Je la tenais fermement contre moi, son corps frêle tremblant sous la pression de mes mains. Son souffle était rapide, irrégulier, comme si chaque respiration pouvait être la dernière. Le comte, ce salaud, avait été neutralisé, mais je sentais qu’elle n’était pas prête à comprendre la gravité de la situation. Ses yeux, agrandis par la peur, se fixaient tour à tour sur moi et Mica, cherchant une échappatoire dans cette pièce où il n’y en avait aucune.
Le comte avait toujours été un homme dangereux, mais son pouvoir ne venait pas seulement de lui. Il avait des alliés, des hommes impitoyables, prêts à tout pour maintenir l'ordre qu’il avait instauré. Sa mort n’allait rien changer pour elle, au contraire, elle venait de se plonger dans un cauchemar encore plus profond. Ce n’était plus une question de fuir. La question était de survivre. « Ils te traqueront. » Les mots résonnaient dans ma tête, prononcés par Mica quelques minutes plus tôt.
Soudain, un bruit sourd derrière moi me fit lever les yeux. Le comte, ce salaud d'enfoiré, s'était relevé. Malgré la douleur visible dans son corps, il s'était libéré de ses liens, animé par un mélange de haine et de désespoir. Sans attendre une seconde de plus, il se jeta sur moi, ses yeux emplis de rage. Pris par surprise, je lâchai la jeune femme, me dégageant juste à temps pour éviter le coup qu'il essayait de porter. Je trébuchai en arrière, essayant de reprendre l’équilibre, mais Mica fut plus rapide que moi. Dans un mouvement précis, presque chorégraphié, il sortit son arme et tira.
Le silencieux étouffa le bruit du tir, mais le claquement sourd de la balle atteignant son front résonna comme une sentence implacable. Le comte s'effondra sans un bruit, une tache rouge s'élargissant lentement autour de son crâne. Le silence qui suivit fut assourdissant.
La jeune femme, qui avait observé toute la scène, recula d’un pas, ses pieds glissant presque dans la flaque de sang qui s’étendait sous le corps. Ses yeux se portèrent vers la porte, une lueur d’espoir naissant en elle. « Non... » pensais-je en la voyant bouger. Mais avant que je puisse réagir, elle se lança dans une tentative désespérée de fuir. La porte, si proche, semblait son unique salut.
Mica fut sur elle en un instant. Ses doigts agrippèrent son bras avec une force brute et la ramenèrent violemment contre le mur. Son dos heurta la surface dure avec un bruit sourd, et elle laissa échapper un cri de douleur, étouffé par la terreur. Ses tentatives pour se libérer étaient désespérées, mais inefficaces. Mon frère, implacable, la maintenait en place, son visage à quelques centimètres du sien, la regardant comme un prédateur qui vient de capturer sa proie.
— « Tu ne vas nulle part. » Sa voix, basse et rauque, vibra dans l'air, glaçant le sang de la jeune femme. Elle se figea sous son emprise, son souffle court et haché.
Elle essaya encore de se débattre, mais Mica la pressa davantage contre le mur, l’immobilisant totalement. Ses yeux brillaient d’une lueur inquiétante. Il savourait chaque seconde de ce moment, chaque goutte de terreur qui se dégageait d’elle. Elle tremblait, visiblement à bout de forces, tandis que mon frère prenait une longue inspiration, comme pour mieux s’imprégner de la situation.
— « Écoute-moi bien. » Sa voix, bien que plus douce, était toujours chargée de menace. « On ne veut pas te faire de mal, mais il faut que tu comprennes quelque chose. Le comte est mort, mais ses hommes vont te traquer. Ils ne vont pas te laisser tranquille, tu sais ça ? »
Elle ne répondit pas, trop effrayée pour formuler une réponse cohérente. Mais je savais qu’elle comprenait. Elle n’avait plus d’autre choix que de nous suivre, que de faire confiance aux hommes qui avaient tué celui qui la tenait captive. « Quelle ironie... » pensais-je. Mais elle n’avait pas le luxe de réfléchir à ces contradictions. Son instinct de survie devait prendre le dessus.
Je m’approchai à mon tour, remettant lentement mon masque. Chaque mouvement était calculé, chaque geste mesuré. Mon regard ne quittait pas son visage. J’étais devenu l’ombre de la mort à ses yeux.
