LOGINJe ne sais pas ce qui a été le plus violent :
La présence de Jason dans mon salon. Ou celle de Natalie… qui s'était avancé jusqu'à ses côtés. Elle était là. Devant moi. Comme si elle avait le droit d’être ici. Comme si elle avait quelque chose à m’expliquer. Comme si elle n’était pas la raison pour laquelle mon cœur était en train de se briser encore plus, seconde après seconde. Je crois que le silence a duré longtemps. Ou peut-être que non. Je ne sais plus. Le temps n’avait plus de forme, plus de sens. Tout était confus dans ma tête. Jason la regarda avec un air que je n’avais jamais vu. Un air que je n’avais jamais reçu de lui. Un de ces regards qui disent tout sans rien dire. Et tout en moi s’est effondré encore une fois. Natalie inspira. Ses yeux brillaient, mais pas de honte. Je crois qu’elle avait peur. Ou peut-être qu’elle jouait. Je n’arrivais même pas à savoir. — Claire… murmura-t-elle. Je… je voulais te parler avant. Je voulais t’expliquer. J’ai ri. Pas un vrai rire. Un rire qui vient d’un endroit cassé. Un rire qui sonne faux. Un rire qui dit : “J’ai trop mal pour être encore calme.” — M’expliquer quoi ? soufflai-je. Que tu couches avec mon mari depuis près d'un an ? Ou que tu as signé un document qui détruit ma vie dans mon dos ? Elle a serré sa sacoche comme si elle cherchait un refuge dedans. — Ce n’est pas comme ça… — Natalie, arrête, ai-je coupé d’une voix que moi-même je ne reconnaissais pas. Arrête. Juste… arrête. Jason leva les yeux au ciel. — Je t’ai dit qu’on pouvait régler ça calmement… Je me suis retournée vers lui. Et je crois que c’est là que quelque chose a changé en moi. Un truc profond. Un truc que même lui n’a pas compris. — Jason… tu vas te taire. Il ouvrit légèrement bouche, surpris. Les sourcils froncés. Mais je ne l’ai pas laissé parler. — Natalie et toi… vous avez déjà eu tous les mots du monde pour me mentir. Maintenant c’est à moi de parler. Je me suis tournée vers mon amie. Mon ancienne amie. La seule personne à qui je me confiais. La personne qui savait quand je pleurais sous la douche. Celle qui savait quand j’avais mal. Celle qui prétendait me défendre. Celle qui me disait : « Je serai toujours là. » Je l’ai fixée longtemps. Assez pour qu’elle baisse les yeux la première. — Pourquoi ? demandai-je. Elle a dégluti. — Claire… — Pourquoi ? répétai-je, plus fort. Elle respira longuement, comme si elle devait se préparer. — Je… je ne voulais pas que ça arrive comme ça. Je t’assure. Jason et toi… vous étiez déjà… — Détruits ? finis-je à sa place. Elle hocha la tête. — Oui. Votre couple… il ne fonctionnait plus depuis longtemps. Et d'ailleurs, il n'a jamais fonctionné Claire. Je me suis approchée d’elle. Lentement. Très lentement. — Et c’est pour ça que tu m’as remplacé ? murmurai-je. Elle leva la tête d’un coup. — Non ! Je ne t’ai pas remplacée ! Claire, ce n’est pas comme ça que… Je levai la main. — Ne mens plus. S’il te plaît. Pas maintenant. Pas aujourd’hui. Pas après ce que je viens d’apprendre. Elle resta immobile. Jason aussi. On aurait dit deux statues. Deux statues coupables. J’ai continué : — Quand tu me disais de partir… c’était pour lui laisser la place, c’est ça ? Elle ferma les yeux. Jason regarda ailleurs. — Et quand tu me disais que j’allais “retrouver le bonheur”… tu parlais de quoi ? De te voir prendre ma place dans ma propre vie ? Elle vacilla. — Claire… je t’aime. Tu es ma sœur. Je voulais ton bien. Je