Chapitre 3– Le piège du loup
**Isabella**
J’observe mon reflet dans le miroir, serrant les pans de ma veste entre mes doigts. J’aurais dû ignorer cette invitation. J’aurais dû la jeter à la poubelle et continuer à creuser pour trouver une faille dans son empire.
Mais non.
Me voilà, vêtue d’une robe sobre et élégante, prête à affronter Richardson dans un cadre qu’il a lui-même choisi.
Un dîner.
Juste lui et moi.
Samuel n’a pas approuvé. Il a tenté de me convaincre que c’était une erreur, que ce n’était qu’un piège.
"Tu crois vraiment qu’un homme comme Richardson invite son adversaire à dîner par simple courtoisie ?" m’a-t-il lancé, exaspéré.
Non, bien sûr que non.
Cet homme ne fait rien sans raison.
Je quitte mon appartement et monte dans le taxi qui m’attend. Mon cœur bat plus fort que je ne voudrais l’admettre, non pas par nervosité, mais par anticipation. Cet échange ne sera pas anodin. Il testera mes limites, tentera de me déstabiliser.
Mais je suis prête.
**Richardson**
Installé à une table privée dans le restaurant le plus exclusif de la ville, je l’attends. La salle est tamisée, le service irréprochable, l’ambiance feutrée. Un cadre où je domine, où je dicte les règles du jeu.
Et bientôt, elle sera là.
Je n’ai pas le moindre doute qu’elle viendra. Isabella Morelli ne sait pas reculer. C’est ce qui la rend dangereuse. Mais c’est aussi ce qui la rend prévisible.
Quand la porte du restaurant s’ouvre et que je la vois entrer, je souris.
Elle est parfaite. Une posture droite, un regard froid, mais une tension discrète dans ses épaules. Elle veut faire croire qu’elle contrôle la situation, mais son corps la trahit légèrement.
Elle m’a accordé cette rencontre.
Elle vient de faire le premier pas dans mon piège.
Elle s’avance vers moi d’un pas assuré, s’arrêtant juste devant la table.
"Vous aimez vraiment les mises en scène, dis-je en lui désignant le siège en face de moi."
"Je me méfie des hommes qui aiment trop contrôler leur environnement, répond-elle en s’asseyant."
"Un sage instinct."
Je fais un signe au serveur qui s’approche immédiatement.
"Du vin, Isabella ?"
Elle me fixe un instant avant d’acquiescer.
"Pourquoi suis-je ici, Richardson ?"
Directe. Sans détours.
Je fais tourner mon verre de vin entre mes doigts.
"Parce que vous avez envie de comprendre qui je suis."
Elle laisse échapper un ricanement incrédule.
"Ne vous surestimez pas."
Je souris, posant mes coudes sur la table.
"Pourtant, vous êtes venue."
Elle croise les bras.
"Je suis venue parce que je sais que vous essayez de me distraire. Vous pensez que ce dîner va me faire oublier que j’ai des preuves contre vous ?"
"Des preuves ?"
Je hausse un sourcil, amusé.
"Vous n’avez rien, Isabella. Sinon, vous seriez en train de me détruire dans une salle d’audience, et non pas assise ici, face à moi."
Elle serre les dents, mais ne répond pas immédiatement. Elle sait que j’ai raison.
"Je trouverai," dit-elle finalement, sa voix plus basse, plus menaçante.
Je me penche légèrement en avant, réduisant la distance entre nous.
"Peut-être. Mais d’ici là, je vous aurai déjà fait comprendre que jouer contre moi est une perte de temps."
Ses pupilles se dilatent légèrement, et je le remarque immédiatement.
"Vous êtes un homme arrogant, lâche-t-elle."
"Et vous une femme bien trop fière pour admettre que je vous intrigue."
Elle écarquille les yeux, une fraction de seconde, avant de retrouver son masque d’assurance.
Mais j’ai vu ce que je voulais voir.
Elle n’est pas indifférente.
Et c’est exactement ce que j’espérais.
**Isabella**
Je serre ma fourchette avec une force qui trahit ma tension. Cet homme est insupportable. Chaque mot qu’il prononce, chaque mouvement qu’il fait, tout est soigneusement calculé pour me provoquer, me tester.
