Chapitre 4

Le hall s'est figé dans un silence si total qu'on aurait entendu une épingle tomber. Tout le monde fixait Thalassa avec stupeur, mais la seule réaction qui comptait pour elle était celle de Kris.

Les narines de Kris ont frémi, ses yeux se sont écarquillés, comme s'il exigeait une confirmation de ce qu'elle venait d'annoncer.

« Oui », confirmé d'un hochement de tête sincère. « C'est vrai. Je l'ai appris hier. C'est pour ça que je t'ai appelé autant de fois. Je voulais te partager cette bonne nouvelle, mais tu n'as jamais répondu. Et quand j'ai envoyé un message en disant que j'avais quelque chose d'important à te dire, c'était ça que je voulais partager. »

Elle a retenu son souffle, guettant la moindre réaction de Kris, anxieuse de sa réponse. Ses yeux scrutaient son visage, comme à la recherche du moindre signe de mensonge, son regard devenant hésitant.

Juste au moment où Thalassa a cru qu'il allait la croire, sa mère a surgi. « Mon fils, après tout ce qu'elle a fait, tu ne peux sérieusement pas croire un seul mot qui sort de la bouche de cette putain. Elle ment ! Elle dit ça exprès pour que tu ne divorces pas. »

« Je ne mens pas ! » a déclaré Thalassa avec force. « Dès que j'ai découvert que j'étais enceinte, je l'ai dit à Karen. Elle… »

« Pourquoi tu continues à m'entraîner dans tes mensonges ? Tu ne m'as rien dit du tout. » Karen a nié une fois de plus.

Cette fois, Thalassa n'a pas été surprise par cette trahison. Mais la douleur qu'elle a ressentie n'en a pas été moins vive.

À cet instant, l'expression troublée de Kris a cédé la place à cette froideur tranchante qu'elle connaissait trop bien. Il a serré les dents et a dit entre les mâchoires crispées : « Sors d'ici. »

Thalassa a tressailli, la gorge nouée. « Kris, je viens de t'annoncer que je suis enceinte. Tu veux vraiment que je parte ? »

« Je ne tomberai plus dans tes mensonges. Je veux que tu disparaisses de ma vie. Je ne te supporte plus. Je te hais, Thalassa Thompson. »

Les larmes ont embué les yeux de Thalassa, elle a secoué vigoureusement la tête pour nier. « Tu… tu ne le penses pas vraiment. »

Kris a laissé échapper un rire glacial qui l'a glacée jusqu'aux os. « Tu as raison. Je ne le pense pas. Parce que je ne te hais pas, Thalassa. Je te méprise profondément. »

Les larmes ont enfin glissé le long de ses joues. À cet instant, une douleur aiguë et intense au cœur lui transperçait le corps comme un couteau. Il lui a fallu quelques secondes pour que cette souffrance s'atténue un peu.

« Très bien », a-t-elle fini par dire en essuyant violemment ses larmes. « Donne-moi un stylo. Je vais signer les papiers du divorce. »

Elle en avait assez. Assez d'être humiliée. Assez de devoir prouver son innocence à Kris. S'il la méprisait, alors soit.

Un stylo a été tendu devant elle. Elle ne s'est même pas souciée de savoir qui le lui avait donné. Elle l'a attrapé d'un geste sec et s'est dirigée vers la table au centre du salon. Elle s'est accroupie, a posé les papiers sur la table et a signé chaque page là où il fallait.

Une fois terminé, elle a refermé le dossier et est revenue vers Kris.

« Tiens », a-t-elle dit d'un ton neutre, le visage impassible. « C'est signé. Comme tu le voulais. »

Kris a pris les papiers sans la quitter des yeux. « Dis-moi où envoyer tes affaires quand tu auras pris ta décision. Je ferai le nécessaire. »

Il a aussitôt tourné les talons et est monté à l'étage sans même lui accorder un dernier regard.

Une fois qu'il a disparu de sa vue, Thalassa s'est lentement retournée pour regarder les personnes derrière elle. Ils ont tous arboré un sourire triomphant, sauf Karen, qui n'a même pas eu le courage de la regarder.

« Qu'est-ce que tu fais encore là, salope ? Mon frère est divorcé de toi maintenant. Tomas, dégage-la. » a lancé Tyler, le frère de Kris.