me suis avancée encore. A un centimètre d’elle. — Si tu m’aimais… tu ne serais jamais tombée amoureuse de mon mari. Elle ouvrit la bouche… mais aucun son ne sortit. Son visage devint rouge. Puis blanc. Jason souffla, agacé. — Claire, on va pas rester dix ans là-dessus, hein. C’est arrivé. On ne peut plus changer ça. Maintenant, il faut être adulte. Je me suis tournée vers lui. Lentement. Très lentement. Comme si mon corps menaçait d’exploser. — “Adulte” ? répétai-je doucement. Il haussa les épaules. — Oui. T’es dramatique. Comme d’habitude. Je n’ai pas crié. Je n’ai pas pleuré. Je n’ai pas tremblé. Non. J’ai juste souri. Un petit sourire. Un sourire fatigué. Un sourire déchiré. — Jason… tu sais ce qui est drôle ? Il fronça les sourcils. — C’est que tu viens de me libérer. Sans même t’en rendre compte. Il haussa les épaules comme si ça ne changeait rien pour lui. Mais moi, au fond… je venais de comprendre quelque chose. J’avais mal. Très mal. Une douleur que je n’avais jamais ressentie. Mais sous la douleur… sous les larmes… il y avait une autre sensation. Comme une porte qui s'ouvre. Une sensation que je n’avais jamais connue dans ma vie. Un début de force. Natalie me regardait, perdue. — Claire… je veux juste te parler. Je veux t’expliquer comment c’est arrivé. Ce n’était pas prévu… Jason et moi… on a juste… on a juste… — Assez, ai-je coupé. Je serrai la feuille du divorce dans ma main. — Je ne veux pas de tes explications. Je ne veux plus de tes justifications. Et je ne veux plus de toi dans ma vie. Elle recula d’un pas. Comme si mes mots venaient de la gifler. Jason soupira. — Bon. Alors c’est clair. On divorce. Ça nous arrangera tous les trois. Je me tournai vers lui. Et je crois qu’à ce moment-là, mon cœur a cessé de saigner pour la première fois de la journée. — Non, Jason. Ça t’arrangera toi et elle. Pas moi. Je repris mon souffle. — Mais tu sais quoi ? Je vais signer. Je vais signer parce que je n’ai plus envie d’être l’ombre de ma propre vie. Je vais signer parce que j’en ai assez de pleurer pour quelqu’un qui n’a jamais su m’aimer. Je vais signer parce que j’en ai marre de t’attendre, de te pardonner, de te protéger. Je vais signer parce que je vaux plus que ça. Natalie porta la main à sa bouche. Jason resta de marbre. Il ne comprenait pas. Je posai le document sur la table. — Mais je signerai quand je serai prête. Pas quand tu le veux. Pas quand elle le veut. Natalie pleurait maintenant. De vraies larmes. Ou peut-être des larmes calculées. Je ne savais plus la différence avec elle. — Claire… s’il te plaît… Je fis un geste pour qu’elle se taise. — Sors de chez moi. Elle cligna des yeux, surprise. — Claire… — Sors. Maintenant. Elle se tourna vers Jason comme si elle cherchait du soutien. Mais Jason ne bougea pas. Ou peut-être qu’il s’en moquait. Il était toujours bon pour abandonner au mauvais moment. Finalement, Natalie murmura : — Je suis désolée… Je secouai la tête. — Non. Tu ne l’es pas. Elle baissa les yeux. Puis elle sortit. La porte se referma. Et quand elle claqua… c’est comme si quelque chose claquait aussi en moi. Jason resta planté là, au milieu du salon. — Bon. Je vais y aller aussi, dit-il d’une voix neutre. On reparlera de tout ça demain. Je ne répondis pas. Il sortit à son tour. Quand la maison redevint silencieuse, j’ai senti mes jambes se dérober. Je suis tombée sur le canapé. Je n’ai pas pleuré. Pas cette fois. Je suis juste restée