Par surprise

Trop absorbée par mes pensées, je traversai la rue sans prêter attention à ce qui m'entourait. Mais les klaxons incessants des voitures me firent sortir de ma sombre rêverie. Le son assourdissant d'un pneu qui crisse me fit lever la tête juste à temps pour voir un camion à dix roues me surplomber, à seulement un mètre de l'endroit où je me tenais.

Mon Dieu. Un camion à dix roues a failli me tuer ! La réalisation me frappa comme un éclair. Ma bouche s'ouvrit de surprise et d'incrédulité. Cette expérience de frôler la mort me fit revenir à mes esprits.

Peu importe ce qui s'était passé, je ne pouvais pas me permettre de mourir et laisser ma mère seule. Je ne pouvais tout simplement pas. J'ai réalisé que je devais vivre !

Immédiatement, je courus sur le côté de la route pour me mettre en sécurité, hélai un taxi qui approchait et montai à l'intérieur. J'avais une course importante à faire.

Il me fallut un certain temps pour retrouver mon calme.

Le taxi me déposa à ma destination, la pâtisserie préférée de ma mère. Je voulais lui acheter un gâteau d'anniversaire. Techniquement, son anniversaire était hier, mais je ne lui avais pas acheté de gâteau à ce moment-là, j'étais trop distraite par la demande de divorce d'Ace.

Je choisis un gâteau au chocolat à un seul étage. Il était décoré de feuilles et de fleurs sur les côtés, et au centre, "Joyeux anniversaire Maman" était écrit en glaçage rouge.

J'appelai un autre taxi et parvins à monter sans encombre tout en tenant la boîte du gâteau d'une main et ma valise de l'autre. Comme il y avait eu un accident à proximité, le taxi ne put pas avancer. Impatiemment, je me tortillai sur mon siège, essayant de m'occuper en regardant les boutiques à proximité.

Ma mère dormait profondément quand je l'ai quittée. Elle serait certainement inquiète lorsqu'elle se réveillerait et réaliserait que je n'étais pas là à côté d'elle.

Ma bulle de pensée éclata lorsque je vis une moto s'arrêter devant une bijouterie à proximité. Le conducteur et le passager me semblaient un peu familiers.

La femme enleva son casque et, à ma grande surprise, je découvris qu'il s'agissait d'Angela ! Elle portait toujours la même robe que celle que lorsqu’elle m'a insultée ce matin-là. Cependant, l'homme qui l'accompagnait portait un costume et une cravate différents. J'ai supposé que c'était Ace, mais il n'a pas enlevé son casque pour que je puisse le confirmer.

Mais après tout, qui d'autre cet homme pourrait-il être, sinon mon mari infidèle.

Ace entoura d'un bras protecteur la taille d'Angela. Ils entrèrent dans la bijouterie. Depuis la vitrine du magasin, je pouvais voir qu'ils achetaient des alliances.

Même lorsqu'ils disparurent de ma vue, je continuai à fixer la porte de la bijouterie par curiosité.

Prévoient-ils de se marier si rapidement après notre divorce ? La douleur frappa fort ma poitrine à cette pensée.

Oublie cette douleur, Phoenix ! Oublie ton mari aussi ! Il ne le mérite pas. Je me répétais cette phrase encore et encore.

La porte de la bijouterie s'ouvrit à nouveau après un moment et le couple en sortit. Cette fois-ci, Angela tenait un petit sac de shopping dans sa main.

Ace monta sur la moto et Angela le suivit, ses mains serrées autour de sa taille alors qu'ils s'éloignaient rapidement sur la voie réservée aux motos.

Les embouteillages se dissipèrent enfin et le taxi avança en douceur. Un soupir de soulagement s'échappa de mes lèvres.

Trente minutes plus tard, j'arrivai à l'hôpital en toute sécurité. J'ai payé le chauffeur et me suis précipité vers l'entrée, excité de voir ma mère.

Un doux sourire se dessina sur mes lèvres tandis que je courais vers la chambre de maman avec un gâteau dans une main et la lourde valise dans l'autre. L'excitation débordante de la saluer avec un gâteau d'anniversaire me fit atteindre sa chambre en l'espace d'une minute.

Pour la toute première fois, je n'avais pas peur d'entrer dans sa chambre. J'ai décidé de laisser ma valise dehors d'abord, avant d'ouvrir la porte d'une main et de porter soigneusement le gâteau de l'autre, veillant à ne pas gâcher le dessin.

J'ai été accueilli par le lit vide. "Maman ?" ai-je appelé, mais ma seule réponse fut le silence.

"Maman ?" J'ai regardé attentivement autour de la chambre pour vérifier si elle était là. Je commençais à paniquer, et alors que je regardais frénétiquement autour de moi, le gâteau...

Mais je m'en fichais, parce qu'il n'y avait personne sur le canapé.

Le lit était vide.

"Où es-tu, maman ? Ce n'est pas drôle !" ai-je crié cette fois-ci. Une peur aiguë me traversa, m'empêchant de respirer.

Puis, la porte s'ouvrit violemment avec un bruit sourd. Je me suis retourné et mes yeux affolés se posèrent sur Ace qui entra dans la pièce. Ses yeux de pierre se posèrent sur mon visage blême.

