LOGINEthanLa porte de l'appartement se referme avec un bruit sourd, isolant à nouveau le monde. Le silence qui suit est lourd des paroles non dites, de l'accusation suspendue dans l'air du hall. Ils ont peur de nous. La phrase de Lena résonne. "Nous". Un pronom si petit, si puissant. Il m'a protégé, là, en bas. Il m'a donné une force que je ne me connaissais plus.Mais maintenant, seul avec elle dans l'ascenseur qui monte, puis dans le couloir, la force se dissipe, laissant place à un épuisement si profond qu'il en est physique. Chaque pas est un effort. J'ai l'impression de revenir de guerre.Léna ne dit rien. Elle observe. Elle sent le changement, la dépression qui suit l'adrénaline. Elle me suit dans le salon, maintenant baigné d'un soleil cruel qui expose sans pitié les traces de notre nuit : les coussins en désordre, les tasses de café à moitié pleines, le désordre organique d'une vie qui a repris ses droits.Je m'effondre dans un fauteuil, les coudes sur les genoux, la tête dans les
LénaLa douche avait été un sanctuaire. L'eau chaude avait lessivé la sueur, le sel des larmes sèches, l'odeur de notre fureur et de notre rédemption. Ethan, sous le jet, m'avait regardée se laver le dos avec une gravité qui m'avait serré la gorge. C'était un rituel. Un soin. Comme s'il prenait possession de mon corps non plus par la passion, mais par le geste le plus simple, le plus intime.Maintenant, vêtus de peignes de bain, nous sommes dans la cuisine. La lumière est différente, plus neutre. L'odeur du café qu'il prépare emplit l'espace, un parfum normal, rassurant, qui entre en contradiction violente avec le champ de bataille émotionnel que nous venons de traverser.Je le regarde. Ses mouvements sont précis, économes. Le chirurgien. Mais il y a une nouvelle hésitation, une lenteur qui trahit l'homme qui se réapproprie des gestes quotidiens après des années d'automatisme. Il me tend une tasse. Nos doigts se frôlent. Une étincelle, minuscule et familière, parcourt ma peau.— Noir,
EthanLe silence, à nouveau. Mais celui-ci est d'une nature différente. Il n'est plus lourd de non-dits et de peur, mais saturé d'un aveu tacite. L'air est épais, chargé de l'odeur de notre étreinte contre le mur, un mélange musqué de sexe, de sueur et de plâtre froid. La lumière du jour est maintenant crue, impitoyable, elle balaye la chambre et illumine chaque détail du désastre que nous sommes : les vêtements en lambeaux, les draps en tas sur le sol, et nous, debout au milieu de ce champ de bataille, nus et haletants.Mes mains sur ses hanches sont les seules points de contact qui me rattachent à la réalité. Je les sens, ses hanches, les os sous la peau douce, la chaleur vivante qui émane d'elle. Mon corps entier vibre comme une corde trop tendue qui vient d'être relâchée. Ce n'était pas du plaisir. C'était une exorcisme. Une tentative violente et désespérée de chasser les fantômes en me remplissant d'elle, uniquement d'elle.Léna relève la tête. Ses yeux, noyés de larmes séchées e
LénaSes mots résonnent encore dans le silence. « Il ne faut pas que tu aies peur de moi. » Un avertissement et une prière. Ma réponse, un sourire triste et féroce. La peur ? Elle est partie, brûlée dans l'incendie de la nuit dernière et noyée dans le silence tremblant de ce matin. Ce qui a pris sa place est plus profond, plus primitif. Une soif. Non plus de conquête ou de destruction, mais de revendication.Il est toujours debout près de la fenêtre, dos à moi, silhouette découpée dans la lumière froide de l'aube. Je vois la tension dans ses épaules, la raideur de sa colonne vertébrale. L'homme de marbre et d'acier tente de se reconstituer, mais je sais maintenant ce qui se cache en dessous : de la lave, de la chair vive, un cœur qui bat avec la force désordonnée d'un animal traqué.Je glisse hors du lit. Les draps froissés libèrent le parfum de notre nuit, de notre sueur, de nous. Je ne cherche pas à couvrir ma nudité. Elle est mon armure, à présent. Mon étendard. Chaque pas sur le s
EthanLe silence après la tempête est un organisme vivant. Il palpite entre nous, chargé des souvenirs brûlants de nos corps, du goût salé de notre sueur mêlée. Lena est blottie contre moi, sa respiration un flux régulier contre mon cou. Son corps, contre le mien, est à la fois un rappel de l'abandon sauvage et une question muette.La paix que je devrais ressentir est un leurre. C'est un calme précaire, comme la surface lisse de l'eau qui cache un courant sous-marin violent. En elle, j'ai trouvé un miroir. En moi, elle a allumé un feu. Et maintenant, je regarde les ombres dansantes sur les murs, et je sais qu'elles sont les miennes.Son parfum — le sien et le nôtre, maintenant — m'enveloppe. C'est une drogue, un anesthésiant puissant contre la froideur qui a été mon armure pendant si longtemps. Mais l'armure protège aussi de soi. Sans elle, je suis nu, face aux fantômes que j'ai enfermés dans les recoins les plus sombres de mon esprit.La chambre sent le sexe et la transgression. La r
LénaMa main, tendue vers lui, ne tremble plus. C’est une invitation, un défi, une déclaration de guerre à nos démons intérieurs. La journée passée à forger ma douleur en arme a laissé mes nerfs à vif, ma peau hypersensible. Chaque parcelle de mon être est devenue une mèche attendant l’étincelle.Ethan regarde ma main comme s’il voyait l’énergie nouvelle qui y pulse. Il ne la prend pas tout de suite. Son regard, lourd d’une intensité qui fait vaciller la pièce, remonte lentement le long de mon bras, effleure mon épaule, la courbe de mon cou, pour enfin s’enliser dans le mien. L’air que nous respirons devient épais, combustible.— Prête pour quoi, Lena ? murmure-t-il, sa voix un roulement de tonnerre lointain.— Pour tout.Le mot à peine sorti, il agit. Sa main capture la mienne, non avec douceur, mais avec une possession sauvage. Il me tire à lui, et l’impact de nos corps est une déflagration. Il n’y a plus de préliminaires doux, plus de chuchotements. La tempête qu’il a promise est l







