Deux mois avant l’accident…
Nahema observe Gérard. Elle l’a toujours trouvé séduisant. Elle a toujours été amoureuse de lui depuis ses 16 ans, mais à l’époque, il avait d’autres objectifs ; il ne la voyait même pas et sortait uniquement avec des filles plus âgées. À 19 ans, Nahema a décidé de refouler ses sentiments et de l’oublier le jour où il est parti vivre en ville, il y a cinq ans. Mais les temps ont bien changé. Aujourd'hui, Nahema et Gérard cheminent ensemble, et cela fait bientôt un an qu'ils sont en couple.
— J'espère que tu seras prête quand on partira, lui dit Gérard alors qu'ils se retrouvent dans un coin du village.
— Oui, c'est pour ça que je veux qu'on fasse le point chaque fois qu'on se voit ici. Je n'en peux plus de vivre dans ce village ; il n'y a rien ici.
— D'accord, on va partir. Suis simplement mes instructions à la lettre pour que ça se passe bien là-bas.
— Ça fait des mois qu'on essaie de planifier mon déménagement avec toi. J'ai 24 ans et je galère ici. Je ne suis plus une enfant.
— Je sais que ce n'est pas facile. J'ai connu ça, et je peux t'assurer que quand je viens ici, je fais ce que j'ai à faire et je m'en vais.
— Maintenant tu vas te barrer avec moi, hein ? ironise-t-elle en roulant les yeux avec malice.
Cela fait des mois que cette idée trotte en permanence dans la tête de Nahema. Elle en a marre de moisir sur place, comme elle le chante à qui veut l'entendre. Selon elle, il n'y a pas grand-chose à faire au village, à part aller aux champs, faire quelques sillons, compter les tines d’huile rouge pour sa mère, ou aider à faire quelques ourlets des tenues que sa mère, couturière, doit préparer pour ses clientes. Ou bien, pire encore, regarder les poules et les autres animaux domestiques se prélasser dans la cour.
Nahema ne veut plus de cette vie. Elle aspire à plus, rêve grand et est persuadée qu’en ville, tout lui réussira. Avec seulement le Bac en poche, elle se sent trop vieille et souhaite se battre pour prendre sa vie en main. Heureusement que Gérard est là ; il la motive constamment et lui donne des idées. La tentation de partir est de plus en plus forte. Mais sa mère, Cécile, n'est pas de cet avis.
— Qu’est-ce que c’est que cette idée de vouloir partir pour la ville ?
— Maman, j’ai vraiment envie de me chercher là-bas.
— Et tu comptes vivre chez qui ? Tu n’as même pas d’argent.
— Non, mais… j’ai un ami qui…
— Oh, pardon ! Je connais cette chanson ! Après, je vais entendre des choses que je ne veux pas savoir.
— Non, maman. J’ai vraiment besoin de partir. Donne-moi juste une semaine ; si ça ne marche pas, je reviendrai.
— Et tu comptes y aller avec qui ?
— Gérard.
— Qui ? Quel Gérard ? Ce salaud ?
— Pourquoi dis-tu qu’il est salaud ?
— Tu n’es pas au courant ? Il passe son temps à mettre toutes les filles enceintes ici. Ne me dis pas que c'est avec lui que tu…
— Non, non ! On est juste bons amis. Tu sais qu’on se connaît depuis l’enfance. Il est comme un grand frère pour moi.
— Je te le dis, si c’est le Gérard que je connais… Hum ! Ce n’est pas la peine. Quelle idée de penser même que tu…
— On est justes amis. Il m’a proposé d’aller tenter ma chance en ville, c'est tout.
— Et toi, toute naïve, tu as accepté. Mais je rêve en couleur ! Ne me tente même pas. Tant que tu vis sous ce toit, j’ai le droit de te dire ce que je pense : c’est non !
Mais Nahema est bien décidée à partir ; Gérard lui a promis monts et merveilles. Il lui a parlé d’une vie pleine d’opportunités, de découvertes et de liberté. Elle s’imagine déjà là-bas, loin de l’ennui du village, où elle pourrait réaliser ses rêves. Chaque conversation avec lui renforce son envie de quitter cette vie qu’elle considère comme étouffante. Elle se voit dans un appartement chic, avec des amis autour d'elle, explorant les rues animées, découvrant de nouvelles passions, peut-être même un travail qui lui plairait vraiment. Les histoires que Gérard lui raconte la remplissent d’espoir. Elle sait que partir ne sera pas facile, mais elle est prête à tout pour fuir cette dure réalité.
