Chapitre 2 – L’ennemie parfaite
Adrian De Luca
Je l’ai vue trembler. Rien qu’un instant. Un battement de cils. Une hésitation infime. Mais c’était là.
Sienna White.
Toujours aussi féroce. Toujours aussi fière. Toujours aussi magnifique dans sa rage.
Je descends les escaliers de la villa White en silence, un sourire discret aux lèvres. J’entends encore le claquement de ses talons sur le marbre, sa voix pleine de colère et de mépris. Elle croit que c’est moi qui ai gagné.
Mais ce n’est pas un jeu. Pas encore.
C’est un test.
Et je vais le réussir, comme toujours.
Le chauffeur m’attend devant la voiture. Je monte à l’arrière sans un mot. Je déteste cette ville. Trop de souvenirs, trop d’odeurs étouffantes, trop de visages qui veulent vous poignarder avec un sourire. Mais je suis ici pour une raison. Et elle commence par un nom : White Industries.
Mon père pense qu’il m’a piégé. Il croit que ce mariage arrangé va me forcer à rentrer dans les rangs, à jouer au bon héritier, à m’assagir. Il pense que Sienna va m’apprendre l’humilité. Il ne comprend rien. Ni à moi. Ni à elle.
— Direction la tour De Luca, je lance au chauffeur.
La voiture démarre. Je m’enfonce dans le siège, sors mon téléphone. Trois messages. Deux appels manqués. Un mail de mon assistante.
Et une notification qui me fait sourire : "Sienna White vient de quitter le domaine familial."
J’ai mes informateurs. Comme elle a les siens.
Parce qu’on ne joue pas dans la même cour que les autres. On est nés dans l’arène, elle et moi. Deux fauves élevés pour dominer. Deux héritiers élevés dans le poison et l’or. On se connaît depuis l’enfance. On s’est affrontés sur tout. Qui aurait la meilleure école. Le meilleur dossier. Le meilleur score. La meilleure réputation. Elle me déteste parce que je l’ai toujours battue. Et moi, je l’admire parce qu’elle ne m’a jamais laissé gagner facilement.
Mais ce mariage change la donne.
Six mois. C’est la condition. Six mois à jouer au couple parfait. À afficher des sourires pour les journalistes. À donner des interviews où nos regards complices feront grimper les actions en bourse.
Et ensuite, on divorce. Et je récupère ce que je veux.
Le contrôle.
Mais ce que Sienna ignore, c’est que ce jeu... je ne joue jamais sans plan.
**
La tour De Luca est un monolithe de verre et d’acier en plein cœur de Manhattan. Trente-neuf étages de pouvoir, de pression et de promesses. Je sors de l’ascenseur du dernier étage et marche vers mon bureau. Mon assistante, Ivy, se lève à mon approche.
— Monsieur De Luca, le board vous attend à quinze heures. Et le département communication demande confirmation pour la conférence de presse de demain.
— On la maintient. Ils auront ce qu’ils veulent : une photo de nous deux, une annonce officielle. Un mariage de rêve. C’est ça qu’ils attendent, non ?
Elle hoche la tête. Je sais ce qu’elle pense. Que je suis fou. Que cette alliance est une bombe à retardement. Et elle a raison.
Mais je n’ai jamais eu peur des bombes. Je préfère les faire exploser moi-même.
Je referme la porte de mon bureau et me dirige vers la baie vitrée. La ville s’étend sous mes pieds, immense, vivante, indifférente. Un peu comme moi.
Je sors une clé USB d’un tiroir secret. Je la branche à mon ordinateur. Une série de fichiers cryptés s’ouvrent. Dossiers confidentiels. Notes privées. Informations stratégiques sur les White. Tout ce que j’ai appris ces deux dernières années.
Parce que ce mariage n’est pas une idée soudaine. C’est une stratégie.
Leur entreprise est fragile, malgré les apparences. Endettée. Mal gérée par les actionnaires secondaires. Et Howard White veut sauver la face. La fusion avec De Luca Finance est leur seul salut. Mais moi, je ne veux pas d’un simple partenariat.
Je veux leur empire. Entier.
Et pour ça, j’ai besoin d’elle.
Sienna est la clef. Elle est le visage, la voix, le cœur battant de l’entreprise. Les actionnaires la suivent. Les investisseurs l’adorent. Elle inspire confiance. Elle est brillante, imprévisible, tenace.
Et totalement incontrôlable.
