David
J’essaie de bouger.
Impossible.
Mes jambes sont figées, comme si des chaînes invisibles me retenaient.
L’homme sur le trône me fixe, immobile.
Son regard me brûle, mais je ne peux pas détourner les yeux.
— Qui êtes-vous ? ma voix tremble.
Un silence. Puis, il sourit lentement.
— Tu me connais déjà.
— Non…
— Si.
Je secoue la tête, tentant d’échapper à cette présence oppressante.
— Je ne vous ai jamais vu.
— Mais moi, je t’ai vu. Depuis toujours.
Je frissonne.
Autour de nous, le temple semble respirer, ses murs vibrants d’une énergie obscure.
Le sol sous mes pieds devient brûlant.
— Je ne comprends pas.
— Tu comprendras.
Il se lève.
Son mouvement est fluide, trop fluide. Comme s’il glissait plutôt que de marcher.
Je recule.
— Pourquoi suis-je ici ?
— Parce que le moment est venu.
Le moment ?
Mon cœur cogne dans ma poitrine.
Tout ceci n’a aucun sens.
Je ferme les yeux, tentant de me réveiller.
Mais quand je les rouvre…
Il est juste devant moi.
Je sursaute, étouffant un cri.
Il pose une main glacée sur mon épaule.
— Tu es prêt.
Non.
Je ne suis pas prêt.
Je ne veux pas être là.
Je veux partir.
Mais ma bouche refuse de prononcer ces mots.
Alors, il murmure quelque chose.
Et soudain…
Tout bascule.
---
Je suis allongé dans mon lit.
Le plafond au-dessus de moi est familier.
Mon souffle est court.
Je me redresse en sursaut, le cœur battant.
Un cauchemar.
Ce n’était qu’un cauchemar.
Mais alors…
Pourquoi ma peau brûle-t-elle encore là où cet homme m’a touché ?
Je regarde mon bras.
La marque.
Elle est encore plus sombre.
Elle semble pulser, comme un cœur qui bat.
Non…
Quelque chose ne va pas.
Je dois voir mon grand-père.
---
Je descends précipitamment les marches, mon corps encore tremblant.
La maison est silencieuse.
Trop silencieuse.
Je pousse la porte du salon.
Vide.
Je traverse le couloir, frappant à la porte de mon grand-père.
— Grand-père ?
Pas de réponse.
J’ouvre doucement.
La chambre est sombre.
Mais…
Le lit est défait.
Et il n’est pas là.
Un frisson me parcourt.
Ce n’est pas normal.
Je me retourne brusquement.
Et je la vois.
Le Corbeau est là.
Elle me regarde, son sourire effrayant.
— Il est parti.
Ma gorge se serre.
— Où ?
— Trop loin pour toi.
— Vous mentez !
Elle éclate de rire.
— Tu le sais, David. Tu as vu ce qui t’attend.
Je recule, mes poings serrés.
— Je vais le retrouver.
— Oh, bien sûr.
Son regard s’assombrit.
— Mais
seras-tu prêt à voir la vérité ?
---
La vérité…
Je ne sais pas si je suis prêt.
Mais je n’ai pas le choix.
Je dois le retrouver.
Même si cela signifie affronter mon destin.
David
Je ne dors plus.
Depuis cette nuit, quelque chose a changé.
L’air dans la maison est plus lourd. Plus oppressant. Comme si des ombres invisibles se déplaçaient entre les murs.
Mon grand-père est introuvable.
Et Le Corbeau m’observe.
Toujours là.
Toujours à l’affût.
Elle ne dit rien.
Elle attend.
Mais moi, je n’attends plus.
Je vais découvrir ce qu’ils cachent.
---
La maison de mon grand-père est vieille. Trop vieille.
Ses couloirs sont pleins de secrets.
Et il y a une porte.
Une porte que je n’ai jamais eu le droit d’ouvrir.
Elle est au fond du couloir, à côté de la pièce où mon grand-père passe ses journées à prier.
J’y suis déjà passé des centaines de fois.
Mais cette nuit, elle m’appelle.
Comme un murmure dans ma tête.