—Je t’assure, en moins d’un mois, tu trouveras rapidement un emploi et tu deviendras indépendante. La rassure Gérard. Ne t’inquiète pas, j’ai plein de contacts là-bas. Je vais voir comment on peut te prendre comme femme de ménage chez mon patron. Je t’assure que c’est une chance pour toi. Ils ont vraiment besoin de quelqu’un, et ils paient bien.
—Vraiment ? Je suis partante !
—Ton rêve va se réaliser, ma chérie. Et je te dis qu’avec peu, tu peux avoir ta propre chambre. Avec mon salaire, imagine ce que ça va nous rapporter ! On va gagner beaucoup d’argent ensemble ! Tu vois ? On se fait du blé comme ça, et ensuite on redescend ici au village pour se marier. Les gens seront épatés.
—A qui le dis-tu ?
Les tensions entre Nahema sa mère s'intensifient. Leurs disputes se multiplient, créant un climat de plus en plus lourd à la maison. Chaque conversation sur son désir de quitter le village se transforme en conflit. Sa mère, inquiète pour sa sécurité et son avenir, ne peut s'empêcher de décourager sa fille.
— Nahema, je ne comprends pas pourquoi tu es si déterminée à partir. Tu as tout ce qu'il te faut ici ! Pourquoi vouloir risquer l'inconnu ?
— Maman, je ne peux plus vivre ici ! Je rêve d'une vie meilleure, et le village ne m'offre rien. La ville est ma chance de m'épanouir !
— Tu crois vraiment que tout sera facile là-bas ? Tu te rendras vite compte que ce n'est pas si simple. La stabilité est ce dont tu as besoin, pas de rêves et d’illusions.
— Mais je n’en peux plus de cette routine ! Gérard m'a promis qu'il m'aiderait à trouver un emploi et à bâtir un avenir. Je ne peux pas laisser passer cette opportunité !
— Gérard encore ! Tu es aveuglée par tes sentiments. Ce garçon ne te veut pas du bien. Tu ne sais pas à quoi tu t'exposes.
— Arrête de le juger ! Il me soutient et m'encourage à réaliser mes rêves. Tu devrais être heureuse pour moi !
— Je veux juste te protéger, Nahema. En tant que mère, c'est mon devoir. Je veux le meilleur pour toi, et je crains que tu prennes des risques inutiles.
Les échanges deviennent de plus en plus tendus, et la distance entre Nahema et sa mère semble se creuser davantage à chaque dispute.
— Nahema, c'est une très mauvaise idée. Je ne pourrai jamais me pardonner de te laisser partir avec ce garçon. C'est hors de question. Si tu veux, attends que je termine les prochaines récoltes, et ensuite nous pourrons discuter de…
— Les prochaines récoltes, c’est quand ? C'est trop loin. Je ne peux pas rester ici sans rien faire.
— Dans ce cas, tu ne pars pas. Je suis désolée, mais c'est non.
Nahema sait que convaincre sa mère est inutile, mais elle a un plan en tête et, au bon moment, elle saura le mettre en œuvre.
Gérard est de retour ce week-end, et comme d’habitude, ils se donnent rendez-vous dans un coin de la place. La tension est palpable, et Nahema ressent un mélange d'excitation et d'appréhension. Elle est déterminée à saisir cette chance de changer de vie, peu importe les obstacles.
— Ma mère s’oppose à mon départ. Elle refuse que j’aille avec toi, dit Nahema avec amertume.
— Laisse-la faire. On part ensemble, fais-moi confiance. Elle ne sait pas que tu es déjà une grande fille ?
— Je te dis que c’est compliqué ! Elle me rabâche presque tous les soirs dès que je lui parle de partir. Je lui ai même demandé un peu d’argent, mais elle ne veut rien entendre. Comme si je ne comptais pas lui rembourser.
— Ne t’en fais pas, chérie. Nous avons un plan, n’est-ce pas ? Tu me dis juste quand tu es prête, et on se lance.
— La semaine prochaine, on part dimanche, tu vois comment ?
— J’aime entendre ça. Viens ici, dans mes bras.
— Laisse-moi tranquille !
— Quoi ? Qu’est-ce que j’ai fait ?
— On dirait que tout ton travail consiste à mettre les filles enceintes ici ? Hein ?
— C’est cette rumeur ? Ta mère est vraiment diabolique, hein ? Chaque fois qu’elle me voit, je suis toujours avec une amie. C’est mal ?
