Point de vue de Rocco
Le lendemain matin, Rocco se leva tôt, le regard déjà dur, une tasse de café à la main. L’air frais du matin ne parvenait pas à dissiper la lourdeur de la nuit précédente. Le contrat signé, la fête, mais surtout cette étrange sensation qu’il y avait quelque chose d’invisible qui se préparait. Il n’aimait pas ça. Le contrôle était la seule chose qui comptait, et ce qui avait été un simple acte de pouvoir était désormais teinté d’incertitude. Le téléphone vibra sur son bureau. Un message de Marco, toujours aussi direct : “Rendez-vous au bureau ce soir. Il y a des choses à régler.” Rocco savait déjà que quelque chose clochait. Marco n’envoyait jamais ce genre de message sans raison. Il soupira, son esprit tournant déjà à mille à l’heure. Plus tard dans l’après-midi, il arriva au bureau. L’air était lourd dans la pièce, trop calme, trop silencieux. Marco entra sans frapper, comme toujours, son visage tendu. — “Les affaires vont bien, mais il y a un problème.” Marco marqua une pause. “Des rumeurs. Un groupe veut s’installer sur notre territoire. Et ils ont des alliés puissants ici.” Rocco fronça les sourcils, son regard se durcissant instantanément. — “Qui ?” demanda-t-il, sa voix glaciale. Marco haussait les épaules. — “Je ne sais pas encore. Mais je vais trouver ce qu’ils préparent.” Il se pencha en avant, fixant Rocco d’un regard insistant. “Et il y a aussi un problème plus personnel. La femme du consul a pris contact avec nous.” La mention de “la femme du consul” fit se tendre les muscles de Rocco. Ce genre de contact n’était jamais bon. Il savait ce que cela impliquait. — “Qu’est-ce qu’elle veut ?” demanda-t-il en serrant les poings sur le bureau. — “Je ne sais pas encore, mais elle a demandé un service. Quelque chose de… délicat.” Rocco resta silencieux quelques secondes. Cette situation ne lui plaisait pas. Il n’aimait pas les imprévus. Il fallait qu’il prenne les devants. Il se leva et envoya un message à Carola, son assistante de confiance. Elle était toujours prête à agir rapidement. Quelques minutes plus tard, Carola arriva. Elle était calme, méthodique, avec ce regard perçant qu’il appréciait. Il lui expliqua la situation sans détour. — “Il faut que tu prennes en charge cette affaire avec la femme du consul. Va la rencontrer ce soir. Découvre ce qu’elle veut et comment ça peut affecter nos affaires. Je veux tout savoir.” Carola hocha la tête, prête à partir. Elle n’avait pas besoin de plus d’instructions. Elle savait exactement ce qu’il attendait d’elle. Elle disparut dans la nuit, prête à remplir sa mission. Rocco se retrouva seul, une fois de plus, dans ce bureau trop grand, trop vide. Il se laissa tomber dans son fauteuil en cuir, pensant à tout ce qu’il venait d’apprendre. Chaque geste, chaque décision, était crucial. Il savait que cette guerre silencieuse qui se dessinait pourrait bien être plus complexe qu’il ne l’avait imaginé. Les pièces se mettaient lentement en place, mais il n’était toujours pas sûr de la direction qu’elles prendraient. Tout pouvait basculer d’un instant à l’autre. Point de Vue de Gianna Le lendemain matin, Gianna se leva tôt, comme toujours. Le soleil peinait à percer à travers les rideaux, mais elle était déjà en mouvement. La nuit avait été courte, son esprit encore préoccupé par la proposition de Bianca. Son amie, toujours prête à l’entraîner dans des aventures imprévues, lui avait suggéré de rejoindre le club où elle travaillait. C’était tentant, mais Gianna n’était pas sûre de ce qu’elle voulait vraiment. Elle se concentra sur les tâches du matin : préparer le petit déjeuner pour Giulia, sa petite sœur, avant de la conduire à l’école. Elle se rendit dans la cuisine, sortit des œufs et du pain, et commença à préparer rapidement un repas simple mais nourrissant. Giulia, sa sœur de 12 ans, arriva en courant, les cheveux en bataille, enfilant