Un avertissement.
Ou une invitation.
J’hésite.
Puis, je tends la main.
Mes doigts frôlent la poignée froide.
Un frisson me traverse.
Quelque chose derrière cette porte me regarde.
Je le sens.
Mais je ne recule pas.
Je tourne la poignée.
La porte s’ouvre dans un grincement.
Un souffle glacial me frappe le visage.
L’obscurité.
Dense.
Insondable.
Je fais un pas.
Puis un autre.
Et la porte se referme derrière moi.
---
L’odeur est étrange.
Un mélange de cire brûlée, d’encens et de quelque chose de plus… profond.
Plus ancien.
Un escalier descend dans les entrailles de la maison.
Je n’avais jamais su qu’il existait.
Où mène-t-il ?
Je ne réfléchis plus.
Je descends.
Mes pas résonnent sur la pierre froide.
Les murs sont couverts de symboles gravés.
Des inscriptions que je ne comprends pas.
Mais certaines me semblent familières.
Ma marque.
Elle est partout.
Des dizaines, des centaines de fois.
Je pose la main sur l’un des symboles.
Et soudain…
Un éclair me traverse le crâne.
Une douleur fulgurante.
Des images explosent devant mes yeux.
— Un homme en robe noire, assis sur un trône d’obsidienne.
— Une femme aux yeux rouges, murmurant des paroles inconnues.
— Mon grand-père… agenouillé devant eux.
Je hurle.
Et tout s’arrête.
Je suis à genoux, la main crispée contre mon front.
Mon souffle est court.
Ces visions…
Elles ne sont pas réelles.
Elles ne peuvent pas l’être.
Je dois avancer.
Je me redresse et continue.
Plus bas, une lumière vacille.
Une torche.
Quelqu’un est ici.
Je ralentis.
Je retiens mon souffle.
J’avance prudemment.
Et quand j’arrive en bas des marches…
Je le vois.
Mon grand-père.
Debout au centre d’un cercle tracé au sol.
Il murmure.
Des mots que je ne comprends pas.
Des mots qui résonnent dans l’air comme des échos d’un autre monde.
Son corps est tendu.
Son visage…
Différent.
Comme marqué par quelque chose d’invisible.
Je veux parler.
Je veux crier son nom.
Mais une main glacée se pose sur ma bouche.
— Chut.
Le Corbeau.
Son souffle froid caresse ma nuque.
— Ne le dérange pas.
Je me débats.
Mais elle me retient fermement.
— Regarde bien, David.
Je lève les yeux.
Et c’est à ce moment-là que je le vois.
L’ombre.
Immense.
Elle se dresse derrière mon grand-père.
Deux yeux rouge sang brillent dans les ténèbres.
Et une voix, grave, résonne dans la pièce.
— Il est enfin prêt.
Je veux fuir.
Mais c’est trop tard.
L’ombre me voit.
Et elle m’attend.
Je ne pouvais plus fuir.Elles étaient là. Trois paires d’yeux brillant dans l’obscurité, me fixant avec une intensité qui m’enserrait la poitrine. J’étais paralysé. Mon souffle s’étranglait dans ma gorge. La marque sur mon bras brûlait, comme si un fer rouge s’enfonçait sous ma peau.Puis, une voix a brisé le silence.— Il est prêt.C’était le Corbeau.Son ombre s’est avancée dans la pièce, glissant comme une silhouette sans poids. Derrière elle, la Mouche Tsé-Tsé et le Hibou restaient en retrait, mais je sentais leur présence, menaçante et oppressante.— Viens.Ma gorge était trop sèche pour parler. Mes jambes refusaient de bouger.— Viens, David.Elle a tendu la main.La marque sur mon bras a pulsé. Une chaleur étrange s’est répandue dans mon corps, affaiblissant ma volonté. Une partie de moi voulait obéir.Non.Je ne pouvais pas.Alors j’ai fait ce que mon grand-père m’avait appris à faire quand j’étais enfant.J’ai prié.Dans ma tête, je répétais les mots qu’il m’avait transmis,
