1. La Nuit qui ne finit jamais
L'île du Pacifique était plongée dans une chaleur tropicale moite, lourde, chargée de l'odeur du sel et des fleurs nocturnes. Mais la chaleur la plus intense ne venait pas de l'extérieur. Elle venait de la chambre principale du bungalow.
Elias Vance n'était plus le garde du corps froid du début. Depuis son retour de la mort, depuis que le sang d'Amy et le Sérum Omega avaient fusionné dans ses veines, quelque chose avait changé. Une barrière avait sauté.
Amy était allongée sur les draps de soie froissés, le corps couvert d'une fine pellicule de sueur, le souffle court. Elle regardait l'homme qui se tenait au pied du lit, sa silhouette découpée par la lune.
Elias ne dormait presque plus. Le sérum lui donnait une énergie inépuisable, mais cette énergie devait sortir. Et depuis des semaines, elle sortait par une faim insatiable pour elle.
— Tu me regardes encore, murmura Amy, sa voix rauque. Viens dormir, Adam.
Elias s'approche. Il bougeait comme un prédateur, silencieux, fluide. Il s'agenouilla sur le matelas, ses mains larges se posant de chaque côté des hanches d'Amy, l'enfermant. Ses yeux verts brillaient dans le pénombre, pupilles dilatées.
— Je ne peux pas dormir, dit-il, sa voix basse, vibrant directement dans la poitrine d'Amy. Quand je ferme les yeux, je vois le vide de l'espace. La seule chose qui me garde sur Terre, c'est toi. Ton odeur. Ton pouls.
Il baissa la tête, enfouissant son visage dans le creux de son cou, inspirant profondément comme s'il cherchait à absorber son âme.
— Tu sens la peur, Amy. Pourquoi ?
— Je n'ai pas peur, mentit-elle, passant ses doigts dans ses cheveux noirs. Je suis juste... épuisé. Tu es intense, Elias. Plus qu'avant.
Il relève la tête. Il y avait une lueur possessive dans son regard qui fit frissonner Amy. Ce n'était pas de la violence, c'était une adoration dévorante. Le Sérum avait amplifié ses émotions. Il ne l'aimait pas simplement ; il était addict à elle biologiquement.
— Je suis vivant grâce à toi, grogna-t-il. Mon chantait t'appartient. Mon corps t'appartient. Je veux juste m'assurer que tu es toujours là. Que tu es à moi.
Il l'embrassa, un baiser qui n'avait rien de tendre, un baiser de revendication, profond, exigeant, qui balaya la fatigue d'Amy et ralluma le feu au creux de son ventre. C'était la malédiction de leur nouvelle vie : le danger était parti, mais la passion était devenue une guerre en soi.
2. Les effets secondaires
Le lendemain matin, Amy se réveilla seule. La place d'Elias était froide.
Elle se leva, enfila une chemise d'Elias qui lui arrivait à mi-cuisse, et sortit sur la terrasse.
Elias était sur la plage. Il ne courrait pas. Il s'entraînait. Il soulevait des troncs de palmiers massifs, échoués par la marée, les utilisant comme des haltères primitifs. Ses muscles roulaient sous sa peau bronzée, ses veines saillantes, chromées par endroits sous l'effet du soleil.
Alaric, qui vivait dans l'annexe de la maison (transformée en centre de serveurs), rejoignit Amy sur la terrasse, une tablette à la main.
— Ses niveaux de testostérone et d'adrénaline sont 400% supérieurs à la normale humaine, dit l'enfant sans préambule.
— Bonjour à toi aussi, Alaric, soupira Amy, prenant un café.
— Je suis sérieux, Amy. Le Sérum Omega n'était pas conçu pour la paix. Il était conçu pour créer un Super-Soldat en guerre perpétuelle. Sans ennemi à combattre, son corps produit trop d'énergie.
Alaric pointa Elias du doigt.
— Il compense par l'activité physique extrême... et par l'activité sexuelle. C'est un mécanisme de régulation de la dopamine. S'il s'arrête, il devient agressif. Ou pire, son cœur pourrait se lâcher sous la pression.
Amy regardait son fils amoureux. Il jette le tronc d'arbre avec une violence terrifiante, le bois éclatant en morceaux. Il se tourne vers elle. Même à cent mètres, elle sentit l'impact de son regard. Il la voulait encore.
— Il a besoin d'un exutoire, dit Amy. Ou d'un remède pour calmer le sérum.
— Il n'y a pas de remède, dit Alaric. Il est ce qu'il est. Mais il y a une conséquence que vous n'avez pas prévue.