Mais dans six mois, elle portera mon nom. Elle sera liée à moi par un contrat aussi solide qu’une alliance en diamant. Et quand tout le monde nous verra unis, les White s’effondreront dans mes bras.
Elle croit que c’est elle qui perd.
Mais elle ne sait pas encore ce que j’ai à offrir.
**
La réunion commence à quinze heures précises. Les membres du conseil me scrutent avec attention. Certains doutent encore de ma décision. Ils me voient comme l’héritier rebelle, celui qui voyage au lieu d’assister aux conférences, qui préfère les négociations musclées aux dîners mondains.
Mais aujourd’hui, je leur donne du sérieux. Du concret. Une stratégie.
— Ce mariage est une fusion symbolique, dis-je en concluant ma présentation. Une alliance médiatique et économique. White Industries est affaiblie, mais leur image reste puissante. Avec nous, ils deviendront solides. Et nous, inattaquables.
Un murmure d’approbation se répand dans la salle.
— Et si elle refuse ? demande un vieux requin au fond de la table.
Je souris.
— Elle a déjà accepté.
Pas à haute voix, pas encore. Mais elle le fera. Je le sais. Elle n’a pas le choix. Et même si elle croit qu’elle peut me faire payer chaque seconde de ces six mois, je suis prêt.
Parce qu’au fond, je n’ai jamais cessé de la regarder.
Et peut-être que la seule chose plus dangereuse que la posséder... c’est de la désirer.
**
La nuit est tombée quand je sors du bureau. Je monte dans ma voiture, direction mon appartement. Un duplex en haut d’une tour privée. Luxe discret. Silence total.
Et pourtant, je ne trouve pas le sommeil.
Je revois son visage. Ses yeux furieux. Sa bouche entrouverte. Sa voix tranchante comme un rasoir.
Je me lève, attrape un verre de whisky, le fais tourner dans ma main. Je me déteste un peu de penser à elle comme ça. Comme à une tentation.
Elle n’est pas qu’un pion. Elle est une reine. Et dans cette partie d’échecs, chaque mouvement compte.
Mais parfois… j’ai envie de tout renverser.
Pas pour gagner.
Juste pour voir ce qu’elle ferait.
Chapitre 7 – SiennaLe bourdonnement incessant de mon téléphone me tire du sommeil.Je grogne, aveuglée par la lumière du matin, puis je tends la main à tâtons jusqu’à l’attraper sur la table de nuit. Quinze notifications. Dix messages. Trois appels manqués.Je cligne des yeux.Maman Julia (assistante)Bureau de presse White Corp. Et surtout…Une alerte Google News.Je me redresse d’un coup dans le lit, le cœur déjà en alerte. Mon instinct ne me trompe jamais, surtout quand il s’agit de mauvaises nouvelles. Je clique."Sienna White et Adrian De Luca fiancés en secret ?""L’empire White fusionne avec la dynastie De Luca : le mariage de l’année confirmé ?""Rumeurs d’un contrat de mariage entre deux héritiers ennemis"Mon souffle se bloque.Putain.Je bondis hors du lit, pieds nus sur le parquet, robe de chambre à moitié ouverte. Mon téléphone sonne. Encore.C’est Julia, ma fidèle assistante. Elle sait que je ne réponds jamais à la première sonnerie. Mais là, je décroche à la deuxiè
Chapitre 6 – AdrianElle ne parle pas.Elle ne m’a pas encore mis dehors non plus, ce qui, venant de Sienna White, est pratiquement un miracle.Je suis debout, à deux pas d’elle, dans ce salon immaculé qui lui ressemble. Chaque détail est précis, chaque objet à sa place. Une beauté froide, calculée, contrôlée. Comme elle.Mais je sais que sous cette surface, ça bouillonne.Je le vois dans sa posture tendue, dans la façon dont ses doigts se crispent légèrement contre le tissu de son peignoir. Et surtout dans son silence. Sienna ne se tait jamais sans raison. Quand elle ne parle pas, c’est qu’elle lutte.Je décide d’attendre. De lui laisser l’espace de répondre. Je n’ai pas besoin de précipiter les choses. Pas avec elle.Et puis, elle souffle, les yeux plantés dans les miens :— Pourquoi maintenant ?Je hausse un sourcil.— Pourquoi je viens te proposer une alliance ce soir ?Elle hoche lentement la tête, méfiante.— Parce que ce soir, tu m’as prouvé que tu étais prête à faire ce qu’il
