Dans un coin paisible de la ville, vivait une femme nommée Myriam, douce, discrète, aimante. Depuis plus de trente ans, elle partageait sa vie avec Idriss, son mari. Un homme de 57 ans, travailleur, toujours bien habillé, respecté de tous.
Ils formaient ce que beaucoup appelaient « un couple exemplaire ».
Ils avaient trois enfants. Leur fils aîné, Malik, âgé de 28 ans, travaillait à l’étranger. Les deux autres, Leïla et Samiya, vivaient encore à la maison, étudiantes et complices de leur mère.
Myriam menait une vie simple, rythmée par la routine, les prières, la cuisine… et l’attente d’Idriss chaque soir.
Je regardais l’horloge du salon pour la troisième fois en moins de dix minutes. Il était 21h12. Idriss était en retard.
Je n’étais pas de nature méfiante… mais ce soir, je ne sais pas pourquoi, quelque chose me mettait mal à l’aise.
J’entendais enfin la clé tourner dans la serrure.
— Salam alaykoum, lança-t-il d’une voix fatiguée.
— Wa alaykoum salam, répondis-je en me levant du canapé.
Je m’approchai pour l’embrasser, comme je le faisais toujours… mais je m’arrêtai net.
Un parfum.
Fort. Sucré. Presque entêtant.
Je plissai les yeux.
— Tu as changé de parfum, Idriss ?
Il me regarda, surpris.
— Hein ? Non. Pourquoi ?
— Tu sens quelque chose… d’inhabituel. Un parfum de femme. Très floral.
Il rit nerveusement, détourna les yeux.
— Oh, ça doit être la nouvelle au bureau. Elle vide littéralement son flacon sur elle chaque matin. C’est sûrement ça.
Je restai un instant silencieuse. Puis je forçai un sourire.
— Tu veux manger quelque chose ?
— Un café, juste un café. J’ai la tête lourde.
— Je te fais ça.
Je me dirigeai vers la cuisine, le cœur serré sans savoir pourquoi. Dans le salon, il posa ses affaires, puis s’installa dans le fauteuil.
Je l’observai à la dérobée. Il ne me regardait pas. Il fixait son téléphone. Ses doigts tapotaient rapidement l’écran.
J’approchai avec la tasse.
— Tu veux du sucre ?
— Non. Noir. Comme d’habitude.
Il prit la tasse sans me regarder.
Je m’assis en face de lui.
— Tu sembles tendu. Ça va ?
— Oui. Juste une journée longue. Trop de dossiers. Trop de gens. Trop de bruit.
Je hochai la tête. Puis je demandai, plus doucement :
— Et moi ? Est-ce que je fais partie de ce “trop” ?
Il releva enfin la tête, surpris.
— Quoi ? Bien sûr que non. Pourquoi tu dis ça ?
— Je ne sais pas… Je te sens ailleurs. Ces derniers temps, tu es souvent absent, tu rentres tard. Et ce soir, ce parfum…
Il posa la tasse un peu trop vite.
— Tu te fais des idées, Myriam. Tu sais que je t’aime.
Je souris doucement. J’avais envie de le croire. De toutes mes forces.
Mais une petite voix murmurait dans ma tête :
"Tu sens autre chose. Tu sais que quelque chose ne va pas."
Ce que je ne savais pas encore, c’est que ce parfum-là…
Ce n’était pas celui d’une collègue.
C’était celui d’une autre femme.
D’une autre vie.Le départ promis
Point de vue : Aïshe
La lumière dorée du soir filtrait à travers les rideaux blancs du salon. Aïshe, assise sur le canapé, une tasse de thé à la main, jetait des coups d’œil réguliers à son téléphone posé sur la table basse. Elle regardait l’heure : 18h57.
Idriss devait l’appeler. Il avait promis.
Yasmina, leur fille aînée, traversa le salon.
— Maman, tu vas encore le fixer longtemps, ce téléphone ?
— Il doit m’appeler, souffla-t-elle. Il m’a dit qu’il aurait une réponse aujourd’hui. Pour le départ.
— Le départ… Tu crois vraiment qu’il va le faire cette fois ?
— Oui. Il m’a juré. Cette fois, c’est la bonne.
Yasmina hocha la tête sans répondre. Elle avait appris, au fil des années, à se méfier des promesses de son père.
Adam, son frère de 14 ans, entra à son tour avec un ballon sous le bras.
— Papa vient ce soir ?
— Non, mon cœur. Il est pris. Il m’appelle, là. Tout de suite.
