Chapitre 2

ZAIA.

L'aube se lève, sombre et lourde comme le poids sur ma poitrine.

Hier soir, Sébastien est parti. J'avais entendu la porte d'entrée claquer, et je me demande s'il est allé voir Annalise.

Le dossier de divorce posé devant moi mentionne une pension alimentaire de cinq millions de dollars. C'est une somme considérable. Il semble vraiment pressé de se débarrasser de moi.

Je jette le dossier sur le lit. Son argent ne m'importe pas. Rien ne peut apaiser la douleur de me faire sentir rejetée par mon âme sœur, l'homme à qui j'avais tout donné.

Je rejette la couverture froissée et me lève pour me regarder dans le miroir de ma coiffeuse.

Le reflet montre une peau crème couverte de taches de rousseur et des cheveux roux longs et rebelles, que je n'ai jamais songé à couper parce que Sébastien les aimait. Mes lèvres ne sont pas aussi grosses que celles d'Annalise, mais ce qui me caractérise le plus, ce sont mes yeux couleur améthyste.

A une époque, tous les hommes me désiraient. À l'université, chaque jeune homme voulait sortir avec Zaia Toussaint.

En tant que fille de l'Alpha Hugh Toussaint, cela fait ajouter ma réputation dans mes études. Je viens d'une meute presque aussi grande et respectée, mais avec une réputation très différente.

La meute de mon père est reconnue pour son statut social et son influence. Celle de Dark Hollow Falls est célèbre pour son pouvoir et son contrôle. Personne n'ose les défier.

Je regarde les papiers dans ma main. Je pose une main sur mon ventre et respire profondément. Le stress est mauvais pour le bébé. Je refuse de rester ici à souffrir. Je vais lui prouver que je peux m'en sortir.

Enfin, je serre les papiers avec rage et m'habille pour la journée.

« Le Alpha n'est pas rentré hier soir ? » demande Emma, en sortant de la salle à manger avec les plats de la veille.

« Il est rentré tard, j'étais déjà au lit, » réponds-je en esquissant un sourire forcé en me dirigeant vers la cuisine.

« Vous semblez pâle, Luna. Ça va ? » Emma s'inquiète alors que je prépare mes céréales sans grand appétit.

Mon téléphone interrompt notre conversation.

C'est Valerie Scott, mon docteur et amie proche, à l'autre bout de la ligne.

« Allô ? » je m'éloigne de la table pour plus de discrétion.

« Zaia, je suis désolée de te déranger si tôt. Après avoir revu tes analyses, j'aimerais que tu viennes pour des examens complémentaires. »

Mon cœur s'accélère. « Tout va bien, Valérie ? »

« Ne t'inquiète pas, viens me voir dès que tu peux. »

Je raccroche, l'angoisse montant en moi. Rapidement, je demande à Ethan de préparer la voiture.

Installée dans la voiture, je lui dis de prendre la direction de l'hôpital.

Son regard intrigué me suit alors qu'il démarre. « Ça va, Luna ? »

« Oui, je vais simplement retrouver Valérie pour un brunch. »

Ce n'est pas tout à fait un mensonge.

Valérie est le chef gynécologue de l'hôpital, qui avait annoncé ma grossesse avec joie.

Nous arrivons bientôt à l'hôpital où je remercie Ethan, lui demandant d'attendre.

Le vent violent me frappe, et je me hâte de trouver refuge dans la chaleur de l'hôpital.

« As-tu un autre rendez-vous, Luna ? » demande la réceptionniste.

Les rumeurs se répandront vite si l'on apprend que je suis à l'hôpital deux jours de suite.

« Oh, je... »

« Elle est ici pour me voir. »

Valérie, les bras croisés et vêtue de sa blouse blanche, nous interrompt.

« Ah, je vois, » répond la réceptionniste, souriant avant de se replonger dans ses documents. L'odeur du désinfectant imprègne les couloirs.

En marchant, Valérie chuchote tout en avançant dans le couloir et en ouvrant la porte de son bureau : « Il serait préférable de garder ta grossesse secrète pour l'instant. »

« Je suis d'accord. » Mes raisons sont légèrement différentes.

Une fois dans son bureau, Valérie m'invite à m'allonger sur le lit d'examen pour une échographie rapide de mon abdomen. Il n'y a pas d'écran en face de moi pour observer l'échographie par moi-même.