— Laquelle ?
— Ses phéromones. Sa signature biologique. Il ne passe pas inaperçu, Amy. Il émet un signal bio-chimique que certains... collecteurs... recherchent.
— De quoi parle-tu ? Le Patriarche est gelé. Zeus est mort.
— Il y a pire que les conquérants, Amy. Il y a les Collectionneurs .
3. L'Invitation de la Chair
Un drone de livraison postale, un modèle civil standard, approchant de l'île. Il ne portait pas d'armes, mais une simple boîte en velours rouge. Il la dépose sur la table de la terrasse et repartit.
Elias remonta de la plage en quelques secondes, alerté par le bruit. Il était torse nu, ruisselant, magnifique et effrayant. Il se place devant Amy, protectrice.
— N'y touche pas, ordonna-t-il.
Il scanna la boîte avec son œil modifié (qui avait gardé certaines capacités d'analyse, bien que Zeus soit mort).
— Pas d'explosifs. Pas de poison. Juste du papier et... du tissu.
Il s'agit de la boîte.
À l'intérieur, il y avait une invitation gravée sur une feuille d'or, et un masque en soie noire.
"Au Sujet Alpha et à sa Reine. L'ennui est la seule mort véritable. Le Club 'Eros & Thanatos' vous invite à sa vente aux enchères annuelle à Macao. Objet de la vente : Le dernier échantillon du sang du Patriarche. Venez jouer. Ou venez chasser."
— Le sang du Patriarche ? dit Amy. Je croyais qu'il était piégé en Antarctique.
— Son corps d'origine est piégé, dit Elias. Mais avant de mourir, il a dû faire des prélèvements.
Elias serra l'invitation dans son poing.
— Si quelqu'un possède ce sang, il peut essayer de recréer le sérum. Ou cloner le Patriarche.
— Ce n'est pas pour ça qu'ils t'invitent, Elias, dit Alaric, analysant le filigrane de la carte. Éros et Thanatos . Amour et mort. C'est un club de plaisirs interdits pour l'élite mondiale. Ils ne veulent pas ton argent. Ils veulent ta génétique . Ils savent ce que tu es devenu.
Elias regarda Amy. Une lueur sombre passe dans ses yeux. L'ennui de l'île commençait à peser sur lui. La bête en lui voulait chasser.
— On va ? demanda Amy, sentant l'excitation monter malgré elle.
Elle voyait bien qu'il ne tiendrait pas longtemps ici à soulever des arbres. Il avait besoin de danger. Et elle... elle avait besoin du voir en action. La paix l'avait également rendue nerveuse. Elle était devenue accro à l'adrénaline, tout comme lui.
— Macao, dit Elias, un sourire carnassier étirant ses lèvres. La ville du péché. C'est parfait.
Il s'approche d'Amy, ignorant Alaric, et la souleva dans ses bras comme si elle ne pesait rien.
— Mais avant de partir... j'ai besoin de réguler ma dopamine, murmura-t-il contre son oreille, sa main glissant possessivement sur sa cuisse nue.
— Elias, Alaric est là ! protesta Amy, rougissant mais s'accrochant à ses épaules larges.
— Il a vu des codes sources plus sales que ça, grogna Elias, l'emportant vers la chambre.
Alaric soupira et remet ses écouteurs.
— Les adultes sont dysfonctionnels, marmonna l'enfant.
4. Macao : La Cité du Vice
Vingt-quatre heures plus tard.
Macao brillait de mille feux, une version asiatique et plus sombre de Las Vegas. Elias et Amy débarquèrent de leur jet privé.
Leur allure avait changé. Fini les tenues tactiques. Ils étaient habillés pour tuer, mais socialement.
Elias portait un smoking sur mesure qui peinait à cacher la largeur de ses épaules et la puissance contenue de son corps. Il dégageait une aura de danger brut qui faisait retourner les femmes et reculer les hommes sur son passage.
Amy portait une robe fendue jusqu'à la hanche, rouge sang, le dos nu révélant la douceur de sa peau. Elle portait le collier contenant le micro-outil SERPENT
Ils entrèrent dans le casino souterrain du Lotus Doré , le lieu du rendez-vous.
L'atmosphère était lourde de parfums précieux, de fumée et de désir. Ici, on ne pariait pas de l'argent, mais des secrets, des vies et des corps.
À peine entrés, ils furent abordés. Non pas par des gardes, mais par une femme.