— De toute façon, je n’ai pas envie de penser à ça en ce moment. D’abord, il faut qu’on parte ; on réglera ça face à face en ville.
— Fais-moi confiance. Je viens ici juste pour toi. Qu’est-ce que je ferais avec les autres filles ? Quand ta mère verra comment tu seras dans un an, elle va regretter de m’avoir traité comme ça.
— D'accord ! On se dit à dimanche alors.
— À dimanche, à l’aube… à 5 heures du matin.
C’est bientôt l’aube, et le soleil s’apprête à se lever. Nahema a déjà préparé son sac depuis la veille. Elle n’a pas fermé l’œil de la nuit, déterminée à partir sans dire au revoir à sa mère préférant la mettre devant le fait accompli. La partie la plus délicate sera de sortir de la maison sans faire de bruit. Elles dorment toutes les deux dans la même chambre, dans une petite maison où un rideau sépare à peine les deux pièces.
Son sac est prêt depuis longtemps, soigneusement caché sous un tas de légumes dans la cuisine. Mais maintenant, elle doit trouver un moyen de quitter la pièce discrètement. Gérard l’attend au petit carrefour, où ils se sont donnés rendez-vous à 5 heures du matin. Passé cette heure-là, ils risquent de rater les rares véhicules qui passent, à raison de deux par jour.
Elle lui a promis qu’elle serait là à temps, mais il est déjà 4h30, et Gérard commence à s’impatienter. Il lui envoie un texto :
« Mais bordel ! Tu es où ? La voiture va bientôt arriver. »
Est-ce facile ? Pas du tout. Nahema doit sortir de la chambre, puis ouvrir la porte principale sans faire de bruit. Après un moment de tension, elle réussit tant bien que mal. Elle enfile une robe rapidement, son cœur battant la chamade, puis elle s'éclipse enfin.
À l’extérieur, elle aperçoit Gérard en train de discuter avec le chauffeur, le visage inquiet. Gérard supplie le conducteur de patienter encore un peu.
—Allez, je t’en prie, juste quelques minutes de plus ! dit-il, le ton suppliant.
Nahema le rejoint, soulagée de voir que son plan commence à prendre forme. Elle se force à rester calme, malgré l’adrénaline qui a envahi tout son être. Elle sait qu’elle doit se montrer rapide et déterminée, car ce jour pourrait bien être le début d’une nouvelle vie.
— Mais on s'était dit quelle heure, déjà ? Tonne Gérard, impatient.
— Tu penses que c'était facile ? J'ai dû sortir de la maison sans faire de bruit, et avec tous ces cadenas et ces chaînes sur la porte, tu voulais que je fasse comment ?
— L'essentiel, c'est que tu sois enfin là. Allez, on y va.
— Mieux vaut que tu parles comme ça plutôt que de me menacer devant tout le monde. Et puis, regarde-nous, on est serrés comme des sardines ! C'est quoi ce tacot dégueulasse ? Beurk !
Gérard éclate de rire, malgré la situation.
Piqué au vif, le chauffeur s’arrête brusquement et s’adresse à elle…
—Descends ! Non seulement on attend la bonne dame, mais en plus, elle se permet de parler et de critiquer ma voiture. Descends, tu restes !
L'incident a duré une quinzaine de minutes avant que Gérard ne parvienne finalement à calmer les tensions.
— Pardon, chauffeur, laisse tomber. C’est le matin, évitons les disputes inutiles. Toi aussi, tu te chamailles avec une femme ?
— Serrés comme des sardines ! Eh bien, achète ta propre voiture et conduis-la toi-même ! Rétorque le chauffeur, exaspéré.
— Nahema, tais-toi, dit Gérard d’un ton ferme. Reste calme.
Nahema est restée silencieuse durant tout le trajet. Après tout, une nouvelle vie l'attendait… ou plutôt, les attendait tous les deux, avec leurs projets pleins d’espoir. Et c’était bien là l’essentiel.
Un mois plus tard, le jour de l’accident…
—Au secours ! Aidez-moi svp !
Il n’y a personne à cette heure-ci, surtout dans ce coin reculé. Il est près de 4 heures du matin, et pas une âme à l’horizon. Pourtant, elle a réussi à s’échapper, à se libérer de ses bourreaux. Elle a couru de toutes ses forces, sans jamais oser regarder derrière elle.
Elle ne sait même pas où elle se trouve exactement, car elle ne connaît pas bien la ville. Tout ce dont elle se souvient, c’est que la veille au soir, elle était dans un snack-bar avec Gérard et des amis, un verre à la main… puis plus rien. Le trou noir.
