Peut-être par culpabilité d'avoir offert le même cadeau, Louis m'a proposé de m'emmener à l'entreprise.
Comme je n'étais pas bien et je ne voulais pas conduire, je n'ai pas refusé.
Il se tenait devant sa voiture, les sourcils froncés jusqu'à l'extrême.
Je ne sais pas quand cela avait commencé, mais Louis avait fini par détester me voir monter dans sa voiture. Il ne supportait plus que je prenne la place passager et m'avait poussée à acheter la mienne.
Peut-être parce qu'à ce moment, je m'étais acharnée à revendiquer ce siège comme une possession, à la limite de l'obsession. Il en avait eu assez.
Et pourtant, ce jour-là, pour Yukki, il avait décoré l'habitacle de peluches de chats et de stickers mignons. Même le siège passager avait été entièrement repensé pour convenir à sa petite taille.
Me voyant attendre à côté, il a fini par ouvrir la portière, et a déplacé les peluches vers l'arrière.
Je l'observais faire des allers-retours, et je lui ai dit avec les sourcils froncés : « Laisse tomber, je vais y aller seule. »
Louis a jeté la dernière peluche à l'arrière : « Viens quand même, Yukki adore ce genre de trucs, elle est toute vive, toujours à les tripoter... Faut pas t'en formaliser. »
En voyant le siège rose totalement détonner avec le reste de l'intérieur, j'ai refusé.
Oui, ça me dérangeait vraiment.
J'ai ouvert la portière de ma propre voiture, mais Louis m'a devancé d'un bond, et s'est installé côté conducteur.
« Je conduis. On a dit qu'on y allait ensemble. »
Je l'ai regardé un long moment, et j'ai bien remarqué ce malaise furtif passer dans ses yeux.
Donc, il savait. Il savait que la décoration du siège passager était de trop.
Il voulait encore dire quelque chose, mais je l'ai coupé : « On va être en retard. Démarre. »
Il a pincé les lèvres et a mis le contact.
Au feu rouge, son téléphone a sonné.
Rien qu'à la sonnerie, je savais de qui il s'agissait.
Une voix douce et légèrement pleurnicharde, étouffée de sanglots, a traversé le haut-parleur :
« Loulou... j'ai trop mal au ventre... Je crois que j'ai mangé un truc pas frais hier... Tu peux m'emmener à l'hôpital ? Viens, s'il te plaît… t'es le meilleur… »
Louis a raccroché sans un mot.
Sans même me regarder, il a tourné le volant pour s'arrêter sur le côté, défait rapidement ma ceinture, et a dit d'un ton sans appel : « Une salariée ne se sent pas bien, je vais voir. On est presque arrivés, tu peux marcher le reste. »
Je n'ai pas encore refermé la portière qu'il est déjà parti, voiture lancée à toute vitesse.
