J'ai fermé les yeux et me suis appuyée sur le manche de ma pelle. « Vas-y. » Cette nuit m'avait achevée, et il fallait encore que je creuse quelques pieds de plus avant de pouvoir porter Carl là-dedans.Tu prévoies d'utiliser Brandon pour te rapprocher de Vince. Tu prépares le terrain depuis des mois. Tu le laisses s'approcher. Tu lui parles davantage. Elle s'est assise sur son arrière-train et nous a fixées d'un regard noir, Nix et moi.Où tu veux en venir ? On doit se rapprocher de lui pour faire ce qu'on a à faire, a grogné Nix.C'est exactement mon point. On fait ce qu'on doit faire. On va se servir de mon ex-compagnon pour obtenir ce dont on a besoin afin de découvrir qui se cache derrière les attaques contre les meutes. Pour que notre père, le père de Toya, puisse sortir de sa planque. Pour que notre mère puisse être avec son compagnon.« Et alors ? » J'ai basculé la tête en arrière et j'ai contemplé la lune, l'ai fusillée du regard plutôt. Elle trônait là-haut, à me regarder
J'étais restée là-dehors plus d'une heure avant que quelqu'un vienne voir comment j'allais. J'avais complètement décroché, m'enfonçant dans la rage que j'avais refoulée en creusant cette terre meuble. À chaque clignement d'yeux, mon esprit me ramenait au dernier souffle de Carl, au moment où j'avais levé la tête pour chercher mes amies, mes proches, et où mes yeux étaient tombés sur Rowan. « Putain, quelle conne », ai-je marmonné.J'ai entendu un petit soupir. « J'aurais dû me douter que tu serais là, à broyer du noir. » Toya s'est assise au bord de mon trou. J'ai continué à creuser, ignorant ses mots. Je ne broyais pas du noir. Je creusais une tombe. J'ai dû marmotter exactement ça, parce que Toya a pouffé. « Deux choses peuvent être vraies à la fois. »J'ai relevé la tête d'un coup et je l'ai pointée du doigt. « Ta gueule. » Elle a levé les mains en signe de reddition, et j'ai dû fermer les yeux en serrant les dents. « Pardon. » Mais je me suis remise à creuser.Elle a encore soup
J'ai dû me couvrir la bouche pour empêcher les sanglots de sortir. Je ne pouvais pas m'effondrer maintenant. Pas encore. J'ai levé les yeux au plafond, priant pour avoir un peu plus de temps. J'avais des choses à faire. J'ai posé la lettre sur le bureau et j'ai respiré profondément. J'ai regardé Toya. « Dis à tout le monde de choisir une chambre. »« Qu'est-ce que tu vas faire ? »J'ai baissé les yeux sur ma robe crasseuse ; je me suis tournée vers le placard. Je n'allais sans doute pas trouver grand-chose à me mettre, mais j'avais besoin d'autre chose pour faire ce que j'avais à faire. J'ai ouvert le placard et j'ai fait un pas en arrière. Il y avait un post-it collé sur une étagère et je l'ai décollé.Cette chambre a toujours été la tienne. Je ne faisais que l'occuper.Le placard débordait de vêtements féminins. J'ai attrapé un survêtement noir et j'ai retiré ma robe. Toya s'est approchée, l'air perplexe. « C'est quoi tout ça ? »J'ai dû retenir un sanglot. « Il l'a rempli pour
J'ai ouvert la lettre entre mes mains, et une vague de douleur brute m'a frappée en pleine poitrine. L'écriture soignée de Carl s'est offerte à moi.Amy,Je sais qu'à l'instant où tu lis ceci, je suis allongé sur la terre froide après avoir tout donné pour sauver ma petite fille. Je sais que tu viens de passer une heure à prendre soin d'elle, et pour cela, je te suis éternellement reconnaissant. Mais si tu la laisses veiller, elle va se faire du mal. Je l'ai vu dans mes visions. Alors je t'en supplie, endors-la.Sers-toi de ta magie et endors-la chaque soir pendant les mois qui viennent. C'est une enfant, mais c'est mon enfant, et je la connais. Elle a une âme de vieille dans un petit corps et elle perçoit bien plus que tu ne l'imagines. Mais elle ne voit pas encore toute la situation, et si tu l'y autorises, elle va se mettre en danger. Et le monde avec elle.J'ai relevé la tête de la lettre pour voir Toya qui s'était rapprochée. « Qu'est-ce qui se passe ? » Elle a fait encore un pa
La baignoire a fini de se vider tandis que Carly restait debout là, et j'ai acquiescé. « Oui. Oui, c'est ça. » Elle a frissonné quand j'ai remis l'eau chaude, laissant la baignoire se remplir de nouveau. Mais je doute qu'elle ait ressenti quoi que ce soit. Je l'ai aidée à retourner dans l'eau et j'ai remis du shampoing dans ses cheveux, l'eau changeant à peine de couleur cette fois. Après avoir rincé, j'ai mis l'après-shampoing. Je savais que je traînais. Qu'est-ce qu'on dit à un enfant qui vient de tout perdre ? « Carly... » Elle m'a à peine remarquée, mais son regard a fini par croiser le mien. « Je ne vais pas te mentir en te disant que cette douleur, cette souffrance, va s'en aller rapidement. » Elle a gémi, sa petite lèvre qui tremblait tandis qu'elle se tournait complètement vers moi. « Une douleur comme ça, une perte pareille. Ça va faire mal très longtemps. » Comment expliquer ce genre de perte à un enfant ?Mais elle a hoché la tête. « Je crois que mon papa va toujours me man
« Amy... » Toya m'a suivie dans la maison, mais Carly a relevé la tête.Elle a montré le mur près de la porte. « Papa a dit que tes amies auraient besoin de peignoirs, alors on les a accrochés là pour elles. » Sa petite voix était à peine un murmure tandis que je continuais d'avancer. Elles se débrouilleraient bien.Je suis montée directement à l'étage. Je ne savais pas vraiment où j'allais, mais je savais que je n'avais aucune envie de m'occuper de cet homme maintenant. De personne, en fait. Mais j'étais responsable de cette petite fille désormais, et elle avait besoin de moi. J'ai atteint le palier et jeté un œil dans chaque pièce. Il y avait un tas de chambres ici. « Mais qu'est-ce que... »« Papa a dit qu'on aurait besoin de toutes ces chambres en attendant que les choses se tassent. Tes amies vont rester ici avec nous le temps que tu retrouves ton chemin. » Le temps que je retrouve mon chemin. Mon ventre s'est noué. Carl avait tout prévu. Il savait exactement comment il allait