LOGINLes jours suivants passèrent trop vite au goût de Ralantsoa.
Elle enrageait.
Pas un mot plus haut que l’autre.
Le vendredi matin, l’ambiance au bureau était insupportable.
Le travail avait disparu.
Elle claqua son stylo sur la table et se leva brusquement, comme pour chasser l’air chaud de la pièce. Elle sortit dans le couloir, espérant une bouffée d’air frais.
Il était là, calme, posé contre le mur, les mains dans les poches, l’air d’un homme parfaitement satisfait du désordre qu’il avait semé.
— Vous n’avez pas l’air très emballée par notre petit week-end, dit-il doucement, avec son habituel demi-sourire.
Elle le fusilla du regard.
— Je suis désolée si je ne partage pas l’enthousiasme d’un troupeau d’adolescents en uniforme. Certains ici ont des responsabilités. Et des vies.
— C’est justement pour ça que c’est important, répondit-il, le ton plus sérieux. Quand l’esprit est tendu, l’équipe se désagrège. Une entreprise, c’est une machine humaine. Sans cohésion, elle s’effondre.
Elle croisa les bras.
— Ce qui tient une entreprise, c’est le travail. Pas les jeux de plage et les marshmallows au feu de bois.
Il haussa les épaules, imperturbable. S’approcha doucement et se pencha légèrement vers elle :
— On verra bien dimanche soir qui avait raison, murmura-t-il à son oreille.
Elle serra les dents.
Pourquoi fallait-il toujours qu’il ait le dernier mot sans élever la voix ? Et surtout… pourquoi ce murmure, si près, si intime, la déstabilisait-il autant ?— Vous perdez votre temps, lança-t-elle en se détournant.
— Peut-être, répondit-il. Mais j’ai l’habitude d’en tirer quelque chose.
Ralantsoa sentit un léger frisson lui parcourir l’échine. Elle inspira profondément, tentant de chasser ce malaise.
Cette proximité, cette tension… c’était nouveau. Et elle n’aimait pas ça. Pas du tout.Elle rentra dans son bureau, le cœur battant.
Son regard se posa sur le sandwich oublié, puis sur l’écran d’ordinateur. Les chiffres, les rapports, tout semblait soudain plus flous, moins nets.Un malaise diffus, une émotion qu’elle n’avait jamais ressentie.
Un trouble qu’elle n’était pas prête à nommer.Elle secoua la tête, cherchant à chasser cette pensée.
Mais elle savait au fond d’elle que ce sentiment ne s’évanouirait pas si facilement.Ralantsoa resta immobile, le souffle court, tandis que la porte se refermait sur le silence. La pièce semblait vouloir l’avaler. Son cœur battait si fort qu’elle craignait qu’il n’alerte ses gardes. Pourtant, sous la peur, une petite flamme d’obstination brûlait désormais plus vive : elle n’était pas seulement captive — elle était une clef. Et une clef, ça se tourne, ça se force.Elle reprit son travail, méthodique. La corde, déjà fragilisée, rendit un nouveau fil ; elle sut que le temps jouait pour elle. Ses doigts, engourdis mais précis, cherchèrent une faiblesse dans la boucle. Les mouvements de la main, répétés, étaient douloureux, mais le fil finit par lâcher encore d’un demi-centimètre. Une mince marge. Une marge suffisante pour glisser la main à travers et, peut-être, agripper le métal derrière la fixation.Des pas se firent entendre dans le couloir — trois, puis deux ; la cadence d’un changement de poste. Ralantsoa se recroquevilla et feignit l’évanouissement. Lorsqu’un garde
Ralantsoa sentit chaque mot comme une alarme qui tonne contre ses tempes. Il vient de rentrer. Les syllabes résonnaient encore, lourdes. Son corps se raidit ; la petite victoire sur la corde lui parut tout à coup dérisoire. Si il venait, tout changeait — soit il était la clef, soit il était la menace finale.Elle rouvrit très lentement les yeux et scruta l’obscurité. La pièce paraissait plus petite à présent, comme si les murs avaient reculé pour mieux l’enfermer. Ses doigts, engourdis mais acharnés, cherchèrent la partie usée de la corde. Il fallait qu’elle gagne encore un centimètre, juste un centimètre de plus pour glisser la main sous le lien, atteindre la boucle, et — si la chance lui
Lorsque Ralantsoa rouvrit les yeux, tout était plongé dans une semi-obscurité. Son corps était étendu sur un siège inconfortable, les mains attachées sur les accoudoirs. La pièce était silencieuse, à l’exception d’un léger bourdonnement électrique au loin. L’air était froid et chargé d’une odeur étrange qu’elle ne pouvait identifier.Elle essaya de bouger, mais ses muscles étaient raides et ses membres engourdis par l’effet du chloroforme. Sa panique monta d’un cran.— Où… où suis-je ? murmura-t-elle, sa voix tremblante.Une lumière s’alluma doucement au plafond, révélant un es
Ralantsoa ajusta une dernière fois son foulard devant le miroir, inspira profondément et attrapa son sac. La matinée s’annonçait chargée, mais elle n’avait pas perdu son calme habituel. Trente minutes plus tard, elle referma la porte de sa chambre et descendit les escaliers d’un pas léger. Sort de la maison en disant au revoir à ses parents.Dehors, l’air était encore frais. Elle s’avança vers la route pour héler un tuk-tuk.Un grondement discret se fit entendre. Un SUV noir aux vitres teintées s’arrêta juste devant elle, ses pneus crissant légèrement sur le bitume. L’instinct de Ralantsoa la fit reculer aussitôt, son cœur battant plus vite.La portière arriè
Ny Aina gara la voiture devant l’immeuble du bureau, son cœur battant plus vite qu’il ne l’aurait voulu. La façade grise, d’ordinaire si banale, lui parut ce matin presque menaçante. Il resta quelques secondes assis derrière le volant, le moteur encore allumé, comme pour rassembler ses forces.Finalement, il coupa le contact, attrapa son sac et descendit. À peine avait-il franchi le seuil qu’il croisa le regard furtif d’un agent de sécurité, plus appuyé qu’à l’accoutumée. Une impression désagréable le parcourut, mais il continua sa marche d’un pas assuré.Dans le couloir menant au bureau de Mme Vero, tout semblait calme. Les conversations feutrées s’éteignaient à son passage, et il crut pe
Ny Aina resta un moment immobile, le téléphone encore chaud entre ses doigts. Ses épaules s’affaissèrent légèrement, comme si tout le poids de la conversation venait de retomber sur lui.— Aller la voir… répéta-t-il d’une voix basse, presque pour lui-même.Ralantsoa inclina la tête, ses yeux brillants d’une douceur mêlée d’inquiétude.— Oui. Elle t’a parlé comme si elle n’avait plus personne. Et toi… tu as encore une place dans son histoire, même si ce n’est plus la même qu’avant.Il ferma les yeux un instant, inspirant profondément. Les images de son passé avec Linah revinrent comme des &eacut







