LOGINLéaLe déclic est venu un matin calme. Trop calme. Nous prenions notre café. Le soleil entrait à flots. Je le regardais, cet homme qui connaissait mon corps mieux que moi, qui avait touché des parts de mon âme que j’ignorais. Je l’aimais. D’un amour dévorant, absurde, absolu. Un amour fait de cendres chaudes et de braises vives.Et je savais, avec une certitude aussi implacable que celle qui m’avait poussée vers lui, que c’était fini.Pas par lassitude.Par lucidité.Certains incendies sont trop beaux pour devenir des cendres. Le nôtre avait atteint son apogée. Il ne pouvait que se consumer, se rabaisser, devenir cette routine toxique, cette possession jalouse et étouffante qui guettait déjà dans l’ombre de nos silences. Nous avions atteint le sommet de la crête. Il n’y avait plus qu’à redescendre, ou à sauter dans le vide.Je ne voulais pas de la descente. Je ne voulais pas voir notre feu se réduire à de la fumée âcre, nos batailles à des reproches mesquins, notre passion à une dépen
LéaLe pacte n’était pas un mot. C’était une géographie nouvelle, un continent aux frontières brûlantes que nous avons exploré, centimetre par centimetre, jusqu’à l’usure.Les semaines qui ont suivi ont été un long, un interminable présent. Un présent dévorant. Ethan ne m’a pas possédée à moitié. Il a tenu parole. Il a pris mes matins somnolents, mes colères soudaines, mes rires trop forts. Il les a pris, les a serrés dans ses mains jusqu’à ce qu’ils en sortent transformés, imprégnés de lui. Et moi, j’ai donné. J’ai donné ma soumission qui n’en était pas une, mais un abandon choisi, conscient, féroce. J’ai donné ma révolte, mes « non » qui étaient des défis, et qu’il transformait en « oui » étouffés sous sa bouche. J’ai donné mes larmes, celles de frustration, de plaisir trop intense, de peur parfois. Il les buvait comme un nectar.Notre monde était l’appartement, les rues désertes à l’aube, la forêt proche où nous courions jusqu’à l’épuisement pour mieux nous collisionner, haletants,
LéaJe m’assois sur un tabouret de la cuisine ouverte, le menton dans la main, et je le regarde. Ses mouvements sont précis, économes. Casser les œufs, faire fondre du beurre, griller du pain. Une scène banale. Mais l’air entre nous vibre encore. Chaque regard qu’il me jette par-dessus son épaule est une décharge basse tension. Chaque fois que je respire, je sens la mémoire de ses mains.Il pose deux assiettes sur le comptoir, s’installe en face de moi. Nous mangeons. Le silence n’est pas malaisant. Il est chargé. C’est le silence de deux personnes qui viennent de se voir à nu, au-delà de la peau.C’est lui qui le rompt, la fourchette suspendue.— Il faut qu’on parle de ce que c’est.Je lève les yeux. Je savais que cela viendrait. J’avais espéré que non. J’avais espéré que oui.— De quoi, exactement ?— De ça. Il pose sa fourchette. Son regard ne me lâche pas. Tu n’es pas une conquête. Hier soir n’était pas un jeu.— Je le sais.— En es-tu sûre ? Parce que ce que je veux… ce dont j’ai
LéaLe sol de la salle de bains est froid sous mes pieds nus, mais la peau qu’Ethan vient de mordre brûle. Une marque neuve. Une signature. Il me porte, mon dos pressé contre le carrelage humide, et le monde se réduit à la chaleur de son corps, au rythme saccadé de sa respiration contre mon cou.Il entre en moi d’un seul mouvement, profond, conquérant, et un son rauque s’échappe de ma gorge. Ce n’est pas de la douleur. C’est de la reconnaissance. Mon corps reconnaît le sien, l’accueille, le réclame avec une ferveur qui m’annihile.Je m’accroche à ses épaules, mes ongles s’enfonçant dans sa peau salée. Il grogne, un son bas et animal, et redouble de force, de vitesse. Chaque poussée est une affirmation. Chaque retrait, une promesse de retour. L’eau continue de couler, tiède maintenant, ruisselant sur nos fronts joints, mélangée à la sueur, aux souffles courts.— Regarde-moi, Léa.Sa voix est un gravier dans l’oreille. J’ouvre les yeux, je plonge dans son regard. Il n’y a plus de fatigu
LéaLe réveil n’a pas encore sonné, mais mon corps s’en moque. Il me tire vers la conscience comme si la nuit n’avait été qu’un songe, un mirage fiévreux… sauf que chaque muscle, chaque frisson laissé dans ma peau raconte l’inverse.Ethan dort encore.Ou fait semblant.Je le sens dans la façon dont son bras est posé autour de ma taille, trop fermement pour un sommeil profond. Dans la manière dont son souffle frôle ma nuque, comme s’il goûtait encore ma peau même en silence.La chambre est plongée dans un demi-jour bleuté. Le drap traîne au sol, éjecté pendant l’une de nos tempêtes, un territoire qu’aucun tissu n’a réussi à contenir cette nuit.Je souris malgré moi.Je bascule doucement sur le dos, et comme je m’y attends, son bras suit le mouvement. Ses yeux s’ouvrent presque aussitôt. Deux ombres claires, fatiguées, brûlantes.— Tu bouges trop…, murmure-t-il d’une voix encore cassée.— Ou alors tu dors trop peu…Son sourire s’étire, lent, affamé. Celui-là. Celui qui fait monter une v
EthanLe silence après l’orage a une texture particulière. Épais, vibrant, presque chargé d’électricité. Léa est encore sous moi, son souffle caressant mon épaule, sa peau chaude collée à la mienne. Je pourrais rester là, enfoui dans elle, à écouter la cadence de son cœur, mais je sens déjà un autre fil se tendre entre nous. Le sien. Le mien. Cette faim étrange, circulaire, qui se nourrit de la précédente.Elle bouge légèrement, juste assez pour que mon sexe encore enfoui en elle palpite. Et son sourire, ce petit sourire qui apparaît avant même qu’elle ouvre les yeux, me traverse de part en part.— Tu es lourd…, souffle-t-elle, taquine.Je me redresse d’un centimètre, juste assez pour croiser son regard. Ses yeux sont encore brillants, humides de plaisir. Et je sais déjà que je ne résisterai pas longtemps.— Tu veux que je me relève ? demandé-je.— Non.Son non claque doucement dans l’air, comme une invitation.Elle glisse une main dans mes cheveux, tire légèrement, juste assez pour q