— « Parce que, au cas où tu ne l'aurais pas compris, chérie... » Je fis une pause, m’assurant que mes mots faisaient leur chemin dans son esprit embrouillé. « Tout le monde pensera que c’est toi qui as tué ce porc. »
Ses yeux s’élargirent, et je pouvais voir que cette idée la terrifiait plus que tout. Je continuai d'une voix calme, presque didactique :
— « Et tu sais ce que ça signifie ? Ses hommes, ses complices... ils vont vouloir ta peau. Ils voudront savoir comment tu as réussi. D'où venait l'arme ? Qui t’a aidée ? Et, crois-moi, ils vont te faire parler. »
Je laissai planer ces derniers mots, les faisant résonner dans l’air. Il n’y avait pas besoin de plus de détails. Elle comprenait, maintenant. Chaque fibre de son être tremblait de peur, mais elle comprenait.
— Je... je ne dirai rien... » murmura-t-elle finalement, la voix brisée, presque inaudible.
Je me penchai un peu plus près, laissant mon souffle effleurer sa peau.
— Je te le demande encore une fois. Est-ce que tu as compris ? »
Ma main se resserra dans ses cheveux, tirant légèrement pour la forcer à répondre plus vite. Elle gémit de douleur, hochant frénétiquement la tête.
— Oui ! J'ai compris ! » sanglota-t-elle, les larmes roulant maintenant sur ses joues.
Je la relâchai légèrement, sentant qu’elle était au bord de la panique totale. Cette fille avait appris sa leçon. Elle savait qu'elle ne pourrait pas fuir de nouveau, qu'une autre tentative signifierait sa mort.
— Alors, tu vas nous suivre sans faire d’histoires. » Je jetai un regard à Mica, qui souriait toujours d’un air inquiétant. « Parce que, la prochaine fois, tu n’auras plus de seconde chance. »
Elle hocha encore la tête, cette fois avec une résignation silencieuse, ses yeux désormais ternes. Elle avait compris. Nous étions sa seule issue. Je me gratta la tête, et le regarda, j'esperais simplement qu'elle avait vraiment tout compris.
Le silence retomba dans la pièce. Le corps du comte gisait toujours là, une preuve évidente de la violence qui venait de se dérouler. Mais pour elle, cette violence n'était que le début.
CENDRILLONOn arriva au bar-hôtel au petit matin, le ciel gris perlant de pluie fine. Les planches sur les fenêtres donnaient à l’endroit un air de bunker, mais c’était toujours debout, toujours à nous. Marie gara la voiture en travers du parking, et on sortit péniblement, comme des soldats rentrant d’une guerre qu’on avait pas vraiment voulue. Ethan boitait, soutenu par Roland. Mica grognait en tenant son épaule, refusant l’aide de quiconque. Moi, je guidai mon père, son bras autour de mes épaules, son poids léger mais pesant sur mon cœur.À l’intérieur, ça sentait encore la bière et le bois, mais y’avait une odeur de cendres aussi, un souvenir de l’incendie qu’on avait éteint avant de partir. On s’effondra tous autour d’une table, un tas de corps cassés mais vivants. Marie sortit une bouteille de whisky de sous le comptoir et servit des verres sans demander, même à mon père, qui trembla en prenant le sien.— À nous, dit-elle, levant son verre. Les emmerdeurs qui survivent.On trinqu
MICAHLes premiers hommes arrivèrent, armes dégainées, et le chaos explosa. Je tirai, visant la tête, et un type s’effondra. Ethan plongea sur un autre, son couteau trouvant une gorge. Cendrillon couvrit son père, tirant maladroitement mais touchant un bras. Le bruit des balles et des cris remplit la cave, et moi, je riais presque – c’était ma guerre, ma putain de danse.Mais y’en avait trop. Un coup me frappa à l’épaule, et je grognai, le sang chaud coulant sous ma veste. Ethan prit une balle dans la jambe, tombant à moitié. Cendrillon cria, et son père la poussa derrière lui, frappant un type avec son bout de métal. On était foutus, mais je voyais pas encore la fin.Et puis, une détonation plus forte éclata dehors, suivie d’un hurlement. Les hommes de Darius hésitèrent, et une silhouette descendit l’escalier, un revolver fumant à la main. Marie. Putain, Marie, avec Roland derrière elle, une carabine dans les mains tremblantes.— Bougez vos culs ! cria-t-elle, abattant un autre type.
