All Chapters of Charlie Blues: Badass Boy: Chapter 11 - Chapter 20
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10Le lendemain matin, je décollai de bonne heure, autant pour profiter de la fraîcheur matinale que pour prendre un peu d’avance sur un trajet assez long, la route pour le Turkménistan n’étant pas directe puisqu’il faut éviter le survol du nord de l’Iran.Deux mille kilomètres à parcourir dans un vénérable bimoteur qui n’est pas un foudre de guerre, j’étais bon grosso modo pour sept heures de vol sans pouvoir lâcher le manche une minute pour aller se soulager.À première vue, ça peut paraître un peu embêtant, mais j’ai un truc : une gourde « spécial pipi ».Quand elle est pleine, ma gourde, qu’est-ce que je fais ? Je la vide par la fenêtre.Voilà pourquoi, de temps à autre, de pauvres Terriens ébahis lèvent les yeux vers le ciel en se demandant pourquoi il tombe des gouttes alors qu’il n’y a pas le moindre nuage à l’horizon.Je vous épargnerai les pensées qui trottèrent dans ma tête pendant toutes ces heures de vol. Je pens
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11Avez-vous déjà été dans un hammam ? Vous savez, ce truc plein de vapeurs irrespirables où on crève de chaud, où une brute avec des mains comme des battoirs vous tord dans tous les sens, vous malaxe à la limite de la déchirure musculaire et du défonçage de côtes.Remarquez, côté détente, ça vaut le détour. Je le conseille même vivement à tous les stressés du bulbe. On ressort de là vanné, mais alors vanné ! Un coup à aller se coucher à sept heures du soir. Malheureusement, j’avais une soirée à organiser. Mais qu’est-ce qui m’avait pris d’aller me faire un hammam ? Me restait plus qu’à aller me reprendre un café, plus une boîte de vitamine C.J’avais besoin d’un QG pour monter mon opération séduction de la soirée. La meilleure chose était de rentrer à l’hôtel. Là-bas, je trouverais toute l’aide nécessaire. Je sautai donc dans un taxi pour une autre partie de gymkhana effréné tendance suicidaire.Trente minutes plus tard, le réceptionniste m’a
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12La salle du petit déj’ regorgeait d’odeurs appétissantes de thés parfumés, de pâtisseries doucement sucrées et de croissants chauds. Je m’assis à une jolie table tout de blanc nappée, près de la fenêtre et commandai un assortiment de bons trucs sentant bien bon.– Heu… dites donc, dans la bibliothèque du bord, vous n’auriez pas un livre de poésie, par hasard ? glissai-je subrepticement à l’oreille du garçon qui me servait le thé.– Je me renseigne, Monsieur.J’eu le temps de déguster deux croissants au beurre farcis au miel avant que le loufiat ne me rapporte un livre de poèmes sur le voyage. C’était mieux que rien. Je le parcourus distraitement, sautai d’Apollinaire à Baudelaire, en passant par Nerval, puis, peu inspiré, je décidai d’attaquer une prose nettement plus laconique : celle du K.Je décachetai l’enveloppe et lus : « Apportez la mallette à la Valette. »Pour du laconique, c’était du laconique. Fidèle à lui
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13Cinq heures plus tard, j’usai la gomme de mes pneus sur la piste de Milan et roulai jusqu’au parking affaires. Anita m’attendait sur le tarmac avec les filles. Je coupai les moteurs puis ouvris la porte arrière. Deux mini-tornades se jetèrent sur moi.– Papaaa !– Papaaa !Je les soulevai du sol et entamai la distribution de bisous avec la plus grande équité, condition sine qua non pour éviter les bagarres, la jalousie étant apparemment un vice intégralement transmissible de mère en fille ; et ceci dès le plus jeune âge.Anita attendit que je repose les fillettes pour venir se jeter à mon cou. Elle était vêtue plus sobrement que lors de notre dernière rencontre. Quand elle sortait avec ses filles, elle faisait des efforts, ça se voyait. Néanmoins, même habillée d’un sac poubelle, elle ferait bander un mort. Je la serrai contre moi, nos langues s’emmêlèrent et mes mains se baladèrent. Avec Anita, je ne les commande plus, elles font ce
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14John avait dressé une succulente table de petit déjeuner sur le pont de sa jonque, mais j’étais bien incapable d’avaler quoi que ce soit. Ce qui n’était pas le cas de Jean-Édouard qui engloutissait tartines, croissants et petits pains avec un entrain inquiétant.– Allez, ne faites pas cette tête, ça va s’arranger, vous verrez, me rassura John avec un large et chaleureux sourire.– Je n’en doute pas, mais j’ai quand même un peu les boules.– Ça passera, dit-il en bourrant sa pipe.Le Soleil au zénith faisait miroiter l’eau du port de mille reflets. Une légère brise ridait la surface chatoyante, créant de minuscules vaguelettes qui se brisaient en un doux clapotis contre les coques blanches des goélettes de bois qui nous entouraient.John avait placé une immense toile sur la bôme du grand mât qui recouvrait le pont comme un chapiteau et procurait une ombre rafraîchissante.Si ce n’était le bourdonnement incessant de la ville, le coin ét