DavidJe ne peux pas dormir.Les mots de mon grand-père résonnent dans ma tête."Elles ne s’arrêteront pas. Il faut que tu sois prêt."Qu’est-ce que ça veut dire ? Prêt à quoi ?Je me redresse sur mon lit, le souffle court. La sueur colle mes vêtements à ma peau. La chambre est plongée dans l’obscurité, seulement troublée par le reflet de la lune sur le sol.Puis, un bruit.Un chuchotement.Je tends l’oreille.C’est dehors.Le vent souffle, mais ce n’est pas le vent qui parle.Je me lève lentement.Je ne veux pas y aller, mais quelque chose m’y pousse.Je pose la main sur la poignée de la porte.Ma paume est moite.J’ouvre.Le couloir est vide.Mais je sens une présence.Je descends les marches avec précaution, mon cœur battant à tout rompre.En bas, la grande porte qui donne sur la cour est entrebâillée.Quelqu’un est sorti.J’hésite.Et puis, j’entends mon nom.Un murmure.— David…Je sursaute.La voix vient de dehors.Je ne devrais pas y aller.Mais je n’ai pas le choix.---La nui
DavidJ’essaie de bouger.Impossible.Mes jambes sont figées, comme si des chaînes invisibles me retenaient.L’homme sur le trône me fixe, immobile.Son regard me brûle, mais je ne peux pas détourner les yeux.— Qui êtes-vous ? ma voix tremble.Un silence. Puis, il sourit lentement.— Tu me connais déjà.— Non…— Si.Je secoue la tête, tentant d’échapper à cette présence oppressante.— Je ne vous ai jamais vu.— Mais moi, je t’ai vu. Depuis toujours.Je frissonne.Autour de nous, le temple semble respirer, ses murs v
DavidL’ombre me fixe.Ses yeux rouges transpercent l’obscurité.Mon souffle se bloque.Mon corps refuse de bouger.Derrière moi, Le Corbeau resserre son étreinte, ses doigts glacés m’empêchant de fuir.— Tu ne peux plus reculer, David.Sa voix est un murmure, mais elle résonne comme une sentence.Mon grand-père continue de murmurer des paroles incompréhensibles.Il ne semble pas voir l’ombre derrière lui.Ou peut-être qu’il sait.Peut-être qu’il l’attendait.Mon cœur bat à tout rompre.Je veux crier.Je veux lui dire d’arrêter.Mais aucun son ne franchit mes lèvres.L’ombre fait un pas en avant.Le sol tremble sous son poids.L’air devient plus lourd, presque irrespirable.Et soudain…Elle parle.— David.Ma gorge se serre.Comment connaît-elle mon nom ?Je recule d’un pas, mais Le Corbeau me retient fermement.— Il est temps.Je secoue la tête.Non.Je ne sais pas de quoi il parle, mais je refuse.L’ombre tend une main vers moi.Ses doigts sont longs, démesurés.Un frisson me parcou
DavidLe silence est pesant.Mon grand-père est mort.Son corps gît devant moi, son visage figé dans une expression de douleur.Mais quelque chose ne va pas.Son corps… semble se dissoudre dans l’ombre.Comme si la nuit elle-même l’avalait.Je recule d’un pas, le cœur battant à tout rompre.L’ombre qui m’a parlé se tord, furieuse.Elle ne bouge pas, mais je sens son regard sur moi.— David… tu n’as pas le choix.Sa voix résonne dans ma tête.Elle n’a même plus besoin de parler.Je la sens en moi, comme un murmure insidieux.— Je ne veux pas t’écouter.Ma propre voix tremble, mais je refuse de me laisser dominer.Le Corbeau s’avance lentement derrière moi.Son regard est froid, calculateur.— Tu es à nous, David. Depuis toujours.— Non.Je fais un pas en arrière, mais elle rit doucement.— Regarde ton bras.Je baisse les yeux.La marque sombre pulse sur ma peau, plus intense que jamais.Elle semble vivante.Comme si elle voulait s’étendre, m’envahir.Mon souffle se bloque.Mon grand-pè
