Stan reprit enfin ses esprits. Est-ce qu’il devait courir vers la fille ou prendre ses jambes à son cou en se sauvant dans l’autre sens ?Derrière lui, un crissement de pneus lui fit tourner la tête.Un van rouge venait de piler juste devant la bite en béton. Au volant, Stan reconnu l’homme aux cheveux à la Richard Gere, vu au BibiBar dans son rêve et dans la salle d’audience, au milieu des fumigènes.La porte latérale gauche du van s’ouvrit en glissant.Un homme aux cheveux rouges, tenant une M60 dans les mains, lui fit signe de se baisser.Stan bondit derrière un tas de poubelles.Les balles fusèrent du van comme des fusées, explosant l’arrière du camion de poubelles dans des gerbes d’étincelles dignes d’un feu d’artifice.La fille aux couettes bleues mit les gaz et c’est à fond qu’elle
Ils volèrent cinq voitures pour faire soixante-quinze kilomètres en tout.La fille blonde en treillis de vingt ans à peine consultait son smartphone en permanence – on aurait dit un Bibi féminin avec pas mal de dizaines de kilos en moins et beaucoup de charme en plus – pour savoir où se trouvaient les flics, les postes de contrôle et tout le reste.A la quatrième voiture, une Prius hybride piquée sur le parking de Velizy 2, chacun avait retrouvé son calme.Les présentations furent faites officiellement :Le vieux s’appelait bien Théophile. C’était le boss. La fille, Annabelle.Le Japonais, Akihiro.Ils se changèrent sur le parking devant Auchan pour une tenue plus discrète, genre jeans-basket-polo. Annabelle aussi s’était changée derrière une voiture en jeune femme tranquille qui sort un soir avec des potes, robe
BibiBar. Il faisait nuit. Le troquet sur le toit était plein à craquer.Des filles en mini-jupe ou en robe du soir dansaient entres elles en regardant d’un œil enflammé les grappes de mecs qui buvaient leur verre d’un œil vicieux sur ce que pourrait être le reste de leur nuit.Sur l’estrade, Old Boy faisait monter la pression avec son jazz vieux d’un siècle, mais ça marchait.Plusieurs planches supplémentaires avaient été installées pour gérer l’afflux nocturne entre les échafaudages et l’entrée du bar.Ça n’empêchait pas quelques gorets bourrés à mort de basculer dans le vide.Les plus chanceux s’écroulaient un ou deux étages en dessous en faisant rire tout le monde, un bras ou une jambe de cassé tout au plus, les malchanceux visitaient les neuf étages qui les séparaient du vieux bitume de l’ancien monde sans jamais se relever.Blon
—si, si…Stan avait oublié ce qu’il voulait dire.Il ouvrit les yeux, une moitié encore perdue dans les limbes brumeuses de son rêve d’un Paris déchu faisant la fête au BibiBar avec des OVNI ; et l’autre moitié prenant conscience de la réalité de ce lundi matin.Il était dix heures passées.Sa chambre était vaste, la double porte-fenêtre sans rideaux donnait sur une terrasse. Encore en caleçon et en tee-shirt, il s’y rendit. Il faisait frais. Partout, des bois aux feuilles toutes jaunes s’étalaient en collines autour de lui.A un ou deux kilomètres d’ici, un clocher indiquait la position d’un village.Dans le jardin de la villa, un homme en costume noir armé d’une Kalachnikov passa en longeant la piscine vide, surveillant les alentours. Il lui lança un bonjour de la tête.
Ida Kalda arriva au Bureau 09 le lundi vers 10 heures. Ça faisait vingt neuf heures qu’elle n’avait pas dormi ni changé de fringues. Elle passa rapidement à son appartement prendre une douche et enfiler des affaires qui sentaient le frais avant de rejoindre Claude Santoro qui, debout au milieu du Centac, visionnait et revisionnait les centaines d’heures d’images dont le service disposait.—Colonel.—Capitaine.Depuis la veille à 5h10, c’était la panique au bureau : trois agents étaient morts. Prax, dans le coma, était sous surveillance permanente à l’Hôpital Américain de Neuilly sans que personne ne sache s’il allait s’en sortir ou pas, ni avec quelles séquelles physiques ou mentales.Et toutes les cibles prioritaires s’étaient volatilisées.Et pour couronner le tout, le jeune Stanis
Quand Stan rejoignit l’équipe dans la cuisine, au moins vingt minutes plus tard – étant resté indécis dans le jardin, marchant à droite et à gauche jusqu’à ce qu’il comprenne qu’un retour chez lui mettrait sûrement en danger ses parents, Bibi et tous les gens qu’il aimait –, l’effervescence les animait tous.Au moins vingt téléphones jetables posés sur le bar étaient utilisés à la chaîne pour passer des appels courts et codés. Comme tous ceux qui ne voulaient pas être repérés, les téléphones étaient brisés après un seul appel et jetés dans un sac-poubelle spécial qui démagnétisait les puces, les circuits électroniques et les batteries.Chacun semblait connaître son rôle.On parlait de Jersey, de jet privé, du Nevada, des frontières, de Transits.—Ils vont localiser la borne d’appel 4G qu’on utilise dans peu de temps, dit Théo
Ida Kalda décida pour ne pas tourner folle dingue d’alterner une heure d’étude d’un dossier d’un employé du Bureau 09, suivie d’une heure consacrée à la recherche d’infos sur Stanislas Kross, en réservant son heure de déjeuner pour dicter depuis le salon de son appartement son rapport sur l’enquête de la ruelle.Elle avait tellement peu dormi que parfois, sur la table tactile du Centrac, dont la salle entière lui était totalement réservée, il lui arrivait de voir les caractères se dédoubler.Elle s’enfila sa dose de café hebdomadaire en une seule heure et tout en épluchant le passé des experts en tous genres qui bossaient dans l’énorme bureau derrière la vitre polarisée, elle élabora un questionnaire destiné à détecter les mensonges lors des entretiens qu’elle allait faire passer à tout le monde dès le lendemain matin.A midi, sur les rotules, elle commanda par l’interphone interne une p
Après douze heures de vol et malgré le confort inimaginable qu’on pouvait trouver dans un jet pour milliardaires, Stan dévala la passerelle pour s’étirer aussi fort que possible.Courbaturé de partout, complètement sonné par l’atterrissage, à la limite de gerber, tous les passagers de l’Entité semblaient comme lui.La cause : un atterrissage un peu olé-olé annoncé quelques secondes avant que l’avion ne touche le sol.— Les jeunes, dit le pilote d’une voix d’un calme totalement malhonnête, la piste étant plus courte que la distance dont nous avons besoin pour atterrir… beaucoup plus courte, je veux dire… nous vous demandons de bien vous caler dans vos sièges, la tête bien droite contre vos appui-têtes. Et de vous accrocher.Effectivement, le jet freina tellement fort après avoir touché la piste presque en chute libre, les roues rebondissant sur elles-mêmes à trois