Avant même que je n'aie le temps de prononcer, son cri s'était tu. Il avait été entraîné sous l'eau, et le silence qui suivit fut plus assourdissant que n'importe quel vacarme.Je me suis juste mis à l'appeler sans relâche, aussi fort que je le pouvais, ma voix déchirant la brume glaciale :« JUNIOOOORRR ! JUNIOOOOORRRR ! JUNIOOOOOORRRRR ! »Mais c'était une peine perdue, un cri dans le vide. J'étais juste en train de m'accrocher à un semblant d'espoir, mais au fond de moi, je savais qu'il n'allait jamais me répondre. La seule chose qui parvenait à mes oreilles, c'étaient les mêmes bruits étranges qui avaient précédé l'attaque : des rires aigus et moqueurs, des bruits de nage rapides, et
La brume était devenue bien plus dense et épaisse, un mur impénétrable de grisaille, mais surtout très glaciale. Cette fois, même l'eau était invisible sous nos pieds, et c'était à peine si je voyais Junior de l'autre bout de la pirogue, sa silhouette floue, presque effacée par le voile. L'air était si froid qu'il brûlait nos poumons à chaque inspiration.La visibilité étant de zéro, ça ne tarda pas quand on commença à entendre le bruit de quelque chose s'approcher.Cela produisait un son sourd, lourd, un écho guttural qui semblait venir de l'eau elle-même.Galoub ! Galoub ! Galoub !Le bruit se faisait de plus en plus distinct, résonnant à travers la brume glaciale, comme si quelqu'un, ou quelque chose, s'approchait avec une lenteur monstrueuse. Chaque galoub martelait
Après avoir navigué un court instant, le vrombissement du moteur de la pirogue s'atténuant à mesure que nous nous approchions, nous fûmes bientôt aux abords de cet étrange brouillard. Et ce n'était qu'à ce niveau, tout près du voile, que j'en perçus la véritable immensité : il s'élevait, colossal, jusqu'au ciel, une muraille d'opacité qui engloutissait l'horizon. C'était comme si d'énormes nuages d'orage, denses et menaçants, étaient descendus sur la mer, une masse impénétrable de ténèbres laiteuses.Dès le moment où nous y sommes entrés, une chape de silence s'est abattue. L'air devint plus froid, plus lourd. Il était à peine possible de voir à plus de trois mètres devant nous. Il ne s'agissait pas d'un simple brouillard, mais d'une brume épaisse, presque solide, qui englobait tout. Non seulement cela, mais la traversée s'annonçait longue, interminable, alors même que nous venions à peine de franchir le seuil.Au départ, notre pirogue était dotée d'un moteur, un modeste garant de not
Nous étions en pleine réunion extraordinaire, une présentation cruciale pour l'avenir de ma carrière. La tension était palpable, chaque mot pesé, chaque argument scruté. Et soudain, au milieu d'une phrase, une soif impérieuse me saisit. Une soif anormale, violente, comme si mon corps entier se desséchait. Une assistante, prompte, me tendit un verre d'eau.Et dès la première gorgée, la panique. Non pas un simple étouffement, mais une noyade intérieure, une suffocation atroce. L'eau, au lieu de me désaltérer, se transformait en plomb dans mes poumons, me broyant la poitrine. Mes yeux s'écarquillèrent, horrifiés, fixant mes collègues, mes supérieurs, leurs visages se floutant tandis que la douleur me déchirait. Je serrais ma gorge, mes mains crispées, mais mon souffle était coupé. Le silence de la salle dev
Un soir, elle me donne rendez-vous chez elle. Je savais déjà ce qui allait se passer là-bas. Une nuit pour oublier, une tentative d'échapper à l'ombre grandissante qui me suivait.Arrivée sur les lieux, elle avait fait un délicieux repas que nous avions partagé. L'appartement était cosy, éclairé d'une lumière tamisée, et pour un bref instant, j'ai cru pouvoir respirer, me détendre. Nous avons parlé un peu, des banalités, des rires légers. Laurie était charmante, attentive.Un moment, elle m'annonce qu'elle va se doucher et que je devrais l'attendre ou la rejoindre si je veux. Une proposition à peine voilée. Malgré son invitation alléchante, une prudence innée, alimentée par la terreur des dernières semaines, me retint. L'idée même que Kaï-Lani puisse se manifester dans un tel mom
Je me retourne brusquement pour la faire face et là, c'est comme si toute une vague se déverse sur moi au point de me faire tomber. Le souffle coupé, mes poumons en feu, je perçois à travers le fracas sourd de l'eau une voix lointaine, éthérée, qui me chuchote : « Tu ne peux pas fuir, Dilane. Tu es à moi. »Et puis, aussi brusquement que ça avait commencé, tout était redevenu normal. Le silence tomba, lourd, assourdissant. Je me retrouvais au sol, trempé de la tête aux pieds, mes vêtements collant à ma peau comme une seconde épiderme froide. L'air vibrait encore d'une humidité étrange, et une odeur entêtante d'iode, de sel et d'algues mouillées piquait mes narines, comme si l'océan entier s'était invité dans ma chambre pour une danse macabre. Le lit était mouillé, le tapis gorgé d'eau par endroits, et une petite flaque luisait sous la fenêtre, reflétant faiblement la lumière de la lune.J'avais compris ce soir-là que les choses ne se passeraient donc plus comme avant. La réalité de Ka