DavidJe suis à genoux, le souffle court.La marque sur mon bras pulse, une chaleur insoutenable s’en dégage, comme si ma peau brûlait de l’intérieur.Je lève les yeux.Le Corbeau, le Hibou et la Mouche Tsé-Tsé me surplombent, leurs visages voilés d’ombre.Elles me scrutent, impassibles, patientes.Elles savent.Elles savent que je lutte, que je refuse d’accepter leur vérité.Mais elles savent aussi que le temps joue en leur faveur.Je sens quelque chose ramper sous ma peau.Un frisson me traverse.— Qu’est-ce que vous m’avez fait ?Ma voix tremble, mais je veux comprendre.Le Corbeau s’agenouille devant moi.Son sourire est lent, mesuré.— Nous ne t’avons rien fait, David.Elle effleure mon bras du bout des doigts.La marque s’illumine d’une lueur rougeâtre.Je me crispe, un feu incandescent me traverse.— Tout ceci est déjà en toi.Le Hibou s’avance à son tour, sa silhouette longue et élancée se fond dans l’obscurité mouvante.— Depuis ta naissance.Je serre les dents.— Vous mentez
DavidJe suis assis dans l’obscurité, le dos appuyé contre le mur froid de ma chambre.Le silence est lourd.Oppressant.Je n’ai pas bougé depuis des heures, incapable de détacher mon regard de la marque sur mon bras.La lueur rougeâtre s’est estompée, mais je peux encore la sentir sous ma peau, une présence sourde et menaçante.Les mots du Corbeau, du Hibou et de la Mouche Tsé-Tsé résonnent en boucle dans ma tête.— Tu ne peux pas lutter contre ce que tu es.Mes poings se serrent.Je refuse d’accepter leur vérité.Je ne suis pas comme elles.Je ne serai jamais comme elles.Pourtant, une partie de moi sait que quelque chose a changé.Depuis cette nuit, je ressens tout différemment.L’air semble plus lourd.Les ombres paraissent plus profondes.Et parfois… parfois, je crois entendre des murmures, juste à la lisière de mon esprit.Je secoue la tête violemment, tentant de chasser ces pensées.Non.Ce n’est qu’un piège.Un jeu qu’elles veulent que je perde.Je me lève d’un bond.Il faut qu
DavidElles m’encerclent.Le Corbeau, le Hibou et la Mouche Tsé-Tsé.Leurs silhouettes se découpent dans l’ombre, menaçantes, immobiles.Elles ne se précipitent pas.Elles attendent.Elles savent que je suis piégé.Que je n’ai nulle part où fuir.Le froid s’infiltre dans mes os, bien plus profond que l’air glacial de la nuit.C’est un froid ancien.Un froid qui s’accroche à mon âme.Je serre les lettres contre moi, comme si elles pouvaient me protéger.— Alors, David ?Le Corbeau fait un pas en avant.Son sourire est lent, cruel.— As-tu compris maintenant ?Je ne réponds pas.Je ne peux pas.Je suis encore sous le choc de ce que je viens de lire.Je suis leur offrande.Leur tribut.Le dernier héritier du pacte de sang.Elles m’attendaient depuis toujours.Et maintenant que mon grand-père n’est plus là pour me protéger, elles comptent bien réclamer leur dû.Mon regard glisse sur la cabane, cherchant désespérément une échappatoire.Mais il n’y en a pas.Seule la porte derrière elles me
DavidLes mots d’Esteban flottent encore dans l’air, suspendus entre nous comme une promesse impossible.— Votre loyauté, capitaine. Rien de plus.Je ne réponds pas immédiatement.Autour de nous, le silence est étrange. Comme si la ville elle-même retenait son souffle. Derrière moi, Joren s’agite. Briggs croise les bras, son regard lancé sur l’inconnu.Je fais un pas en avant.— Et si je refuse ?Un sourire étire les lèvres d’Esteban.— Vous n’êtes pas homme à refuser ce qui pourrait sauver votre peau.Je serre les dents. Cet homme me connaît trop bien.Mais je ne suis pas dupe.— Parlez.