"Que fais-tu ici ? Où est ma maman ?" ai-je demandé avec colère.

N'était-il pas en train de faire du shopping joyeusement avec Angela ? Avait-il fait quelque chose à ma mère ?

"Je suis désolé, phœnix ," dit Ace avec regret.

"Ta mère est morte."

Ses paroles ont brisé tout mon monde.

"C'est faux, Ace. Tu mens, n'est-ce pas ?" ai-je demandé désespérément, essayant de reprendre mon souffle.

J'attendais qu'il me dise que c'était une erreur, que ma mère était toujours vivante. Mais il ne dit rien d'autre.

Sans un mot, il fit un pas en avant comme s'il voulait me prendre dans ses bras. Ses mains se tendirent vers moi, mais je les repoussai, m'éloignant de lui. Peut-être s'est-il retiré parce qu'il a vu la peur dans mes yeux. Ses mains retombèrent le long de son corps, en signe de reddition, tandis qu'il me regardait silencieusement m'effondrer.

J'étais au bord de la folie.

Tout cela n'est qu'un rêve ! Oui, tout cela n'est qu'un rêve ! Je le répétais comme un mantra désespéré. Je ne pouvais pas accepter que ma mère soit partie.

"S'il te plaît, calme-toi, phœnix ", dit-il doucement. "Tout va bien se passer." ajouta-t-il, mais cela n'aida pas à apaiser le lourd chagrin qui s'était logé dans mon cœur au moment où j'ai réalisé que ma mère était partie.

"Calme-toi ? CALME-TOI ?! Comment puis-je faire ça ! Tu ne sais pas ce que je ressens, Ace ! Ce n'est pas ta mère qui est partie !" crachai-je amèrement avec des regards assassins dans les yeux. Si les regards pouvaient tuer, il serait mort sur place.

"Tu as le cœur fragile, phœnix . Ne te mets pas trop à rude épreuve."

Il était étonnamment inquiet. Quel homme hypocrite, prétendant être un mari attentionné.

"Que le diable t'emporte, Ace ! Je ne veux pas de ta sympathie." criai-je furieusement en repoussant sa main lorsqu'il essaya de me toucher.

"Tu mens ! Je ne te crois pas ! Ma mère est vivante. Où l'as-tu emmenée ? Dis-le-moi !" exigeai-je en saisissant son col avec mes mains, froissant le tissu sous mes doigts.

"Elle est partie." dit-il à voix basse.

"Tu plaisantes, n'est-ce pas ?"

Ma voix tremblait de peur devant le regard compatissant dans ses yeux. Ace ne me regarderait pas ainsi sans raison valable. Mes doigts se glaçèrent.

Maman allait bien quand je l'ai quittée. Elle ne mourra pas sans manger son gâteau d'anniversaire !

"Je suis désolé, mais elle est décédée avant ton arrivée. Avant de mourir, elle murmurait encore ton nom... jusqu'à son dernier souffle."

Ace annonça la nouvelle de la manière la plus douce possible, mais cette nouvelle bouleversante ne pouvait être adoucie par aucun ton doux, encore moins par celui de l'homme qui a torturé et anéanti mon cœur à maintes reprises par son infidélité et sa trahison, le laissant comme une coquille vide.

Le moment où j'ai enregistré la vérité de ses paroles, mon monde s'est effondré. Une douleur indescriptible a serré mon cœur. Mon conduit respiratoire s'est rétréci jusqu'à ce que je ne puisse plus respirer. Tout mon corps tremblait de choc alors que je m'effondrais par terre.

Cela ne peut pas se produire ! Cela ne peut pas se produire ! Je hurlais intérieurement. Secouant la tête, j'ai accidentellement croisé le regard préoccupé d'Ace.

Ses yeux d'un bleu profond étaient emplis de compassion alors qu'il regardait ma silhouette affaissée par terre.

Il a tenté de tendre la main pour m'aider à me relever, mais je lui ai lancé un regard meurtrier qui l'a fait reculer. Je pouvais me relever seule, sans l'aide de mon mari adultère.

Je me suis levée et je me suis dirigée vers le canapé sur lequel maman était assise hier. Quand je me suis souvenue de son apparence, j'ai voulu pleurer, mais mes larmes refusaient de couler.

Au lieu de cela, ma poitrine s'est serrée, et je commençais à perdre la bataille pour garder les yeux ouverts. Je me suis mise à vaciller debout. Tout commençait à devenir flou, et le vent froid de la climatisation semblait transpercer mon corps de mille aiguilles.

Est-ce que je suis en train de mourir ?

"Phoenix ! Phoenix ! Ça va ?" La voix paniquée d'Ace est parvenue à mes oreilles.

Je me suis tournée par surprise, et mon front a accidentellement heurté son menton, en gémissant de douleur alors qu'une vive douleur traversait mon visage. Mais cette douleur pâlissait en comparaison des mille aiguilles qui piquaient incessamment mon cœur.

J'étais tellement préoccupée par le fait de m'assurer de ne pas tomber que je n'avais pas du tout remarqué Ace derrière moi. Pourquoi s'embêtait-il à me suivre ? Il ne m'aimait pas.

La seule personne qui m'aimait, c'était maman, et elle était partie.

Je me suis retournée vers le canapé et j'ai étouffé un sanglot.