Elle était grande, sculpturale, vêtue d'une robe qui semblait faite de diamants liquides. Ses yeux étaient violets (des lentilles ou une modification génétique ?).
— Monsieur Vance, ronronna-t-elle, ignorant totalement Amy. Je suis Madame V. Le propriétaire. J'ai entendu dire que vous étiez... inépuisable.
Elle pose une main manucurée sur les bras d'Elias, ses doigts effleurant les biceps dur sous le tissu.
— La rumeur dit que votre sang vaut des milliards. Mais je suis plus intéressée par ce que vous pouvez faire avec ce corps.
Elias ne recula pas. Il la regarda avec son œil bleu froid.
— Je suis venu pour le sang du Patriarche. Pas pour des jeux.
— Oh, mais pour avoir le sang, il faut jouer, chéri. Ici, la monnaie, c'est le plaisir.
Madame V se tourna vers Amy, un sourire de mépris amusé sur les lèvres.
— Et vous devez être... l'accessoire. La "Reine". Êtes-vous prête à partager, ma chère ? Ou avez-vous peur que le Loup ne trouve une meute plus appétissante ici ?
Amy sentit la jalousie monter, une émotion qu'elle pensait avoir maîtrisée. Mais voir cette femme toucher Elias, voir la faim dans les yeux des autres femmes du casino qui déshabillaient son partenaire du regard... c'était insupportable.
Amy s'avança, glissant son bras autour de la taille d'Elias, marquant son territoire avec une froideur royale.
— Je ne partage pas, Madame V. Et si vous touchez encore à ce qui m'appartient, je vous coupe la main.
Madame V éclata de rire.
— J'aime ça. De la passion. Très bien. La vente aux enchères commence à minuit. Mais attention... ce soir, le lot principal, ce n'est peut-être pas le sang du Patriarche. C'est peut-être le géniteur lui-même.
Elle s'éloigna en ondulant des hanches.
Elias se pencha vers Amy.
— Tu es jalouse ? demanda-t-il, amusé, l'œil vert brillant.
— Tais-toi. Reste concentré.
— Je suis très concentré. Je sens son rythme cardiaque. Elle ment. Elle n'a pas le sang du Patriarche.
— Alors pourquoi nous a-t-elle fait venir ?
— Pour prélever le mien, dit Elias. Regarde les serveurs.
Amy regarda les serveurs qui passaient avec des plateaux. Ils ne portaient pas des verres. Ils portaient des seringues vides sur des velours.
— Ce n'est pas un casino, réalisa Amy. C'est une ferme de prélèvement. Et tu es le taureau primé.
5. Le Piège de Phéromones
Les lumières s'éteignirent brusquement. Une brume rose, douceâtre, commença à descendre des bouches d'aération.
— Gaz ! retint son souffle Elias.
— Non, dit Amy, reniflant l'air. Ce n'est pas toxique. C'est... aphrodisiaque.
C'était un gaz de synthèse puissant, conçu pour briser les inhibitions et stimuler l'agressivité et le désir.
Elias grogna. Le Sérum Omega dans son sang réagit violemment au stimulant. Ses pupilles se dilatèrent jusqu'à manger l'iris. Ses muscles se tendirent, déchirant les coutures de son smoking.
La bête en lui, qu'il contenait à grand-peine sur l'île, était en train d'être libérée chimiquement.
— Amy... va-t'en, gronda Elias, tombant à genoux, luttant contre l'envie de tout détruire... ou de tout prendre.
Autour d'eux, les invités du casino commençaient à perdre le contrôle, se jetant les uns sur les autres dans une frénésie orgiaque et violente.
Madame V apparut sur un balcon, protégée par un masque à gaz.
— Voyons ce que le Sujet Alpha peut faire quand on lui enlève sa laisse morale ! Capturez la fille ! Si vous voulez le contrôler, contrôlez sa femelle !
Des gardes, équipés de respirateurs et de bâtons électriques, foncèrent vers Amy.
Elias releva la tête. Son visage était un masque de fureur pure. Il ne voyait plus Amy comme sa partenaire. Il la voyait comme Sienne. Et personne ne touchait à ce qui était à lui.
Il rugit, un son qui n'avait plus rien d'humain, et se jeta sur les gardes, non pas pour les désarmer, mais pour les démembrer.
Amy était seule au milieu d'une arène de luxure et de sang, avec un Elias devenu fou furieux qui massacrait tout sur son passage pour la "protéger". Mais une fois les gardes morts... se tournerait-il vers elle avec amour, ou avec une faim incontrôlable ?