DavidLa mer s’apaise, mais l’équipage reste figé. Le silence est un poids lourd, pesant sur nos épaules comme une menace latente. Les vagues se retirent lentement, laissant derrière elles une mer d’huile, calme, trop calme.Je suis à genoux, le souffle court. La marque sur ma main a noirci, brûlée par l’affrontement. J’ai réussi à la repousser, mais je sais que ce n’est qu’une victoire temporaire.— Capitaine ?Joren s’appuie sur le gouvernail, le front couvert de sueur. Son flanc saigne toujours, une tâche sombre s’élargissant sur sa chemise.— C’est fini ? demande-t-il d’une voix rauque.Je serre les dents.— Non.Et il le sait aussi.L’Ombre PersistanteL’équipage s’affaire, mais personne ne parle. Les visages sont tendus, blêmes. Ils ont vu ce que moi seul affrontais d’habitude. Ils ont entendu cet appel, ce murmure venu des abysses.— Les voiles ! Réparez les dommages ! aboie Briggs, tentant de redonner un semblant d’ordre.Mais même lui a la voix tremblante.Je me relève lentem
DavidLe vent hurle autour de moi, fouettant le pont comme un fou furieux. L’équipage lutte pour ne pas être emporté, s’accrochant aux cordages et aux mâts qui craquent sous la pression. La mer s’est levée, déchaînée, creusant des vagues hautes comme des falaises. Mais au centre de tout cela, elle reste immobile.L’ombre.La créature.Non.L’incarnation du pacte que j’ai scellé, du destin qui m’attend.— David…Son murmure me transperce, coule sous ma peau comme une encre maudite.— Non !J’arrache mon bras à son emprise. Un éclat de lumière jaillit de la marque sur ma paume, projetant une lueur irréelle entre nous. La créature recule d’un pas, et son sourire se tord.— Tu refuses encore ?Sa voix gronde, résonne dans l’air comme un tonnerre sourd.L’eau tourbillonne autour d’elle, et une colonne liquide s’élève, spirale monstrueuse prête à s’abattre sur le navire.L’équipage panique.— Capitaine, faites quelque chose ! hurle Joren, toujours à terre, le souffle court, une main pressée
DavidLe chant ne cesse pas. Il pulse dans mon crâne, résonne sous ma peau, s’insinue dans mes os comme un poison insidieux. Chaque note est une caresse glaciale sur mon esprit, un murmure qui m’effleure et me consume.Autour de moi, l’équipage retient son souffle. Tous ont vu ce que j’ai vu. Cette mer morte, ce ciel effacé, cette chose qui m’a regardé à travers mon propre reflet.Mais ils ne l’ont pas entendu.Ce chant ne s’adresse qu’à moi.Je ferme les yeux un instant. Mon cœur bat trop fort, trop vite.Contrôle-toi.Respirer. Ne pas sombrer.J’ouvre les paupières. La nuit est toujours là, dense, lourde, absolue. Les étoiles n’ont pas reparu. Le silence, lui, est revenu, oppressant, plus pesant encore que les murmures.Puis, un bruit.Un craquement.La CorruptionJe tourne la tête. Le bois du pont continue de noircir. L’érosion avance à une vitesse anormale, comme si des siècles passaient en un battement de cils.— Éloignez-vous de là ! ordonné-je.Les marins hésitent avant d’obéir
DavidL’eau m’arrache l’air des poumons. Un silence absolu m’entoure, plus dense que tout ce que j’ai connu. Pas un bruit, pas une vibration. Juste l’immensité noire, infinie, qui m’attire vers le fond.Mes bras s’agitent par réflexe, mais il n’y a ni haut ni bas. L’eau n’est pas froide. Elle est absente. Une matière qui n’en est pas une, un gouffre qui me retient sans jamais me porter.Je descends.Ou est-ce le monde qui s’élève au-dessus de moi ?Les ténèbres s’épaississent. Une masse informe se dessine, immense, démesurée. Elle ne brille pas. Au contraire, elle absorbe la lumière qui ne devrait même pas exister ici.Puis, elle s’ouvre.L&