son uniforme scolaire. “Giulia, dépêche-toi, on va être en retard !” Soudain, on frappa à la porte. Gianna s’essuya les mains sur son tablier avant d’aller ouvrir. “Bonjour, Mme Elisa !” dit-elle en tentant de paraître polie, même si elle redoutait déjà la conversation. “Bonjour, Gianna. Je viens à propos de vos factures impayées,” dit Elisa d’un ton sec. “Ça fait trois mois que vous n’avez rien payé. Je sais que vous traversez des moments difficiles, mais il va falloir régler ça. Je vous donne une semaine pour trouver une solution, sinon je serai obligée de vous expulser. J’ai besoin d’argent, après tout.” Gianna n’eut même pas le temps de répliquer que Mme Elisa avait déjà tourné les talons et quitté la porte. Elle ferma la porte, le cœur lourd. Elle jeta un coup d’œil autour de la pièce avant de se précipiter vers Giulia, qui attendait toujours à la table, absorbée par son téléphone. “Viens, Giulia. On doit partir, dépêche-toi !” ordonna Gianna en prenant ses affaires. Elle attrapa ses clés et les plaça dans le contact du scooter. Il faisait déjà jour, mais l’air frais de la matinée lui glaça le visage alors qu’elle démarrait le moteur. La journée s’annonçait longue, et Gianna avait l’impression que chaque pas la menait un peu plus loin de ses rêves. Gianna, après avoir pris un moment pour digérer la conversation avec Mme Elisa, attrapa son téléphone. Elle avait besoin de parler à Bianca, de mieux comprendre cette proposition qu’elle avait du mal à chasser de ses pensées. Elle composa son numéro et attendit quelques secondes avant que sa meilleure amie ne réponde. “Gianna ! Qu’est-ce qu’il y a ?” répondit Bianca d’une voix enthousiaste. “Bianca, tu peux venir chez moi ? J’ai besoin de te parler de ce que tu m’as proposé hier,” dit Gianna, son ton plus sérieux qu’à l’accoutumée. “Bien sûr, j’arrive dans 30 minutes,” répondit Bianca. Trente minutes plus tard, on frappa à la porte. Gianna se précipita pour ouvrir et se retrouva face à Bianca, toujours souriante, mais ce sourire s’effaça un peu en voyant l’air préoccupé de Gianna. “Salut, Bianca, entre !” dit Gianna en la faisant entrer. Elle la mena directement vers le salon. “Tu ne devineras jamais ce qui s’est passé ce matin.” “Quoi donc ?” demanda Bianca, intriguée. Gianna prit une grande inspiration avant de raconter ce qui s’était passé. “Mme Elisa est venue. Elle m’a dit que nos factures de loyer sont impayées depuis trois mois… Et elle a menacé de nous expulser si on ne trouve pas une solution dans une semaine. C’est pas une surprise, je m’y attendais, mais… ça m’angoisse de plus en plus.” Bianca l’écouta attentivement, puis fit une grimace. “C’est vraiment pas facile… Mais je sais que tu vas trouver une solution. Et je suis là, si tu veux en parler.” Elle marqua une pause avant d’ajouter : “D’ailleurs, si jamais ça devient trop compliqué, tu peux venir chez moi avec Guilia. Le temps que tu trouves une solution.” “Je l’espère…” Gianna soupira, passant une main dans ses cheveux avant de relever les yeux vers Bianca. “Merci, vraiment. Mais je veux essayer de m’en sortir par moi-même. D’ailleurs, à propos du travail, je dois vraiment savoir de quoi il s’agit. Qu’est-ce que je devrais faire exactement ?” Bianca la regarda, hésitante, mais répondit. “Le travail… Ce n’est pas ce que tu crois. C’est pas vendre ton corps. Tu travailles comme strip-teaseuse, mais tu gardes ton masque, ton identité est protégée. Ils veulent juste un show. Et puis, tu n’es pas obligée d’aller plus loin si tu ne veux pas.” Gianna écoutait attentivement, mais avant qu’elle ne puisse poser plus de questions, le téléphone de Gianna se mit à sonner. C’était l’école de Giulia. “Allô, ici l’école de Giulia Castellano. Nous vous appelons pour vous informer que les frais de scolarité de votre Petite Sœur sont impayés depuis deux mois. Nous vous accordons un délai de deux jours pour