Valérie fronce les sourcils, absorbée par l'écran. Je choisis de ne pas l'interrompre pendant qu'elle examine les résultats.

Elle essuie ensuite le gel froid de mon ventre, et me fait signe de me lever, je m'adresse à elle en me redressant : « Dis-moi Valérie, qu'est-ce qu'il y a ? »

« Ne vous inquiétez pas, il n'y a pas de problème avec la grossesse elle-même, mais... » Elle hésite, comme pour me rassurer. « Viens, assieds-toi. »

Je m'assois, l'angoisse montant.

« Donc... »

Elle soupire et baisse la tête tout en ouvrant un dossier sur son bureau.

« Cependant, ta santé n'est pas optimale. Je suis vraiment surprise, pour être honnête. Ta famille est connue pour sa robustesse et tu sembles en forme. Mais les analyses montrent que tu es extrêmement affaiblie, ce qui pourrait affecter le développement de tes enfants. » Elle pose le dossier et je fronce les sourcils.

« Des enfants ? »

« Oui, Zaia, tu attends des jumeaux. C'est pour cela que je suis d'autant plus inquiète pour cette grossesse et pour ton état de santé. »

Des jumeaux ! Normalement, je devrais être ravie, mais l'ombre du divorce plane et Valérie ne semble pas partager mon enthousiasme. Son inquiétude est manifeste.

« Je vais les perdre ? » je demande, nerveuse.

« Les risques de fausse couche sont élevés. Jusqu'à ce que tu passes le premier trimestre, je te conseille de te reposer autant que possible. Il serait sage de garder cette grossesse secrète pour le moment. Je sais que les membres de ta communauté viendront te voir s'ils apprennent qu'un héritier Alpha est en route. »

J'acquiesce et prends le dossier pour le parcourir. Je ne suis pas médecin, mais j'ai acquis des connaissances en médecine lors de mes études à l'université.

« Pourquoi mes niveaux de santé sont-ils si bas ? » je m'interroge.

Elle secoue la tête. « C'est difficile à expliquer, mais je vais te prescrire des multivitamines et nous vous surveillerons. »

« Merci, Val. Puis-je te demander quelque chose d'étrange ? Est-ce que le rejet peut affecter l'enfant à naître ? » je pose la question doucement.

Elle me regarde intensément et je maintiens mon regard, espérant qu'elle ne puisse pas lire en moi.

Elle réfléchit un instant avant de me répondre directement. « Non, Zaia, cela n'affectera pas l'enfant directement. Cependant, cela pourrait certainement affecter la mère et... si la mère est déjà affaiblie, comme dans ton cas, il pourrait être difficile d'avoir une autre grossesse. »

Sortant de Valérie, je ne rentre pas chez moi. Je suis trop perturbé et instable de découvrir une réponse. Après ce qu'elle m'a dit, je ne sais plus ce que je dois faire.

Depuis une heure, je réfléchis. J'ai renvoyé Ethan et choisi de marcher malgré le mauvais temps.

Un souvenir ancien resurgit, compressant mon cœur.

(Flashback)

« J'espère que notre enfant te ressemblera. »

« Moi ? » je demande, surprise, alors qu'il m'attire sur ses genoux et caresse mes cheveux.

« Oui, ma douce fée de feu. J'espère qu'ils auront tes cheveux, » il dit en m'embrassant le cou.

Mon cœur s'accélère alors que je penche la tête. Mes cheveux d'un orange flamboyant ne m'ont jamais vraiment plu, mais Sébastien les adorait, disant qu'ils lui rappelaient un phénix.

« Zion, » il dit en touchant doucement ma joue. Le mot suivant me surprend. « Ce sera le prénom de notre fils. »

(Fin du flashback)

Il était si désireux d'avoir notre enfant. Si seulement j'étais tombée enceinte plus tôt, cela aurait-il changé les choses ?

Même si je sais qu'il ne m'aime plus, je pense que je dois faire un effort pour nos enfants. Nous attendons deux magnifiques bébés. Peut-être qu'en l'apprenant, il repensera sa décision. Il pourrait même revenir sur sa décision de divorcer. Après tout, en tant que père, il a le droit de savoir cette vérité.

Un nouvel espoir naît en moi. Je prends la direction du Pack Hall. À cette heure, Sébastien est probablement dans son bureau.