là… à respirer comme quelqu’un qui revient d’un accident. Puis, j’ai senti quelque chose. Un sentiment étrange. Un sentiment que je n’avais jamais vraiment eu. Pas encore de la force. Mais… un début. Un tout petit début. J’ai levé les yeux vers le plafond. Et c’est à cet instant précis que mon téléphone a vibré. Je l’ai pris. Mes mains tremblaient encore. Un numéro inconnu. Un message court. Juste quelques mots. « Je suis devant ta maison. J’ai quelque chose d’important à te dire. — Ayman » Je suis restée figée. Ayman. L’ami d’enfance de Jason. Le seul du groupe qui m’avait toujours regardée avec gentillesse. Le seul qui m’avait parlé comme si j’existais vraiment. Le seul qui posait des questions quand il voyait que je n’allais pas bien. Le seul… qui avait disparu de nos vies depuis quelques mois, sans donner d’explications. Pourquoi maintenant ? Pourquoi lui ? Pourquoi ce message ? Et que voulait-il me dire… à cet instant précis ?— Ayman…, murmurai-je. J’étais à la fois troublée et rassurée. Ce que je ressentais à ce moment-là était très étrange. Il s’avança vers moi et, dans son regard, je voyais bien qu’il ne s’imaginait pas me voir dans cet état. Moi aussi. Je me sentais honteuse. J’étais la pire des idiotes. Il s’accroupit face à moi et prit ma main. Ce geste me troubla. Il ne détourna pas le regard du mien et il me dit : — Tu n’as pas à t’en faire. Je suis là. Mon cœur se mit à battre si soudainement. Je n’avais jamais été proche de lui, mais sa gentillesse et sa délicatesse à mon égard — contrairement à son amie — m’avaient toujours fait me sentir bien. Et aujourd’hui encore, Ayman était là pour moi. — Claire, on va y aller d’accord ? ajouta-t-il. Il me sourit tendrement, et c’était comme si, dans tout ce chaos, je trouvais enfin un peu de paix. Cette main tendue face à moi, et ce sourire qui me rassurait. Je me suis décidée à la prendre. Il m’aida avec les valises. Sans dire un mot, je le
— Ja… Jason… Qu’est-ce que tu dis ? Mais… mais où vais-je aller ?? J’étais abasourdie. Une humiliation de plus. En plus d’avoir été trahie, humiliée, je me retrouvais sans rien, pas même un toit où vivre. Je voulais hurler d’injustice, crier de n’avoir été qu’une poupée de chiffon dans cette maison. Elle était au courant, ma meilleure amie le savait pertinemment. Elle avait participé à tout ceci. Maintenant devant elle, pour sa plus grande victoire, j’allais être chassée comme une malpropre… — Comment peux-tu faire une chose pareille ? Où veux-tu que j’aille ?? Comment vais-je pouvoir regarder mon père en face et lui dire tout ce qui s’est passé ?? lui criai-je au nez avant de me tourner vers ma meilleure amie. — Toi Natalie, tu savais, pas vrai ?? Tu savais, je me trompe ? demandai-je en riant d’un rire amer. Le pire… Elle avait l’air de se foutre totalement de moi. Un regard méprisant se posa sur moi. Un regard que je ne lui reconnaissais pas. Est-ce qu’on peut être auss
Je les regardais l’un après l’autre, complètement abasourdie. Je n’aurais jamais pu le soupçonner, ni même penser une seule seconde que les deux pouvaient être des amants.Ma sœur de cœur, Natalie, que je considérais comme mon plus grand soutien, avait tout simplement profité de la situation et m’avait poignardée d’un couteau dans le dos.Ils se tenaient là, tous deux devant moi. Elle lui tenait la main… enfin non, tous deux se tenaient la main.Cette tristesse, ces yeux embués de larmes de la veille avaient disparu. Elle se tenait face à moi, confiante, décidée.Jason s’avança jusqu’à moi, le regard froid comme d’habitude.Je ne pus même pas le regarder en face tant je ne voulais pas qu’il lise ma tristesse dans mes yeux.Il sortit un stylo de sa poche et se pencha sur la table.Je le sentis de nouveau poser ses yeux sur moi.— On ne va pas passer une éternité là-dessus. Je te libère. Tu devrais faire pareil, déclara-t-il avec ce ton si distant.Sur le coup, j’ai sursauté.Au fond de
