Chapitre 4

Chapitre 4 

Point de vue de Selena

La brume matinale s’étirait entre les arbres, glissant comme un voile argenté sur la terre humide des Carpates. Chaque pas que je faisais sur le sol couvert de feuilles mortes résonnait dans le silence oppressant de la forêt. Mon cœur battait à un rythme irrégulier, un mélange d’excitation et de peur. J’étais consciente que chaque mouvement, chaque souffle pouvait trahir ma présence dans ce lieu où la prudence était vitale.

Mes doigts effleurèrent la mousse humide sur le tronc d’un vieux chêne. La texture était douce sous ma paume, et pourtant, elle ne suffisait pas à calmer l’angoisse qui me tenait en alerte depuis que j’avais quitté le sentier principal. Je savais qu’approcher la clairière de l’Alpha était un risque, et pourtant… quelque chose en moi me poussait toujours vers cet endroit. Comme si un fil invisible me guidait, me contraignait à avancer malgré la peur.

Chaque bruit de la forêt me faisait sursauter : le craquement d’une branche, le bruissement d’un animal dans les fourrés, le souffle du vent dans les feuilles. Mais au milieu de cette tension, mon esprit revenait inlassablement à lui. **André**. Même son nom, murmuré dans mes pensées, faisait battre mon cœur plus fort. Je me souvenais de la première fois que je l’avais vu, debout au sommet de la colline, dominant la clairière comme s’il appartenait à la forêt elle-même. Sa présence imposante, son aura puissante… tout en lui m’avait frappée, et depuis, je ne pouvais m’empêcher d’y penser.

Je passai une main sur la cicatrice qui barrait ma joue gauche. Elle me rappelait chaque regard de pitié ou de peur que j’avais subi dans mon village, chaque murmure derrière mon dos. Mais ici, dans cette clairière, avec le souvenir de ses yeux verts qui m’avaient observée sans jugement, elle semblait moins lourde. Peut-être qu’il voyait au-delà de cette marque, peut-être qu’il voyait qui j’étais réellement. L’idée seule fit naître un frisson qui remonta le long de ma colonne vertébrale.

Je m’avançai prudemment, mes sens en alerte. Chaque pas était calculé, chaque souffle contrôlé. Mais malgré la vigilance, une partie de moi voulait qu’il m’aperçoive, qu’il sache que j’étais là. Et lorsque je levai les yeux, je le vis. Là, à quelques mètres, son regard me fixait. Il était immobile, imposant, mais ses yeux… ses yeux me scrutaient avec une intensité qui me laissa sans voix.

Un mélange de peur et de fascination m’envahit. Mon corps se figea, et pourtant, je sentais une chaleur étrange, douce et rassurante, m’envelopper. C’était un contraste déroutant : j’étais à la fois effrayée et irrésistiblement attirée par lui. Chaque muscle de mon corps était tendu, prêt à fuir, et pourtant, mes pieds refusaient de bouger. Je savais qu’à cet instant, rien dans le monde extérieur n’avait d’importance. Tout ce qui comptait, c’était le lien silencieux qui semblait se tisser entre nous.

Je sentis ses yeux suivre chacun de mes mouvements, et je compris que, malgré sa puissance, il n’était pas indifférent à ma présence. Il y avait dans son regard une curiosité profonde, presque fragile, qui contrastait avec l’Alpha redouté par la meute. C’était comme s’il découvrait chaque détail de moi, chaque imperfection, chaque hésitation, et que cela le fascinait.

Je pris une inspiration profonde, essayant de calmer le tumulte de mes pensées. Je devais rester concentrée. Je n’étais pas seulement une humaine perdue dans les Carpates ; je devais prouver que j’étais capable de survivre ici, capable de marcher aux côtés d’un être dont le monde entier obéissait à la loi de la meute. Et pourtant, une part de moi voulait juste qu’il s’approche, qu’il brise la distance et me montre que je n’étais pas seule.