DavidL’appel ne s’arrête pas. Il s’insinue dans mon esprit, rampant comme une marée noire qui s’étale sur le sable. Je serre les dents, tentant de chasser cette voix qui me hante, mais elle s’accroche à moi comme une ancre.— David… Tu ne peux pas fuir.Je me redresse, le souffle court, mes doigts crispés sur le bois du bastingage. L’air est lourd, chargé d’un silence pesant. Tout semble figé, comme si le monde retenait son souffle.L’océan s’étale devant moi, immense et impénétrable. Mais sous cette surface tranquille, quelque chose veille. Quelque chose m’attend.Les Signes— Capitaine !La voix de Joren brise le silence, me ramenant à la réalité. Il accourt vers moi, l’air préoccupé.— On a un problème.Je me tourne vers lui, refoulant les ténèbres qui me rongent.— Quoi encore ?Il me désigne le ciel. Je lève les yeux et mon sang se glace.Les étoiles ont disparu.Aucune lueur ne brille dans l’immensité nocturne. Comme si une main invisible avait effacé la voûte céleste.Joren av
DavidLe silence s’abat sur le pont comme un couperet. L’ombre face à moi n’a pas bougé. Pourtant, je ressens son emprise partout autour de moi. L’air est plus lourd, plus froid. Les torches vacillent, comme si leur flamme hésitait à continuer d’exister en présence de cette entité.— Qui es-tu ? répété-je, cette fois d’un ton plus tranchant.L’ombre ne répond pas tout de suite. Puis, d’une voix profonde, presque familière, elle murmure :— Un avertissement.Je serre mon épée, prêt à frapper au moindre mouvement suspect.— Un avertissement de qui ?Elle lève lentement une main, paume ouverte vers le ciel.— Des profondeurs.Et soudain, tout bascule.La DéchirureLe pont du navire disparaît sous mes pieds. Un instant, je suis là, au milieu de mes hommes, l’instant d’après, je suis ailleurs.Un lieu que je ne reconnais pas.Le sol est noir, rugueux comme de la pierre volcanique. Autour de moi, des silhouettes sans visage flottent dans un espace sans fin. Le ciel au-dessus n’est pas un ci
DavidLe château est plongé dans une torpeur sinistre. La guerre est finie, mais le silence qui règne dans les couloirs ne signifie pas la paix. Au contraire. Il y a une tension sourde, une attente glaciale qui précède toujours une nouvelle tempête.Je suis assis sur le trône de pierre noire, les doigts drapés sur l’accoudoir froid, observant les flammes danser dans la grande cheminée. Autour de moi, le conseil murmure, échange des regards lourds de suspicion et d’ambition.— Nous devons agir vite.La voix de Markus brise le silence. Son regard est braqué sur Eldric, qui se tient debout à quelques pas du trône.— Les nobles du sud n’ont pas renoncé. Nous avons pris leur château, mais pas leur loyauté.Je lève un sourcil.— As-tu des preuves ?— Des espions ont intercepté un message. Une invitation secrète envoyée à trois seigneurs exilés. Une réunion aura lieu dans trois jours, près du port de Valdoria.Eldric croise les bras et sourit légèrement.— Ils ne perdront jamais espoir, Davi
DavidLe feu danse encore dans mes souvenirs, le crépitement des flammes résonne en écho dans ma tête. La guerre est finie, du moins en apparence. Mais je sais que ce n’est qu’un répit. Une trêve silencieuse avant la prochaine tempête.Nous avons pris le château. Nous avons écrasé nos ennemis. Mais le goût de la victoire est amer.Les Ombres du PasséJe me tiens dans la grande salle du trône, face aux murs marqués de suie et de sang. Les bannières ennemies ont été arrachées, brûlées, remplacées par les nôtres. Pourtant, l’air est lourd de souvenirs, de fantômes qui refusent de disparaître.— Ce château t’appartient désormais, David.La voix de Markus brise le silence. Il se tient derrière moi, son armure encore souillée par la bataille.— Tout ceci… je murmure en balayant la salle du regard. Combien de morts pour en arriver là ?— Assez pour ne jamais oublier.Le JugementDans la cour du château, les prisonniers sont agenouillés, leurs mains liées dans le dos. Certains tremblent, d’au