Et comme par magie, le téléphone vibra. Écran allumé : "Idriss".
Le cœur d’Aïshe bondit dans sa poitrine. Elle décrocha aussitôt.
— Allô ?
— Prépare les valises, dit-il d’une voix grave. On prend l’avion demain matin. À 8h.
— Quoi ? Idriss… tu es sérieux ?
— Très sérieux. Tout est prêt. Les passeports, les billets, les papiers. Tu prends juste ce qu’il faut. Trois valises. Pas plus.
— On part vraiment ? Toi, moi, les enfants ? On quitte ce pays ?
— Oui. On s’en va, Aïshe. Ensemble.
Elle mit la main sur sa bouche pour étouffer un cri de joie.
— Mon Dieu… Idriss… Tu tiens enfin ta promesse ?
— Oui. Mais écoute-moi bien : pas un mot à personne. On reste discrets. Je passe à l’aube vous chercher. D’accord ?
— D’accord, chuchota-t-elle.
Elle raccrocha. Son corps tremblait. Elle resta un moment immobile, puis bondit de sa chaise.
— Yasmina ! Adam ! Faites vos valises ! On part demain matin !
Les deux enfants se figèrent.
— Demain ?! s’écria Adam.
— Papa a appelé ? demanda Yasmina, méfiante.
— Oui. Il vient nous chercher à l’aube. On prend l’avion. Pour de bon.
Adam sauta de joie, tandis que Yasmina restait figée.
— Et sa… "femme officielle" ? demanda-t-elle froidement.
— Il m’a dit qu’il avait tout réglé. Qu’on ne devait plus jamais revenir.
— Tu le crois encore, maman ? Après toutes ces années ?
— Cette fois, c’est différent. Je le sens.
Yasmina se leva sans répondre. Elle entra dans sa chambre et ferma doucement la porte.
Aïshe resta seule quelques instants. Elle regarda autour d’elle : les murs, les cadres, les souvenirs. Demain, tout cela appartiendrait au passé.
Elle monta dans sa chambre, ouvrit l’armoire et sortit sa valise. En la posant sur le lit, elle murmura :
— Il est à moi, maintenant. Rien qu’à moi.
Mais quelque part
au fond d’elle… une petite voix hésitante chuchotait : “Et si…”
Point de vue omniscientIl était 17h03 quand le téléphone d’Aïcha sonna. C’était un appel de sa fille Naomie, la voix tremblante.Naomie (au téléphone)— Maman… je… il faut que je te dise quelque chose. C’est très grave.Aïcha— Qu’est-ce qu’il y a ma fille ? Tu me fais peur !Naomie (en larmes)— Mon fiancé… Karim… il est mon frère, maman. Le fils d’Idriss. Ton mari.Aïcha (choquée, debout d’un bond)— Qu… quoi ? Tu dis quoi ? Non, ce n’est pas possible ! Ma fille, t’as dit quoi ?Naomie— J’ai appelé Myriam pour confirmer. C’est bien lui… je suis anéantie maman, je… je sais plus quoi penser.Aïcha laissa tomber son téléphone sur le canapé. Elle regardait dans le vide, les mains tremblantes, le souffle court.---Pendant ce temps, Vanessa (appelée parfois Mélissa) était seule dans sa chambre. Depuis des heures, elle fixait la boîte de pilules. Elle avait acheté ces comprimés clandestins, persuadée que c’était sa seule issue. Elle ne voulait pas d’un enfant, encore moins si c’était av
Chez Mélissa (Vanessa) – 10h15Assise sur son lit, Mélissa regarde les comprimés qu’elle a achetés la veille. Le petit sachet plastique est posé devant elle, comme un piège silencieux. La lumière du matin entre par la fenêtre, douce et cruelle à la fois. Tout semble paisible autour d’elle, sauf en elle.> "Je n’ai que 20 ans... Je ne suis pas prête. Pas pour ça. Pas maintenant. Pas comme ça..."Elle prend son téléphone. Une hésitation. Elle clique sur le nom de Karim, mais ne compose pas. Elle le regarde. Son sourire dans la photo de profil. Sa voix qui lui revient en écho : « Tu dois aussi penser à ton avenir… »> "Et s’il m’en voulait ? S’il me laissait ? Et s’il pensait que j’ai voulu le piéger ? Non. C’est mieux qu’il ne sache rien. C’est mieux d’effacer tout ça…"Les comprimés tremblent dans ses mains. Elle sort un verre d’eau, le pose sur la table de chevet.Mais juste au moment de les avaler, une larme coule sur sa joue. Elle serre les dents.Mélissa (à voix basse)— Pourquoi j