régulariser la situation, sans quoi elle ne pourra pas revenir en cours.” Gianna serra les poings, sa gorge se nouant. “C’est trop, tout ça. J’ai l’impression de nager sous l’eau et de m’enfoncer de plus en plus,” murmura-t-elle après avoir raccroché. “Je sais que c’est beaucoup à gérer en même temps, Gianna. Écoute, je peux t’aider. Je peux te prêter l’argent pour les frais de scolarité de Giulia. Je ne veux pas te laisser dans cette situation,” dit Bianca, d’un ton sincère. Gianna la regarda, reconnaissante mais aussi gênée. “Tu ferais ça ? Mais… c’est beaucoup d’argent, Bianca…” “Ne t’en fais pas, ça ne me dérange pas. C’est pour toi. Et pour Giulia. Tu es ma meilleure amie, Gianna, je ne vais pas te laisser dans la merde.” Gianna acquiesça, émue, avant de se remettre à réfléchir. “Et pour le travail ?” Bianca prit une grande inspiration. “Alors, le travail… C’est principalement des danses, des shows . Les clients apprécient et parfois, ils demandent des danses privées, mais ça reste sans contact. Tu peux refuser tout ce que tu veux, Gianna. Mais certains clients peuvent faire des propositions. Ils peuvent te proposer beaucoup d’argent, mais c’est à toi de dire non. Et si tu choisis de le faire, tu n’es pas obligée de donner ta virginité. C’est ton choix.” Gianna la regarda, choquée mais aussi intriguée. “C’est… c’est vraiment ce que tu fais ?” Bianca acquiesça, un regard sérieux dans les yeux. “Oui. Je ne suis pas forcée, et je garde mon visage caché. C’est un show. Certains en demandent plus, mais je fais ce que je veux. Et je crois que tu pourrais t’en sortir, Gianna. C’est pas facile, mais ça t’aidera à avoir l’argent dont tu as besoin.” Gianna prit un moment pour digérer toutes ces informations. “Je vais y réfléchir, Bianca. Merci pour ton aide.” Bianca lui sourit. “Je suis là pour toi, quoi qu’il arrive.”Point de vue : Rocco La voiture s’immobilisa devant l’immeuble new-yorkais, et un silence s’abattit dans l’habitacle. Rocco resta immobile un instant, observant les lumières de la ville danser derrière les vitres teintées. Deux mois. Deux mois d’Italie, de tension, de confrontations et de silences étouffants. Deux mois à porter un masque devant un père qui le jugeait, une mère qui se taisait, un frère trop parfait et une sœur trop lucide. À ses côtés, Antonio coupa le moteur sans dire un mot. Lui aussi semblait absorbé par cette atmosphère étrange. New York, pourtant si vivante, paraissait figée ce soir-là. Comme si elle retenait son souffle. — T’es sûr de toi ? murmura Antonio en le regardant de côté. Rocco sortit lentement de la voiture. L’air était frais, chargé de cette électricité qu’il avait presque oubliée. Il inspira profondément avant de répondre : — Plus que jamais. Ils montèrent dans l’ascenseur en silence. L’appartement était exactement comme ils l’avaient la
Gianna – Le message restait là, figé sur l’écran, comme une brûlure vive qu’elle n’arrivait pas à apaiser. “Parce que même à 7 000 kilomètres de toi, tu hantes chacun de mes gestes. Même quand je te fuis.” Elle avait relu cette phrase au moins cinquante fois. Le téléphone posé sur sa poitrine, elle restait immobile, dans ce lit trop grand, trop froid. Les murs silencieux semblaient l’écouter penser. Elle n’avait pas dormi. Pas une seconde. À l’aube, la lumière grise du jour filtrait à travers les rideaux, peignant la pièce d’une pâleur nostalgique. Gianna se leva sans bruit, traversa le couloir, et se dirigea vers la cuisine. Elle fit couler du café sans y toucher. Ses gestes étaient automatiques, mais son esprit était resté coincé dans ce message. Dans ce qu’il impliquait. Dans ce qu’il réveillait. — Tu es debout tôt… murmura Bianca, en entrant, emmitouflée dans son peignoir. Gianna tourna la tête, surprise. Elle n’avait même pas entendu les pas de son amie. — J’ai