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15Nous étions tous les trois penchés sur un plan de la ville, étalé sur la grande table de bois du pont. Une lampe à pétrole posée dans un coin éclairait la scène de sa flamme jaune.– C’est là, dis-je en posant un doigt sur la carte.« Là » correspondait au quartier de Kandilli, sur la rive asiatique du Bosphore, dans le nord d’Istanbul. D’après le nom de la rue et le numéro, l’adresse en question semblait être coincée entre une ruelle et le détroit.– Hum ! Je crois bien que je connais ce coin, annonça John en tirant sur sa pipe. J’ai remonté le Bosphore jusqu’à la mer Noire, le mois dernier et je suis passé devant. C’est un quartier résidentiel assez chic, si mes souvenirs sont bons. Les habitations qui donnent sur la mer sont de vieilles maisons en bois du dix-huitième siècle. Elles ont toutes leur ponton particulier.– Vous croyez qu’on pourrait aborder par le détroit ? demandai-je.– C’est même la meilleure solut
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16– Charlie, il est neuf heures !– Ah ? Déjà ? dis-je en ouvrant difficilement un œil à moitié collé.Valentino referma doucement la porte, me laissant seul dans l’agréable pénombre de ma cabine. Les rayons solaires tentaient de s’infiltrer par tous les moyens à travers le store vénitien de la fenêtre, créant ainsi une espèce de brume lumineuse s’accordant parfaitement avec mon cerveau embrumé. Avais-je rêvé ou bien la nuit dernière avions-nous combattu des hordes asiatiques en quête de la mallette ? Je bondis sur ma couchette.La mallette !Elle était là, posée au pied du lit, resplendissante dans sa robe en aluminium brossé. Ouf ! Ce n’était donc pas un rêve et j’allais bientôt revoir mes filles.Tralali ! Tralala !Le sourire jusqu’aux oreilles, je pratiquai mes ablutions et montai sur le pont, l’humeur plus guillerette que jamais. Je m’attendais à trouver mes compagnons assis confortablement
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17Val avait garé la voiture de loc dans une rue adjacente au port. Il était vingt heures. Il nous fallait environ trente minutes pour rejoindre le lieu du rendez-vous, mais je préférais arriver en avance. Une intuition.Nous récupérâmes la caisse, une grosse BMW M5 noire – Val ne conduit que des voitures hyper-puissantes de couleur noire, c’est une question de principe, chez lui. L’odeur du cuir pleine fleur m’emplit délicieusement les narines tandis que mon acolyte négociait le trajet vers le rendez-vous à l’image de la puissance de son moteur, c’est-à-dire avec sauvagerie. Je vérifiai l’attache de ma ceinture, calai mes pieds sur le plancher et m’accrochai à la poignée comme un acrobate à son trapèze.– Dis-donc, remarquai-je, on dirait que tu as pris le pli local, question conduite.– C’est pour mieux passer incognito, me fit le blackos avec un sourire de carnassier en chasse.– Dans une BM dernier cri, au milieu de ces tas de ferrailles ?
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18La folle poursuite commença.Nous étions pour le moment dans le quartier des orfèvres ; les murs resplendissaient d’or et d’argent : assiettes finement travaillées, plats à couscous et autres vaisselles de cuivre rutilantes sur lesquelles se reflétaient les centaines d’ampoules éclairant le tunnel aux voûtes habilement décorées de motifs arabisants.La visite était superbe, quoiqu’un peu trop rapide à mon goût. Val et moi inaugurions un nouveau style, ce qu’on appellera peut-être plus tard, si l’effet se démocratise, du tourisme éclair, autrement dit, voir un max de trucs dans un minimum de temps.À notre époque où tout va de plus en plus vite, c’est peut-être un concept révolutionnaire. Vous savez quoi ? Je crois qu’on devrait breveter l’idée et lancer la mode, organiser la visite du Louvres en rollers, voyager sur la Seine en offshore, s’offrir le tour des pyramides en jet ou un safari au Kenya en 4x4 de course.– Charlie, au lieu
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19L’air frais nous fouettait à nouveau le visage. Nous avions fait demi-tour vers Istanbul quelques minutes plus tôt et les lumières lointaines de la vaste agglomération imprimaient une lueur fantomatique sur les quelques nuages chargés d’humidité qui survolaient la cité.– On est à quelle distance du port, à ton avis ? hurlai-je par dessus le bruit du moteur.– Au moins quarante kilomètres !– Putain, on pourra pas rentrer sans !Le moteur fit de nouveau entendre quelques ratés, puis s’arrêta sur un dernier hoquet. Val laissa filer en roue libre une vingtaine de mètres avant de nous stopper sur le bas côté.– Tu disais ?– Merde !– C’est aussi mon avis.Et voilà, on était redevenus deux pauvres piétons dans un monde dédié au moteur à explosion. C’est con, hein ! Okay, okay, relativisons. Sur l’échelle des emmerdes, la panne d’essence est à un tout petit niveau. C’est vrai quoi, y’a pas mort
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