Lieu : Maison de MyriamHeure : 14h00L’ambiance est légère et remplie d’excitation dans le grand salon décoré avec goût. Myriam a tout préparé pour recevoir la fiancée de son fils : thé à la menthe, jus frais, petits gâteaux traditionnels. La petite sœur de Karim est déjà prête avec son téléphone, impatiente de prendre des photos. Idriss, en chemise beige et pantalon sombre, tourne un peu en rond, puis monte à l’étage.Myriam (regardant l’heure sur son téléphone)— Elle ne devrait plus tarder… C’est toujours comme ça avec les jeunes filles d’aujourd’hui, elles arrivent à l’heure du cœur, pas à l’heure de la montre !Tout le monde rit doucement. Cinq minutes plus tard, la sonnette retentit.Karim (se levant d’un bond)— Ah ! C’est elle !La domestique va ouvrir. Une jeune femme élégante entre dans la cour. Ses pas sont timides, mais assurés. C’est Naomie. Elle porte une robe chic, simple mais élégante, ses cheveux bien coiffés, un léger maquillage, et un sourire discret aux lèvres.My
Lieu : Maison de LucieHeure : 10h du matinIdriss est au volant de sa berline noire, l’esprit agité. Il a pris soin de porter une chemise bien repassée, sobre, et un parfum discret. Après la conversation tendue avec Lucie sur sa grossesse, il a décidé d’assumer. Il doit parler avec elle… et rencontrer enfin sa mère.La voiture se gare devant un petit immeuble tranquille. Idriss prend une inspiration, éteint le moteur, et sort calmement. Il monte les escaliers, frappe à la porte.Lucie ouvre avec un doux sourire, un peu nerveuse.Lucie (gênée mais souriante)— Bonjour Idriss… entre, je t’en prie.Il entre. L’appartement est propre, modeste, mais chaleureux. Il s’assied sur le canapé en velours vert pendant que Lucie apporte deux verres d’eau. Elle tourne un instant autour de la table, visiblement troublée.Lucie (baissant les yeux)— Je… je voulais te présenter ma mère. Elle va bientôt arriver. Elle voulait te voir.Idriss (soupirant)— Oui… c’est bien. On doit être adultes dans tout
Chez Lucie – Fin de matinéeLucie était assise dans le canapé de son salon modeste, les jambes croisées, le regard rivé sur l’écran de son téléphone. Un message venait d’arriver, signé Idriss.> Idriss :« Voici l’argent pour le transport de ta ménagère. Je viendrai voir ta mère bientôt, mais pour l’instant je suis un peu empêché. On s’arrange, d’accord ? Prends soin de toi. »Lucie soupira de soulagement en voyant la notification de virement. Elle ouvrit son application bancaire et constata que la somme promise était bien là. Elle se leva lentement et alla poser une main sur son ventre, encore à peine arrondi.Lucie (murmurant avec tendresse)— Petit ange… papa commence à faire un pas. Peut-être qu’il va vraiment nous assumer un jour.Elle esquissa un sourire. Ce n’était pas encore l’idéal, mais elle se sentait un peu plus en sécurité, un peu moins seule.---Dans un restaurant discret en périphérie de la ville – 17h30Karim était déjà assis à la terrasse, un cocktail sans alcool à l
Point de vue : IdrissDeux semaines s’étaient écoulées depuis le retour de Karim en France. Idriss, toujours tiraillé entre ses vies parallèles, essayait tant bien que mal de garder le contrôle. Entre les obligations familiales, les rendez-vous professionnels et les tensions internes, il n’avait pas eu une minute à lui. Mais ce matin-là, alors qu’il sirotait son café dans son bureau, son téléphone vibra.[Appel entrant – Anastasie]Il sourit inconsciemment en voyant son nom s’afficher. Cela faisait plusieurs jours qu’ils n’avaient pas eu une vraie conversation. Il décrocha rapidement.Idriss (voix douce)— Mon amour… quelle belle surprise de t’entendre ce matin.Anastasie (voix posée, avec un brin d’excitation)— Bonjour Idriss. J’espère que je ne te dérange pas ?Idriss— Toi ? Jamais. Je suis au bureau, mais j’ai toujours le temps pour toi. Que se passe-t-il ?Anastasie— Écoute… j’ai réfléchi. Les enfants sont en vacances dans une semaine. Et j’ai aussi quelques jours de congé. J’a