Gianna – Le sommeil était devenu une épreuve. Gianna passait ses nuits à se retourner, piégée entre ses draps et ses pensées. Elle avait beau s’épuiser à l’université, à danser au Velvet, à sourire devant sa sœur pour lui donner l’impression que tout allait bien, chaque fois qu’elle fermait les yeux… il était là. Rocco. Parfois, c’était juste son regard. D’autres fois, c’était sa voix, ce ton grave qui effleurait sa peau comme une caresse. Et dans les pires nuits, c’était ce souvenir obsédant de sa main frôlant la sienne, de son souffle tout près de ses lèvres, sans jamais aller jusqu’au bout. Ce soir-là, elle avait voulu dormir tôt. Bianca l’avait observée d’un air soucieux avant de lui souhaiter bonne nuit. Gianna s’était blottie sous les couvertures, comme si la chaleur du tissu pouvait compenser le vide glacé qu’il avait laissé derrière lui. Elle rêva. Un rêve étrange, diffus, mais troublant. Elle marchait dans une rue étroite, pavée de silence. Et au bout de cet
Gianna – La vie avait repris son cours. En apparence, du moins. Les jours s’étaient enchaînés avec une mécanique presque froide. Réveil à l’aube, petit-déjeuner rapide avec Giulia – qui, bien que fatiguée, souriait à nouveau –, puis trajet jusqu’à l’université, cours, retour à la maison, et enfin, le soir, direction le Velvet. Gianna s’était remise dans le mouvement, comme on remonte une montre détraquée. Mais au fond d’elle, quelque chose sonnait faux. Il y avait ce vide. Silencieux. Constant. Une sorte d’absence sourde qui la suivait partout, même dans ses rêves. Rocco était parti depuis une semaine. Elle ne l’avait pas revu depuis leur rencontre devant la clinique. Pas de message. Pas d’appel. Pas même une énième provocation lâchée au hasard. Rien. Il était reparti comme il était venu : de manière brutale, imprévisible. Et elle… elle s’en trouvait déstabilisée. Elle n’avait jamais compté sur lui. Elle ne s’était jamais permis de penser à lui autrement que comme une
Gianna – Le silence de la chambre d’hôpital n’avait rien de rassurant. Même avec tous les appareils qui bipaient doucement, même avec le souffle paisible de Giulia endormie à côté d’elle, Gianna sentait son cœur marteler sa poitrine comme s’il refusait de se calmer. L’opération s’était bien passée. Les médecins l’avaient dit avec un calme professionnel, presque froid. Mais après des heures d’attente à se torturer l’esprit, le mot “réussi” n’avait pas suffi à la rassurer. Elle était restée assise là, sans bouger, la main serrée dans celle de sa sœur, comme si le moindre relâchement allait faire tout s’effondrer. Elle observait Giulia. Son petit visage pâle, les cernes sous ses yeux, les mèches brunes collées à son front. Fragile, et pourtant si forte. Gianna aurait voulu pleurer, mais ses larmes étaient restées coincées quelque part, trop profondes. Elle avait le cœur en miettes et les pensées en désordre. Et parmi ces pensées… il y avait lui. Rocco. Il ne l’avait jamai
Point de vue Gianna Le téléphone vibra tôt ce matin-là. Encore groggy, Gianna tendit la main pour attraper l’appareil. Son cœur se serra aussitôt en voyant le nom de l’hôpital affiché à l’écran. — Allô ? — Bonjour Mademoiselle Gianna, ici l’hôpital Mount Sinai. Je vous appelle pour vous informer que les frais d’hospitalisation et la chirurgie de Giulia ont été entièrement pris en charge. L’intervention est programmée pour vendredi matin. Tous les spécialistes nécessaires sont disponibles, et les médicaments ont été commandés. Gianna mit quelques secondes à répondre. — Mais… comment ? Qui… ? — Nous avons reçu les documents d’un cabinet d’avocats privés ce matin, avec ordre de procéder immédiatement. Tout est réglé. Il ne vous reste qu’à signer le consentement familial ce soir. Elle remercia à peine, la voix étranglée, puis raccrocha. Elle resta un long moment à fixer l’écran noir de son téléphone, incapable de bouger. Le soulagement, violent, se heurta à un nœud plus pr