MicahLe sous-sol du pub puait la peur et le sang, un mélange qui me rappelait trop de nuits où j’avais dû jouer les bêtes pour survivre. Darius était là, dos au mur, mon flingue collé à sa tempe, son sourire de serpent toujours vissé à sa gueule. Autour de nous, ses hommes gisaient dans leur propre merde – morts pour les chanceux, gémissants pour les autres. Ethan saignait d’une entaille au bras, mais il tenait debout, son couteau dégoulinant dans sa main. Cendrillon, elle, serrait sa bouteille brisée comme une arme, ses yeux brûlant d’une rage que je connaissais bien. On avait gagné cette manche, mais ce connard de Darius avait encore un as dans sa manche, je le sentais.— Parle, ordonna-t-elle, sa voix claquant comme un fouet.Putain, j’étais fier d’elle. Elle tremblait plus, ma princesse. Elle avançait vers lui, et moi, je reculai juste assez pour le garder en joue, laissant Ethan l’attraper par le col pour le tenir en place. Darius ricana, un son qui me donnait envie de lui explo
On débarqua à l’aube, et putain, cette ville puait la pluie et le désespoir. Le ciel était gris, lourd, comme s’il allait nous tomber sur la tronche. Marie nous avait filé une adresse – un entrepôt pourri dans l’est, près des docks. Je garai la bagnole le long d’un mur tagué, à l’abri des curieux, et on sortit dans l’air froid qui vous mordait la gueule. Cendrillon resserra son manteau, Ethan planqua son flingue dans sa ceinture, et moi, je scrutai les environs.— Ça pue la merde, marmonnai-je. Trop calme.— C’est les docks, répondit Ethan, toujours calme comme un moine. C’est toujours mort à cette heure.Je grognai, pas convaincu. Les docks, ouais, mais y’avait un truc qui clochait. Trop de silence, trop d’ombres. L’entrepôt se dressait là, une ruine de ferraille avec des fenêtres explosées qui vous fixaient comme des yeux crevés. La porte grinçait dans le vent, et je vis Cendrillon serrer les poings. Elle avança d’un coup, sans attendre.— Allons-y, dit-elle, et elle fila vers l’entr
CENDRILLONOn passa l’après-midi à préparer nos affaires. Quelques vêtements, des armes que les jumeaux avaient gardées de leur passé, et un plan griffonné sur une serviette en papier. Londres. Darius. Le serpent et la couronne. Chaque mot pesait comme une pierre dans ma poitrine, mais je refusais de flancher. Pas avec Ethan et Mica à mes côtés. Pas avec ce bébé qui me donnait une raison de plus de me battre.Vers le soir, alors qu’on chargeait la voiture, je pris une seconde pour regarder le bar. Notre refuge, notre rêve. Les planches sur les fenêtres lui donnaient l’air d’une forteresse, mais il restait debout. Comme nous.— Prête ? demanda Ethan, sa voix douce derrière moi.— Ouais, murmurai-je. Prête.Mica klaxonna depuis le volant, un sourire sauvage aux lèvres.— Alors bouge, princesse. On a un roi à décapiter.Je montai dans la voiture, le cœur battant, et alors qu’on s’éloignait dans la nuit, je sentis une étrange certitude s’installer. Peu importe ce qui nous attendait, on af
CENDRILLON— Et nous ? demanda Ethan, ses yeux sombres fixés sur elle.— Vous sécurisez cet endroit, répondit-elle. Barricadez les fenêtres, vérifiez les clients. Si les hommes de Valerian veulent jouer, ils viendront ici. C’est votre château, protégez-le.Roland releva enfin la tête, ses mains agrippant sa canne comme s’il puisait sa force dans le bois usé.— Je reste avec vous, murmura-t-il. Si c’est ma faute, je vais pas vous laisser seuls.— T’es sûr que t’es en état ? lâcha Mica, sans filtre. T’as l’air d’un mort qui marche, Roland.— Mica ! sifflai-je, mais il me coupa d’un regard.— Quoi ? C’est vrai. On a besoin de combattants, pas de poids morts.Roland esquissa un sourire triste, presque amer.— T’as raison, petit. Mais j’ai encore un ou deux tours dans mon sac. Laissez-moi une chance de me racheter.Le silence revint, lourd, chargé de tout ce qu’on ne disait pas. Marie écrasa sa cigarette à moitié fumée et se leva.— Reposez-vous ce soir, ordonna-t-elle. Demain, on entre en