Le vent fit bruisser les feuilles, et un frisson me parcourut. La forêt semblait vivante, consciente de notre présence, et chaque son prenait une dimension étrange et intense. Je sentis le parfum de l’Alpha se mêler à l’air humide : bois, pluie et une essence animale qui me fit tourner la tête. Mon cœur s’accéléra. Je savais que je devais rester sur mes gardes, mais il y avait une force plus puissante que la peur, une attraction silencieuse et irrésistible qui me retenait ici, face à lui.

— Pourquoi… moi ? pensai-je, les mots se perdant dans le vent. Pourquoi moi, une simple humaine avec des cicatrices et des faiblesses, aurait-elle capté l’attention d’un Alpha ?

Je restai là, immobile, tandis qu’il faisait un pas vers moi. La tension entre nous était palpable, un mélange de désir contenu et de respect mutuel. Chaque mouvement qu’il faisait semblait mesurer le danger autant que la proximité, chaque regard portait un message silencieux : je suis là pour toi, mais tout doit rester dans les limites de ce monde sauvage.

Alors que nos regards se croisaient, je compris que notre lien ne pouvait être ignoré. Il n’était pas seulement une question de survie ou de curiosité ; c’était plus profond, presque instinctif. Et je sentis un mélange de peur et de bonheur m’envahir : peur de ce que ce lien pouvait signifier, bonheur de savoir que quelqu’un me voyait vraiment.

La meute, cependant, n’était jamais loin. Un grondement discret retentit au loin, me rappelant que ce monde n’était pas sûr, et qu’il y avait des yeux partout. Mais malgré cette menace constante, je ressentais une sécurité inattendue. Être observée par André, sentir sa présence proche sans qu’il ne touche ma peau, suffisait à me donner un courage que je ne connaissais pas.

Je m’accroupis près d’un tronc tombé, laissant mes doigts effleurer l’écorce rugueuse, et je réalisai combien j’étais consciente de chaque détail autour de moi. Chaque bruit, chaque odeur, chaque mouvement pouvait signifier la différence entre la vie et la mort. Mais à côté de moi, André était calme, imposant, et je savais qu’il veillait sur moi. Cette simple certitude m’apportait une paix que je n’avais jamais connue.

Un bruit soudain dans les buissons me fit sursauter. Mon souffle se bloqua. Mais avant que je ne puisse réagir, il fit un pas en avant, sa posture protectrice, ses muscles tendus, prêts à agir. Et dans ce geste silencieux, je compris qu’il ne s’agissait pas seulement de la meute ou de la survie. Il s’agissait de nous deux, d’un lien fragile et puissant qui venait de se former.

Je sentis mes jambes trembler, non pas de peur, mais de l’émotion brute qui me submergeait. Mon regard croisa le sien, et dans ce simple échange, je compris que nous étions liés d’une manière que ni la meute ni le monde extérieur ne pouvaient comprendre.

— Reste près de moi, pensais-je. Peu importe ce qui arrive… je dois rester près de lui.

Le vent s’intensifia, apportant avec lui un parfum de danger et d’aventure. Et je sus que ce moment, ce lien, n’était que le début d’une histoire plus grande, plus intense, où la peur et le désir se mêleraient, où chaque jour apporterait son lot d’épreuves et de révélations.

Alors que je levai les yeux vers André, je vis une lueur dans ses yeux, un mélange de curiosité, de protection et de fascination. Et dans ce simple regard, je compris que notre destin venait de basculer. Je n’étais plus une humaine isolée dans la forêt. J’étais devenue la personne au centre d’un lien interdit et fascinant, et rien ne serait jamais plus pareil.

Le bruissement des feuilles se fit plus intense. Quelque chose approchait, un danger que nous n’avions pas anticipé. Mon cœur bondit. Je savais que nous allions devoir affronter ce moment ensemble, et que ce qui se passerait ensuite pourrait tout changer…

Et dans cette tension, dans ce mélange de peur et de désir contenu, je sentis naître une certitude : je ne voulais plus jamais revenir en arrière.