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Chapitre 6 — Le contrat

Penulis: Déesse
last update Terakhir Diperbarui: 2025-04-24 21:10:28

Graziella

Je m'assois à la table, le contrat posé devant moi comme un test de ma propre volonté. La lumière froide de la pièce semble se concentrer sur ce document, le rendant encore plus imposant, presque menaçant. Je prends une respiration profonde, mes mains effleurent le papier sans le toucher. Je sais ce que ce contrat représente, mais je ne peux m'empêcher de l'examiner encore un peu, comme si je pouvais en lire les intentions cachées, les clauses non écrites. Mais je ne trouve rien d'autre que des mots, des phrases, une promesse. Une promesse enivrante, un piège bien ficelé.

Élias reste debout, immobile, à une distance qui me permet de sentir sa présence sans qu'il envahisse mon espace personnel. Il n’a pas bougé, mais je sais qu’il observe chacun de mes gestes. Chaque hésitation. Chaque seconde de doute. Ce contrat, c'est plus qu'un simple morceau de papier ; c'est le point de non-retour. C’est ce que je suis sur le point d’accepter, ce que je suis prête à accepter, malgré mes réticences. Mais les pensées se bousculent dans ma tête. Chaque fois que je pense avoir trouvé une raison de m'arrêter, une nouvelle partie de moi me pousse en avant. Est-ce la peur qui m’oblige à avancer ou un désir plus profond, plus insidieux, qui me fait croire que ce chemin est le seul qui vaille la peine d’être emprunté ?

Je relève les yeux vers lui, rencontrant son regard. Il ne sourit pas, il ne dit rien. Il attend. Et dans ce silence, il y a plus de pouvoir que dans mille discours. Il sait que je vais signer. Il sait que je vais céder. Il connaît la réponse avant même que la question ne soit posée. Il me teste, me pousse dans mes retranchements, et j’ai l’impression qu’il a gagné avant même que je ne réalise ce qui se passe. Il est là, à une distance parfaite pour m’observer, pour me juger, sans jamais me toucher. Mais sa présence est plus intime que n'importe quelle caresse, plus accablante que n'importe quel regard lourd de désir.

— Vous savez ce qui est écrit là-dedans, Graziella ? Sa voix est grave, douce, presque comme un chuchotement, mais son ton porte une autorité incontestable.

Je hoche la tête lentement. Oui, je le sais. Je l’ai lu plusieurs fois déjà, mais chaque mot me frappe un peu plus fort. Ce n’est pas un contrat de travail classique. Ce n’est pas un simple accord entre deux parties. C’est un contrat de possession. Un contrat où je m’engage à lui céder tout ce que je suis : mon corps, mon âme, mon avenir. Et en retour, il me promet tout ce que je désire. Une carrière. Un pouvoir. Une reconnaissance. Mais à quel prix ? Ce n’est pas l’avenir que je pensais avoir, ce n’est pas ce dont je rêvais. Pourtant, au fond de moi, je sais que j'ai toujours su que cette offre, ce compromis tordu, viendrait. Que c'était ma destinée. La promesse d'un pouvoir immense. La tentation ultime.

Je regarde à nouveau le document, et mon esprit fait le tour de chaque clause. Certaines sont claires, d’autres sont plus floues, presque effrayantes. Ce que je vais lui confier ne pourra jamais être repris. Tout ce que je perds, je ne pourrai plus jamais le retrouver. Je pourrais me révolter. Je pourrais refuser de signer, partir, choisir une autre voie. Mais une autre voie… quelle autre voie ? Me regarder dans un miroir chaque matin, me rappeler tout ce que je pourrais être et ne pas l’être, tout ce que je pourrais obtenir et ne pas obtenir ? Non, il n’y a pas d’autre choix. L'illusion de la liberté s’effrite dans ma tête, comme un vieux rêve brisé.

Je le sens se pencher légèrement, et je sais que son regard est fixé sur le document. Il m’observe, attend qu’enfin je prenne la décision qui changera ma vie. Mais chaque mot me semble de plus en plus lourd. Et je le sais, il attend de moi cette décision avec une patience glacée, un calme inquiétant. Il sait que je vais signer. Il le sait avant même que je n'en sois certaine moi-même.

— Tout ce que vous êtes… tout ce que vous serez… appartient désormais à ce contrat. C’est le seul chemin qui vous reste, Graziella. Vous n’avez pas d’autre option.

Les mots flottent dans l’air, lourds de sens. Je ferme les yeux un instant, cherchant à m’ancrer dans cette réalité. Il n’y a pas de retour en arrière. Pas après tout ce que j’ai traversé pour arriver ici, pas après toutes les promesses et les rêves qu’il m’a vendus. La liberté que j’avais cru avoir n’est plus qu’un mirage, une illusion que j’ai moi-même créée pour me convaincre que j’avais encore le choix. Mon âme a déjà été vendue, peut-être même avant que je ne prenne conscience de la transaction. Il me montre maintenant le prix exact.

Je me penche en avant et, d’un geste lent, je prends le stylo qui repose à côté du contrat. Le bruit du métal contre le papier est amplifié, presque comme une alarme silencieuse. Je suis consciente de chaque seconde qui passe, consciente du moment précis où je vais franchir la ligne. Une ligne invisible qui me sépare de tout ce que j’ai connu, de tout ce que j’ai été. Est-ce que je suis prête ? Oui, je suis prête. Ou peut-être que je suis déjà perdue. Mais je dois faire ce choix maintenant. Il n'y a pas d'autre choix.

— Vous êtes sûre de cela, Graziella ? Sa voix se fait plus profonde, presque un murmure. Chaque mot semble être un dernier avertissement. Mais je sens qu’il ne doute pas. Il connaît déjà ma réponse.

Je serre le stylo dans ma main, ma peau légèrement humide, mes doigts engourdis par l’anticipation. Je regarde le contrat une dernière fois, et tout s’éclaire dans ma tête. Ce n’est pas un choix entre deux vies, mais un saut dans l’inconnu. Un saut que je suis prête à faire. Peut-être que je n’ai jamais eu de véritable choix. Peut-être que, depuis le début, il n’a jamais été question de liberté, mais seulement de choisir comment je serai captive. Peut-être qu’il a toujours eu raison. Et peut-être que, dans un monde où il n'y a que des dominants et des dominés, j'ai toujours su qu'il n'y avait qu'une place pour moi : à ses côtés. Ou plutôt, sous lui.

D’un coup sec, je signe.

Le bruit du stylo sur le papier résonne dans la pièce comme un claquement, un acte irréversible. Et en un instant, tout est différent. Il n’y a plus de doute. Il n’y a plus de chemin alternatif. Je me redresse lentement et regarde Élias, qui me fixe avec une intensité déconcertante. Il sait. Il sait que je viens de me perdre. Et il semble satisfait.

— Bien, dit-il, sa voix marquée par une approbation froide. Vous avez pris votre place.

Je reste là, figée, le stylo toujours dans ma main, l’instant suspendu. Le contrat est signé, et moi, je me sens à la fois plus proche de ce que j’ai toujours voulu et plus loin de moi-même que jamais. Mais je ne peux plus revenir en arrière. Il n’y a plus de place pour le doute. La liberté, désormais, n'est plus qu'une illusion. Tout ce que j'avais cru posséder est désormais sous son contrôle. Tout ce que je suis, je lui appartiens.

Mais au fond, une question persiste : l’ai-je vraiment perdu ?

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