Les souvenirs des derniers jours de Frédéric Levis étaient toujours vivaces dans l’esprit d’Andrew et de Rachelle. Couché sur son lit de mort, le patriarche de Levis Global avait rassemblé tout le courage qu’il lui restait pour parler à sa famille.
— Ma bien-aimée Rachelle et mon fils Andrew, vous êtes ma famille, et une famille se doit de se serrer les coudes. Après mon départ, promettez-moi de vous rapprocher pour le bien de cette famille et de l'entreprise.
Andrew avait croisé les bras, son regard distant fixé sur le plafond, tandis que Rachelle serrait la main de son mari avec force, ses yeux remplis de larmes sincères.
Ces paroles étaient lourdes de sens, mais pour Andrew, elles résonnaient comme une trahison. Comment son père, l’homme qu’il avait admiré toute sa vie, pouvait-il lui demander une telle chose ? Collaborer avec une étrangère qui, selon lui, n’avait été qu’une opportuniste profitant de la vulnérabilité de son père.
La lecture du testament quelques semaines après la mort de Frédéric fut un moment de tension extrême.
— Monsieur Andrew Levis et Madame Rachelle Levis sont désignés comme codirecteurs de Levis Global. La gestion conjointe est essentielle pour honorer la vision et les valeurs de Frédéric Levis.
Andrew avait éclaté de colère.
— Travailler avec elle ? Vous êtes sérieux ? Cette femme n’a rien à faire ici. Elle a séduit mon père pour arriver à ses fins, et maintenant vous voulez me forcer à partager mon héritage avec elle ?
Rachelle, bien que visiblement touchée, avait gardé son calme. Ses mots, en revanche, étaient acérés comme une lame :
— Votre père m’a épousée parce qu’il m’aimait, monsieur Andrew. Pas parce qu’il était manipulé, comme vous aimez à le croire. Peut-être devriez-vous grandir et accepter que le monde ne tourne pas autour de vous.
Andrew l’avait foudroyée du regard.
— Vous ne me donnerez jamais d’ordres, Rachelle. Je vous laisse votre part uniquement parce que c’est ce qu’il voulait. Mais n’espérez aucune coopération de ma part.
Depuis ce jour, Levis Global était devenu un champ de bataille. Les décisions importantes étaient constamment source de conflit. Andrew refusait systématiquement toute proposition émanant de Rachelle, tandis qu’elle s’assurait de contourner ses blocages par des stratégies subtiles.
Dans l’entreprise, les employés savaient qu’il valait mieux éviter de se retrouver entre les deux dirigeants. Ils sentaient que chaque mot, chaque geste pouvait être interprété comme un choix de camp, et cela pouvait coûter cher.
Ce matin-là, Rachelle examinait les dossiers des candidats qui avaient passé les entretiens. Elle s’attardait sur celui d’Alicia. La jeune femme avait quelque chose qui l’intriguait. Une sincérité dans son regard, une détermination qu’elle ne s’expliquait pas, mais qui la mettait mal à l’aise. Et une chose qui l’intriguait «Pourquoi n'avait-elle pas de nom de famille ?»
La porte de son bureau s’ouvrit brusquement, laissant apparaître Andrew.
— Alors, qu’as-tu décidé ? Tu vas encore rejeter toutes les idées simplement parce qu’elles ne viennent pas de toi ?" lança-t-il, la voix empreinte d’ironie.
Rachelle releva lentement les yeux de son écran, sa patience déjà mise à rude épreuve.
— Andrew, si tu pouvais apprendre à frapper avant d’entrer, nous pourrions éviter ces conversations inutiles.
Il avança vers elle, ses mains dans les poches, une lueur de défi dans les yeux.
— Qu’as-tu contre Alicia ? Pourquoi tu refuses qu’elle intègre l’équipe ?
Rachelle posa son stylo, croisant les bras.
— Je n’ai rien contre elle personnellement, mais elle n’a pas les compétences nécessaires pour ce poste. Nous avons besoin de quelqu’un d’expérimenté, capable de gérer la pression, et elle n’est pas cette personne.
Andrew se pencha légèrement, sa voix se durcissant.
— Tu veux dire qu’elle n’est pas quelqu’un que tu peux manipuler à ta guise, c’est ça ?
Rachelle éclata d’un rire froid.
— Manipuler ? Si quelqu’un joue à ce jeu ici, c’est bien toi, Andrew. Tu veux l’embaucher parce qu’elle te rappelle quelqu’un, pas parce qu’elle est qualifiée.
Le visage d’Andrew se ferma.
— Ça n'a rien à y voir. C'est totalement différent.
Un silence tendu s’installa entre eux. Rachelle finit par soupirer, secouant la tête.
— Un jour, Andrew, tu comprendras que cette guerre que tu mènes est vaine. Mais en attendant, continue donc à te battre contre des fantômes."
