Charnelle
Je passai le reste de la journée dans une sorte de léthargie, me forçant à travailler, à répondre aux emails, à participer aux réunions, mais chaque geste était automatique. Mon esprit, lui, était ailleurs. Il n'arrêtait pas de revenir à Adrien, à ce qu'il avait dit, à la manière dont il s'était comporté. C’était comme si ses mots tournaient en boucle dans ma tête, de plus en plus présents, de plus en plus insistant.
Je savais que je ne pouvais pas continuer ainsi. Que je devais prendre une décision. Mais chaque tentative de rationaliser les choses échouait. L'attirance que j'éprouvais pour lui n'était pas simplement physique. C'était bien plus complexe. C'était comme un enchevêtrement de désirs, de peurs et de curiosités que je n'arrivais pas à démêler. Et chaque minute passée à lui résister ne faisait que renforcer l'intensité de ce que je ressentais.
Quand je partis du bureau ce soir-là, le soleil était encore bas, mais une chaleur étouffante envahissait l'air. Mes pensées étaient lourdes, oppressantes, et je ne pouvais m'empêcher de repenser à cette distance entre nous, ce que nous avions dit, mais aussi ce que nous n’avions pas dit. Il m’avait laissée avec une sensation étrange, une sorte de promesse non formulée.
En rentrant chez moi, je me laissai tomber sur le canapé, les yeux fixés sur le plafond. Je n'avais plus d'énergie pour réfléchir, encore moins pour analyser tout ce qui s’était passé au bureau. Mais malgré mes tentatives de me détourner de tout ça, je savais qu’une part de moi était déjà piégée. Il avait raison. Je n’avais pas seulement été attirée par lui, j’avais aussi été poussée par une curiosité presque irrépressible, un besoin de découvrir ce qui se cachait derrière cette barrière professionnelle, cette façade qu’il entretenait avec tant de brio.
Je laissai échapper un soupir, m’enfonçant davantage dans le canapé. Puis, sans vraiment y réfléchir, je sortis mon téléphone et ouvris son message de la veille. L’échange avait été court, mais l’impact qu’il avait eu sur moi était bien plus profond. Il n'avait pas attendu que je sois prête, il m’avait forcée à regarder les choses en face. Chaque mot, chaque phrase, semblait peser sur mes épaules.
Une vibration me fit sursauter. Un nouveau message. Adrien.
“Je sais que tu penses encore à notre conversation d’hier. Tu n'as pas à tout comprendre tout de suite. Mais tu sais, tu n’es pas seule dans tout ça. Je suis là si tu veux en parler.”
Je me mordis la lèvre inférieure en lisant ces mots. Pourquoi était-il si persistant ? Pourquoi, même après m’avoir laissée dans cet état de confusion, se sentait-il obligé de revenir à la charge ? Je n'avais pas besoin de ses paroles de réconfort. J'avais besoin d'espace, d’air, de distance. Mais quelque part, au fond de moi, je savais que je ne pourrais pas repousser cela indéfiniment.
Une partie de moi, peut-être la plus profonde, se sentait rassurée par sa présence, par son assurance. C'était comme si, à travers ses messages, il me tendait une main, me guidant dans un labyrinthe que je ne connaissais pas encore. Je voulais résister. Je devais résister. Mais pourquoi alors cette envie de lui répondre, de lui faire savoir que j’étais là, que je ressentais cette même tension qui se cristallisait entre nous ?
Je pris une profonde inspiration, mes doigts hésitants au-dessus du clavier de mon téléphone. J'allais lui répondre. Mais que devais-je lui dire ?
Un message s’écrivit tout seul, presque sans que je n’y pense :
“Je pense que tu as raison. Je ne peux pas ignorer ce que je ressens, mais je suis perdue. J’ai peur, Adrien. J’ai peur de ce que cela pourrait devenir.”
Je relus le message. Il était sincère, presque vulnérable. C’était la première fois que je laissais mes peurs et mes doutes s’exprimer aussi clairement. Mais pourquoi avais-je eu besoin de lui dire ça, à lui, de tous les hommes ? Pourquoi me livrais-je à quelqu’un que je savais être aussi imprévisible, aussi… dominant dans sa manière d’être ?
