Chapitre 7

Vanessa a agité la main pour arrêter un taxi et est rentrée chez elle, épuisée. À peine entrée, son cœur s'est serré devant le spectacle qui l'attendait :

Sally, pelotonnée comme un chaton blessé sous un plaid, se faisait dorloter par Jocelyn. Ce dernier lui tendait une cuillère de sirop avec une précaution qui en disait long.

Mais quand il a aperçu Vanessa, son regard s'est transformé en lame glaciale, chargée d'un mépris à couper au couteau.

« Tu as le culot de revenir ? » Jonathan a foncé sur elle et lui a envoyé une gifle violente.

Vanessa a vacillé, le paysage dansant devant ses yeux.

« Je savais que le retour de Sally te rendait malade, mais là, tu dépasses les bornes ! Elle est ta sœur, alors pourquoi un tel drame ? Si Jocelyn n'était pas intervenu, elle aurait pu y rester ! »

Sally, intérieurement jubilante, a joué les saintes-nitouches : « Papa, arrête… Ça va, hein ? »

« Ferme-la ! Cette conna*se ne mérite pas ta pitié. » Sa poitrine se soulevait par à-coups, trahissant une colère à peine contenue.

Vanessa restait tétanisée, les tympans en feu.

Soudain, Jocelyn a lâché d'une voix de mort-vivant : « À genoux. Demande pardon. » Son ton était si glacial qu'on aurait cru entendre craquer la givre.

Cependant, contre toute attente, Vanessa a grondé : « JAMAIS. »

Les sévices des ravisseurs lui avaient ouvert les yeux : Sally avait monté ce coup pour la faire passer pour la méchante ! Alors pourquoi s'excuserait-elle ? C'était pas de sa faute !

Sally a poussé alors un soupir théâtral : « Laisse tomber... C'est un accident... Je ne veux pas briser les liens entre nous, les filles... »

« Elle a failli te tuer ! Demander des excuses est si exagéré ? » Jocelyn a fixé Vanessa sans cligner des yeux, son dégoût palpable. Il ne savait plus depuis quand cette femme était devenue aussi incontrôlable et déraisonnable.

Jonathan, exaspéré par l'entêtement de sa fille, l'a attrapée par le bras comme on soulevait un chiot nouveau-né et l'a traînée devant Sally. Un grognement de douleur lui a échappé, c'était seulement alors qu'il a remarqué les brûlures en étoile qui constellaient son avant-bras.

Alors qu'il fronçait les sourcils, interloqué, la voix glaciale de Jocelyn a coupé court à ses questions : « Te mutiler pour faire porter le chapeau à Sally… Vanessa, tu redéfinis le mot 'sans scrupules'. »

Les doutes de Jonathan se sont dissipés d'un coup, remplacés par une fureur aveugle. Il lui a écrasé les épaules d'une pression brutale, la forçant à ployer les genoux et à s'effondrer avec un bruit sourd sur le sol.

« Tu as vraiment pété un câble ! Cette famille, ton propre père… rien ne compte plus pour toi ?! »

Vanessa a levé un regard vide pour croiser celui de Jocelyn. L'homme, une main possessive autour de Sally, la toisait comme un juge en robe noire. Elle, à genoux, n'était plus qu'une loque humiliée.

Quelque chose dans son expression butée a irrité Jocelyn. « Présente tes excuses, et j'oublierai tout », a-t-il raillé.

Vanessa a éclaté d'un rire rauque, les yeux injectés de sang : « Répète après moi : jamais. Fais-moi taire si tu l'oses. »

C'était la goutte de sang qui a noyé les derniers restes de pitié chez Jocelyn.

Jonathan, lui, est passé aux actes. Sous la pluie de coups, Vanessa, déjà au bout du rouleau, s'est affaissée comme un pantin désarticulé. En moins de quelques secondes, elle a sombré dans le noir.

...

Elle ignorait combien de temps elle était restée inconsciente. À son réveil, le salon était désert, comme vidé de toute vie.

Serrant les dents contre la douleur qui lui labourait le corps, elle s'est agrippée au canapé pour se redresser. Elle a traîné jusqu'à sa chambre et a jeté ses affaires dans une valise.

Au moment de refermer le couvercle, une voix vicieuse l'a fait sursauter : « Alors, tu as apprécié ma petite surprise d'adieu ? »

Sally, vautrée dans l'encadrement de la porte, arborait un sourire à faire geler l'enfer : « J'avais même pensé t'inviter à mes fiançailles… Mais papa a refusé. Tu salis le nom des Cazel, qu'il disait. Ton existence même est une honte pour nous. »

« Pars donc, Vanessa. Et surtout… ne reviens jamais. Sans toi, on respirera enfin. Ah, et merci pour ces deux années où tu as distrait Jocelyn. Un jouet gratuit, c'est toujours pratique, non ? »

Vanessa, les lèvres serrées, n'a rien dit.

Avec un « Clac », sa valise s'est verrouillée, emprisonnant avec elle le dernier vestige d'attachement qui la liait à cette maison.

Le lendemain, avant même l'aube, elle embarquait dans un vol vers l'inconnu, sans un regard en arrière.

Dans la zone d'embarquement, ses doigts ont survolé l'écran de son portable avec une détermination chirurgicale : Jocelyn, SUPPRIMER ; Contact, EFFACER ; Histoire, TERMINÉE.

L'avion a fendu les nuages, traçant une cicatrice blanche dans le ciel. On aurait dit une signature, la dernière page d'un chapitre merdique qu'elle brûlait enfin.