Elle reprit son travail, ignorant ostensiblement la présence d’Andrew, qui sortit en claquant la porte.
Dans son bureau, Andrew s’effondra sur sa chaise. Son esprit était envahi par des souvenirs qu’il avait toujours essayé de refouler.
Il se revoyait, adolescent, aux côtés de son père. Frédéric lui parlait souvent de force et de loyauté, lui inculquant l’idée que la famille était tout ce qui comptait.
— Andrew, nous sommes des Levis. Nous devons être unis et solides. Personne ne doit pouvoir nous diviser.
Mais cette vision avait éclaté le jour où son père avait présenté Rachelle comme sa nouvelle épouse. Andrew n’avait jamais accepté cette union. Pour lui, cela représentait une trahison des principes que son père lui avait enseignés.
De son côté, Rachelle se tenait devant la grande baie vitrée de son bureau, son regard perdu dans la vue sur la ville. Elle pensait à Frédéric, à sa douceur et à sa confiance inébranlable en elle.
— Pourquoi as-tu fait cela, Frédéric ? Tu savais que ton fils me haïrait. Tu savais qu’il ne m’accepterait jamais. murmura-t-elle.
Rachelle n’était pas insensible. Sous son apparence froide se cachait une femme profondément blessée par le rejet constant d’Andrew. Mais elle savait que montrer cette vulnérabilité serait une erreur.
Dans les couloirs de l’entreprise, Alicia marchait d’un pas hésitant, cherchant son bureau. Elle croisa des regards curieux, certains bienveillants, d’autres méfiants.
Elle s’arrêta près du bureau de Rachelle en entendant des éclats de voix.
— Je te préviens, Andrew, tes caprices ne dureront pas éternellement. Cette entreprise ne survivra pas si tu continues à agir comme un enfant !"
— Et toi, Rachelle, combien de temps encore comptes-tu jouer à la veuve éplorée pour garder ta place ? Mon père t’a peut-être crue, mais je vois clair dans ton jeu.
Alicia se figea. Elle ne comprenait pas tout, mais la tension entre les deux dirigeants était palpable.
Elle reprit son chemin, le cœur battant. Elle réalisait que cet emploi n’allait pas être de tout repos.
Le soir venu, Andrew contemplait un ancien portrait de son père, accroché dans son bureau.
— Pourquoi, père ? Pourquoi m’as-tu imposé cette femme ? Nous étions bien, toi et moi. Pourquoi compliquer les choses ?"
Il ferma les yeux, se laissant submerger par un mélange de colère et de tristesse.
De son côté, Rachelle termina sa journée en observant les étoiles depuis son balcon. Elle savait qu’Andrew était un homme blessé, mais elle se demandait s’il serait un jour capable de surmonter sa haine pour elle.
Leurs destins étaient liés, qu’ils le veuillent ou non.
Le téléphone en haut-parleur, Alicia entama une discussion, le regard déterminé.– Je t’écoute. Dis-moi ce que j’aurais à faire.– Avant tout. Abstiens-toi de tout révéler à Stacy.– Stacy ? Pourquoi ? demanda-t-elle, intriguée.– Tu le comprendras très bientôt…Assise dans le bus, Sœur Marie regardait à travers la vitre. Elle lut la mention : « Bienvenue à New-York ».Elle murmura, émue : « Je ne peux en aucun cas vous laisser toutes seules dans cette situation, mes chères enfants. »Pendant ce temps, Andrew termina un appel téléphonique. Il rangea son portable dans sa poche, puis s’avança vers Rachelle d’un pas sûr.– C’est fait. Tout se passe comme prévu, déclara-t-il en se plantant devant elle.Rachelle hocha la tête avec fermeté.Alors qu’Andrew s’apprêtait à quitter la pièce, elle lui saisit doucement la main.– Attends, s’il te plaît…, dit-elle d’une voix hésitante.Il s’arrêta net. Son regard se posa sur cette main, si familière, celle qui le réconfortait autrefois. Il tourna
(Dring…)Stacy alluma son portable. En voyant l’appel entrant, elle répondit aussitôt.– Allô Sœur Marie !– Stacy, mon enfant ! Comment vous allez, Ali et toi ?– Je vais bien, mais Alicia ne va pas très bien, répondit-elle d’une voix basse.– Oh mon Dieu ! Mais que lui arrive-t-il ? Que s’est-il passé ? demanda-t-elle, visiblement inquiète.– Ma sœur… elle a enfin retrouvé sa mère. Mais cette dernière est une femme pour qui elle travaillait. Elle ne s’est jamais montrée affectueuse avec elle… et avec toutes les accusations faites contre elle, ça n’arrange surtout pas la situation, répondit Stacy, d’un ton triste.Il y eut un silence au bout du fil. Sœur Marie semblait réfléchir profondément.– Ma sœur ? Sœur Marie ? insista Stacy, un peu nerveuse.– Oui, oui mon enfant… Et où est-elle actuellement ? Je souhaiterais lui parler un moment.– Oh ma sœur, je crains qu’elle ne puisse pas être en mesure de t’écouter. Elle se repose en ce moment. J’ai réussi à la calmer… mais ma sœur, je su