Le Pack Hall jouxte notre manoir. Ils sont séparés juste par un portail noir. Les membres de notre meute vivent dispersés dans toute la ville. Ce lieu est le cœur de nos rassemblements pour les réunions et les événements importants.

Je tape le code de l'étage réservé aux dirigeants et scanne mon empreinte digitale pour y accéder. Montant l'escalier tapissé, je me rappelle que cet étage est exclusif aux membres élevés de la meute, inaccessible sans autorisation.

Inspirant profondément, je me redresse, espérant qu'il pourrait envisager de ne pas me renvoyer. C'est alors que je vois Annalise, assise sur le bureau de Sébastien dans une robe provocante, riant de quelque chose qu'il vient de dire.

Pour la première fois, je me demande si Sébastien s'est intéressé à moi parce que je ressemble à ma demi-sœur. Annalise est plus grande et plus svelte, avec de magnifiques cheveux blonds et des yeux bleus, l'image même de l'ange adoré de tous.

Je touche mes propres cheveux roux qui tombent sur mes épaules. Nous avons des ressemblances, mais nous sommes si différentes...

« Oh Seb, j'ai peur que tu sois vraiment tombé pour ma sœur, » dit Annalise, me faisant lever brusquement la tête.

La colère et l'irritation montent en moi. Je suis encore la Luna et sa femme, tant que les papiers de divorce ne sont pas signés. Il m'appartient encore... Comment ose-t-elle ! La colère bouillonne en moi alors que je marche d'un pas décidé dans le couloir.

« Ne te méprends pas, » répond Sébastien.

Annalise éclate de rire, un son qui me hérisse le poil. Je serre les dents en observant à travers l'entrebâillement de la porte.

« Alors, tu dis que pendant ces trois dernières années, tu n'as jamais eu de sentiments pour elle ? »

Un silence suit ma question. Je pose ma main contre le mur, cherchant du soutien pour ma détermination chancelante.

« Pas du tout. C'était simplement un rejet qui arrive trois ans trop tard, quelque chose que j'aurais dû faire il y a longtemps, » dit Sébastien froidement.

Je retiens mon souffle, luttant contre la douleur du rejet qui menace de serrer mon cœur.

« Oh, cela me soulage tellement. Penser que nous pourrions retrouver ce que nous avions avant son intrusion entre nous. »

À travers l'entrebâillement de la porte, je vois Sébastien assis en silence. Son expression est grave. Il regarde distraitement par la fenêtre.

« Tu m'écoutes, Seb ? »

« Désolé, je réfléchissais... Tu disais ? »

« Je disais que tout redeviendrait comme avant, avant qu'elle ne me prenne tout. » Ses mains glissent le long de ses épaules.

Je pose une main sur ma poitrine, espérant que la douleur s'atténue. Pendant ce temps, Annalise continue son monologue.

« Ne t'inquiète pas. Je veux dire, elle n'a même pas pu te donner un enfant... Moi, je nous ferai un bébé. Tu mérites un héritier, » dit-elle de manière envoûtante.

Je me demande ce que j'ai fait pour mériter cela. Les souvenirs de nos moments ensemble me reviennent. Je secoue la tête, perplexe.

Nous nous sommes mariés rapidement après la découverte que nous étions âmes sœurs, une pratique courante. Le père de Sébastien avait insisté, mais Sébastien ne semblait pas malheureux. Il était attentif, me complimentait, et je savais qu'il me désirait...

Alors, qu'est-ce qui a changé ?

« Sébastien, et si nous passions un week-end à nos anciennes sources chaudes ? » elle propose avec un minaudage coquet.

Mon mari se penche en avant, une étreinte dans mon estomac se resserre lorsqu'il pose sa main sur sa cuisse dénudée. « C'est une excellente idée. »

Je recule, le cœur lourd de douleur, une douleur invisible aux yeux de tous. Je ne peux pas rester ici à les voir se moquer de moi.

Je ne peux pas. Je ne peux pas lui parler de nos enfants. Et s'il tentait de me les prendre ?

Je me retourne et redescends précipitamment les escaliers, luttant contre les larmes qui menacent de couler.

Mais je n'y parviens pas et les larmes se libèrent, tout comme ma vie qui s'effondre autour de moi.