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Au revoir Arsène
Au revoir Arsène
Auteur: Lakhita

Chapitre 1

Ça fait tellement mal. Une douleur fulgurante que je ne peux comparer à rien d'autre. Je n'ai jamais rien ressenti de tel auparavant. C'est comme si un feu s'était allumé dans tout mon corps et m'obligeait à me tordre dans tous les sens en essayant en vain de l'éteindre.

Je m'évanouis au bout de quelques secondes ne pouvant plus supporter cette douleur. Je tombais dans un profond sommeil. Profond et étrange. J'avais l'impression de m'élever à l'extérieur de mon corps et de flotter dans un endroit sombre, visqueux et réconfortant. Je n'ai pas froid entourée de toute cette obscurité mais j'ai des frissons.

Soudain, mon corps se calme et je ne peux plus ouvrir les yeux. Je ne ressens plus la douleur. En fait, je ne ressens rien. Seulement la paix des ténèbres. Est-ce que je suis morte ? Non, je sais que ce n'est pas la fin. Je ne peux pas partir aussi facilement.

Alors que je flotte dans ce tas, je repense à tout ce qui m'est arrivé l'année dernière. Tant de choses se sont passées en si peu de temps, mais j'ai l'impression que cette année a disparu en une seconde. Les détails s'estompent et disparaissent un à un ne laissant que les émotions que j'ai ressenties à ces moments-là.

Je ne savais pas que j'avais des pouvoirs au début. Je pensais que j'étais juste une fille comme les autres dans mon université. Comme tout le monde, je pensais que j'étais originale d'une certaine manière, mais je ne pensais pas que j'étais originale au point d'avoir des pouvoirs.

J'ai eu une vie très simple par rapport à maintenant. Je ne flottais pas dans une obscurité impénétrable. Je me suis juste réveillé tous les jours et je suis allé à l'université. Là, j'ai assisté à des cours fascinants que j'ai complétés avec des programmes que j'ai trouvés en ligne. En dehors des cours, je pouvais voir mes amis à l'école et continuer à leur parler via mon téléphone une fois rentrée à la maison.

Je n'avais pas vraiment besoin de travailler dur pour avoir de bonnes notes, donc j'ai dû trouver des occupations pour me sentir vivante. Je voyageais avec ma famille, allais au musée voir des peintures, chantais, lisais, écrivais, regardais des films et des animés... J'ai tout fait pour être toujours occupée.

À l'époque, je pensais que j'étais quelqu'un qui avait sa vie d’organisée et qui allait réussir dans e futur. Mais avec le recul, je me rends compte que ce ne sont pas ces choses frivoles qui rendent la vie de quelqu'un intéressante. J'aurais juste dû profiter des moments de silence et de paix. Maintenant, dans le noir, j'avais tout le temps de le faire.

Ma vie a peut-être été mouvementée avant de découvrir mes pouvoirs, ce n'était rien comparé à après. Tout s'est effondré dans ce monde où j’avais eu beaucoup de repères, en une seule journée. Une journée comme les autres dans mon université.

Mes amis et moi avons dû changer de bâtiment pour notre prochain cours. Par conséquent, nous marchions et parlions de rien. Notre plus gros problème étant que nous nous sommes réveillés trop tôt ce jour-là. J'étais de bonne humeur et d'autres étudiants marchaient sur le même chemin que nous. Il n'y avait rien d'inhabituel ce jour-là et pourtant tout s'écroula soudainement.

Un énorme bruit a déchiré le ciel suivi d'un tremblement de terre qui nous a propulsés au sol. Je me suis cognée la tête sans me blesser gravement et je me suis levée aussi vite que j'ai pu pour éviter d'être piétinée par des étudiants paniqués essayant de fuir à tout prix.

Les bruits et les lumières dans le ciel ont continué et n’ont pas aidé la panique qui a pris naissance dans les cœurs des gens. Tout le monde a dû penser que nous étions attaqués par des terroristes ou qu’il y avait de la foudre qui s’abattait au sol.

J'aurais dû courir aussi mais mes jambes refusaient de m'écouter. Mes amis m'ont criée de les suivre mais je n'ai pas bougé. Je ne pouvais pas détacher mes yeux des lumières.

La fuite des autres a éclairci ma vue et je pouvais parfaitement voir ce qui causait tout cela. Je ne pouvais pas croire ce que je voyais. A dix mètres de moi, une bagarre avait lieu entre deux hommes dont je ne voyais pas les visages tant ils allaient vite.

En plus de se battre avec leurs poings, ils ont fait sortir des éclairs ou autre chose de leurs paumes, ce qui était responsable de l'horrible son.