Andrew arriva au manoir trempé. Il entra et monta les marches, le regard assombri, sans dire un mot. Violette, qui descendait, le vit arriver et cria d’inquiétude.— Jeune patron, vous êtes tout trempé ! s’exclama-t-elle en accourant vers lui.— Violette, ne t’en fais pas. Tout va bien, c’est juste de la pluie, répondit-il d’une voix neutre et stoïque.— Mais attends, je vais t’aider à te mettre au chaud, déclara-t-elle, inquiète.Andrew lui prit le bras, l’arrêtant.— Violette, je t’ai dit de ne pas t’en faire pour moi. Je vais bien et je pourrai le faire tout seul. Il est préférable que tu ailles te reposer, tenta-t-il de la dissuader.— Si tu insistes. Mais promets-moi qu’au moindre problème, tu me le diras, lança-t-elle, inquiète.— Oui, Violette, répondit-il.En descendant les marches, elle se parlait à elle-même, inquiète.— D’abord Madame Rachelle et maintenant M. Andrew… Que se passe-t-il dans cette maison ? Et Peter aussi qui s’est absenté pendant plusieurs heures... Ahh ! Viv
La quête de vérité d’Alicia l’avait conduite vers une révélation qu’elle n’aurait jamais pu imaginer. Sous cette nuit sombre et froide, sa douleur résonnait dans le silence.— Comment est-ce possible ? Pourquoi, mon Dieu ? Pourquoi a-t-il fallu que ce soit elle, ma mère ? s’écria-t-elle, bouleversée.Les larmes coulaient sans fin sur ses joues alors qu’elle marchait dans la rue, le cœur en miettes.— Alicia… je suis ta ma-man ! S’il te plaît, reviens ! implorait Rachelle, la voix brisée par le chagrin.Assise sur un banc, elle serra le médaillon contre sa poitrine, comme pour se raccrocher à ce qu’il lui restait. Ses yeux rougis montraient toute la douleur qu’elle portait.— Ma petite chérie, s’il te plaît… je suis désolée, sanglotait-elle, incapable de retenir ses pleurs.Pendant ce temps, Stacy se tenait debout, figée devant la fenêtre donnant sur la rue. Son regard alternait nerveusement entre son téléphone et l’extérieur.— Ali, j’espère que tout se passe bien…, murmura-t-elle ave
— Pour lui, Levis Global lui appartient et ça doit lui revenir, déclara Sophia.— Pourquoi m’as-tu menti ? Et mon oncle, pourquoi l’as-tu recueilli chez toi ? demanda Andrew, son regard oscillant vers l’un et l’autre.— J’avais l’intention de tout avouer, mais sans savoir comment il l’a découvert, Mathias savait que j’allais tout te révéler. Ce jour-là, il était là, et il m’avait ordonné de te droguer… chose que je n’aurais pas pu faire.Et Jacques de s’expliquer :— Andrew, depuis un certain temps, j’avais des soupçons sur lui, et grâce à Alicia, j’ai pu obtenir son adresse... Mon objectif était de le confronter, mais à mon arrivée…— Il m’a trouvée effondrée, défigurée et marquée de plaques sur les bras, termina Sophia, la tête baissée.Soudain, Andrew se releva, les poings serrés, avec le visage marqué par la colère.— Comment... comment a-t-il pu ? Comment ? s’exclama-t-il, en colère.— Andrew, calme-toi. Essayons de trouver une façon de le mettre au pied du mur...— Et Rachelle ?
« Mais que se passe-t-il ? Que fait-elle ici ? »Les deux femmes restèrent figées, se dévisageant avec stupéfaction. Le silence, chargé de tension, pesait lourdement. L’incompréhension se lisait sur leurs visages.Rachelle recula d’un pas, porta la main à sa poitrine comme pour calmer un battement affolé, puis s’assit lentement, le bouquet de fleurs glissant de ses mains.– Que vient-elle faire ici ? Quelle est cette coïncidence ?– Non, non, cela ne peut absolument pas être possible… Elle doit sûrement être quelque part dans le parc, m’attendant certainement, lança Alicia tout en tournoyant sur elle-même, anxieuse, paniquée.– MA-MAN, où es-tu ?! s’écria-t-elle, la voix brisée par la tristesse.Rachelle se redressa brusquement, interpellée par ce cri. Ses yeux brillants de larmes, elle s’approcha lentement d’Alicia, encore dos à elle. Arrivée tout près, elle la retourna d’un geste brusque, son regard dur.– Comment oses-tu venir ici et prétendre chercher une personne qui n’existe pas