Je laissai le téléphone sur la table. Mon cœur battait plus fort. J'avais l'impression d'avoir franchi une ligne invisible, une ligne que je ne pouvais plus effacer. Il n’y avait pas de retour possible. Même si je voulais, je savais qu'une partie de moi était déjà allée trop loin dans cette direction.
Une réponse arriva presque immédiatement.
“La peur est normale, Charnelle. Mais ne laisse pas cela t’empêcher de vivre ce que tu ressens. La seule façon de savoir ce que cela peut devenir, c’est de l’accepter. Nous avons tous nos peurs, mais il est temps de les affronter.”
Ses mots résonnaient dans ma tête comme un écho. Il n’avait pas tort. Il avait raison, même si cela m’effrayait. Combien de fois avais-je vécu dans la peur de ce que les autres pourraient penser, ou du jugement que l’on pourrait avoir sur mes choix ? Et si cette fois, je laissais tout cela de côté et je me laissais simplement guider par ce désir, cette attirance qui m’électrisait et m’effrayait à la fois ?
Je me levai du canapé, marchant dans la pièce comme si la réponse que j’allais donner allait décider de tout. Je m’approchai de la fenêtre, observant les rues sombres en contrebas, me perdant dans la réflexion. Si je répondais, il n’y aurait pas de retour en arrière. Si je laissais ma main trembler sur le clavier, je m’abandonnerais à cette folie, à ce jeu dangereux qu’il m’avait tendu.
Alors, pourquoi hésiter encore ?
Je pris une décision. Un dernier message, une dernière tentative. Je me posai devant mon téléphone, mes doigts pressant doucement les touches.
“D’accord. Je vais te suivre, Adrien. Mais sache que ce n’est pas facile pour moi. Je suis prête à explorer ce que
tu proposes, mais seulement à ma façon.”
Charnelle Adrien me serre plus fort, et je sens sa respiration devenir plus irrégulière. Ses doigts se crispent autour de moi, comme s’il avait besoin de me sentir, de se rassurer.— Oui, il a accepté. Il… il m’a dit qu’il me laissait tout. Tout ce qu’il a bâti. Et qu’il voulait que je prenne ma place, ma véritable place.Je le regarde, cherchant une trace de doute dans ses yeux, mais il n’y en a pas. Il est déterminé. Plus que jamais.— Alors, c’est fini. Il n’y a plus d’obstacles, n’est-ce pas ? Je le regarde, cherchant dans ses yeux une réponse, une confirmation.Il hoche la tête, une lueur de soulagement et de fierté dans son regard.— Oui. Plus rien ne pourra nous séparer, Charnelle. Nous allons avancer, et ce que ton père n’a pas pu accepter, nous le ferons ensemble. Pour notre futur. Pour ce que nous sommes. Et pour notre enfant.Je souris, le cœur léger. Peu importe ce qui se passera demain. Nous avons franchi cette étape. Et désormais, nous allons écrire notre histoire à deu
CharnelleLes jours passent, et chaque instant qui s’écoule me rapproche un peu plus de ce futur que nous avons imaginé, ensemble. Mon ventre s'arrondit doucement, et avec chaque mouvement de cet enfant qui grandit en moi, je sens une force nouvelle s’éveiller en moi. Une force que je n’avais pas imaginée, mais qui semble guider mes pas. Adrien et moi avançons côte à côte, une main dans l'autre, dans une harmonie nouvelle, plus forte que jamais.La décision de son père, ce changement de dynamique, continue de me travailler. Adrien n’a plus à se battre contre une ombre. Le poids de l’héritage, des attentes, semble enfin avoir été levé. Pourtant, je sais que le chemin devant lui ne sera pas forcément plus simple. Il devra assumer ce rôle avec une force nouvelle, une conviction nouvelle. Et je serai là, toujours. Pour le soutenir. Pour l’aimer.Ce matin-là, après un petit-déjeuner tranquille, nous décidons de sortir de la villa pour prendre l’air. Un moment pour nous deux, loin des respo
