DavidLe choc est violent, presque insoutenable.Nos corps se heurtent comme des titans brisés, mais c’est plus qu’un simple affrontement physique.C’est une collision d’âmes, de volontés, un combat inscrit dans l’essence même de notre être.Je sens son éclat noir, froid et corrosif, comme un poison qui cherche à me dévorer de l’intérieur.Je serre les dents, et je lui oppose ma lumière vacillante, fragile mais tenace.Le sol sous nos pieds craque, fissuré par l’intensité de nos échanges.Je vacille, le souffle court, les muscles en feu, mais je tiens bon.Parce que c’est lui ou moi.Parce que ce combat n’est pas qu’une querelle personnelle.Il est pour le monde entier, pour chaque vie suspendue à cet instant.KaelSon sourire est un rictus cruel, un défi lancé au destin.Il sait qu’il détient cette part de vérité que j’ai choisie de rejeter.Mais il ignore que cette même vérité, aussi amère et lourde soit-elle, est la source de ma force obscure.Kael inspire profondément, un souffle
DavidLe vent s’est levé.Pas une brise. Pas un souffle d’air ordinaire.Non.Un vent ancien. Un souffle chargé de mémoire et de malédiction.Il traverse ma peau, griffe mes os, racle mon souffle.Et il annonce quelque chose. Quelqu’un.Quelque chose qui me connaît.Esteban recule, le souffle court, la main crispée sur la garde de son arme qu’il ne sort pas. Parce qu’il sait que ça ne servirait à rien.Joren, figé, ne dit rien. Son regard me fuit. Il sait. Ou peut-être, il devine. Et cela suffit à lui tordre les entrailles.Esteban— Quelqu’un approche.(Il se penche, les doigts effleurant la terre comme pour l’interroger)— Ce n’est pas toi… C’est pire.Briggs(Il s’est figé, les yeux révulsés, la voix gonflée d’un rire étranglé)— Deux porteurs. Deux phares. Deux plaies dans la peau du monde…(Il se met à rire, étranglé par une joie maladive)— La Prophétie n’avait rien prévu de tel !(Il titube comme un prophète ivre de sa propre folie)— L’équilibre… est une chimère. Un mensonge b
DavidLa lumière me lacère les yeux.Elle n’éclaire rien. Elle détruit.J’ai froid. Et pourtant, je brûle.Chaque battement de mon cœur est un marteau qui cogne contre ma cage thoracique, une forge ancienne qui réveille ce que je suis.Esteban gémit.Il est recroquevillé, son front battant le sol, comme s’il voulait s’enfoncer dans la terre pour y disparaître.Ses lèvres bougent sans qu’aucun mot n’en sorte, comme si même la douleur n’osait plus parler.Briggs se balance d’avant en arrière, les mains jointes, priant un dieu qu’il n’a jamais nommé.Ses yeux sont révulsés, blancs, tremblants.Autour de lui, l’air ondule, distordu par une chaleur invisible.Il murmure dans une langue oubliée, des syllabes rêches, cassées.Joren est debout. Immobile.Le regard vide.Ses poings sont fermés, si fort que ses ongles percent sa paume.Esteban— Qu’est-ce que tu as fait ?(la voix est râpeuse, comme s’il avait avalé des cendres)— Qu’est-ce que tu es devenu, David ?Je serre les dents.Quelque
DavidLes ténèbres me dévorent.Il n’y a plus d’air. Plus de lumière. Plus de temps.Le monde au-dessus n’est qu’un souvenir flou, un mirage salé accroché à mes cils.Ici, tout est silence et densité. La pierre n’est pas morte. Elle palpite. Elle me regarde.Elle me reconnaît.Je descends.Une marche. Puis une autre.Elles s’enfoncent dans la terre comme les crocs d’une bête affamée.Elles me happent. M’avalent.Elles m’ouvrent.Chaque pas est une douleur.Chaque pas est une mémoire.Chaque pas est une vérité que je n’ai pas demandée, mais que je porte quand même.David (intérieurement)Je vois des fragments.Des visages oubliés. Des mains tendues, rompues.Des pactes gravés dans des langues mortes, tordues de souffrance.Des cris étouffés par les siècles.Je ne suis pas le premier.Je suis juste celui qui revient.Celui qui ose.Celui qui ne tremble pas devant les ruines sacrées.Esteban— Tu saignes.Il a insisté pour me suivre. Je ne l’ai pas arrêté. Peut-être parce que je ne voula
DavidLe vent s’est levé.Pas une tempête. Pas encore. Mais une tension dans l’air, un frémissement étrange, comme si la mer elle-même hésitait entre calme et chaos. Elle respire à travers moi, s’immisce dans mes os, fait vibrer chaque nerf de mon corps. Je reste à la proue, les mains crispées sur le bois froid, le regard fixé sur l’horizon. Je ne cherche plus à comprendre. Je veux juste ressentir. L’air, le sel, le poids de mon propre souffle.Ce que j’étais s’efface. Ce que je deviens me dépasse.Derrière moi, j’entends les pas d’Esteban. Plus assurés cette fois. Il ne dit rien. Il reste à mes côtés. Et c’est suffisant. Pas besoin de mots. Pas encore.BriggsIl est remonté sur le pont. Il a cessé de prier. Ses lèvres sont closes, mais son regard parle à sa place. Il s’est planté au milieu du pont, les yeux vides, fixes, comme s’il voyait encore au-delà de ce monde. Il a vieilli. En quelques heures, en quelques battements de cœur, il a perdu une décennie.— Vous l’avez vu, hein ? sou
DavidJe suis étendu sur le sol de la cale. Le bois est tiède sous mes paumes, mais mon corps grelotte. Le silence est lourd. Trop lourd. Pas un souffle. Pas un craquement. Même l’océan, derrière les parois du navire, semble s’être figé, comme s’il retenait son souffle, redoutant ce que nous avons réveillé.Je cligne des yeux.La lumière vacille, bleutée, étrange. Les torches brûlent encore. Mais elles n’ont plus rien d’humain. Elles crépitent doucement, comme si elles savaient qu’un sacrilège venait d’être commis. Ou réparé. Je ne sais plus. Le monde a changé. Peut-être juste pour moi. Peut-être pour tous.Je passe une main sur ma poitrine.Mon cœur bat. Lentement. Trop lentement