Chapitre 7 — L’arrivée au village natal

Les moteurs vrombissent dans la nuit. Trois voitures, farouches, fendillent l’asphalte à vive allure. À l’intérieur de chacune d’elles, les visages tendus de Lukas, Matteo et Julian se dessinent dans l’éclairage blafard du tableau de bord. L’écho des cris de leur père, la détresse de leur mère tombée en syncope, et la violence de la vidéo captée par les caméras de surveillance brûlent leur mémoire.

Lukas, au volant du véhicule de tête, serre le volant à en blanchir les jointures. Derrière lui, les phares des deux autres voitures balayent l’obscurité, accompagnés des gyrophares discrets des gardes assignés par les autorités. Ce n’était plus une simple réunion familiale. C’était une mission de sauvetage. Leur sœur était en danger.

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Pendant ce temps, dans un village reculé bordé de montagnes silencieuses et de forêts endormies, Caleb gara sa voiture poussiéreuse devant une petite maison en pierres vieillissantes. Le moteur s’éteint, le silence du lieu contraste avec l’agitation qui régnait un peu plus tôt. Miranda et Cassie bondirent hors de la voiture, riant entre elles, arborant leur fierté comme une couronne. Caleb resta un instant immobile, le regard voilé. Puis il sortit de la voiture, faisant le tour pour ouvrir la portière passager.

— Descends, dit-il d’un ton neutre.

Elliana tourna lentement la tête vers lui. Ses yeux, gonflés de larmes qu’elle refusait de laisser couler, le fixaient avec une intensité glaciale. Sans un mot, elle descendit. Chaque pas lui arrachait une douleur, mais elle se tenait droite. Pour elle. Pour son bébé. Pour ses frères qui viendraient. Elle le savait. Ils viendraient.

— T’as vu sa tête ? souffla Cassie, moqueuse.

— Elle fait la princesse alors qu’elle vient de nulle part, ajouta Miranda en la suivant.

Elliana les ignora. Elle caressa doucement son ventre rond, murmurant à son enfant un mot silencieux de réconfort. Tout ira bien.

Alors qu’ils s’approchaient de la maison, un homme d’âge mûr, au visage rond et jovial, s’approcha d’eux. Il portait une veste en laine et une casquette usée. C’était le maire du village.

— Caleb ! Par tous les saints, ça fait un bail ! s’exclama-t-il en tendant une main chaleureuse.

— Monsieur le maire ! répondit Miranda, rayonnante. On revient enfin dans notre bon vieux village, et cette fois avec une bonne nouvelle : mon fils a été promu vice-président d’une grande entreprise !

— Vice-président, rien que ça ! Félicitations ! Caleb, tu fais la fierté du village.

— Merci, monsieur le maire, répondit Caleb en souriant.

Le regard du maire glissa sur Elliana, silencieuse et en retrait.

— Et cette jeune femme ? C’est ta femme ? Elle n’a pas l’air... très commode.

Caleb passa un bras autour des épaules d’Elliana, qui tressaillit.

— Elle est juste un peu fatiguée du voyage, dit-il en jetant à Elliana un regard dur. La grossesse, ça pompe l’énergie.

Le maire hocha la tête, un brin gêné, et poursuivit la conversation avec Miranda et Cassie, vantant les projets de rénovation du village. Elliana ne disait rien. Elle observait la nature paisible autour d’elle, ce contraste cruel avec la tempête qu’elle portait dans son cœur.

À l’intérieur de la maison, l’odeur du bois humide et de la poussière l’enveloppa. Miranda ouvrit toutes les fenêtres pendant que Cassie installait quelques décorations sorties des cartons. Caleb emmena Elliana dans une petite chambre.

— Tu vas dormir ici. Repose-toi. Et arrête avec tes simagrées, dit-il froidement.

Il ferma la porte.

Elliana s’assit sur le lit dur, les mains posées sur son ventre. Des larmes coulèrent enfin sur ses joues. Pas de cris. Pas de sanglots. Seulement le silence d’un cœur brisé.

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Pendant ce temps, sur la route, Lukas répondit à un appel.

— On a repéré la voiture. Elle a quitté la nationale et pris la route vers le village de Mont-Brune. On y sera dans moins d’une heure.

— Merci, dit-il avant de raccrocher.

Il alluma les phares longues portées, et accéléra.

— Tiens bon, Elliana.

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Dans le village, la nuit était tombée. Miranda avait préparé une soupe de légumes, et Cassie servait du jus frais dans des verres en plastique.

— Elliana ! cria Miranda depuis la cuisine. Viens manger !

Elliana se leva lentement. En franchissant la porte, elle vit le trio assis à la table. Caleb ne la regardait même pas. Elle s’assit sans un mot. Le repas se déroula dans une tension glaciale, brisée seulement par les bavardages de Miranda et Cassie.

À la fin du repas, Caleb annonça qu’il sortirait un moment pour discuter avec le maire de la fête du lendemain.

— Il faut qu’on annonce ma promotion à tout le village, dit-il, enfilant sa veste.

Quand la porte claqua derrière lui, Elliana retourna dans sa chambre.

Elle s’allongea sur le lit, songeuse.

Demain, tout changera. Mes frères viendront. Je partirai. Je ne serai plus jamais leur victime.

Puis elle murmura :

— Maman, papa, attendez-moi.

Et dans le silence de la nuit, au loin, les voitures approchaient.