— « Tu as vu le garçon qui vient ici tous les jours ? Celui qui s’assoit toujours dans le coin, tranquille, et qui regarde tout le temps son ordinateur ? »
C’est la maman de Rym qui parle pendant qu’elle nettoie un verre derrière le comptoir. Elle regarde sa fille avec des yeux pleins d’excitation, comme si elle venait de découvrir un secret précieux.
Rym la regarde avec étonnement, haussant légèrement un sourcil, puis continue à essuyer la table devant elle, concentrée sur sa tâche.
— « De quel garçon tu parles ? »
Sa mère s’approche et baisse un peu la voix, comme si elle allait lui confier quelque chose de très sérieux :
— « Il s’appelle Achraf. Tu sais, le grand, sérieux, celui qui bouge jamais de son ordi. D’après mon amie Aïcha, son fils est dans la même classe qu’Achraf. »
Rym marque un temps d’arrêt. Le nom lui dit vaguement quelque chose. Un visage flou. Un étudiant discret qu’elle a peut-être déjà croisé sans y prêter attention.
— « Son fils dit qu’Achraf est l’un des meilleurs étudiants de la fac. Peut-être même le meilleur ! Tu sais quoi ? Un jour, l’ordinateur du prof est tombé en panne pendant le cours. Personne ne savait quoi faire… »
Elle marque une pause, le temps de raviver un souvenir qu’elle semble apprécier.
— « Et devine qui l’a réparé ? Achraf ! Devant tout le monde ! Même le prof était choqué, il ne disait plus rien. Les étudiants aussi, ils étaient impressionnés. Depuis ce jour, ils l’appellent “la légende”. »
Rym esquisse un léger sourire, amusée par l’enthousiasme de sa mère, mais elle ne dit toujours rien.
— « Ma chérie… il vient ici presque tous les jours. Il s’assoit toujours au même endroit et travaille calmement. Moi je crois qu’il est timide. Mais il te regarde à chaque fois que tu passes près de lui. »
Elle dit cela avec une douceur presque complice, comme si elle observait une histoire d’amour naître sous ses yeux.
— « Je suis sûre que si tu lui parlais, il ne pourrait pas résister à ton charme. Tu es jolie, simple, élégante… Quel garçon dirait non ? »
Rym rigole un peu, gênée malgré elle :
— « Maman… tu exagères. »
Mais sa mère pose une main sur son cœur et ajoute, les yeux brillants :
— « Imagine… s’il venait un jour et te disait : Rym, veux-tu m’épouser ? Oh là là, je serais la maman la plus heureuse du monde ! Un ingénieur pour mari ! Ce serait le rêve ! »
Rym secoue la tête en riant, essayant d’échapper à l’imagination débordante de sa mère. Mais à ce moment-là, un petit quelque chose la pousse à lever les yeux…
Et à regarder vers le fond du café.
Il est là.
Comme sa mère l’a décrit.
Silencieux. Concentré. Penché sur son ordinateur, les doigts glissant avec assurance sur le clavier.
Mais cette fois…
Elle l’a remarqué.
Il dégage quelque chose.
Et une petite question, discrète mais persistante, s’infiltre dans l’esprit de Rym :
Depuis combien de temps il vient ici ? Et pourquoi je ne l’avais jamais vraiment vu avant ?
La fin de la saison approchait. L’air était plus frais le soir, les feuilles commençaient doucement à se teinter d’ocre, et dans notre appartement, il régnait un calme que je n’avais jamais connu ailleurs. Ce soir-là, j’avais proposé qu’on monte sur le toit. Le bâtiment était bas, et il y avait une petite terrasse accessible, un coin presque oublié des autres résidents. Une chaise longue, une couverture, deux tasses de thé. Et le ciel. Je portais un pull blanc trop large, volé à Ashraf. Il me tombait sur les cuisses. Lui, il avait juste mis son hoodie noir habituel, celui qu’il mettait souvent à la fac, quand il voulait passer inaperçu. Même maintenant, il gardait cette habitude : se faire discret, rester dans l’ombre… sauf pour moi. Il s’était installé avant moi, les bras croisés derrière la tête, les yeux levés vers les étoiles à peine visibles. Moi (en m’asseyant à côté de lui) : — Tu crois qu’on aurait pu vivre ça ailleurs ? Une autre ville, une autre époque ? Ashraf (sans
La fin de la saison approchait. L’air était plus frais le soir, les feuilles commençaient doucement à se teinter d’ocre, et dans notre appartement, il régnait un calme que je n’avais jamais connu ailleurs.Ce soir-là, j’avais proposé qu’on monte sur le toit. Le bâtiment était bas, et il y avait une petite terrasse accessible, un coin presque oublié des autres résidents. Une chaise longue, une couverture, deux tasses de thé. Et le ciel.Je portais un pull blanc trop large, volé à Ashraf. Il me tombait sur les cuisses. Lui, il avait juste mis son hoodie noir habituel, celui qu’il mettait souvent à la fac, quand il voulait passer inaperçu. Même maintenant, il gardait cette habitude : se faire discret, rester dans l’ombre… sauf pour moi.Il s’était installé avant moi, les bras croisés derrière la tête, les yeux levés vers les étoiles à peine visibles.Moi (en m’asseyant à côté de lui) : — Tu crois qu’on aurait pu vivre ça ailleurs ? Une autre ville, une autre époque ?Ashraf (sans détour