À son réveil, elle s’est retrouvée dans une chambre, allongée à côté de deux inconnus. La tête lui tourne encore. Lorsqu’elle a compris ce qui s’était passé, elle a voulu partir, mais ils l’en ont empêchée. Elle s’est débattue, a crié, supplié qu’on la laisse partir, en vain. Ils voulaient la garder prisonnière.
Ce n’est que lorsque le voisin, un homme d’une cinquantaine d’années, a entendu le vacarme et s’est interposé que tout a basculé. Il a frappé à la porte, les menaçant d’alerter la police s’ils ne la libéraient pas sur-le-champ. Face à cette pression, ils ont fini par céder, puis ils l’ont relâchée.
— Mon enfant, le dehors est dangereux, lui dit le monsieur d’un ton grave. Tu as eu de la chance. Pars vite, ne te retourne pas, et appelle à l’aide dès que tu seras plus loin. Je suis sûr que quelqu’un viendra à ton secours.
— Merci, Monsieur ! Merci, Seigneur !
Elle s’est enfuie en courant, sans savoir où aller, seulement guidée par l’instinct de survie. Elle est terrorisée. Son souffle est court, son cœur tambourine dans sa poitrine. Par moments, la panique la submerge, mais elle s’efforce de garder son calme. Elle ignore où elle se trouve exactement, mais tout porte à croire qu’elle erre dans une zone périphérique de la ville, un endroit presque désert. L’obscurité et le silence envahissent son esprit. Elle frissonne, autant de froid que de peur, redoutant de croiser des agresseurs ou quelque individu malintentionné.
Cherchant un abri, elle se tapit derrière un bosquet. C’est alors qu’elle aperçoit une voiture à l’horizon, roulant à vive allure sur la route. Son cœur bondit. C’est peut-être sa chance. Elle n’a pas d’autre choix. D’un geste précipité, elle se redresse et se rue vers la chaussée pour attirer l’attention du conducteur. Mais la vitesse du véhicule la terrifie. Elle hésite, recule, avance à nouveau. Son corps ne sait plus quoi faire, son esprit vacille entre espoir et crainte. Puis, au dernier moment, la panique l’emporte : elle tente de rebrousser chemin. Trop tard.
Le choc est brutal. Le véhicule la percute de plein fouet. Son corps roule sur le capot avant d’être projeté violemment au sol. Nahema gît, inanimée.
Derrière le volant, Marco est pétrifié. Il a freiné instinctivement, et les longues traces sombres de pneus marquent l’asphalte. Son souffle est court, son cerveau peine à assimiler ce qui vient de se produire. Il vient de renverser une jeune fille.
— Merde ! Non… non, pas ça ! Pas maintenant… Pas maintenant ! Le ciel est en train de me tomber sur la tête.
Il bondit hors du véhicule, haletant et priant de toutes ses forces que la fille soit encore en vie. Chaque pas qu’il fait accélère un peu plus les battements affolés de son cœur. Il avance vers elle, avec la même appréhension qu’un enfant sur le point de recevoir une sévère correction. Nahema gît là, inerte. Il se penche, la gorge serrée, et pose ses doigts tremblants sur son cou pour chercher un signe de vie…
— Elle… elle respire encore. Dieu merci !
Il ravale sa peur et jette un regard inquiet autour de lui. Pas question d’ameuter la foule. Il doit agir vite, l’emmener à l’hôpital au plus vite.
— Mam’selle ? Mam’selle, vous m’entendez ? Est-ce que ça va ?
Nahema bouge légèrement, un frisson parcourant son corps meurtri. Ses paupières restent closes, mais son visage se tord sous l’effet de la douleur. Un gémissement faible s’échappe de ses lèvres tandis qu’elle tente, en vain, de bouger davantage.
— J’ai mal… snif… snif… gémit-elle, la voix tremblante.
— Ne… ne vous inquiétez pas… Je… je vais vous emmener à l’hôpital, tenez bon.
Marco la soulève rapidement. L’aube commence à poindre, teintant le ciel de nuances pâles. Pas le temps de réfléchir. Il ouvre la portière arrière, allonge Nahema avec précaution sur le siège, puis s’engouffre derrière le volant. D’un geste brusque, il fait demi-tour et fonce vers la ville, en direction de l’hôpital le plus proche.
