Ils ont attendu trois jours.
Trois jours pour réunir leurs prêtres, écrire leurs accusations, et se présenter devant mon trône comme des croisés face à un démon. Le grand prêtre Dalmoras, vieillard sec et rusé, entre dans la salle du trône comme s’il en était le maître. Il ne s’agenouille pas. Il ne baisse pas la tête. Il me regarde avec cette assurance que seuls les hommes qui pensent parler au nom d’un dieu peuvent se permettre. — Votre Majesté, commence-t-il, le ton mesuré. Nous sommes inquiets. — De quoi ? que les enfants apprennent à lire ? — Que le peuple oublie la voix divine. Que l’ordre sacré soit troublé par des idées dangereuses. L’éducation… doit passer par le temple. Comme il en a toujours été. Je m’appuie contre le dossier de mon trône. — Justement. Il est temps que ça change. Ses yeux se plissent. — Vous écartez l’Église. Vous usurpez son rôle. Vous introduisez des symboles étrangers, des doctrines qui n’ont jamais été validées par nos sages. Vous créez des écoles, des livres profanes, et même des imprimeries… tout cela sans consultation. Je me lève. — Je suis le roi. — Et moi, je suis le lien entre le ciel et votre peuple ! tonne-t-il. Le silence tombe. Même mes gardes frémissent. [Notification : Conflit d’autorité détecté – Influence religieuse : élevée.] [Risque d’excommunication du pouvoir royal : 62%. Réaction populaire : divisée.] Je serre les poings. Je pourrais céder. Négocier. Mais ce serait un signal de faiblesse. Et dans ce royaume… la faiblesse est une religion bien plus mortelle que la leur. — Grand Prêtre, dis-je calmement. Vous parlez de lien. De voix divine. D’ordre. Mais dites-moi… Je descends les marches du trône, face à lui. — Où était cette voix quand les paysans mouraient de faim ? Quand vos scribes vendaient des prières aux plus offrants ? Quand le savoir se vendait plus cher qu’un pain ? Il ne répond pas. — Vous avez gardé le peuple dans l’obscurité. Moi, je leur tends une lampe. Un murmure parcourt la salle. Dalmoras pâlit, mais il n’a pas fini. — Vous jouez avec les fondations du royaume, Majesté. Ce que vous appelez lumière pourrait bien être l’incendie qui nous détruira tous. Il tourne les talons. — L’Église ne vous soutiendra plus. Et si vous continuez ainsi, elle vous combattra. [Notification : Perte de soutien religieux – Impact : modéré pour l’instant. Préparez-vous à des sabotages, sermons contre le trône, manipulation du peuple.] --- Le soir, je reste seul. Le Système s’ouvre devant moi, froid, neutre, impartial. [Nouvel arbre débloqué : “Foi et Manipulation sociale”.] • Création d’un culte royal – 20 points • Récupération du symbolisme religieux au profit du trône – 12 points • Réforme doctrinale via écoles contrôlées – 9 points J’ai 13 points. Juste assez pour riposter subtilement. Je choisis la réforme doctrinale. J’infuse doucement l’idée que foi et connaissance ne s’opposent pas, mais se complètent. Que Dieu ne craint pas les questions. Qu’un roi éclairé ne défie pas les cieux, il les représente différemment. [Notification : +9 Points de Renommée – Apparition de mouvements réformistes populaires.] --- Le lendemain, un jeune prêtre entre dans mon bureau. Seul. Timide. Mais avec le feu dans les yeux. — Majesté… je ne suis pas d’accord avec le Haut Temple. Beaucoup d’entre nous veulent changer, apprendre… guider, pas dominer. Je l’écoute. Et je sais. C’est ainsi que naissent les révolutions silencieuses.La nouvelle du Rat tomba comme un couperet sur les plans de Rolland. Trois jours. C'était le délai infime dont il disposait avant que Stonehaven ne sombre potentiellement dans le chaos orchestré par Karl Lagerfeld et ses marionnettes locales. Le Baron Theron, un nom que Rolland ne connaissait que trop bien – une lignée autrefois puissante, déchue pour trahison sous le règne de son grand-père, et qui n'avait jamais pardonné à la couronne sa disgrâce. Un pion idéal pour le Duc du Sud.Immédiatement, un message codé fut expédié par le cavalier le plus rapide au Lieutenant Erlan Kaelen, qui campait avec ses deux cents hommes d'élite à moins d'une journée de marche de Stonehaven. L'ordre était simple et brutal : infiltrer la ville discrètement, identifier les meneurs de la conspiration avec l'aide des agents du Rat déjà sur place, et frapper avant qu'ils ne puissent mettre leur plan à exécution. Pas de demi-mesures. La racine du mal devait être arrachée avant qu'elle n'empoisonne toute la
