Victor
02h19 — Gdańsk, appartement privé, zone portuaire.
Elle s’appelle Anja. Ou c’est ce qu’elle m’a dit.
Je ne lui ai pas demandé si c’était son vrai nom. Je ne veux pas le savoir. Ce soir, les vérités pèsent plus lourd que les mensonges.
La chambre est plongée dans une lumière chaude, orangée, presque crue, comme si la nuit elle-même voulait garder ce moment fragile intact. Les rideaux sont tirés, la ville reste dehors, lointaine, sourde, en pause. On entend à peine le grondement sourd des cargos dans le port. Juste sa respiration. Et la mienne. Deux horloges désynchronisées, battant en décalage, battant comme deux mondes qui se croisent sans jamais vraiment s’accorder.
Son corps est contre le mien. Souple. Présent. Une ancre dans une mer trop instable.
Je glisse mes doigts sur la courbe de son dos, lentement, du bout des doigts, comme pour m’assurer que ce contact est réel. Elle frissonne, doucement, en silence. Ses cheveux noirs éparpillés sur l’oreiller, une cascade désordonnée