Je ne pouvais pas comprendre ce qui se passait devant moi. C'était comme si j'étais moi-même dans un film hollywoodien. En voyant cet éclair, j'ai senti quelque chose d'étrange dans mon estomac.

Sans savoir pourquoi je pouvais sentir qui était le méchant dans ce combat et je les regardais sans bouger un muscle.

J'étais paralysée. Je n'avais jamais vu de magie auparavant et je ne savais même pas qu'elle existait. Voir de mes propres yeux que tout ce que je pensais savoir était faux m'a retournée l'estomac. Un sentiment étrange m'envahit. Une sorte de peur mais aussi de jalousie. Pourquoi ne faisais-je pas partie de ce monde ? Un univers qui m'a fait peur mais en même temps m'a tellement attirée.

Soudain, j'ai eu l'impression que ma place était dans ce combat et une puissance inconnue m'a poussée en avant. Sans avoir le temps de réfléchir, j'ai réalisé que j'étais derrière le méchant qui ne pensait pas qu'un humain parmi d’autres essaierait de l'attaquer. Par conséquent, ayant l'élément de surprise à mes côtés, je lui ai donné un coup de pied et l'ai envoyé au sol. Le méchant s'est immédiatement levé et je pouvais dire qu'il n'était pas très heureux de ce que je venais de faire.

Personne ne m'avait jamais regardée comme ça avant. Avec des yeux vides et froids. Derrière ces yeux se trouvait une âme simplement mue par le désir de détruire. J'ai reculé par réflexe mais c'était trop tard.

En y repensant maintenant, j'avais envie de rire. Pourquoi est-ce que je voulais tellement être faire part de ça ? Pourquoi ne pouvais-je pas m'enfuir comme n'importe quel autre être humain l'aurait fait ? Je n'avais rien à prouver à personne. Personne ne m'aurait blâmée si j'avais fui, au contraire ils m'auraient trouvée totalement saine d'esprit.

Cependant je ne regrette pas ce que j'ai fait. Je suis même fière de moi. Pour la première fois de ma vie, j'ai eu envie de me battre et je n'ai pas reculé. J'avais été courageuse et j'étais enfin devenue vraiment originale.

Mon sourire s'est soudainement évanoui. Sans ce combat je n'aurais jamais rencontré Arsène.

Retour à l'histoire. Après avoir énervé le soi-disant méchant, tout est devenu noir. Il m'a jeté contre un arbre et j'ai perdu connaissance instantanément. Cependant, je me suis réveillée assez rapidement car au moment où j'ai ouvert les yeux, les deux inconnus étaient toujours en train de se battre.

Le gentil se tenait entre le méchant et moi. Je me sentais mal. Si je n'étais pas intervenu, cela aurait été plus facile pour lui. Il aurait pu se battre sans penser à me protéger.

Je me suis donc levée et j'ai décidé de partir pour ne plus le déranger. Je voulais aussi partir parce que je perdais beaucoup de sang et je voulais être soignée avant de m'évanouir à nouveau.

Maintenant que l'adrénaline était parti, j'avais honte. J'avais honte parce que je me mêlais de quelque chose qui ne me concernait pas du tout mais surtout j'avais honte parce que j'aurais pu être gravement blessé et dans ce cas j'aurais blessé les gens qui m'aimaient.

J'ai agi sans réfléchir et dans quel but ? J'aurais pu dire que j’avais agi parce que je voulais sauver le bon garçon ou que je voulais juste être égoïste et me sentir utile, mais la vérité était quelque part entre les deux. Moi-même, je ne comprenais pas ce qui s'était passé ce jour-là.

Les pompiers m'ont trouvée rapidement et j'ai eu droit aux soins nécessaires. Je n'avais rien de grave ce qui était un miracle compte tenu de la force avec laquelle j'avais heurté cet arbre.

Plusieurs élèves ont dit à quel point ils avaient peur de revenir en classe. Je comprenais pourquoi. Ils ne pouvaient avoir peur que de quelque chose qu'ils avaient fui. Personnellement, le fait que je m'interpose avait en quelque sorte ôté l'angoisse de revenir sur les lieux. Comme si j'avais combattu mes propres peurs.

J'appris plus tard qu'Arsène, le gentil, aurait dû effacer ma mémoire ce jour-là. Le protocole stipulait qu'il devait effacer la mémoire de tous les témoins humains de la scène. Quelques jours après l'incident, j'ai remarqué que plus personne ne parlait de l'événement et j'ai fait comme si de rien n'était.

