick », répondit-elle presque sans y penser, sa voix trahissant une surprise mêlée à une touche de tendresse. Une tendresse qu’elle n’avait pas ressenti depuis longtemps.
Malick, intrigué, remarqua la familiarité de son ton. Cette manière de l’appeler, comme s’il l’avait déjà rencontrée. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres, à peine perceptible, mais suffisant pour éveiller une certaine curiosité en lui. Il se demandait bien ce qui se cachait derrière cette apparence si distante et réservée. Puis soudain tout devint plus claire.
« Samira, c’est ça ? » demanda-t-il, son regard perçant se posant sur elle avec plus d’intensité qu’il ne l’aurait voulu. Un brin d’amusement se mêlait à l’étonnement dans ses yeux.
Elle hocha la tête, son sourire à peine visible. « Oui. Ça fait longtemps. »
Elle avait changé. C’e n’était plus la petite rondelette, avec l’acné sur le visage qui était peu sur d’elle. Elle était ravissante dans sa robe « terracotta ».
« Bien trop longtemps, je dirais. » Sa voix se fit plus douce, moins assurée, comme si cette rencontre inopinée venait de raviver quelque chose qu’il avait longtemps ignoré.
Avant que Samira n’ait eu le temps de répondre, la musique se fit plus forte, et d’autres invités se pressaient autour d’eux. Un léger malaise s’installa, mais les deux restèrent là, figés, comme deux personnes qui s’étaient croisés après des années d’absence. Mais l’air entre eux était bien plus chargé que ça.
Il l’invita sur la piste de danse. Elle ne se fit pas prier, et se lâcha sur une musique endiablé de Meiway.
Ces retrouvailles lui avait fait du bien. Elle était en sécurité, elle pouvait se lâcher et profiter.
Abel-Malick et Samira, deux âmes liées par le passé, se retrouvaient pour la première fois, et tout était sur le point de changer.
Chapitre 2 :
Le lundi qui suivit le mariage, Samira reprit le cours normal de sa vie. Dans son bureau, le matin était dédié à l’analyse des rapports de performance des agences de la banque. Responsable du Réseau d’Agence, elle veillait scrupuleusement à ce que chaque objectif soit atteint, et ce n’était pas une tâche facile. Ses journées se déroulaient en suivant un rythme effréné, mais elle ne s’en plaignait pas. Le travail était son ancrage, sa zone de confort, un lieu où elle contrôlait les choses.
Alors qu’elle était absorbée par une analyse comparative de la performance trimestrielle, Agnès, son assistante avec laquelle elle avait rapidement tissé des liens, fit irruption dans son bureau, un magazine People à la main.
« Boss, mais pourquoi tu m’as caché ça ? » dit-elle en agitant le magazine sous ses yeux.
Samira leva les yeux de son écran, visiblement surprise. « Pardon ? » répondit-elle, incrédule.
Agnès sourit malicieusement. « Tu es en pleine page dans le magazine People, avec le célibataire le plus convoité du pays. »
Samira se redressa, perplexe. Elle jeta un coup d’œil au magazine qu’ Agnès tenait encore devant elle. L’image la frappait : une photo d’elle et Abel-Malick Touré en pleine danse lors du mariage, éclatants de complicité.
« Ah, je vois… » murmura Samira, un léger sourire en coin. « Mais Agnès, je connais Malick depuis que je suis toute petite. Il n’y a rien d’extraordinaire là-dedans." elle prit une inspiration, cherchant à retrouver son sérieux. « Un peu de tenue, s’il te plaît. Ce n’est pas très professionnel de ta part. Ce n’est pas l’heure de la pause pour que l’on papote sur ce genre de futilités. »
Agnès lui adressa un sourire d’excuse, mais il était évident que l’information l’amusait. « Excuse-moi, Boss, je retourne à mon poste. Mais attends-toi à des représailles de Miss Palenfo et de son frère. Ils ne supportent pas Abel-Malick Touré. »
Samira haussait un sourcil, intriguée. « Pourquoi ? »
Agnès, un brin excitée de dévoiler des rumeurs internes, se rapprocha et se pencha vers Samira. « Sonia et Franck Palenfo sont les enfants d’Hélène Palenfo Touré, la belle-mère de Malick, issu de son premier mariage. Mais même s’ils ont grandi en partie à la résidence des Touré, monsieur Touré ne les a jamais vraiment adoptés. Du coup, Malick est l’unique héritier du groupe BSA, la Banque Solidaire d’Afrique. Ils le voient comme un concurrent, un adversaire à abattre. »
Franck et Sonia Palenfo était respectivement Directeur général Adjoint et Directrice de la conformité à la BSA.
Samira laissa échapper un soupir, un peu lassée par ces histoires de famille qui semblaient se jouer à un autre niveau. Mais l’information de Maryline ne lui échappait pas : les tensions entre les différents membres de la famille Touré étaient un sujet sensible, et Malick, malgré sa position, devait naviguer dans ce labyrinthe familial avec une certaine précaution.
« Il ne faut surtout pas afficher de liens avec lui, surtout pas en public, sinon tu risques de devenir une cible pour eux, » ajouta Agnès en faisant une pause dramatique. « Et crois-moi, ils savent être cruels. »
Samira savait que, comme beaucoup de grandes entreprises, le groupe BSA n’échappait pas aux travers du népotisme et des luttes de pouvoir familiales. Elle se demandait si elle ne venait pas de tomber dans une entreprise où les relations familiales et les rivalités personnelles primait sur la compétence professionnelle.
Elle se recula légèrement dans son fauteuil, pensive. Elle n’était pas du genre à se laisser intimider, mais les implications de cette nouvelle information la troublaient. Son travail ici allait-il devenir un champ de bataille entre les différents clans, où elle serait prise en étau sans même l’avoir voulu ?
La sonnerie de son téléphone la sortit de ses pensées. Un message de Franck Palenfo venait de s’afficher. C’était bref et direct :
« On se voit demain matin à 10h, dans mon bureau. »
Elle savait qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’y aller. La banque n’était pas un lieu où l’on pouvait rester en dehors des jeux de pouvoir. Mais elle avait un pressentiment : rien n’allait être simple ici.