Le crissement de la plume de Rolland sur le parchemin s'arrêta net. Les chiffres détaillant les prévisions de récoltes pour la province de Greenridge s'effacèrent de son esprit, remplacés par les froides et implacables notifications du Système. Karl Lagerfeld. Encore lui. Le Duc du Sud, tel un prédateur tenace, ne se laissait décourager ni par la défaite de son allié nordique, ni par les coups audacieux de la Générale Lyra. Au lieu de cela, il changeait de terrain, délaissant les champs de bataille ouverts pour les venelles sombres de la conspiration et les couloirs tortueux de la trahison.Destabilisation de Stonehaven. Complot visant Eryndale, voire sa propre personne. Les mots luisaient en rouge dans l'interface mentale de Rolland, porteurs d'une menace insidieuse, plus difficile à contrer qu'une armée en marche.Un frisson, non de peur mais d'une colère glaciale, parcourut le roi. Il avait espéré un bref répit après la sanglante victoire de l'Alne, un moment pour panser les plaie
Pendant que la poussière des funérailles retombait lentement sur Eryndale, la vie dans la capitale reprenait un cours marqué par l'effort de guerre et une vigilance anxieuse. La victoire sur l'Alne avait insufflé un nouvel espoir, mais chacun savait que le répit ne serait que temporaire. Karl Lagerfeld, le serpent du Sud, n'allait pas tarder à manifester sa fureur.À l'Hospice Royal, transformé en principal centre de traitement des blessés de guerre, une révolution silencieuse était en marche. Dame Maelis, avant son départ pour l'Est, avait passé plusieurs jours et nuits à transmettre aux médecins et guérisseurs d'Eryndale les "protocoles médicaux oubliés des premiers rois" que Rolland lui avait confiés. Ces connaissances, fraîchement débloquées par le Roi grâce à ses Points de Mérite, portaient sur des concepts aussi simples que révolutionnaires pour l'époque : le nettoyage méticuleux des plaies avec du vin bouilli ou des décoctions de certaines herbes antiseptiques, l'importance de
Les jours qui suivirent la victoire sanglante de la rivière Alne furent empreints à Eryndale d'une dualité poignante. D'un côté, un soulagement palpable, la fierté d'avoir repoussé l'envahisseur et la confiance renouvelée dans le leadership du Roi Rolland. De l'autre, le deuil, lourd et pesant, pour les milliers de fils, de frères et de pères qui ne reviendraient jamais. La capitale se para de noir et des couleurs austères du royaume, se préparant à honorer ses morts.Sur les conseils de Maelis et suivant les suggestions du Système, Rolland avait ordonné des funérailles nationales d'une ampleur inédite. Il comprenait l'importance de ce rituel, non seulement pour apaiser la douleur des familles, mais aussi pour forger un sentiment d'unité et de sacrifice partagé. Chaque soldat tombé, du plus humble milicien au Capitaine Valerius, devait être reconnu comme un héros de Frostmar.La cérémonie principale eut lieu sur la Grande Place d'Armes, devant le palais royal. Une foule immense s'étai
La nouvelle de la victoire sur la rivière Alne se répandit dans Eryndale comme une traînée de poudre, portée par des cavaliers exultants et confirmée par des proclamations royales affichées à la hâte sur les murs de la cité. Un immense soulagement submergea la capitale, chassant pour un temps la peur qui l'étreignait depuis des jours. Des acclamations spontanées s'élevèrent sur les places publiques, les cloches des temples sonnèrent à la volée, et le vin, longtemps gardé en réserve, coula dans les tavernes. Frostmar avait repoussé l'invasion du Nord. Le Roi Rolland avait tenu sa promesse.Pourtant, dans les murs froids du palais, l'ambiance était bien différente. Rolland, entouré de ses conseillers les plus proches, lisait et relisait les rapports détaillés de la bataille. La victoire était indéniable, stratégiquement cruciale. Ivar Frost avait été stoppé net, ses forces décimées, son aura d'invincibilité brisée. Mais le coût, comme l'avait souligné Seran, était effroyable. Plus de qu
L'aube qui se leva sur les rives de la rivière Alne était blafarde et chargée de menaces. Une brume épaisse, née de la pluie nocturne et de la fraîcheur matinale, s'accrochait aux saules pleureurs et masquait partiellement la rive nord où grouillait l'armée d'Ivar Frost. La nouvelle de la chute de la Passe du Dragon, confirmée par des survivants hagards de la Légion du Griffon qui avaient réussi à se frayer un chemin à travers les lignes ennemies, avait jeté un froid glacial sur les défenseurs. Le Général Kaelen était porté disparu, probablement mort ou capturé, son sacrifice ayant permis de ralentir la marée du Nord juste assez longtemps.Le Commandant Seran, le visage dur et marqué par des jours de marche forcée et de nuits sans sommeil, parcourait la ligne de défense improvisée sur la rive sud. Grâce au travail acharné et quasi miraculeux des frères Varn et de leurs équipes d'artisans-soldats, ce qui n'était qu'une berge boueuse quelques jours auparavant commençait à ressembler à u