Aux urgences, Nahema est immédiatement prise en charge. Marco reste là, incapable de partir. Toute la matinée, il attend, oscillant entre impatience et angoisse. Impossible de contacter la famille de la fille, elle n’a aucun téléphone sur elle.
Assis dans la salle d’attente, l’air hagard, il laisse son esprit divaguer. Sa barbe naissante lui gratte le menton, mais il ne s’en soucie pas. Ses pensées l’assaillent sans répit. L’accident. Son père. Caroline. Le poids de tout ce qui s’est déroulé en quelques heures. Puis, soudain, comme un choc électrique, une prise de conscience brutale : son mariage est censé avoir lieu demain.
Il relève la tête, le regard vide. Il doit fuir. Partir loin. Se rendre injoignable. Il ne veut voir personne, entendre personne. Il ne pense qu’à sa mère. À ce qu’elle ressentirait si elle apprenait la vérité. Il sait qu’elle a enduré l’impensable aux côtés de son imbécile de mari, toujours dans le silence, par souci d’honneur et de respect des apparences.
"Je supporte ton père parce qu’il m’a toujours été loyal et m’a acceptée telle que je suis…"
Telle qu’elle est… Pourquoi disait-elle cela en permanence ? Marco n’a jamais compris. Pour lui, sa mère est la femme la plus douce, la plus patiente, la plus aimante qui soit. Mais il s’est toujours gardé d’intervenir dans leur couple. Il n’a jamais voulu mettre son doigt entre l’écorce et l’arbre.Il a du mal à réaliser ce que Caroline lui a fait. Certes, il n’est pas un saint, il a eu ses écarts, mais il a toujours été là pour elle, toujours. Alors qu’elle le trahisse, c’est une chose… mais avec son propre père ? Un haut-le-cœur le saisit à l’immédiat. Il reste là, la tête entre les mains, perdu, jusqu’à ce qu’une voix l’arrache brusquement à son cauchemar.
— Monsieur ?
Il sursaute. Le médecin est devant lui.
Il se lève d’un bond et se précipite vers lui…
— Oui… Excusez-moi… Vous êtes Marc Mbele ? Le fils du…
— Ce n’est pas important, coupe Marco sèchement. Dites-moi plutôt, comment va la jeune fille ?
Le médecin hésite une seconde avant de reprendre.
— Justement, j’allais en venir… Votre fiancée a eu beaucoup de chance.
— Pardon ? Ma quoi ?!
Marco écarquille les yeux, complètement ahuri.
Trois ans plus tard…Nahema sent la pression monter, et le trac l'envahit. À quelques instants de l'événement, elle lutte pour garder son calme. Elle ne pouvait pas imaginer que cela prendrait une telle ampleur. Et pourtant, elle y est parvenue, et elle peut en être fière. Elle a toujours voulu se battre pour se réaliser, afin d’être indépendante. Marco a été là pour elle à chaque étape de son parcours, mais elle savait qu’elle devait aussi tracer son propre chemin. Sans lui, elle serait sans doute perdue, et elle lui en est reconnaissante pour son soutien indéfectible. Ces dernières années, elle a changé, s’est reconstruite, et est devenue une autre femme.En trois ans, elle a repris sa formation d'infirmière après leur mariage. La cérémonie, un moment de pure magie, a eu lieu dans une ambiance magnifique, devant leurs proches et devant Dieu. Ils avaient pensé inviter Henri Parfait, en croyant qu'il n'y avait plus de rancune, qu'il méritait de partager ce moment avec eux. Mais ce der
Caroline est dans sa chambre, tout juste rentrée de chez le coiffeur. Elle arbore fièrement une nouvelle coupe à la garçonne. Elle a bien changé ces derniers temps. Il y a longtemps qu’on ne la reconnaît plus comme la fiancée de Marco, mais plutôt comme la maîtresse officielle de Henri Parfait. Seule Christiane ignorait encore tout cela, elle était la dernière à être au courant.Henri Parfait a façonné Caroline. Il a pris soin d’elle, l’a transformée. Au départ, tout n’était qu’une simple histoire de plaisir entre eux. Après son mariage annulé, Caroline, désemparée, s’est laissée séduire par Henri Parfait. Il la convoitait, était tendre avec elle, et savait la réconforter. Marco lui échappait, trop frivole à l’époque, et Caroline, progressivement, a cédé.À l’annonce de la disparition de Marco, la veille de leur mariage, Caroline a cru qu’elle ne s’en sortirait pas. La honte, le scandale, tout cela lui revenait sans cesse à l’esprit. Elle était inconsolable, maudissant Marco de toutes