Richardson n’est pas un adversaire ordinaire.
"Vous avez une haute opinion de vous-même, dis-je en prenant une gorgée de vin."
"Pas plus que la vôtre, Isabella."
Son ton est calme, assuré. Il me regarde comme si j’étais un problème dont il connaissait déjà la solution.
"Pourquoi m’avoir invitée ? Je doute que ce soit uniquement pour apprécier ma compagnie."
Il sourit, lentement, comme si ma question l’amusait.
"J’aime savoir à qui j’ai affaire."
"Vous me connaissez déjà."
"Non. Je connais votre réputation. Mais ce n’est pas suffisant."
Il se penche légèrement en avant, et malgré moi, mon corps réagit. Une alerte silencieuse.
Il perçoit tout.
"Vous êtes brillante, Isabella, reprend-il. Ambitieuse. Implacable. Mais vous êtes aussi guidée par vos émotions."
Je relève le menton.
"Vous vous trompez."
Il hoche la tête, l’air faussement indulgent.
"Vraiment ? Alors pourquoi êtes-vous venue ?"
Mon cœur rate un battement.
"Parce que je voulais voir dans quel jeu vous essayez de m’embarquer."
"Et ?"
Je pose ma coupe sur la table et le fixe droit dans les yeux.
"Vous ne m’impressionnez pas."
Sa réaction est subtile. Un éclair d’amusement traverse son regard.
"Vous êtes sûre de ça ?"
Il laisse ses mots flotter entre nous, et je ressens un frisson, un mélange de défi et d’inquiétude.
Cet homme joue avec moi.
Mais je ne suis pas du genre à perdre.
IsabellaLa nuit s’étire comme une promesse brisée, et chaque pas me rappelle que ma liberté n’est qu’une illusion. L’air froid mord ma peau, mais je n’y prête pas attention. Ce qui compte, c’est la fuite.Je me faufile entre les ruelles, mon souffle court, le cœur battant comme un tambour de guerre. L’adrénaline pulse dans mes veines, un mélange de peur et de défiance. J’ai réussi à m’éloigner, à le semer, du moins je l’espère. Mais une part de moi sait que c’est trop facile.Dario Richardson n’est pas un homme qu’on sème. Il est une ombre qui s’infiltre dans chaque interstice de ma vie, un poison qui coule dans mes veines.Je le sais, et pourtant, je continue de courir.L’entrepôt abandonné est un abri temporaire, un répit dans cette chasse sans fin. À l’intérieur, le silence est pesant. Chaque recoin sombre semble cacher un piège. Je me recroqueville contre un mur, les bras entourant mes genoux. La poussière danse dans l’air, illuminée par les halos faibles des lampadaires filtrant
IsabellaJe ne sais pas pourquoi je suis surprise de ma propre décision. Pourquoi ai-je cru, un instant, que tout cela pourrait s’arrêter si je m’enfuyais, si je m’échappais de cette cage dorée où j’ai été prisonnière trop longtemps ? Je suis une idiote. Une idiote qui a cru pouvoir fuir les ombres de ce monde.Il y a quelque chose de pervers dans cette ville, dans ce lieu. Les murs semblent respirer, surveiller. Et moi, je cours, toujours plus loin, mais la réalité me rattrape à chaque pas.Je n’ai pas de plan, rien d’autre que l’instinct, cette idée folle que si je m’échappe une fois pour toutes, je pourrais retrouver ma liberté. Mais la vérité, c’est que je fuis dans l’inconnu, dans un monde qui ne me pardonnera pas. Dario me connaît trop bien. Il sait où je vais, ce que je fais, parce qu’il a toujours su. Et cette pensée me serre la gorge, comme un câble serré autour de mon cou.Je ne peux pas le laisser gagner. Pas cette fois.Mes pieds me mènent dans des rues inconnues, les ruel