Le soleil s’était levé doucement ce matin-là, traversant les rideaux blancs de notre chambre, caressant les draps encore froissés de notre première nuit de mariés. Je me suis réveillée seule. Pas par absence, mais par délicatesse : Ashraf était déjà levé.L’odeur du café me guida vers la cuisine. Il était là, dos à moi, en t-shirt gris clair, les cheveux légèrement ébouriffés, concentré à verser le lait dans ma tasse préférée. Il ne m’avait pas entendue. Je l’ai observé un moment. Il faisait tout avec précision, comme s’il suivait un rituel sacré.Moi : — Tu prépares une cérémonie du café ou tu m’as engagée comme invitée spéciale ?Il sursauta légèrement, puis sourit sans se retourner.Ashraf : — C’est un service cinq étoiles, réservé à ma femme.Le mot « femme » me frappa doucement. Il sonnait étrange et doux à la fois, comme un mot trop grand qu’on essaie encore de porter sans trembler.On prit le petit-déjeuner en silence, dans notre petit coin de cuisine, entourés de plantes en
La lumière du matin filtrait à travers les rideaux crème de la chambre. L’agitation régnait dans toute la maison. Les femmes allaient et venaient, les parfums se mêlaient dans l’air — jasmin, oud léger, et quelque chose de sucré, presque vanillé. Mais dans ma chambre, c’était le silence.Assise devant la coiffeuse, je regardais mon reflet. Pas encore maquillée. Pas encore coiffée. Juste… moi.Sara entra discrètement avec un plateau.Sara : "Un peu de jus et une datte. Tu dois avoir un truc dans le ventre."Moi (souriante) : "Merci."Elle s’installa derrière moi, regarda mon reflet.Sara : "C’est aujourd’hui. T’as l’air… calme."Moi : "Je me suis réveillée avec une certitude. Je l’aime. Je suis prête."Le maquillage fut posé avec soin. Léger, doux, sans voler la vedette à mes traits. Les cheveux relevés élégamment, avec une touche floue sur les côtés. Et la robe… une pièce exquise. Satin fluide, col discret, dos légèrement ouvert. Élégante. Simple. Intemporelle.Quand je descendis, ma
La veille du mariage, les familles avaient préparé deux salons. L’un pour les femmes, l’autre pourChapitre 35 — La veilleLa maison baignait dans un calme étrange. Il n’y avait ni cris, ni agitation. Seulement des chuchotements, des vêtements suspendus, des bouquets encore dans leur plastique, et une robe blanche qui attendait dans un coin de ma chambre.Assise sur mon lit, en pyjama, les cheveux encore humides d’un bain long, je fixais le plafond sans le voir.Demain, c’était le jour.Je devais être heureuse. Excitée. Rayonnante.Mais mon cœur battait à une vitesse instable. Mon ventre était serré. Mon esprit bouillonnait.Maman frappa doucement avant d’entrer. Elle portait son peignoir gris, les cheveux attachés à la va-vite.Maman : "Je peux ?"Moi : "T’es déjà entrée."Elle sourit et s’approcha, s’assit à mes côtés.Maman : "Tu ne dors pas."Moi : "Non."Elle ne dit rien. Elle attendait que je parle.Moi : "Et si je me trompais ? Si j’idéalise tout ? Ashraf est... il est incroyabl
La maison baignait dans un calme étrange. Il n’y avait ni cris, ni agitation. Seulement des chuchotements, des vêtements suspendus, des bouquets encore dans leur plastique, et une robe blanche qui attendait dans un coin de ma chambre.Assise sur mon lit, en pyjama, les cheveux encore humides d’un bain long, je fixais le plafond sans le voir.Demain, c’était le jour.Je devais être heureuse. Excitée. Rayonnante.Mais mon cœur battait à une vitesse instable. Mon ventre était serré. Mon esprit bouillonnait.Maman frappa doucement avant d’entrer. Elle portait son peignoir gris, les cheveux attachés à la va-vite.Maman : "Je peux ?"Moi : "T’es déjà entrée."Elle sourit et s’approcha, s’assit à mes côtés.Maman : "Tu ne dors pas."Moi : "Non."Elle ne dit rien. Elle attendait que je parle.Moi : "Et si je me trompais ? Si j’idéalise tout ? Ashraf est... il est incroyable. Mais est-ce que je suis prête ? Est-ce que je suis assez forte pour ce genre d’amour ?"Elle posa sa main sur la mienne