Marco est complètement ému. Nahema lui tend le bébé. Il hésite, les mains tremblantes, maladroit, ce qui les fait sourire tous les deux.—Je… je ne sais pas comment tenir un bébé. J’ai… j’ai l’impression de lui faire du mal.—Prends-la juste comme ça, tu verras. Lui dit Nahema, souriante.Il prend la petite dans ses bras, pensant qu’il aura des difficultés, mais, à sa grande surprise, tout se passe bien. Il la regarde avec des yeux remplis d’émerveillement, lui offrant un doux câlin sur le front. La petite lui sourit innocemment, l’observant avec curiosité. Marco ressent alors un sentiment indescriptible, une tendresse profonde pour sa fille.—Elle est… trop belle ! Nahema ? Je… je ne savais pas. Comment est-ce possible ? Avec tout ce qui s’est passé. Comment as-tu fait ?—On a des choses à se dire, n’est-ce pas ?—Ah ça, j’ai vraiment hâte de comprendre.Plus tard, dans la soirée, alors que Marco se perd dans les yeux de sa fille, Nahema les observe silencieusement. Marco ne cesse de
Christiane n’en peut plus. Elle est à bout. À bout de nerfs, à bout de forces. Elle en a assez. Elle a assez donné, assez supporté, assez menti. Elle sait le mal qu’elle a causé, les cœurs qu’elle a brisés… Andrew, Marco… et même Henri Parfait, cet homme dont elle a enduré les infidélités sans broncher.Henri Parfait l’a toujours trompée. À peine rentrés au pays, il s’est empressé de reprendre ses mauvaises habitudes. Même quelques jours avant leur mariage, il l’avait déjà trahie à plusieurs reprises. Elle a fermé les yeux. Toujours. Jusqu’à aujourd’hui. Mais cette fois, c’en est trop. Elle a déjà assez payé pour ses erreurs, mais là, ça touche Marc. Et ça, elle ne peut l’accepter.Lorsqu’elle rentre chez elle après avoir tout avoué à Marco, elle trouve Henri Parfait assis dans le salon. Il est rentré plus tôt que d’habitude. Étonnant.— Tu rentres tôt… Pour une fois ! lance-t-elle d’un ton acerbe.— Ça peut m’arriver, non ?— Ou alors… Caroline ne t’a pas trop retenu.Henri Parfait l
Marco est abasourdi par les révélations de sa mère. Il n’arrive pas à y croire. C’est la première fois qu’elle évoque un homme dont elle a été amoureuse, et cet homme n’est autre que… son véritable père. Marco réalise alors qu’il n’est pas un Mbele, qu’il n’est pas le fils de HP. Le regard perdu, il recule d’un pas, le souffle court, il prend la parole, la voix brisée.— Je... je ne sais même pas quoi dire… Maman ! Pourquoi ? Pourquoi m'as-tu fait ça ? Depuis le début, tu savais que… que papa n’était pas mon vrai père et que cet Andrew dont tu parles est… mon véritable père ?!Il se couvre le visage, comme pour chasser cette vérité trop douloureuse, et se tourne brusquement. Les mots de sa mère sont comme un coup de poignard, qu’il reçoit en plein cœur.Christiane, elle, ne peut qu'abaisser la tête, submergée par la honte, elle ne sait pas comment réagir. Marco pique une colère vive. Il lui crie dessus.— Tu n’es qu’une femme méchante ! Quand je pense que durant toutes ces années… je…
Vicky est aux anges, feuilletant les magazines qu’elle a achetés ce matin en ville. La plupart parlent de mariage, de robes de mariée, de préparatifs, etc. La date est fixée, Marco et elle se marient dans les six prochains mois. C’est un rêve devenu réalité pour elle, celle d’avoir un mariage de conte de fées. Depuis toujours, elle imaginait épouser un homme de son milieu, un "bon parti". Elle vient d'une famille aisée et n'a jamais manqué de rien. Fille unique, elle a toujours été le centre d’attention de ses parents.Avant de rencontrer Marco, elle avait d'autres projets, notamment voyager à travers le monde. Ses parents étaient prêts à l’accompagner dans cette aventure, et son compte en banque était bien garni pour l'occasion. Mais un soir, lorsque Antoinette, l’amie de Christiane, a croisé Marco, elle l’a trouvé séduisant et a commencé à envisager une autre possibilité pour sa fille : ne pas laisser Vicky mener une vie d’aventurière, mais plutôt épouser un homme stable et bien pos