RichardsonJe reste là, observant Isabella s’éloigner, ma silhouette se fondant dans l’ombre des murs qui semblent toujours plus lourds. Le silence qui suit sa sortie est presque assourdissant, un vide que je peine à combler. Elle m’a défié, et pour la première fois depuis longtemps, cela m’atteint d’une manière que je ne peux expliquer.Elle croit qu’elle peut me fuir. Elle pense que son esprit est plus fort que tout, plus fort que ce que j’ai mis en place. Mais elle ne voit pas la vérité. Elle ne voit pas que chaque tentative de fuite la renforce dans sa conviction qu’elle est toujours libre. Et c’est là que je la tiens. Elle est prisonnière de son propre esprit.Je laisse échapper un léger rire, mais il est amer. Je me dirige vers le bureau, où une pile de dossiers m’attend. Le travail ne cesse jamais, même quand mes pensées vagabondent vers elle, vers la rage qu’elle me fait ressentir, cette chose indescriptible qui brûle en moi chaque fois que je la vois se tenir tête.Elle me dé
IsabellaJe me tiens là, le cœur battant, un tourbillon de pensées qui s’entrelacent dans mon esprit. Il a raison, à sa manière. Je le déteste, mais je le veux. Il me domine, il me manipule, et pourtant, une partie de moi se sent irrémédiablement attirée par ce pouvoir qu’il exerce sur ma vie. Mon esprit hurle de résister, de fuir, mais mon corps, lui, semble ne plus écouter.Je suis perdue. Prisonnière de ce piège que j’ai moi-même ouvert.Ses mots résonnent encore dans ma tête, comme un écho qui refuse de s’éteindre. Il a raison sur certains points. Je n’ai plus d’issue. Tout ce que j’ai tenté jusqu’à présent n’a fait qu’empirer les choses, et le moindre mouvement que je fais pour m’échapper semble se retourner contre moi. Chaque tentative, chaque décision, m’enfonce un peu plus dans l’abîme qu’il a creusé pour moi.Mais je ne peux pas l’accepter. Je ne peux pas simplement m’incliner devant lui. Pas encore. Je dois continuer à me battre, à me défendre. Peu importe combien il me pous
RichardsonElle me défie. Ce regard qu’elle m’adresse, froid et déterminé, c’est une arme. Une arme que j’ai forgée moi-même. C’est fascinant. Elle croit qu’elle peut m’échapper, qu’elle peut s’en aller. Mais elle ne comprend pas encore qu’elle est déjà dans mon piège, qu’il n’y a pas de sortie. Pas pour elle.J’observe ses traits se tendre, chaque muscle de son corps prêt à se rebeller contre moi, contre cette vérité qu’elle refuse de voir. Elle se cache derrière des mensonges, des faux-semblants, mais je sais qu’au fond d’elle, elle le sait aussi. Elle est mienne. Pas de façon visible, mais d’une manière bien plus subtile. Je suis entré dans sa vie à un moment où elle ne pouvait pas anticiper ma venue. Je l’ai marquée sans qu’elle s’en rende compte, je l’ai façonnée à ma manière.Elle croit pouvoir fuir, croire qu’elle peut retrouver une liberté qu’elle n’a jamais eue. Mais elle ignore tout de la cage dans laquelle elle se trouve, et je suis la clé de cette prison. Elle m’appartient
IsabellaJe suis encore là, dans ce manoir. Un endroit qui, en apparence, devrait me sembler familier, mais qui me donne aujourd’hui la sensation d’être étrangère à moi-même. La chaleur étouffante de la pièce m’envahit, et je me surprends à être en proie à un tourbillon de pensées, désorientée. Richardson n’a pas quitté ma vue depuis notre dernier échange, ses yeux obsédants toujours sur moi, comme une lueur dans la nuit qui me refuse l’ombre où me cacher.Il me connaît trop bien, je le sais. Peut-être mieux que je ne me connais moi-même. Ses paroles résonnent encore dans ma tête, comme une cloche funeste annonçant la fin d’un cycle. Ce monde, c’est moi. C’est la vérité qu’il m’impose à chaque geste, à chaque mot, et je m’en sens écrasée, étranglée. Il a toujours réussi à me ramener à lui, comme un fauve qui me lierait à sa volonté par un fil invisible, fragile, mais puissant.Je n’ai pas de place ici, et pourtant, je suis prisonnière de cet espace. Prisonnière de mes propres émotions