Mes amis ont été parmi les derniers à se faire laver la cervelle et quand j'ai vu Arsène qui venait effacer les souvenirs de ces derniers, je me suis cachée et j'ai décidé de le suivre quand il laisserait une ouverture.

J'avais vu ses pouvoirs. Je savais de quoi il était capable. Je ne pouvais pas intervenir pour protéger les souvenirs de mes amis. D'ailleurs, je pensais que c'était peut-être pour le mieux qu'ils oublient.

Tout le monde autour de moi avait oublié. Mais pas moi. Alors comment pourrais-je faire comme si de rien n'était ? Je me suis accrochée à mes souvenirs et j'ai voulu en savoir plus.

Le lendemain quand j'ai vu Arsène devant l'université j'ai décidé de le suivre. Peut-être que je n'aurais pas dû le faire. J'aurais peut-être dû vivre heureusement inconscient de la réalité. Mais je ne regrette rien.

Même si je savais qu'il était revenu exprès pour effacer ma mémoire, j'ai décidé de le suivre. Au fond, j'avais décidé de lui faire confiance. Il connaissait mes cours et devait déjà tout savoir de moi. S'il avait prévu d'effacer mes souvenirs, il l'aurait probablement déjà fait.

Et j'avais raison. Enfin presque. Arsène avait en effet insisté pour effacer mes souvenirs mais son supérieur lui avait demandé de m'amener à lui curieux de mes actions.

J'ai donc suivi Arsène pendant une bonne demi-heure. Je ne restais ni trop loin ni trop près. Si je le perdais de vue, j'accélérais le rythme pour le rattraper mais il m'attendait toujours pour être sûr que je pouvais rattraper mon retard.

Il a fini par m'emmener dans un vieil immeuble et voyant l'état des lieux je me suis figée hésitante. Je n'avais pas vraiment envie d'aller dans un tel endroit avec un inconnu. Je l’ai quand même fais, et j'ai été surprise de voir que l'intérieur était neuf et d’une propreté irréprochable.

Je suivis Arsène directement auprès de son supérieur. Celui-ci était un homme âgé et pas du tout imposant donc c'était assez bizarre de voir Arsène lui parler si poliment. En l’entendant parler, je suis restée quelques minutes devant la porte avant d'entrer. J'étais venue jusqu'ici, je n'allais pas faire demi-tour maintenant.

En me voyant entrer, Monsieur L me sourit chaleureusement et me dit de m'approcher. Quant à Arsène, il n'avait visiblement pas l'air très content que je sois là et s'est réfugié dans un coin de la pièce.

« Je suis désolé de t'avoir fait venir de cette façon. J'espère que le petit Arsène ne t'a pas fait peur. -Pas du tout. »

Mais j'ai à peine eu le temps de m'approcher de Monsieur L que l'engin à sa gauche a fait un bruit sec et tout à coup de la fumée est apparue derrière. Monsieur L et Arsène regardèrent l'engin surpris avant de tourner les yeux vers moi. Je ne savais pas pourquoi ils me fixaient et je me sentais soudain mal à l'aise. Monsieur L finit par reprendre la parole :

« Désolé, je n'ai pas demandé ton prénom.

-Atalante.

-C'est un très joli prénom.

-Merci.

-Il vient de la mythologie grecque, n’est-ce pas ?

-En effet. Mes parents sont de grands fans de mythologie. »

Il me sourit et je me rendis compte qu'Arsène semblait m'écouter avec de plus en plus de curiosité.

« Atalante, la seule femme présente lors de la chasse au sanglier de Calydon.-Certains la voient comme l’héro de cette chasse et d’autres comme l’instrument de vengeance d’Artémis.-Et comment te vois-tu ? »

Je me contentais de sourire ne sachant quoi répondre.

« As-tu toujours eu des pouvoirs, Atalante ?

-Des pouvoirs ? Non jamais. Pourquoi ?

-Oh oui ? Eh bien, cette machine à ma gauche est communément appelée un mesureur complet. Entre autres cette machine est capable de mesurer la quantité de magie présente dans des individus ou des objets et lorsque vous vous en êtes approchée, la machine a mesuré une telle quantité de magie qu'elle a surchauffé. »

J'ai regardé la machine à vapeur en fronçant les sourcils.

« Vous voulez dire que c'est moi qui ai fait ça ? »

Monsieur L hocha la tête.

« Est-ce que cela te dérange si je regarde cela de plus près ? »

J'ai secoué la tête. Savoir que j'avais de la magie dans ce monde m'a réconfortée en quelque sorte.

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