Chapitre 5 – SiennaJ’arrache mes talons dès que la porte de mon appartement se referme derrière moi.Je les laisse tomber avec un bruit sec sur le sol en marbre, puis j’avance à grands pas vers la cuisine, le cœur encore en vrac. Une fois devant le frigo, je l’ouvre d’un geste brusque et attrape la première bouteille de vin rouge qui me tombe sous la main.J’ai besoin d’un verre.Ou deux.Ou toute la foutue bouteille.La soirée me colle encore à la peau. Le satin de ma robe me gratte, mes boucles d’oreilles me tirent les lobes, et mes joues me brûlent à force de sourire pour les photographes. Tout dans mon corps me hurle de me débarrasser de cette soirée, de cette façade, de **lui**.Je remplis un grand verre à ras bord, puis m’affale sur le canapé, robe toujours sur le dos, chignon toujours tiré, maquillage intact. Parfaitement figée dans cette version de moi que je déteste.La Sienna White mondaine. La femme qu’ils veulent que je sois.Je prends une longue gorgée de vin et ferme l
Chapitre 4 – AdrianJe sens encore la chaleur de sa main dans la mienne.Elle tremblait légèrement. Presque imperceptiblement. N’importe qui d’autre aurait cru à un frisson passager, une réaction au contact, ou au froid de la salle. Mais moi, je sais.Sienna White tremble rarement.Et quand elle le fait, ce n’est jamais à cause du froid.Elle s’est tenue à mes côtés pendant dix minutes exactement. Assez longtemps pour alimenter les rumeurs, capturer quelques regards, faire naître les premiers articles de blog. J’ai vu les flashs crépiter autour de nous, entendu les murmures dans les coins. Et elle, elle souriait. Un sourire coupant comme une lame bien aiguisée.Parfaitement maîtrisé. Comme tout ce qu’elle fait.Mais son regard, lui… il disait autre chose.Elle me hait.Et c’est parfait.Parce qu’on ne peut pas haïr sans passion.Je me penche contre le mur du balcon, ma coupe de champagne à moitié vide dans la main. La réception continue à l’intérieur. Rires, musique, discours creux.
Chapitre 3 – SiennaJe serre ma coupe de champagne si fort que mes doigts commencent à engourdir. Si quelqu’un me regarde de loin, il doit penser que je suis parfaitement à l’aise. Robe noire ajustée, cheveux tirés en un chignon parfait, sourire poli vissé sur les lèvres. L’héritière modèle.Mais à l’intérieur, je bouillonne.— Sienna, darling, tu es resplendissante ce soir.Je me retourne à moitié, découvrant le visage poudré de Marianne Langford, une amie de ma mère et surtout une commère professionnelle. Elle m’embrasse sur les deux joues comme si nous étions les meilleures amies du monde.— Merci, Marianne. Tu es ravissante également.Hypocrisie, quand tu nous tiens.Elle jette un coup d’œil vers l’autre bout de la salle, où une silhouette familière attire déjà tous les regards.— Et ce fiancé… comment résister à ce regard de braise, hm ?Je manque de m’étouffer avec mon champagne.— Ce n’est pas encore officiel.Elle sourit, faussement innocente.— Mais ça ne saurait tarder, n’e
Chapitre 2 – L’ennemie parfaiteAdrian De Luca Je l’ai vue trembler. Rien qu’un instant. Un battement de cils. Une hésitation infime. Mais c’était là.Sienna White.Toujours aussi féroce. Toujours aussi fière. Toujours aussi magnifique dans sa rage.Je descends les escaliers de la villa White en silence, un sourire discret aux lèvres. J’entends encore le claquement de ses talons sur le marbre, sa voix pleine de colère et de mépris. Elle croit que c’est moi qui ai gagné.Mais ce n’est pas un jeu. Pas encore.C’est un test.Et je vais le réussir, comme toujours.Le chauffeur m’attend devant la voiture. Je monte à l’arrière sans un mot. Je déteste cette ville. Trop de souvenirs, trop d’odeurs étouffantes, trop de visages qui veulent vous poignarder avec un sourire. Mais je suis ici pour une raison. Et elle commence par un nom : White Industries.Mon père pense qu’il m’a piégé. Il croit que ce mariage arrangé va me forcer à rentrer dans les rangs, à jouer au bon héritier, à m’assagir. Il