Le moteur du camion rugit dans l’aube naissante. Antonio avait bien sûr choisi de voler le camion sans remorque. Avec 660 chevaux sous le capot, un pare-buffle à écrabouiller un troupeau de mammouths en furie, un habitacle derrière les sièges pour vivre, dormir, manger, regarder la télé ou se connecter à Internet avec un ordinateur intégré à la tête du lit, un petit salon qu’on installait en faisant basculer des planches, un frigo, il était exactement ce qui leur fallait.Lentement, il roula vers le regroupement de Nefilims cernés par les non- vivants.Les fantômes qui avaient accompagné Antonio jusqu’à la cabine s’engouffrèrent dans le restaurant. Et personne n’en sortit. Ils dormaient tous.Les non-morts ne leur avait pas ôté la vie.Ils s’étaient contentés de leur donner du sommeil en surplus.Stan ressentit qu’il dormait tous, l’un de
Stan s’éveilla doucement.Prisca, allongée, contre lui, dormait, son bras passé sur son torse. Ils étaient sur un matelas défoncé, dans une pièce sombre. Des planches clouées à la va-vite obstruaient les fenêtres. Des débris de sachets de bouffe gisaient partout par terre.Doucement, il se leva sans réveiller Prisca. Elle avait les yeux gonflés, elle avait dû pleurer beaucoup.A tâtons, il trouva une porte et l’ouvrit, encore un peu dans le coton. Tout le monde était là : Akihiro, Klauss, Tenebra, Oliver et Sorina. Ida etAntonio.Klauss vint le soutenir par l’épaule.—Ben mon gars, tu l’as joué super-héros sur ce coup-là. Ça va mieux ?—On est où ?—Ak
La punition due à celui qui s’égare, c’est de l’éclairer (Critias – Platon)La chambre forte était recouverte de plomb. De plaques de plomb épaisses d’au moins dix centimètres, scellées entre elles pour qu’aucune faille ni aucun trou ne puissent exister. Partout. Sur le sol, les murs, le plafond, la porte, partout.Les lumières arc-en-ciel se dispersèrent doucement, beaucoup plus lentement que d’habitude.Stan avait la bouche pâteuse. Il était complètement dans les choux, dans le flou, dans le vague. Cela n’avait rien d’un Transit habituel. C’était forcé.Théophile, en tenue militaire noire, des rangers reluisantes aux pieds qu’il avait dû cirer durant des heures jusqu’à pouvoir se mirer dedans, se tenait devant la porte, aussi sérieux qu’une peau de vache travaillée à la main par un tanneur trop vigoureux.Au niveau de son cœur, sur son
Le Maître des Serpents – Jiingua, dans la langue de cette tribu d’Amazonie que l’occident n’avait pas encore découverte et qu’Abraham nommait les Amatrides –, s’approcha doucement du Boa emmêlé à la branche d’arbre.Il n’était qu’à cent mètres du village, pas plus.On entendait les enfants jouer et nager dans la rivière Iomitria, la rivière du Dieu Serpent. 400 kilomètres au sud, la rivière se noyait dans l’Amazone, mais aucun de ces indiens n’était jamais descendu jusque-là.Don Lapuana – peau blanche dans leur langue – n’était qu’à un mètre derrière Jiingua. Il plaçait chacun de ses pas dans ceux de l’Indien. Depuis deux ans qu’il était là, Don Lapuana avait appris leur dialecte et leur système d’écriture à base d’iconographies. Il avait trois femmes, une hutte, cinq enfants et on lui enseignait jour après jour la vie quotidienne de la tribu.Jiingua commença à incanter. C’était u
C’est après avoir roulé quatre kilomètres sur une route sans embranchements, à plusieurs centaines de mètres sous les pieds des Bruxellois, que la Berline déboucha dans un vaste parking aux néons blafards.— Nous sommes arrivés, Mademoiselle Kalda, dit Vin Diesel en la regardant dans le rétroviseur.Ida Kalda lui renvoya un sourire crispé.On lui avait donné rendez-vous devant un chantier abandonné, à la sortie de la ville, à 8 heures pétantes. Des vigiles armés, depuis leur guérite, contrôlèrent son identité.Une voiturette de golf conduite par un type en treillis l’emmena ensuite jusqu’à une aire de stationnement bitumée, à l’autre bout du faux chantier ; plusieurs dizaines de voitures luxueuses soigneusement parquées patientaient avec leur chauffeur assis à leur poste, bien à l’abri des regards des passants de cette banlieue éloignée de tout. Plus loin, elle vit des hélicoptères. Et encore plus loin, un aérodrome privé ou des jets pour millionnaires c
C’est un peu livide (et l’air d’une gourde parfaite) qu’elle regarda les portes glisser alors qu’elle était accroupie à chercher un truc quelconque sur lequel appuyer.Face à elle, un homme charismatique l’attendait, les mains dans les poches de son costume sur mesure.Elle se redressa en toussant. Elle attrapa à la va-vite un mouchoir de papier et le montra à l’homme :—Il était tombé.Conne pour conne, autant y aller à fond !Le type portait un costume noir, une chemise noire, une cravate blanche et des chaussures blanches elles aussi. La cinquantaine neuve, les cheveux grisonnants sur les tempes, séduisant à croquer, il ébaucha un sourire mathématiquement parfait qui ne se voulait pas moqueur. On aurait pu se noyer dans ses yeux verts limpides et intelligents. Sur d’autres, l’assemblage anachroniqu
Il n’était que 18 heures mais il faisait déjà sombre. Les nuages mangeaient petit à petit le ciel limpide. Ils roulaient les uns sur les autres, énormes, des arcs électriques silencieux éclataient à chacune de leur rencontre.Cette nuit, il allait saucer un déluge de chez déluge ! Stan écarta un peu plus ses rideaux.Des flammes grimpaient ça et là, dans des fûts, sous les piliers de béton armé larges de plusieurs mètres et noirs de la crasse des pots d’échappement des voitures roulant au-dessus d’eux. Les piliers soutenaient la quatre voies entourant la Défense, à plusieurs dizaines de mètres là-haut.Les flammes dans les fûts de tôles faisaient danser les ombres des clodos qui s’agglutinaient autour pour se réchauffer. Les feux esquissaient les maisons en carton, en contreplaqué, en tôle ondulée ou en tissu, construites à la va-vite dans les coins et les recoins de cet immense terrain vague fait de collin
Tous les hommes reconnaissent le droit à la révolution, c’est-à-dire le droit de refuser fidélité et allégeance au gouvernement et le droit de lui résister quand sa tyrannie ou son incapacité sont notoires ou intolérables. (Thoreau)Bibi, assis sur un monceau de gravats d’un ex-immeuble de huit étages – où au rez-de-chaussée avait beuglé durant quarante-quatre ans, tous les matins, Claude Aziepienketof, sur le pas de sa boucherie, pour vanter sa super viande et la tendresse de ses morceaux de sa grosse voix de baryton (viande qu’il écrabouillait à coups de burin à l’aube, à l’abri des regards) – tapotait à une vitesse de malade sur sa tablette fabrication artisanale.L’écran douze pouces illuminait son visage au milieu du rien du tout qui l’entourait.Son système Linux optimisé à mort faisait sa fierté.Sa maison, juste derrière, appartenait encore à un îlot de b