Alors que le garde s'approchait pour l'attraper par le bras, Thalassa s'est dégagée brusquement et a répliqué froidement : « Je connais le chemin pour sortir. »

Elle a relevé la tête, fière, en marchant vers la porte. Mais en passant près de son ex-belle-mère, celle-ci lui a agrippé le bras pour lui murmurer à l'oreille : « Tu crois vraiment que tu vas garder ce bat*rd que t'essaies de faire passer pour mon petit-fils ? »

Quand Linda Miller a enfin lâché prise, Thalassa n'a rien répondu. Elle a continué sa marche. Même si elle l'avait voulu, elle n'aurait rien pu dire. Elle était tout simplement épuisée. Vidée. Engourdie.

Pendant un an, elle a tout supporté : l'indifférence soudaine de Kris, l'humiliation constante de sa famille. Elle a tout donné pour sauver son mariage. Et au final ? Rien. Elle n'a rien obtenu. Tout a été vain.

Après avoir franchi les portes du Manoir Miller, Thalassa a continué à marcher. Elle ignorait où elle allait ni depuis combien de temps elle avançait. Tout ce qu'elle savait, c'était que son monde s’était écroulé… et qu'elle ne savait pas comment le reconstruire.

Soudain, une main l'a saisie par-derrière et l'a violemment poussée dans une ruelle sombre. Les contours du monde se sont brusquement éclaircis. Le cœur de Thalassa a raté un battement. Elle a crié de frayeur, mais l'homme a aussitôt plaqué une main sur sa bouche.

« N'ose même pas crier ! » a-t-il murmuré d'une voix menaçante. C'était un homme, masqué.

Thalassa a réalisé à quel point il était imprudent de traîner seule à cette heure.

Non, elle ne pouvait pas laisser quoi que ce soit lui arriver. Elle en avait déjà trop vécu pour supporter ça en plus.

Elle a mordu sa main de toutes ses forces. Il a hurlé de douleur et l'a relâchée, mais avant qu'elle ne puisse fuir, il l'a saisie à la gorge, l'a plaquée contre le mur, et lui a donné un coup de genou en plein ventre.

Thalassa a émis un cri étouffé, les yeux écarquillés de terreur. Son bébé !

« Ne me fais pas de mal… Je t'en supplie, ne me fais pas de mal », a-t-elle imploré. « Prends tout ce que j'ai, mais je t'en supplie, ne me touche pas. Je suis enceinte. »

L'homme a ricané sans pitié. « Tu crois que ça m'importe ? » Il s'est penché près de son oreille et a murmuré : « Je suis juste là pour te passer un message : la prochaine fois, ne te mêle plus de ce qui ne te regarde pas. »

Il lui a donné un second coup de genou, encore plus violent. Thalassa a gémi de douleur, son corps s'est effondré au sol.

Allongée, elle a tenu son ventre en sanglotant faiblement : « Je t'en supplie… Ne me fais pas de mal… Je suis enceinte… Pourquoi tu fais ça ? Je t'en supplie… Aie pitié… Je t'en supplie… »

Ses supplications n'ont servi à rien. L'homme a commencé à lui donner des coups de pied violents au ventre, encore et encore. Plus elle suppliait, plus il frappait fort.

Quand il s'est enfin arrêté, le visage de Thalassa était inondé de larmes, et des gémissements douloureux lui échappaient. Il a fallu plusieurs secondes avant qu'elle comprenne qu'il était parti.

Tout son corps lui faisait mal. Elle s'est appuyée sur ses mains pour se redresser de force. Mais elle s'est figée en réalisant qu'elle saignait. Le sang avait imprégné sa culotte et formait une flaque entre ses cuisses.

La panique l'a submergée. Non ! Son bébé ! Son bébé ! Elle devait le sauver.

Avec ses dernières forces, elle est sortie de la ruelle, murmurant d'une voix brisée : « Au secours… S'il vous plaît, aidez-moi… »

Elle a tenté de se lever, mais la douleur était insupportable. Rampant, elle a continué à appeler à l'aide.

Elle a aperçu une femme approcher, tendant faiblement la main vers elle. « S'il vous plaît… aidez-moi… »

Mais la femme, terrifiée, a fait volte-face et s'est enfuie sans même se retourner.

« Non… s'il vous plaît, ne partez pas. Aidez-moi. »

Elle devenait de plus en plus faible. Le monde tournait autour d'elle, elle s'est effondrée au sol et a totalement perdu connaissance.