Je n’ai presque pas dormi cette nuit-là.Je suis restée allongée dans mon lit, fixant le plafond, incapable de calmer le bruit dans ma tête.Jason.Natalie.Le document.Ayman.Tout se mélangeait dans un chaos que je n’arrivais pas à comprendre.À un moment, vers cinq heures du matin, j’ai fermé les yeux juste pour respirer. Juste pour essayer d’arrêter de trembler.Mais une question revenait encore et encore :Pourquoi tout le monde a su avant moi ?Je secouai la tête, les yeux brûlants.Pas le moment de pleurer.Pas encore.Je me levai, ma robe de nuit froissée, mes cheveux en désordre.Je me dirigeai vers la salle de bain.Je me regardai dans le miroir.J’avais l’air d’une femme fatiguée.Vidée.Blessée.Mais il y avait aussi autre chose.Une petite flamme.Une petite colère.Quelque chose qui commençait à naître.Je savais que cette journée allait être décisive.J’ai fait couler un peu d’eau froide sur mon visage.Le choc m’a réveillée d’un seul coup.Puis j’ai attaché mes cheveux
Je suis restée quelques secondes immobile, assise sur mon canapé, le téléphone entre les mains. Mes yeux étaient encore mouillés, mon cœur battait trop vite, ma respiration était courte. Et pourtant… au milieu de tout ce chaos, un nom venait d’émerger comme une bouée. Ayman. Je n’arrivais pas à comprendre pourquoi son message arrivait maintenant, au moment exact où ma vie venait d’exploser. Le timing était trop précis. Trop étrange. Trop chargé de sens. Je me levai lentement, mes jambes encore lourdes, mes gestes maladroits. Ma poitrine me faisait mal. Ma tête aussi. Comme si ma journée essayait de me rattraper d’un seul coup. J’allai vers la fenêtre. J’écartai légèrement le rideau. Et il était là. Appuyé contre sa voiture. Les bras croisés. La tête baissée. Comme quelqu’un qui n’est pas sûr d’être le bienvenu. Je crois que mon cœur a fait un petit sursaut. Un tout petit. Rien d’exagéré. Juste… quelque chose de différent. Je n’avais pas vu Ayman depuis des mois.
Je ne sais pas ce qui a été le plus violent : La présence de Jason dans mon salon. Ou celle de Natalie… qui s'était avancé jusqu'à ses côtés. Elle était là. Devant moi. Comme si elle avait le droit d’être ici. Comme si elle avait quelque chose à m’expliquer. Comme si elle n’était pas la raison pour laquelle mon cœur était en train de se briser encore plus, seconde après seconde. Je crois que le silence a duré longtemps. Ou peut-être que non. Je ne sais plus. Le temps n’avait plus de forme, plus de sens. Tout était confus dans ma tête. Jason la regarda avec un air que je n’avais jamais vu. Un air que je n’avais jamais reçu de lui. Un de ces regards qui disent tout sans rien dire. Et tout en moi s’est effondré encore une fois. Natalie inspira. Ses yeux brillaient, mais pas de honte. Je crois qu’elle avait peur. Ou peut-être qu’elle jouait. Je n’arrivais même pas à savoir. — Claire… murmura-t-elle. Je… je voulais te parler avant. Je voulais t’expliquer. J’ai ri. Pa