CharnelleLes jours qui suivent sont empreints d’une énergie nouvelle, comme si chaque instant était chargé de promesses. Adrien et moi avons pris le temps de célébrer ce moment, cette nouvelle étape qui s’ouvre devant nous. Mais au fond de moi, une certitude s'est installée : je suis prête. Prête à devenir mère, prête à affronter ce futur aux côtés d’Adrien. Ensemble, nous avons traversé tant d’obstacles, et aujourd’hui, un tout nouveau chapitre s’écrit.Ce matin-là, comme tant d’autres, le soleil se lève doucement, effleurant les rideaux de notre chambre avec une lumière dorée. Adrien dort à mes côtés, son corps chaud et rassurant contre le mien. J’aime ces moments de calme, ces instants où la réalité semble s’éloigner, où nous ne sommes plus qu’unis dans la quiétude. Mais mon esprit est aussi rempli de pensées. La nouvelle, cette annonce que j’ai faite à Adrien, résonne encore dans ma tête comme un doux écho : nous allons être parents. Et c’est un bonheur simple, pur, qui me traver
Adrien Je me lève de la table, le cœur battant plus fort maintenant que j’ai pris ma décision. Mon père a peut-être voulu me pousser dans une direction stratégique, mais ce n’est pas pour cela que j’agirai. Ce sera parce que j’aime Charnelle, parce que je suis prêt à l’unir à moi pour la vie. Et cela, c’est ma propre décision.Je lui adresse un dernier regard, un regard déterminé.— Je reviendrai vers toi quand le moment sera venu.Je quitte la pièce, mon esprit déjà tourné vers ce qui doit arriver. Ce n’est pas une simple question de pouvoir. C’est une question de cœur.CharnelleLes jours ont passé, mais quelque chose dans l’air semble encore plus lourd que d’habitude. Adrien est plus distant ces derniers temps, plus concentré sur l'avenir, ses pensées tournées vers des décisions qu’il ne me partage pas encore. Pourtant, je sens cette tension qui persiste entre nous, même lorsque ses mains effleurent les miennes avec une tendresse qui dissimule bien des tourments.Il m’a promis qu’
AdrienLa soirée s'étire dans une atmosphère de tension palpable, alors que je me gare devant la demeure de mon père. La maison, imposante comme toujours, me regarde comme un monstre silencieux. Je la connais bien, chaque recoin, chaque pièce où les secrets se cachent et où l’ombre de mon père semble toujours peser sur tout ce qui se passe sous son toit. Ce soir, je ne suis pas ici pour recevoir des leçons sur le pouvoir ou sur les affaires. Non, ce soir, il y a quelque chose d’autre qui m’attend.Je prends une profonde inspiration et monte les marches menant à l’entrée. Le serveur me laisse entrer et m’accompagne jusqu’à la salle où il m’attend. Je le vois, là, à la tête de la table, son regard toujours aussi acéré, scrutant chaque geste, chaque parole comme une arme. Il me fait signe de m’installer.— Prends place, me dit-il d’un ton neutre, sans chaleur, comme d’habitude.Je m’assois en face de lui, son regard me transperçant. Il semble plus vieux ce soir, fatigué, mais toujours au
AdrienCharnelle et moi échangeons un regard, partagé entre la gratitude et la méfiance. Ce dîner a peut-être été l’occasion de nous annoncer à la famille, mais il a aussi révélé tout un réseau de tensions sous-jacentes, de pouvoirs en jeu et de futurs compromis. La famille, l’entreprise, la nouvelle génération… Tout cela se mêle en une seule et même entité, prête à engloutir ce que nous avons de plus précieux.Et alors que nous nous préparons à partir, je suis plus que jamais convaincu qu’à partir de maintenant, il nous faudra être plus forts que jamais. Pour le bébé. Pour notre avenir. Pour nous.Les jours suivant le dîner ont été une suite d’entretiens avec des partenaires d’affaires, de réunions interminables et de décisions stratégiques. Mon père a fait en sorte de maximiser la visibilité de notre annonce, et maintenant tout le monde sait que nous attendons un enfant. Il n'y a plus de place pour les doutes, et tout le monde attend de voir ce que nous allons faire ensuite.Je le s